Gargantua and Pantagruel (full text of French original, all five books)  

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This is the French text of Gargantua and Pantagruel, in a edition by P. Chéron.

First book: https://fr.wikisource.org/wiki/Pantagruel/%C3%89dition_Nourry,_1530

Second book: https://fr.wikisource.org/wiki/Gargantua/%C3%89dition_Juste,_1535

Third book: https://fr.wikisource.org/wiki/Le_Tiers_Livre

Fourth book: https://fr.wikisource.org/wiki/Le_Quart_Livre

Fifth book:

Full text[1]

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CINQUIÈME LIVRE DE F. RABELAIS Pantagruel l- l) I T ION JOUA UST Paris, 1877

LES CINQ LIVRES DE F. RABELAIS Livre V : Pantagruel


K iiojlviiT (le\ ftùc Imp. A. Salmon LE IF^IBUNAL DE GHIPPE-MINAULT ( Pflbpl«u,L.5,C lî.) LES CINQ LIVRES DE F. RABELAIS PUBLIÉS AVEC DES VARIANTES ET UN GLOSSAIRE PAR P. CHÉRON ET ORNÉS DE Onze Eaux-Fortes par E. Boilvin Livre V ; Pantagruel PARIS LIBRAIRIE DES BIBLIOPHILES Rue Saint-Honoré, 338 JI D c c c L X X V 1 1 C.3- 6047/9 NOTE DE L'EDITEUR ous ne voulons pas laisser paraître cette nouvelle édition des œuvres de Rabelais sans donner aux amateurs quelques explications sur les gravures dont elle est ornée. « Esti- mant, disions-nous lors de la publication des Voyages de Gulliver^ que rien n'est moins artistique qu'une composition dans laquelle se trouvent réunis des personnages entièrement disproportionnés de taille , nous avons exclu tous les sujets de ce genre. » Si nous avions pensé devoir procéder ainsi dans ce dernier ouvrage, dont l'auteur, par la précision et l'exactitude des détails, cherche à donner à ses fictions l'aspect de la vraisemblance, à plus forte raison devions-nous le faire pour l'œuvre de Rabelais, qui, lui, n'était nullement possédé d'un semblable souci. A chaque instant il perd de vue les proportions qu'il a données à ses personnages ou aux objets qui les environnent, et Gargantua, qui vient de s'asseoir, sans se gêner, sur le sommet des tours de Notre-Dame, causera bientôt avec des inter- locuteurs dont la voix ne pourrait parvenir jusqu'à lui et entrera avec eux dans des maisons qui s'élèveraient à peine à la cheville de son pied. Chez Rabelais tout est allusion et symbole. Les grotesques exagérations de son récit ne sont pour lui qu'un moyen de 6 NOTEDELEDITEUR faire passer les dures vérités qu'il veut dire. La grandeur physique de ses héros n'est que l'image de leur grandeur morale et intellectuelle, et ils ne font usage de leur force que pour le bien des hommes : car c'est l'amour de l'humanité qui est la note dominante chez Rabelais, et qui fait le fond de son œuvre. Gargantua et Pantagruel sont les types des souverains puissants et bons, qui ne font la guerre que pour aller au secours des opprimés. Pantagruel va spontané- ment au-devant de Panurge, qui est la personnification du peuple souffrant et travaillant ; il entreprend avec lui un long voyage, lui fait toucher du doigt tous les abus dont il a été victime, et l'amène finalement devant la Dive Bouteille à la- quelle il doit se désaltérer, c'est-à-dire prendre sa part des jouissances de ce monde. On le voit donc, l'œuvre de Rabelais est éminemment philosophique, et nous devions, dans les sujets destinés à la décrire et à la raconter, concilier le sérieux du fond avec le comique de la forme, en évitant de tomber dans le burlesque. Voici, d'ailleurs, dans leur ordre, les sujets que nous avons choisis : 1° L'Éducation de Gargantua. — C'est l'éducation et l'instruction d'après la nature, remplaçant les procédés scolastiques dont l'intelligence de Gargantua avait d'abord été la victime. — Liv. I, chap. 2 3. 2" Gargantua au château du Gué deVède. — Gargantua fait la guerre pour venir au secours des opprimés. — Liv. I, ch. 36. 3^ Rencontre de Panurge, que Pantagruel prend sous sa protection pour le sauver de la misère et de l'ignorance. — Liv. II, ch. 9. 4*' Discussion entre Panurge et Thaumaste. — Triomphe du bon sens populaire sur les raisonnements des sophistes. — Liv. II, ch. 19. 5" Panurge mange son blé en herbe. — Panurge, homme du peuple devenu riche tout à coup, gaspille rapidement tout son bien avrc l'imprévoyance de celui qui n'est pas habitué à posséder. — Liv. III, ch. 2. NOTE DE L EDITEUR C 6° Songe de Panurge. — Nous devions forcément consacrer un sujet à la fameuse discussion sur le mariage; celui-ci nous a fourni l'occasion, très-rare dans Rabelais, de mettre une femme en scène. — Liv. III, ch. 14. 7° Les Moutons de Dindenault. — Un épisode qui ne fait pas l'éloge de Panurge, mais qui est tellement populaire que nous ne pouvions manquer de lui donner place dans notre suite de gravures. — Liv. IV, ch. 8. S° Pantagruel chez les Papimancs. — Abus dans le clergé. — Liv. IV, ch. 5o. 9 Le Tri'.unal de Grippe-Minault. — Abus dans la magistrature. — Liv. V, ch. i3. 10° Panurge devant la Dive Bouteille. — Fin du voyage de Pantagruel et de Panurge^ et conclusion de l'ouvrage. — Liv. V, ch. 45. Tel est le plan que nous avons suivi pour le choix de nos sujets. Nous espérons obtenir l'approbation des amateurs; mais nous avons en tout cas la certitude qu'ils ren- dront pleinement hommage à la puissante originalité et à la vigueur d'exécution que M. Boilvin a montrées dans cette suite de planches, qui est une œuvre entièrement nouvelle. D. J.

INTRODUCTION NCORE une édition de Rabelais, et ce ne sera certainement pas la dernière. M. Jouaust, en tête de sa belle publication du Théâtre de Molière, expliquait dernièrement ce qu'en devenaient les éditions successives; ce qu'il dit à ce sujet peut s'appliquer aussi bien aux éditions de Rabelais : elles vont s'ajoutant les unes aux autres sans se détruire, sans se nuire, apportant chacune quelque clarté nouvelle dans un texte devenu successivement plus facile, plus intelligible, et voyant chaque jour augmenter le nombre de leurs lecteurs. Il y a loin des textes de Le Duchat et d'Éloy Johanneau à ceux qu'on lit aujourd'hui. Et pour arriver à cette facilité, à cette élucidation, il a fallu bien peu de chose : revenir tout simplement au texte primitif de Rabelais, que les éditeurs précédents avaient compliqué comme à plaisir. Rabelais I. a ij INTRODUCTION Grâce à ce procédé tout naturel, qu'avait conseillé M. Brunct, Kabelais a retrouvé de nos jours le succès qu'il a eu lors de son apparition prcniicre, après avoir été presque oublié par le XVII^ et le XVIII^ siècle. Ignoré du commun des lecteurs, à peine lu par quelques érudits , il ne fut bien connu que de quelques grands esprits, comme Molière et La Fontaine, qui portent dans leurs œuvres la trace irrécusable de leur intime fréquentation avec ce vaste génie. C'est la petite édition commencée par Labitte , et continuée par M. Paul Lacroix, qui travailla d'abord à la vulgarisation de Kabelais. Et cependant que de choses à reprendre dans ce texte, reproduction de celui de Le Duchat! La Bibliothèq^ue elzevirienne, sui- vant les conseils de M. Brunct, est revenue aux éditions publiées du vivant de l'auteur, et désormais il ne sera plus permis de s'en écarter. Le grand mérite de l'édition de M. Lacroix est dans le travail sur la vie de Kabelais dont il l'a fait précéder. S'il adopte trop volontiers les bouffonneries énormes qu'on a prêtées à son auteur, il a élucidé avec grand soin beaucoup de côtés obscurs. Le regretté M. Kathery, après lui, est venu nous apporter de nouvelles lumières, malheureusement encore bien insuffi- santes, et après tant de consciencieuses recherches il se trouve que nous n'en savons guère plus sur Ra6«- lais que sur la première moitié de la vie de Molière. L'incertitude commence avec la date de sa naissance et la profession de son père. Ce serait entre 1483 et INTRODUCTION llj 1495, — M. Benjamin Fillon, dans Poitou et Vendée, a rendu presque certaine cette date de 1495, — qu'il serait né à Chinon, dernier de plusieurs fils de Thomas Kabelaisy hôtelier ou apothicaire à