The Bad Glazier  

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The Bad Glazier is a prose poem by Baudelaire, collected in Le Spleen de Paris. It is exemplary of the metaphorical Imp of the Perverse.

THE GLASS-VENDOR

Baudelaire,_his_prose_and_poetry#THE_GLASS-VENDOR, translated by Arthur Symons


There are some natures purely contemplative and antipathetic to action, who nevertheless, under a mysterious and inexplicable impulse, sometimes act with a rapidity of which they would have believed themselves incapable. Such a one is he who, fearing to find some new vexation awaiting him at his lodgings, prowls about in a cowardly fashion before the door without daring to enter; such a one is he who keeps a letter fifteen days without opening it, or only makes up his mind at the end of six months to undertake a journey that has been a necessity for a year past. Such beings sometimes feel themselves precipitately thrust towards action, like an arrow from a bow.

The novelist and the physician, who profess to know all things, yet cannot explain whence comes this sudden and delirious energy to indolent and voluptuous souls; nor how, incapable of accomplishing the simplest and most necessary things, they are at some certain moment of time possessed by a superabundant hardihood which enables them to execute the most absurd and even the most dangerous acts.

One of my friends, the most harmless dreamer that ever lived, at one time set fire to a forest, in order to ascertain, as he said, whether the flames take hold with the easiness that is commonly affirmed. His experiment failed ten times running, on the eleventh it succeeded only too well.

Another lit a cigar by the side of a powder barrel, _in order to see, to know, to tempt Destiny_, for a jest, to have the pleasure of suspense, for no reason at all, out of caprice, out of idleness. This is a kind of energy that springs from weariness and reverie; and those in whom it manifests so stubbornly are in general, as I have said, the most indolent and dreamy beings.

Another so timid that he must cast down his eyes before the gaze of any man, and summon all his poor will before he dare enter a café or pass the pay-box of a theatre, where the ticket-seller seems, in his eyes, invested with all the majesty of Minos, Æcus, and Rhadamanthus, will at times throw himself upon the neck of some old man whom he sees in the street, and embrace him with enthusiasm in sight of an astonished crowd. Why? Because--because this countenance is irresistibly attractive to him? Perhaps; but it is more legitimate to suppose that he himself does not know why.

I have been more than once a victim to these crises and outbreaks which give us cause to believe that evil-meaning demons slip into us, to make us the ignorant accomplices of their most absurd desires. One morning I arose in a sullen mood, very sad, and tired of idleness, and thrust as it seemed to me to the doing of some great thing, some brilliant act--and then, alas, I opened the window.

(I beg you to observe that in some people the spirit of mystification is not the result of labour or combination, but rather of a fortuitous inspiration which would partake, were it not for the strength of the feeling, of the mood called hysterical by the physician and satanic by those who think a little more profoundly than the physician; the mood which thrusts us unresisting to a multitude of dangerous and inconvenient acts.)

The first person I noticed in the street was a glass-vendor whose shrill and discordant cry mounted up to me through the heavy, dull atmosphere of Paris. It would have been else impossible to account for the sudden and despotic hatred of this poor man that came upon me.

"Hello, there!" I cried, and bade him ascend. Meanwhile I reflected, not without gaiety, that as my room was on the sixth landing, and the stairway very narrow, the man would have some difficulty in ascending, and in many a place would break off the corners of his fragile merchandise.

At length he appeared. I examined all his glasses with curiosity, and then said to him: "What, have you no coloured glasses? Glasses of rose and crimson and blue, magical glasses, glasses of Paradise? You are insolent. You dare to walk in mean streets when you have no glasses that would make one see beauty in life?" And I hurried him briskly to the staircase, which he staggered down, grumbling.

I went on to the balcony and caught up a little flower-pot, and when the man appeared in the doorway beneath I let fall my engine of war perpendicularly upon the edge of his pack, so that it was upset by the shock and all his poor walking fortune broken to bits. It made a noise like a palace of crystal shattered by lightning. Mad with my folly, I cried furiously after him: "The life beautiful! the life beautiful!"

Such nervous pleasantries are not without peril; often enough one pays dearly for them. But what matters an eternity of damnation to him who has found in one second an eternity of enjoyment?


LE MAUVAIS VITRIER

Il y a des natures purement contemplatives et tout à fait impropres à l’action, qui cependant, sous une impulsion mystérieuse et inconnue, agissent quelquefois avec une rapidité dont elles se seraient crues elles-mêmes incapables.