l'enseigne de la Lamproie. La connaissance approfondie de la botanique qui se retrouve à chaque page de Vœuvre de Rabelais, tendrait à faire croire qu'il a commencé sa vie dans une officine. Il ne parait pas avoir jamais connu sa mère. Vers neuf ou dix ans, il fut placé par son père à l'abbaye de Seuilly, puis envoyé au couvent de la Baumette, près d'Angers, oh il aurait connu les frères Du Bellay, dont Vamitié lui devait être si utile. On le retrouve en i 5 1 9 nioine, au couvent des franciscains de Fontenay-le-Comte. Ce doit être par la volonté formelle de son père qu'il y prit le froc, car il est difficile de supposer qu'il ait pu obéir à une er- reur de vocation. C'est là que Rabelais commença à prendre cet ardent désir de connaître qui fît de lui non-seulement un érudit, mais un savant. Là se manifesta sa passion pour l'étude des auteurs grecs et latins, dont on retrouve tant de passages dans ses œuvres; là il entra en relations avec nombre d'érudits célèbres. Pierre Lamy, moine comme lui, le fit connaître à Guillaume Budée, puis à Geoffroy d'Estissac, évêque de Maillezais, qui lui resta toujours ami, à André Tiraqueau, à Aimery Bouchard et à bien d'autres. Mais quoi ! tout le clergé a le grec en horreur : c'est œuvre diaboliqiie et on devient hérétique rien qu'en INTRODUCTION étudiant le grec. Pierre Lamy et Rabelais ne tardèrent pas, grâce à leur hellénisme^à s'attirer l'attention malveillante de leurs supérieurs. On fouilla leurs cellules, on confisqua leurs auteurs grecs, peut-être aussi quelques écrits d'Erasme ; on jeta les coupables en prison. Heureusement l'évêque de Maillezais, Geoffroy d'Estissac, les couvrit de sa protection. Il fît quitter à Rabelais le couvent des franciscains pour le soustraire à la haine ou à l'envie des moines, et obtint pour lui, de Clément VII, en 1524, l'autorisation de passer à l'abbaye de Maillezais, sous la règle de saint Benoît. Il était relevé de son vccu de pauvreté et pouvait posséder des bénéfices. Là il augmenta encore le nombre de ses relations d'amitié et d'érudition, puis il quitta enfin la robe de moine, prit l'habit séculier et s'en alla exercer à la fois la médecine et le ministère sacré. Fuyait-il quelque persécution, quelque vengeance de ses anciens confrères de Fontcnay-le-Comte? Voulaitil seulement visiter les Universités de France? Toujours est-il que le 16 septembre lySo // est inscrit sur les registres de la Faculté de médecine de Montpellier, et que le i^' novembre de la même année il y passe son examen de bachelier. Quoiqu'il ne fut pas encore docteur, il y fit des leçons publiques, pendant les années i53o et i53i_, sur les Aphorismes d'Hippocrate et sur /'Ars parva de Galicn, œuvres dont il a publié des éditions. M. Eugène Nocl suppose, avec quelque raison, que, pendant ce premier séjour à Montpellier, Rabe- INTRODUCTION V lais visita les îles d'Hyères, dont il aurait conservé un doux souvenir. Et en effet, en tête du troisième livre, il prend le titre de Calloïer des isles d'Hyères. C'est pendant ce même temps qu'il prit part avec ses amis et collègues [Antoine Saporta, Guy Bourguier, Balthasar Noyer, Tolet, Jean Quentin, Françoys Kobinet, Jean Perdrier) à la représentation de La Morale Comédie de celluy qui avoit ESPOUSÉ UNE FEMME MUTE, morale comédie dont Molière s'est souvenu dans le Médecin malgré lui. En octobre i532 Kabelais est ci Lyon en qualité de médecin de VHôtel-Dieu. Pourquoi et comment, on ne le sait pas encore. Y fut-il en outre correcteur d'imprimerie, comme on Va supposé, rien ne le prouve. C'est à Lyon toutefois qu'il publia plusieurs éditions savantes, et c'est de cette ville qu'il entretint une correspondance active avec les plus remarquables érudits de son temps. C'est en cette même année i532 que parurent à Lyon Les Grandes et Inestimables Chroniques du GRAND et Énorme géant Gargantua^ qui semblent être le point de départ de toute l'épopée burlesque de Kabelais. On ne peut dire avec certitude si cette première ébauche est bien de lui, ou s'il y a pris seule- ment son sujet parce que le nom du héros était déjà populaire. C'est en i532 aussi que parut à Lyon le Pantagruel, suivi de la Pantagrueline PronostiCATioN pour i533. Tout est doute et problème dcms la vie et lespubli- V INTRODUCTION cations de Kabelais. On ne sait si le deuxième livre, le Pantagruel, n'a pas paru avant le premier^ Gargantua. La première édition, avec date, que l'on connaisse <iu Gargantua est de Lyon, i535. // existe un seul exemplaire connu d'une autre édition qui pourrait être antérieure à i535, mais le titre y manque, et Von en est réduit à des suppositions. En i533 et i534 Kabelais accompagne à Kome, en qualité de médecin, de secrétaire peut-être, Jean Du Bellay, évêque de Paris, ambassadeur de François I*^^. C'est pendant ce preniier séjour à Kome qu'il aurait appris l'arabe. A la fin de i534 il est de retour à Lyon, reprend son poste à rHôtel-Dieu, et y fait une leçon publique d'anatomie. Cette même année paraît à Lyon une nouvelle édition du Pantagruel, avec la PantagrueLiNE Pronostication pour l535. En i535 // quitte Lyon, et l'Hôtel-Dieu de cette ville pourvoit à son remplacement comme médecin. En i535 et i536 Kabelais fait à Kome un nouveau voyage avec Jean Du Bellay, nommé cardinal par Paul IIL C'est de là qu'il écrit à Geoffroy d'Estissac les lettres publiées par les frères de Sainte- Marthe. Sur une supplique de Kabelais, à lui adressée par l'entrcniise des cardinaux Ghinucci et Simonetta, le pape Paul lll lui accorde absolution pleine et entière d'avoir quitté sans permission le couvent de Maillezais et le froc. Il est autorisé à reprendre l'habit de saint NTRODUCTION VIJ Benoît et à pratiquer partout la médecine par charité et sans répandre le sang. Revenu alors à Paris, il voulut entrer à l'abbaye de Saint-Maur-des-Fossés, sur les revenus de laquelle le cardinal Du Bellay lui avait assigné un bénéfice. Il éprouva de la part de ses confrères des difficultés au sujet desquelles il adressa une nouvelle supplique au pape Paul III. Quoique la réponse du pape ne soit pas connue, il est probable qu'elle lui fut favorable, car il s'établit à Saint-Maur-des-Fossés . En i537 Kabelais est à Montpellier, ou il se fait enfin recevoir docteur en médecine, le 22 niai, sous la présidence d'Antoine Griphius, Griphy ou Griffy. Il y avait déjà longtemps qu'il avait pris ce titre, notamment dans ses deux almanachs de i533_e^cie i535 et dans la Supplicatio pro apostasia de i536. Kabelais fait alors à Montpellier un cours sur le texte grec des Pronostics d'Hippocrate et une nouvelle leçon publique d'anatomie. Il parait avoir, en i538, parcouru le midi de la France, Castres, Narbonne, en exerçant la médecine, et à la fin de cette année, de retour à Lyon, il y fait la dissection du corps d'un pendu, ce qui est constaté par une pièce de vers latins d'Etienne Dolet. En i539 Kabelais entre comme médecin au service de Guillaume Du Bellay, seigneur de Langey, frère du cardinal, et gouverneur du Piémont, et l'accom- pagne à Turin. Forcépar sa mauvaise santé de quitter son gouvernement, Guillaume Du Bellay meurt le Viij INTRODUCTION 9 janvier i 543, à Saint-Symphorien, près de Lyon, en présence de Rabelais, auquel il lègue une rente de i5o livres tournois. Kené Du Bellay, évêque du Mans, frère de Guillaume, remplace cette rente par la cure de Saint-Christophe du Jambet, au diocèse du Mans, cure dont Kabelais touche les revenus sans être obligé à la résidence. A cette époque Kabelais parait s'être surtout occupé de la publication du Gargantua et du Pantagruel, qui avaient le plus grand succès. En 1647 plusieurs éditions des trois premiers livres et le commencement du quatrième avaient paru. Mais François I^^ touchait à sa fin, et avec lui pouvait cesser la protection dont le couvraient ses nombreux amis. Kabelais prit les devants en allant s'établir à Metz, où il occupa les fonctions de médecin salarié de la ville jusqu'au milieu de l'année l'S^j. A la mort de François I^^ , le cardinal Du Bellay fit un nouveau voyage à Kome, accompagné encore une fois de Kabelais, qui assista en 1549 ^" f^^*^^ données ci l'occasion de la naissance de Louis d'Orléans, second fils de Henri II et de Catherine de Médicis, par le cardinal Du Bellay et d'Urfé, ambassadeur de France. Il décrivit ces fêtes dans un opuscule, La Sciomachie, qui est adressé au cardinal de Lorraine. C'est en cette même année 1549 que Gabriel de Puits-Herbaut, moine de Fontevrauli, publia, contre la personne et les écrits de Kabelais, le Theotimus, INTRODUCTION IX SIVE DE TOLLENDIS ET EXPURGANDIS MALIS LIBRIS..,.^ violent pamphlet qui servit de point de départ à la légende de Kahelais ivrogne et glouton. Le pamphlet est bien oublié^ mais Rabelais a donné l'immortalité à Puits-Herbaut, dont il parle dans son quatrième livre. Il s'agissait maintenant d'obtenir de Henri II un privilège pour ce quatrième livre, et la mort de François I^^ avait privé de crédit tous les amis de Kabelais. Celui-ci trouva un nouveau protecteur dans le cardinal Odet de Chàtillon, qui lui obtint ce privilège. Mais, avant de publier son nouveau livre, Kabelais donna sa démission de ses deux cures, celle de Saint-Christophe de Jambet au diocèse du Mans et celle de Saint-Martin de Meudon au diocèse de Paris, à laquelle il avait été nommé le 8 janvier i55o. Comme l'achevé d'imprimer du quatrième livre, qui parut avec privilège de Henri II et épitre au cardi- nal de Châtillon, est du 28 janvier ibSi, Kabelais ne garda la cure de Meudon qu'un peu nioins de deux ans. Dès que le quatrième livre eut paru, la Faculté de Théologie le censura, et un arrêt du Parlement, du i^"* mars i552, en suspendit la vente. On ne sait quand ni comment fut levée la défense, mais le vo- lume fut remis en vente peu de temps après. On croit que Kabelais mourut en i553^ ci Paris, dans une maison de la rue des Jardins, et qu'il fut enterré au cimetière de la paroisse Saint-Paul. h X INTRODUCTION Te/5 sont les seuls faits positifs que l'on connaisse de sa vie ; tout le reste est supposition ou légende. Le cinquième livre ne parut qu'en 1574, et il est permis de douter qu'il soit en entier de la main de Rabelais. Certains passages sont dignes des quatre premiers livres, mais il faut bien reconnaître qu'en un plus grand nonibre la verve de style^ la ri- chesse d'invention de Rabelais, font défaut. On sent aussi, dans ce cinquième livre, comme un souffle de protestantisme dont on chercherait vainement la trace dans les quatre premiers, où il fronde bien les abus monastiques et autres, mais sans aller jamais jusqu'à la Réforme, restant catholique avant tout. A ce sujet, M. Rathery cite un passage de Colletet qu'il est bon de reproduire : (( Rabelais, tout libertin qu'il paroissoit aux yeux du monde, ne laissoit pas d'avoir de pieux et devôts sentiments et de defferer merveilleusement aux saintes constitutions de l'Eglise catholique et orthodoxe, qu'il reconnut toujours pour sa véritable mère, ce qui est si constant encore que Jean Calvin, ce grand hérésiarque, fit tout ce qu'il put pour l'attirer de son party, mais en vain, et qu'ensuite il le traita d'impie et d'athée, comme on le void dans son Traitté des scandales : si est-ce, jugeant cette relligion nouvelle et de l'invention des hommes plutôt que de Dieu, il regimba contre INTRODUCTION X) elle, et se tint tousjours ferme dans celle qu'il avoit reçue de ses pères. Et c'est ce qui obligea sans doute ce grand et fameux sectateur de Calvin, Henry Estienne, de parler de luy de la sorte dans son Apologie d'Hérodote : « Quoyque François Rabelais semble estre des nostres, il jette souvent toutefois des pierres dans nostre jardin. » C'est au milieu du XVI^ siècle, en pleine Kenaissance, et lors des premiers progrès de la Kefornie, que se manifeste Kabelais, et il résume en lui toutes les aspirations, comme aussi toutes les connaissances de cette vigoureuse époque. En érudition, en science, rien ne lui est étranger; il est universel : langues orientales, langue grecque, médecine, botanique, philosophie, il sait tout. Il n'y a pas à parler du latin, qui était alors une langue courante. S'il sait Aristote par cœur, il puise aussi constam- ment dans ^lien, dans Pline, dans Lucien, et il donne, à chaque ligne de ses écrits, la preuve de sa connaissance approfondie de toute l'antiquité; il a pour elle une affection si enthousiaste qu'il en vient à croire facilement tout ce que rapportent les auteurs grecs ou latins. Et pourtant son admiration pour Aristote ne Vempcche pas d'être un ennemi acharné de la scolastique, et de pencher en philosophie pour Platon. Est-il besoin de faire ressortir la justesse et l'hu- manité de ses idées sur l'éducation, sur la guerre. XIJ INTRODUCTION sur l'application des sciences^ Il est le propagateur de toutes les idées justes^ Vennemi acharne de Tmjustice, le défenseur de tous les opprimés. Il combat toutes les superstitions, et il a le courage d'attaquer en face des corporations puissantes' qui, pour se venger ou se défendre , envoient leurs adversaires au bûcher; aussi est-il obligé, pour leur échapper, d'envelopper les bonnes vérités qu'il veut dire sous des formes que la pruderie moderne trouve un peu crues. Son langage est pourtant celui de tout le monde à Vépoque où. il vivait, et Brantôme, qu'on ne songe guère à attaquer, a eu de bien autres audaces. Rabelais voulait être lu de tout le monde et en même temps échapper au bûcher, et ce ne lui est pas un petit mérite d'y être parvenu, tout en disant hardi- ment ce qu'il avait à dire. Il convient maintenant de donner quelques indications sur le texte de cette nouvelle édition. Il est la re- production exacte, pour les quatre premiers livres, de la dernière édition publiée du vivant de Rabelais. Dans les Variantes, imprimées à la fin de chaque livre, sont mentionnés avec soin tous les passages des éditions antérieures qui manquent dans celle qui a servi de type. Les seules modifications introduites ont consisté : i°A uniformiser la ponctuation, qui, n'ayant pas alors de règles fixes, variait constamment ; 2° .4 multiplier les alinéas, afin de rendre la lec- ture plus facile et moins fatigante; INTRODUCTION XUJ 3° A distinguer l'i et Vu consonnes et voyelles, dont la confusion ne peut être quun obstacle pour le lecteur.Aucun de ces changements n'a porté la moindre atteinte au respect absolu du texte. Le cinquième livre a été l'objet de moins de scrupules. Publié après la mort deKabelais, il se ressent de cette impression posthume. Plusieurs passages en sont presque incompréhensibles, et, toutes les fois que le manuscrit de la Bibliothèque nationale a donné une leçon qui a paru meilleure, on Va suivie. Ce manuscrit est de la main d'un copiste peu lettré, mais il a été fait d'après une édition ou une copie diffé- rente des éditions connues : il donne donc des variantes et des passages nouveaux qu'on ne saurait trouver ailleurs. M. de Montaiglon, en imprimant ce manuscrit pour la première fois, a rendu un véri- table service. Enfin on a joint à cette édition un glossaire, beau- coup trop succinct sans doute, mais qui suffira à en rendre la lecture facile et courante : car, si Rabelais est très-clair dans la construction de sa phrase, chez lui le mot est souvent obscur et a besoin d'explication. Souvent aussi il emploie le même mot dans des acceptions différentes, et toujours le glossaire présente les sens de ces mots dans l'ordre où ils se rencontrent au courant de l'ouvrage. Il reste maintenant un vœu à former, c'est qu'on nous donne bientôt une Bibliographie rabelaisienne; XIV INTRODUCTION mais, pour une telle œuvre, il faut presque toute la vie d'un érudit. Il en est un qui, depuis de longues années, étudie avec une rare patience tout ce qui touche à Rabelais, et il est permis d'espérer que M. Paul Lacroix voudra bien faire pour Rabelais ce que dernièrement il a fait avec tant de succès pour Molière. Paul Chéron. LES CINQ. LIVRES DE F. RABELAIS