Tel qui, craignant de trouver chez son concierge une nouvelle chagrinante, rôde lâchement une heure devant sa porte sans oser rentrer, tel qui garde quinze jours une lettre sans la décacheter, ou ne se résigne qu’au bout de six mois à opérer une démarche nécessaire depuis un an, se sentent quelquefois brusquement précipités vers l’action par une force irrésistible, comme la flèche d’un arc. Le moraliste et le médecin, qui prétendent tout savoir, ne peuvent pas expliquer d’où vient si subitement une si folle énergie à ces âmes paresseuses et voluptueuses, et comment, incapables d’accomplir les choses les plus simples et les plus nécessaires, elles trouvent à une certaine minute un courage de luxe pour exécuter les actes les plus absurdes et souvent même les plus dangereux.

Un de mes amis, le plus inoffensif rêveur qui ait existé, a mis une fois le feu à une forêt pour voir, disait-il, si le feu prenait avec autant de facilité qu’on l’affirme généralement. Dix fois de suite, l’expérience manqua ; mais, à la onzième, elle réussit beaucoup trop bien.

Un autre allumera un cigare à côté d’un tonneau de poudre, pour voir, pour savoir, pour tenter la destinée, pour se contraindre lui-même à faire preuve d’énergie, pour faire le joueur, pour connaître les plaisirs de l’anxiété, pour rien, par caprice, par désœuvrement.

C’est une espèce d’énergie qui jaillit de l’ennui et de la rêverie ; et ceux en qui elle se manifeste si opinément sont, en général, comme je l’ai dit, les plus indolents et les plus rêveurs des êtres.

Un autre, timide à ce point qu’il baisse les yeux même devant les regards des hommes, à ce point qu’il lui faut rassembler toute sa pauvre volonté pour entrer dans un café ou passer devant le bureau d’un théâtre, où les contrôleurs lui paraissent investis de la majesté de Minos, d’Éaque et de Rhadamanthe, sautera brusquement au cou d’un vieillard qui passe à côté de lui et l’embrassera avec enthousiasme devant la foule étonnée.

— Pourquoi ? Parce que… parce que cette physionomie lui était irrésistiblement sympathique ? Peut-être ; mais il est plus légitime de supposer que lui-même il ne sait pas pourquoi.

J’ai été plus d’une fois victime de ces crises et de ces élans, qui nous autorisent à croire que des Démons malicieux se glissent en nous et nous font accomplir, à notre insu, leurs plus absurdes volontés.

Un matin je m’étais levé maussade, triste, fatigué d’oisiveté, et poussé, me semblait-il, à faire quelque chose de grand, une action d’éclat ; et j’ouvris la fenêtre, hélas !

(Observez, je vous prie, que l’esprit de mystification qui, chez quelques personnes, n’est pas le résultat d’un travail ou d’une combinaison, mais d’une inspiration fortuite, participe beaucoup, ne fût-ce que par l’ardeur du désir, de cette humeur, hystérique selon les médecins, satanique selon ceux qui pensent un peu mieux que les médecins, qui nous pousse sans résistance vers une foule d’actions dangereuses ou inconvenantes.)

La première personne que j’aperçus dans la rue, ce fut un vitrier dont le cri perçant, discordant, monta jusqu’à moi à travers la lourde et sale atmosphère parisienne. Il me serait d’ailleurs impossible de dire pourquoi je fus pris à l’égard de ce pauvre homme d’une haine aussi soudaine que despotique.

« — Hé ! hé ! » et je lui criai de monter. Cependant je réfléchissais, non sans quelque gaieté, que, la chambre étant au sixième étage et l’escalier fort étroit, l’homme devait éprouver quelque peine à opérer son ascension et accrocher en maint endroit les angles de sa fragile marchandise.

Enfin il parut : j’examinai curieusement toutes ses vitres, et je lui dis : « — Comment ? vous n’avez pas de verres de couleur ? des verres roses, rouges, bleus, des vitres magiques, des vitres de paradis ? Impudent que vous êtes ! vous osez vous promener dans des quartiers pauvres, et vous n’avez pas même de vitres qui fassent voir la vie en beau ! » Et je le poussai vivement vers l’escalier, où il trébucha en grognant.

Je m’approchai du balcon et je me saisis d’un petit pot de fleurs, et quand l’homme reparut au débouché de la porte, je laissai tomber perpendiculairement mon engin de guerre sur le rebord postérieur de ses crochets ; et le choc le renversant, il acheva de briser sous son dos toute sa pauvre fortune ambulatoire qui rendit le bruit éclatant d’un palais de cristal crevé par la foudre.

Et, ivre de ma folie, je lui criai furieusement : « La vie en beau ! la vie en beau ! »

Ces plaisanteries nerveuses ne sont pas sans péril, et on peut souvent les payer cher. Mais qu’importe l’éternité de la damnation à qui a trouvé dans une seconde l’infini de la jouissance ?



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