PROLOGUE DE M. FRANÇOIS RABELAIS , POUR LE CINQUIESME LIVRE DES FAICTS ET DICTS HEROÏQUES DE PANTAGRUEL AUX LECTEURS BENEVOLES EUVEURS infatigables, et vous, VerolUz tresprecieux, pendant qu'estes de loisir et que n'ay autre plus urgent affaire en main, je vous demande en demandant: Pourquoy est-ce qu'on dit maintenant en commun proverbe : Le monde nest plus fat^ Fat est un vocable de Languedoc, et signifie non salle, sans sel, insipide, fade; par métaphore signifie fol, niais, despourveu de sens, esventé de cerveau. Voudriez-vous dire, comme de faict on peult logica- lement inférer, que par cy-devant le monde eust esté fat, 'maintenant seroit devenu sage? Par quantes et quelles conditions estoit-il fat? Quantes et quelles Rabelais. V. i 2 PROLOGUE conditions estoient requises à le faire sage? Pourquoy estoit-il fat? Pourquoy seroit-il sage? Enquoy congnoissez-vous la folie antique ? Enquoy cognoissez- vous la sagesse présente? Qui le fi^t fat? Qui l'a fait sage ? Le nombre desquelz est plus grand ou de ceux qui Vaymoient fat, ou de ceux qui Vayment saige? Quant de temps fut-il fat? Quant de temps sera il sage? Dont procedoit la folie antécédente? Dont procède la sagesse subséquente? Pourquoy en ce temps, non plus tard, print fin l'antique folie? Pourquoy en ce temps, non plustost, commença la sagesse présente? Quel mal nous estoit de la folie précédente ? ^Quel bien nous est de la sagesse succedente ? Comment seroit la folie antique abolie? Coniment seroit la sagesse présente restaurée? Kespondez, si bon vous semble : d'autre adjuration n'useray-je envers vos Révérences, craignant alté- rer vos Paternitez. N'ayez honte, faictes confusion à Hcr der Tyfel, ennemy de Paradis^ ennemy de vérité. Courage, enfansl si estes des miens, beuvez trois ou cinq fois pour la première partie du sermon, puis respondez à ma demande; si estes de l'autre, Avalis- que Sathanas. Car je vous jure mon grand Hurluburlu que, si autrement ne m'aydcz à la solution du probksme susdit, desja, et n'y a gucrcs, je me repens vous l'avoir proposé, pour tant que ce m'est pareil estrif comme si le loup ienois par les aureilles sans espoir de secours. Plaict? J'entends bien, vous n'estes délibérez de respondre. Non feray-je, par ma barbe; PROLOGUE 5 seulement vous allegueray ce qu'en avoit prédit en es- prit prophétique un vetierable docteur^ ciutheur du livre intitule la Cornemuse des Prélats. Que dit-il^ le paillard? Escoutez, vietz-dazes, escoutez : L'an Jubilé, que tout le monde raire Fadas se feist, est supernumeraire Au dessus trente. O peu de révérence ! Fat il sembloit ; mais en persévérance De long brevets, fat plus ne gloux sera : Car le doux fruict de l'herbe esgoussera, Dont tant craignoit la fleur en prime vere. Vous l'avez oy, l'avez-vous entendu? Le docteur est antique, les paroles sont laconiques, les sentences scotines et obscures, ce nonobstant qu'il traitast naatiere de soy profonde et difficile. Les meilleurs interprètes d'iceluy bon Père exposent Van Jubilé passant le trentiesme estre les années encloses entre ceste aage courante l'an mil cinq cens cinquante. Oncques ne crain- dra la fleur d'icelle. Le monde plus fat ne sera dit, venant la prime saison. Les fols, le nombre desquels est infiny, comme atteste Salomon, périront enragez, et tout espèce de folie cessera, laquelle est pareillement innombrable, comnie dict Avicenne, maniae infinitse sunt species. Laquelle, durant la rigueur hibernale, estoit au centre repercutée, apparoist en la circonférence, et est en cesves comme les arbres. L'expérience nous le demonstre, vous le sçavez, vous le voyez. Et fut jadis exploré par le grand bon homme Hippocrates, Aphorism. : Vere etenim manise^ etc. Le 4 PROLOGUE monde donques ensagissant, plus ne craindra la fleur des febves en la prime vere, c'est-à-dire, comme pouvez le voirre au poing et les larmes à l'œil, pitoiablc- ment croire en caresme un tas de livres qui sembloyent florides, florulens, fîoris comme beaux papillons, mais au vray estoient ennuyeux, fascheux, dangereux, espi- neux et ténébreux comme ceux d'Heraclitus, obscurs comme les Nombres de Pythagoras, qui fut Koy de la febve, tesmoin Horace. Iceux périront, plus ne viendront en main, plus fie seront leuz ne veuz. Telle estait leur destinée, et là fut leur fin prédestinée. Au lieu d'iceux ont succédé les febves en gousse. Ce sont ces joyeux et fructueux livres de Pantagruelisme, lesquels sont pour ce jourd'huy en bruit de bonne vente, attendant la période du jubilé subséquent, à Vestude desquels tout le monde s'est adonné; aussi est-il sage nommé. Voila vostre problesme solu et résolu, faictcs vous gens de bien là-dessus. Toussez icy un bon coup ou deux, et en beuvez neuf d'arrachepied, puis que les vignes sont belles et que les usuriers se pendent; ds me cousteront beaucoup en cordeaux si bon temps dure, car je proteste leur en fournir libéralement sans payer, toutes et quantes fois que pendre ils se voudront, espargnant le gain du bourreau. Afin donques que soyez participans de cette sagesse advcnentc, émancipez de l'antique folie, effacez-moy présentement de vos pancartes le symbole du vicl philosophe à la cuysse dorée, par lequel il vous intcrdisoit l'usage et mangeaille des febves, tenans pour chose PROLOGUE D vraye et confessée entre, tous bons compagnons qu'il les vous interdisoit en pareille intention que le medicin d'eaue douce feu Amer, nepveu de l'avocat Seigneur de Camelotiere, deffendoit aux malades Vaisle de perdrix, le cropion de gelines et le col de pigeon, disant : Ala mala, cropium dubium, coUum bonum pelle re- mota, les reservans pour sa bouche, et laissant aux malades seulement les osselets à ronger. A luy ont succédé certains Caputions nous deffen- dant les febves, c'est-à-dire livres de Pantagruelisme, et à l'imitation de Philoxenus et Gnato Sicilien, anciens architecques de leur monachale et ventrcde volupté, lesquels en plains banquets, lors qu'estoyent les fricins morceaux servis, crachoient sus la viande, affîn que par horreur autres qu'eux n'en mangeassent. Ainsi ceste hideuse, morveuse, catharreuse, vermolue cagotaille, en public et privé, déteste ces livres frians, et dessus vilainement crachent par leur impudence. Et combien que maintenant nous lisons en nostre langue gallique, tant en vers qu'en oraison solue, plusieurs excellens escripts, et que peu de reliques restent de ca- pharderie et siècle Gottis, ay neantmoins esleu gasouiller et siffler oye, comme dit le proverbe, entre les cygnes, plustost que d'estre entre tant de gentils poètes et faconds orateurs mut du tout estimé; jouer aussi quelque villageois personnage entre tant disers joueurs de ce noble acte, plustost qu'estremis au rang de ceux qui ne servent que d'ombre et de nombre, seulement baaillans aux mousches, chovans des aureilles comme 6 PROLOGUE un asne d'Arcadie au chant des musiciens, et par signes, en silence, signifians qu'ils consentent à la prosopopce. Prins ce chois et eslection, ay pensé ne faire auvre indigne si je rcmuois mon tonneau Diogenic, afin que ne me dissiez ainsi vivre sans exemple. Je contemple un grand tas de Collinets, Marots, Drouets, Saingelais, Sallets, Masuels, et une longue centurie d'autres poètes et orateurs galliques, et voy que, par longtemps avoir en Mons Parnasse versé à iescole d'Apollo, et du fons cabalin beu à plein godet entre les joyeuses Muses, à Veternelle fabrique de nostre vulgaire, ils ne portent que marbre parien, ale- bastre, porphyre et bon ciment royal; ils ne traittent que gestes héroïques, choses grandes, matières ardues, graves et difficiles, et le tout en rethorique armoisine et cramoisine, par leurs escrits ne produisent que nectar divin, vin précieux, friand, ricmt, muscadet, délicat, délicieux. Et n'est ceste gloire en hommes toute consonimée, les dames y ont participé, entre lesquelles une cxtraicte du sang de France, non allegable sans insigne prefation d'honneur, tout ce siècle a estonné tant par ses escripts, inventions transcendentes, que par ornement de langage, de style mirifique. Imitezles , si sçavez; quant est de moy, imiter je ne les sçaurois : à chacun n'est octroyé henter et habiter Corinthc. A l'édification du temple de Salomon chascun un sicle d'or offrit, à pleines poignées ne pouvoit. Puis doncqucs qu'en nostre faculté n'est en l'art d'architec- PROLOGUE 7 tare tant promouvoir comme ils font, je suis délibéré faire ce que fîst Kcgnault de Montauban, servir les massons, mettre bouillir pour les massons, et m'auront, puis que compagnon ne puis estre, pour auditeur, je dis infatigable, de leurs trescelestes escripts. Vous mourez de peur, vous autres les Zoïles emulateurs et envieux ; allez vous pendre, et vous mesmes choisissez arbre pour pendages, la hart ne vous fau- dra mie. Protestant icy devant mon Helicon, en l'au- dience des divines Muses, que, si je vis encores Vaage d'un chien, ensemble de trois corneilles, en santé et intégrité, telle que vescut le sainct capitaine juif, Xenophile musicien, et Demonax philosophe, par argu- mens non impertinans et raisons non refusables je prouveray en barbe de je ne sçay quels centonifiques botteleurs de matières cent et cent fois grabelées, rappetasseurs de vieilles ferrailles latines, revendeurs de vieux mots latins tous moisis et incertains, que nostre langue vulgaire n'est tant vile, tant inepte, tant indi- gente et à mespriser qu'ils l'estiment. Aussi en toute humilité supplians que de grâce specicde, ainsi comme jadis estcms par Phebus tous les trésors es grands poètes départis, trouva toutesfois Esope lieu et office d'apologue, semblablement, veu qu'à degré plus haut je n'aspire, ils ne desdaignent en estât me recepvoir de petit Kiparographe, sectateur de Pyreicus. Ils le fe- ront, je m'en tiens pour asseuré : car ils sont tous tant bons, tant humains, gracieux et débonnaires que rien plus. 5 PROLOGUE Parquoy, Beuveurs, parquoy, Goûteurs, iceux en veullent avoir fruition totale, car les recitans parmy leurs Conventicules, cultans les haulx mystères en iceulx comprins, entrent en possession et réputation singulière, comme en cas pareil fîst Alexandre le Grand des livres de la prime philosophie composez par Aristoteles. Ventre sur ventre, quels trinquenailles ! quels gallefretiers ! Pourtant, Beuveurs, je vous advise en heure oporiune, faictes d'iceux bonne provision soudain que les trouverez par les officines des libraires, et non seule- ment les egoussez, mais dévorez comme opiatte cordialle,et les incorporez en vous mesmes;lors cognoistrez quel bien est d'iceux préparé à tous gentils egousseurs de febves. Présentement je vous en offre une bonne et belle pannerce, cueillie on propre jardin que les autres précédentes, vous suppliant, au nom de Keverence, qu'ayez le présent en gré, attendant mieux à la prochaine venue des arondelles. LE CINQ.UIESME ET DERNIER LIVRE DES FAICTS ET DITS HEROÏQUES DU BON PANTAGRUEL, COMPOSE PAR M. FRANÇOIS RABELAIS, DOCTEUR EN MEDECINE Auquel est contenu la Visitation de l'Oracle de la dive BacbuCj et le mot de la bouteille, pour lequel avoir est entrepris tout ce long voyage. Nouvellement mis en lumière. M. D. LXIIII EPIGRAMME ABELAis est-il mort ? Voicy encor un livre. Non, sa meilleure part a repris ses esprits Pour nous faire présent de l'un de ses escrits, Qui le rend entre tous immortel et fait vivre. Nature quite. LIVRE CINQ.UIÉME CHAPITRE I Comment Pantagruel arriva en l'îsh Sonnante, et du bruit qu'entendismes. ONTiNUANT nostre routte, navigasmes par trois jours sans rien descouvrir; au quatriesme aperceusmes terre, et M nous fut dit par nostre pillot que c'estoit risle Sonnante, et entendismes un bruit de loing venant, frequant et tumultueux, et nous sembloit, à l'ouïr, que ce fussent cloches grosses, petites et médiocres, ensemble sonnantes comme l'on faict à Paris, à Tours, Gergeau, Nantes et ailleurs, es jours des grandes festes ; plus approchions, plus entendions ceste sonnerie renforcée. 12 LIVRE V, CHAPITRE I Nous doublions que feust Dodone avecques ses chauderons, ou le Porticque dit Heptaphone en Olympie, ou bien le bruit sempiternel du colosse érigé sus la sépulture de Memnon en Thebes d'Egypte, ou les tintamarres que jadis on oyoit autour d'un sépulcre en l'isle Lipara, l'une des iEolides ; mais la chorographie n'y consentoit. a Je doute, dist Pantagruel, que là quelque compaignie d'abeilles ayent commancé prendre vol en l'air, pour lesquelles revocquer le voisinage faict ce triballe- ment de poilles, chaudrons, bassins, cymbales corybantiques de Cybele, mère grande des Dieux. Entendons. » Approchans davantage, entendismes, entre la perpétuelle sonnerie des cloches, chant infatigable des hommes là residens, comme estoit nostre advis. Ce fut la cause pourquoy, avant que aborder en risle Sonnante, Pantagruel fut d'opinion que descendissions avecq' nostre esquif en un petit roc auprès duquel recognoissions un hermitage et quel- que petit jardinet. Là trouvasmes un petit bon homme hermite nommé Braguibus, natif de Glenay, lequel nous donna pleine instruction de toute la sonnerie, et nous festoya d'une estrange façon. Il nous fist quatre jours consequens jeusner, atfermant qu'en l'isle Sonnante autrement receus ne serions, parce que lors estoit le jeusne de Quatre-Temps. « Je n'entends point, dit Panurge cest énigme; ce seroit PANTAGRUEL l3 plustost le temps des quatre vens, car, jeusnant, ne sommes farcis que de vent. Et quoy, n'avez vous icy autre passetemps que de jeusner? Me semble qu'il est bien maigre; nous nous passerions bien de tant de festes du palais. — En mon Donat, dit frère Jehan, je ne trouve que trois temps, prétérit, présent et futur; icy le quatriesme doit estre pour le vin du valet. — Il est, dit Epistemon, aorist yssu de prétérit tresimparfaict des Grecs et des Latins, en temps garré et bigarré receu. Patience, disent les ladres. — Il est, dit l'hermite, fatal ainsi comme je vous l'aj dit ; qui contredit est hérétique, et ne luy fault rien que le feu. — Sans faulte, Pater, dit Panurge, estant sur mer, je crains beaucoup plus estre mouillé que chauffé, et estre noyé que bruslé. « Bien, jeusnons, de par Dieu; mais j'ay par si long-temps jeusnéqueles jeusnes m'ont sappé toute la chair, et crains beaucoup qu'en fin les bastions de mon corps viennent en descadence. Autre peur ay-je d'avantage, c'est de vous fascher en jeusnant, car je n'y sçay rien, et y ay mauvaise grâce, comme plusieurs m'ont affermé, et je les croy; de ma part, dy-je, bien peu me soucie de jeusner; il n'est chose tant facile et tant à main ; bien plus me soucie de ne jeusner point à Tadvenir, car là il fault avoir dequoy drapper et dequoy mettre au moulin. Jeusnons, de par Dieu, puisqu'entrez sommes es feries esuriales, ja longtemps a que ne les recognoissois. M LIVRE V, CHAPITRE I — Et si jeusner faut, dit Pantagruel, expédiant aultre n'y est, fors nous en despecher comme d'un mauvais chemin. Aussi bien veux-je un peu visiter mes papiers, et entendre si l'estude marine est aussi bonne comme la terrienne, pource que Platon, voulant descripre un homme niais, imperit et ignorant, le compare à gens nourris en mer dedans les navires, comme nous dirions à gens nourris dedans un baril , qui onques ne regardèrent que par un trou. » Nos jeusnes furent terribles et bien espouventables, car le premier jour nous jeusnasmes à battons rompus, le second à espées rabatues, le tiers à fer esmoulu, le quart à feu et à sang. Telle estoit l'or- donnance des fées. CHAPITRE II Comment l'Isle Sonnante avoit esté habitée par les Siticines, lesquels cstoyent devenuz oiseaux. os jeusnes parachevez, l'hermite nous bailla unes lettres adressant à un qu'il nommoit Albian Camat, maistre ^Editue de l'Isle Sonnante ; mais Panurge, le saluant, l'appela maistre Antitus. C'estoit un petit bon homme vieux, chauve, à museau bien enlu- miné et face cramoisie. Il nous fit tresque bon recueil par la recommandation de l'hermite, enten- PANTAGRUEL l5 dant qu'avions jeusné comme a esté déclaré. Après avoir tresbien repeu, nous exposa les singularitez de l'isle, affermant qu'elle avoit premièrement esté habitée par les Siticines, mais, par ordre de nature, comme toutes choses varient, ils estoient devenus oiseaux. Là j'eus pleine intelligence de ce qu'Atteius Capito , PoUux, Marcellus, A. Gellius, Athenaeus, Suidas, Ammonius et autres avoient escrit des Siti- cines et Sicinnistes, et difïîcille ne nous sembla croire les transformations de Nyctimene, Progné, Itys, Alcmene, Antigone, Tereus, et autres oiseaux. Peu aussi de doubte fismes des enfans Matabrune convertis en cygnes, et des hommes de Pallene en Thrace, lesquelz , soubdain que par neuf fois se baignent au Palude Tritonique , sont en oiseaux transformez. Depuis autre propos ne nous tint que de cages et d'oiseaux. Les caiges estoient grandes, riches, sumptueuses, et faictes par merveilleuse architecture. Les oiseaux estoient grands, beaulx et polis à l'avenant, bien ressemblans les hommes de ma patrie ; beuvoient et mangeoient comme hommes,, esmoutissoyent comme hommes, enduisoyent comme hommes, pedoient et dormoient et roussinoient comme hommes; brief, à les veoir de prime face, eussiez dit que feussent hommes; toutesfoys ne l'estoyent mie, selon l'instruction de Maistre JEd'i- tue, mais protestant qu'ils n'estoient ny séculiers ny l6 LIVRE V, CHAPITRE II mondains. Aussi leur pennage nous mettoit en res- verie, lequel aucuns avoient tout blanc, autres tout noir, autres tout gris, autres miparti de blanc et noir, autres tout rouge, autres parti de blanc et de bleu : c'estoit belle chose de les veoir. Les masles il nommoit Clergaux, Monagaux, Prestresgaux, Abbegaux, Evesgaux, Cardingaux, et Papegaut, qui est unique en son espèce. Les femelles il nommoit Clergesses, Monagesses, Prestregesses, Abbegesses, Evesgesses, Cardingesses, Papegesses. « Tout ainsi toutesfoys, nous dist-il, comme entre les abeilles hantent les freslons, qui rien ne font fors tout manger et tout gaster, aussi depuis trois cens ans ne sçay comment entre ces joyeux oiseaux estoit par chascune quinte lune avolé grand nombre de Cagots, lesquels avoient honny et conchié toute l'Isle, tant hideux et monstrueux que tous estoient reffuis. Car tous avoient le col tors et les pattes pelues, les gryphes et ventre de harpies et les culs de Stymphalides, et n'estoit possible les exterminer : pour un mort en avoloient vingtquatre. » Je y souhaitoye quelque second Hercules, pour ce que frère Jehan y perdit le sens par véhémente contemplation, et à Pantagruel advint ce qu'estoit advenu à Messire Priapus contemplant les sacrifices de Cerés, par faute de peau. PANTAGRUEL 17 CHAPITRE III Comment en l'Isle Sonnante n'est qu'un Papegaut. ORS demandasmes à Maistre yEditue, veu la multiplication de ces vénérables >-^'^ oiseaux en toutes leurs espèces, pour- quoy là n'estoit qu'un Papegaut. Il nous respondit que telle estoit l'institution première et fatale destinée des estoilles. Que des Clergaux naissent les Prestregaux et Monagaux sans compagnie charnelle, comme fait entre les abeilles d'un jeune toreau accoustré selon l'art et pratique d'Aristaeus. Des Prestregaux naissent les Evesgaux, d'iceux les beaux Cardingaux, et les Cardingaux, si par mort n'estoient prévenus, fînissoient en Papegaut ; et n'en est ordinairement qu'un, comme par les ruches des abeilles n'y a qu'un roy, et au monde n'est qu'un soleil. Iceluy decedé, en naist un autre en son lieu de toute la race des Cardingaux, entendez tousjours sans copulation charnelle. De sorte qu'il y a en ceste espèce unité individuale, avec perpétuité de succession, ne plus ne moins qu'au phœnix d'Arabie. Vray est qu'il y a environ deux mil sept cens soixante lunes que furent en nature deux Papegaux produits; mais ce fut la plus grande calamité qu'on vit onques en ceste Isle. « Car, disoit iEditue, tous ces oiseaux icy se pillèrent les uns les autres, et Rabelais. V^ 3 l8 LIVRE V, CHAPITRE III s'entrepelauderent si bien ce temps durant que risle périclita d'estre spoliée de ses habitans. Part d'iceux adheroit à un et le soustenoit, part à l'autre et le defendoit; demeurèrent part d'iceux muts comme poissons, et onques ne chantèrent, et part de ces cloches, comme interdicte, coup ne sonna. Ce séditieux temps durant, à leur secours évoquèrent empereurs, roys, ducs, marquis, comtes, barons et communautez du monde qui habite en continent et terre-ferme, et n'eust fin ce schisme et ceste sédition qu'un d'iceux ne fut tollu de vie et la pluralité reduicte en unité. » Puis demandasmes qui mouvoit ces oyseaux à ainsi sans cesse chanter. ^£ditue nous respondit que c'estojent les cloches pendantes au dessus de leuis cages ; puis nous dit : « Voulez-vous que présente- ment je face chanter ces Monagaux que voyez là bardocucullez d'une chausse d'hypocras, comme une allouette sauvage? — De grâce, « respondis- mes nous. Lors sonna une cloche six coups seulle- ment, et Monagaux d'accourir, et Monagaux de chanter. « Et si, dist Panurge , je sonnoye ceste cloche, feray-je pareillement chanter ceux qui ont le plumage à couleur de haran soret? — Pareille- ment, » respondit ^Editue. Panurge sonna , et soudain accoururent ces oi- seaux enfumez, et chantoient ensemblement , mais ils avoient les voix raucques et mal plaisantes. Aussi nous remonstra .^ditue qu'ils ne vivoient que de PANTAGRUEL '9 poisson, comme les hérons et cormorans du monde, et quec'estoit une quinte espèce de Cagaux, impri- mez nouvellement. Adjousta d'avantage qu'il avoit eu advertissement par Robert Valbringue, qui parlà n'agueres estoit passé en revenant du pays d'Affrique , que bientost y devoit avoler une sexte es- pèce, lesquels il nommoitCapucingaux, plus tristes, plus moniaques et plus fascheux qu'espèce qui fust en toute l'Isle. « Affrique, dist Pantagruel, est coutumiere toujours choses produire nouvelles et monstrueuses. » CHAPITRE IV Comment les oiseaux de l'Isle Sonnante estaient tous passagers. Aïs, dist Pantagruel, veu qu'exposé nous avez des Cardingaux naistre Papegaut, et les Cardingaux des Evesgaux, les Evesgaux des Prestregaux, et les Prestregaux des Clergaux, je voudrois bien entendre dont vous naissent ces Clergaux. — Ils sont, dit iEditue, tous oiseaux de passage, et nous viennent de l'autre monde, part d'une contrée grande à merveilles, laquelle on nomme Joursanspain ; part d'une autre vers le ponant, la- quelle on nomme Tropditieux. De ces deux contrées 20 LIVRE V, CHAPITRE IV tous les ans à boutées ces Cleigaux icy nous viennent, laissans pères et mères, tous amis et tous parens. « La manière est telle : quand en quelque noble maison de ceste contrée dernière y a trop d'iceux enfans, soient masles, soient femelles, de sorte que qui à tous part feroit de l'héritage, comme raison le veult, nature l'ordonne et Dieu le commande, la maison seroit dissipée, c'est l'occasion pourquoy les parens s'en deschargent en ceste isle, mesmement s'ils sont des appanaiges de l'Isle Bossard, —C'est, dit Panurge, l'Isle Bouchard lez Chinon? —Je dis Bossard, respondit i£ditue, car ordinairement ils sont bossus, borgnes, boiteux, manchots, podagres, contrefaits et maleficiez, poix inutile de la terre. — C'est, dit Pantagruel, coustume du tout contraire es institutions jadis observées en la réception des pucelles Vestales, pour lesquelles, comme atteste Labeo Antistius, estoit défendu à ceste dignité eslire fille qui eust vice aucun en l'ame, ou en ses sens diminution, ou en son corps tasche quelconque, tant fust occulte et petite. — Je m'esbahis, dit JEdhue continuant, si les mères de par de-là les portent neuf mois en leurs flancs, veu qu'en leurs maisons elles ne les peuvent porter ne patir neuf ans, non pas sept le plus souvent, et leur metians une chemise seulement sus la robbe, sur le sommet de la teste leurs couppans je ne sçay quants cheveux, avec certaines parolles PANTAGRUEL 21 apotrophées et expiatoires, comme entre les iî^gyptiens par certaines linostolies et rasures estoient créez les Isiacques, visiblement, apertement, manifestement, par metempsychosie pythagorique, sans lésion ne blessure aucune, les font oiseaux tels devenir que présentement les voyez. Ne sçay toutesfois, beaux amis, que peult estre, ne d'où vient que les femelles, soyent Clergesses, Monagesses ou Abbegesses, ne chantent motets plaisans et charisteres, comme on souloit faire à Oromasis, par l'in- stitution de Zoroaster, mais catarates et scythropes, comme on faisoit au Dgemon Arimanian; et font continuelles dévotions de leurs parens et amis, qui en oiseaux les transformèrent, je dis autant jeunes que vieilles. « Plus grand nombre nous en vient de Joursanspain, qui est excessivement long. Car les Assaphis, habitans d'icelle contrée, quand sont en danger de patir malesuade famine, par non avoir dequoy soy alimenter, et ne sçavoir ne vouloir rien faire, ne travailler en quelque honneste art et mestier, ne aussi feablement à gens de bien soy asservir; ceux aussi qui n'ont peu jouir de leurs amours, qui ne sont parvenus à leurs entreprinses et sont désespérez; ceux pareillement qui meschantement ont commis quelque cas de crime, et lesquels on cherche pour à mort ignominieuse mettre^ tous avolenticy; icy ont leur vie assignée, icy soudain deviennent gras comme glirons, qui paravent estoyent maigres 22 LIVRE V, CHAPITRE IV comme pies, icy ont paifaicte seureté, indemnité et franchise. — Mais, demandoit Pantagruel, ces beaux oi- seaux icy une fois avolez, retournent-ils jamais plus au monde oîi ils furent ponnus ? — Quelques uns, respondit ^Editue, jadis bien peu, bien à tard et à regret. Depuis certaines éclipses s'en est revolé une grande mouée, par vertu des constellations célestes. Cela de rien ne nous melancholie, le demeurant n'en a que plus grande pitance. Et tous, avant que revoler, ont leurs pennages laissé parmy les orties et espines. » Nous en trouvasmes quelques uns reallement, et en recherchant d'adventure rencontrasmes un pot aux roses descouvert. CHAPITRE V Comment les oiseaux gourmandcurs sont muets en Vlsle Sonnante. L n'avoit ces mots parachevez, quand prés de nous avolerent vingt cinq ou trente oiseaux de couleur et pennage 'que encore n'avois veu en l'Isle. Leur pennage estoit changeant d'heure en heure, comme la peau d'un chameleon, et comme la fleur de tri- poleon ou teucrion ; et tous avoient au dessous de l'aisle gauche une marque comme de deux diame- PANTAGRUEL 23 très mi-partissant un cercle, ou d'une ligne perpendiculaire tombante sur une ligne droite. A tous estoit presque d'une forme, mais non à tous d'une couleur; es uns estoit blanche, es autres verde, es autres rouge, es autres violette, es autres bleue. « Qui sont, demande Panurge, ceux cy, et comment les nommez? —Ils sont, respondit JEd'i- tue, metifs. Nous les appelions Gourmandeurs, et ont grand nombre de riches Gourmanderies en vostre monde. —Je vous prie, dis-je, faites les un peu chanter, afin qu'entendions leur voix. —Ils ne chantent, respondit-il, jamais, mais ils repaissent au double en recompense. —Oii sont, demandoisje, les femelles? — Ils n'en ont point, respondit-il. — Comment donc, infera Panurge, sont-ils ainsi croutelevez et tous mangez de grosse vérole ? — Elle est, dit-il, propre à ceste espèce d'oi- seaux, à cause de la marine qu'ils hantent quelques fois. » Puis nous dit : « Le motif de leur venue icy prés de vous est cestuy, pour veoir si parmy vous recognoistront une magnifique espèce de gots, oiseaux de proye terribles, non toutesfois venans au leurre, ne recognoissans le gand, lesquels ils disent estre en vostre monde, et d'iceux les uns porter jects aux jambes bien beaux et précieux, avec inscription aux vernelles, par laquelle qui mal y pensera est condamné d'estre soudain tout conchié ; autres au devant de leur pennage porter le trophée d'un ca- 24 LIVRE V, CHAPITRE V lomniateur, et les autres y porter une peau de bellier. — Maistre y£ditue, dit Panurge, il peut estre vray, mais nous ne lescognoissons. — Ores, dit JEditue, c'est assez parlementé ; allons boire. — Mais repaistre, dist Panurge. — Repaistre,dit ^Editue, et bien boire, moitié au per, moitié à la couche. Rien si cher ne précieux est que le temps; employons-le en bonnes œuvres. » Mener il nous vouloit premièrement baigner dedans les thermes des Cardingaux, belles et délicieuses sou- verainement; yssans des bains, nous faire par les aliptes oindre de précieux basme. Mais Pantagruel luy dit qu'il ne bevroit que trop sans cela. Adonques nous conduit en un grand et deUcieux refectouer, et nous dist : « L'hermite Braguibus vous a fait jeusner par quatre jours, quatre jours serez icy à contrepoints, sans cesser de boire et de repaistre. —Dormirons-nous point cependant, dist Panurge ? —A vostre liberté, respondit ^Editue, car qui dort, il boit. » Vray Dieu ! quelle chère nous fismes 1 O le grand homme de bien ! PANTAGRUEL CHAPITRE VI Comment les oiseaux de l'Isle Sonnante sont alimentez. Çil<? ANTAGRUEL monstroit face triste, et sembloit non content du séjour cjua- tridien que nous terminoit iEditue : ce qu'aperceut ^Editue, et dit : « Sei- gneur, vous sçavez que sept jours devant et sept jours après breume jamais n'y a sur mer tempeste. C'est pour faveur que les éléments portent aux aicyones, oiseaux sacrez à Thetis, qui pour lors ponnent et esclouent leurs petits lez le rivage. Icy la mer se revenche de ce long calme, et par quatre jours ne cesse de tempester énormément quand quelques voyagiers y arrivent. La cause nous esti- mons afin que, ce temps durant, nécessité les contraigne y demourer, pour estre bien festoyez des revenus de sonnerie. Pourtant n'estimez temps icy ocieusement perdu : force forcée vous y retiendra, si ne voulez combattre Juno, Neptune, Doris, iEolus et tous les Vejoves; seulement délibérez vous de faire chère lie. » Après les premières bauffrures, frère Jehan de- mandoit à iEditue : « En ceste Isle vous n'avez que cage et oiseaux, ils ne labourent ne cultivent la terre, toute leur occupation est à gaudir, gazouiller et chanter. De quel pays vous vient ceste corne 4 26 LIVRE V, CHAPITRE VI d'abundance et copie de tant de bien et frians morceaulx? — De tout l'autre monde, respondit itditue, exceptez moy quelques contrées des régions aquilonnaires, lesquelles depuis certaines années ont meu la camerime. Chou, Ils s'en repentiront, don daine. Ils s'en repentiront, don don. « Beuvons, amis! Mais de quel pays estes-vous ? — DeTouraine, respondit Panurge. —Vrayement, dist ^ditue, vous ne fustesonques de mauvaise pie couvez, puisque vous estes de la benoiste Touraine. De Touraine tant et tant de biens annuellement nous viennent que nous fut dit un jour par gens du lieu, par cy passans, que le Duc de Touraine n'a en tout son revenu de quoy son saoul de lard manger, par l'excessive largesse que ses prédécesseurs ont fait à ces sacrosaincts oiseaux, pour icy de phaisans nous saouler, de perdriaux, de gelinotes, poulies d'Inde, gras chappons de Loudunois, venaison de toutes sortes, et toutes sortes de gibier. (( Beuvons, amis ! Voyez ceste perchée d'oiseaux, comment ils sont douillets et en bon poinct des rentes qui nous en viennent : aussi chantent-ils bien pour eux. Vous ne vistes onques rossignols mieux gringoter qu'ils font en plat, quand ils voyent ces deux bastons dorez... — C'est, dist frère Jean, feste à bastons... — Et quand je leur sonne ces grosses cloches que vous voyez pendues autour de PANTAGRUEL 2'J leurs cages. Beuvons, amis ! il fait certes huy beau boire, aussi fait-il tous les jours. Beuvons ! Je boy de bien bon cueur à vous , et soyez les tresbien venus. N'ayez peur que vin et vivres icy faillent, car, quand le Ciel seroit d'airin et la terre de fer, encores vivres ne nous fauldroient, fussent par sept, voire huit ans, plus long-temps que ne dura la famine en i£gypte. Beuvons ensemble par bon ac- cord en charité. — Diables, s'escria Panurge , tant vous avez d'aises en ce monde ! — En l'autre, respondit iEditue, en aurons nous bien d'avantage. Les Champs Eliziens ne nous manqueront pour le moins. Beuvons, amis; je boy à toy. — C'a esté, dy-je, esprit moult divin et parfait à vos premiers Siticines, avoir le moyen inventé par lequel vous avez ce que tous humains appetent naturellement, et à peu d'iceux, ou, à proprement parler, à nul est octroyé : c'est Paradis en ceste vie et en l'autre pareillement avoir. O gens heureux ! O semy-Dieux ! Pleust au Ciel qu'il m'avint ainsi ! » LIVRE V, CHAPITRE VII CHAPITRE VII Comment Panurge racompte à Maistre y^ditue l'Apologue du Koussin et de l'Asne. VOIR beu et bien repeu, y^ditue nous mena en une chambre bien garnie, bien tapissée, toute dorée. Là nous fist apporter mirobalans, brain de basme et zinzembre verd confit, force hypocras et vin délicieux, et nous invitoit par ces antidotes, comme par breuvage du fleuve de Lethé, mettre en oubly et nonchalance les fatigues qu'avions paty sus la marine; fist aussi porter vivres en abondance à nos navires qui surgeoient au port. Ainsi repo- sasmes par icelle nuict, mais je ne pouvois dormir, à cause du sempiternel brimballement des cloches. A minuict vEditue nous esveilla pour boire; luy mesme y beut le premier, disant : « Vous autres de l'autre monde dictes que ignorance est mère de tous maux, et dictes vray; mais toutesfois vous ne la bannissez mie de vos entendemens, et vivez en elle, avec elle, par elle. C'est pourquoy tant de maux vous meshaignent de jour en jour; tousjours vous plaignez , tousjours lamentez ; jamais n'estes assouvis, je le considère présentement. Car ignorance vous tient icy au lict liez, comme fut le Dieu PANTAGRUEL 29 des batailles par l'art de Vulcan , et n'entendez que le devoir vostre estoit d'espargner de vostre sommeil, point n'espargner les biens de ceste fameuse Isle. Vous debvriez avoir ja faict trois repas, et tenez cela de moy, que pour manger les vivres de l'Isle Sonnante se fault lever bien matin; les mangeant, ils multiplient; les espargnans, ils vont en diminution. Fauchez le pré en sa saison, l'herbe y reviendra plus drue et de meilleure emploicte; ne le fauschez point, en peu d'années il ne sera tapissé que de mousse. Beuvons, amis, beuvons trestous ; les plus maigres de nos oiseaux chantent maintenant tous à nous, nous boirons à eux s'il vous plaist. Beuvons, de grâce, vous n'en cracherez tantost que mieux. Beuvons une, deux, trois, neuf fois : non zelus, sed chantas. » Au poinct du jour pareillement nous esveilla pour manger souppes de prime. Depuis ne fîsmes qu'un repas, lequel dura tout le jour, et ne sçavois si c'estoit disner ou soupper, gouster ou regoubilloner. Seulement par forme d'esbat nous pourmenasmes quelques tours par l'Isle, pour veoir et ouille joyeux chant de ces benoists oiseaux. Au soir Panurge dit à ^Editue : « Seigneur, ne vous desplaise si je vous raconte une histoire joyeuse, laquelle advint au pays de Chastelleraudois depuis vingt et trois lunes. « Le pallefrenier d'un gentilhomme, au mois d'avril, pourmenoit à un matin ses grands chevaux 3o LIVRE V, CHAPITRE VII parmy les guerests; là rencontra une gaye bergère, laquelle, A l'ombre d'un buissonnet, Ses brebiettes gardoit, ensemble un asne et quelque chèvre. Devisant avec elle, luy persuada monter derrière luy en crouppe, visiter son escurie, et là faire un tronçon de bonne chère à la rustique. Durant leur propos et demeure, le cheval s'adressa à l'asne, et luy dist en l'aureille (car les bestes parlèrent toute icelle année en divers lieux) : « Povre et chetif baudet, j'ay de toy pitié « et compassion. Tu travailles journellement beau- « coup, je l'apperçois à l'usure de ton bas-cul: c'est « bien faict, puisque Dieu t'a créé pour le service « des humains; tu es baudet de bien. Mais n'estre « autrement torchonné, estrillé, phaleré et alimenté « que je te vois, cela me semble un peu tyrannique « et hors les metes de raison. Tu es tout herissonné, « tout hallebrené, tout lanterné, et ne manges icy « que joncs, espines et durs chardons. C'est pour- « quoy je te semonds, Baudet, ton petit pas avec « moy venir, et veoir comment nous autres, que « Nature a produits pour la guerre, sommes traittez « et nourris. Ce ne sera sans toy ressentir de mon « ordinaire. — Vrayement, respondit l'asne, j'iray « bien volontiers. Monsieur le Cheval. — Il y a, « dist le roussin, bien Monsieur le Roussin pour « toy. Baudet. — Pardonnez moy, respond l'asne. PANTAGRUEL 3l (( Monsieur le Roussin, ainsi sommes en nostre lance gage incorrects et mal apprins, nous autres villace geois et rustiques. A propos, je vous obeiray ce volontiers, et de loing vous suivray de paour des c( coups (j'en ai la peau toute contrepointée), ce puisque vous plaist me faire tant de bien et (( d'honneur. » « La bergère montée, l'asne suyvoit le cheval, en ferme délibération de bien repaistre advenans au logis. Le pallefrenier l'apperceut, et commanda aux garsons d'estable le traicter à la fourche et Tesrener à coups de baston. L'asne, entendant ce propos, se recommanda au Dieu Neptune et commençoit à escamper du lieu à grand erre, pensant en soy mesme et syllogisant : ce II dict bien aussi ee n'estre mon estât suivre les cours des gros sei- « gneurs; Nature ne m'a produit que pour l'aide ce des pauvres gens, Esope m'en avoit bien adverty ce par un sien apologue; ce a esté outrecuidance à (c moy; remède n'y a que d'escamper d'huy, je dis ce plustost que ne sont cuictes asperges. » Et l'asne au trot, à peds, à bonds, à ruades, Au gallot, à p«tarades. ee La bergère , voyant l'asne desloger, dist au pallefrenier qu'il estoit sien, et pria qu'il fust bien traité; autrement elle vouloit partir, sans plus avant entrer. Lors commanda le pallefrenier que plustost les chevaux n'eussent de huit jours avoine que l'asne 32 LIVRE V, CHAPITRE VII n'en eust tout son saoul. Le pis fut de le révoquer, car les garsons l'avoient beau flatter et l'appeler : « Truunc, truunc, Baudet, çà. — Je n'y vois pas, « disoit l'asne, je suis honteux. » Plus amiable- ment l'appelloient, plus rudement s'escarmouchoitil, et à saulx, à pétarades; ils y fussent encores, ne fust la bergère qui les advertit cribler avoine hault en l'air en l'appellant, ce que fut faict. Soudain l'asnc tourna visage, disant : « Avoine ! bien, adveniat, non « la forche, je ne dis, qui me dit, passe sans flux. » Ainsi à eux se rendit, chantant mélodieusement, comme vous sçavez qui faict bon ouir la voix et musique de ces bestes archadiques. « Arrivé qu'ail fut, on le mena en l'estable prés du grand cheval; fut frotté, torchonné, estrillé, li- tière fresche jusqu'au ventre, plain râtelier de foin, plaine mangeoire d'avoine, laquelle quand les garsons d'estable cribloient, il leur chauvoit des aureilles , leurs signifiant qu'il ne la mangeroit que trop sans cribler, et que tant d'honneur ne luy appartenoit. « Quand ils eurent bien repeu, le cheval interro- guoit l'asne, disant : « Et puis, pauvre Baudet, « comment t'en va? Que te semble de ce traite- « ment? Encores n'y voulois tu pas venir. Qu'en « dis-tu? — Par la figue, respondit l'asne, laquelle « un de nos ancestres mangeant, mourut Philemon a à force de rire, voicybasme. Monsieur le Roussin. « Mais quoy, ce n'est que demie chère. Baudouy- PANTAGRUEL 33 « nez vous rien céans, vous autres Messieurs les x( Chevaux? — Quel baudouynage me dis-tu, Bau- « det? demandoit le cheval; tes maies avives, Bau- « det! Me prens-tu pour un asne? — Ha, ha, <( respondit Tasne, je suis un peu dur pour appren- <( dre le langage courtisan des chevaux. Je demande : <( Roussinez-vous point céans, vous autres Messieurs « les Roussins ? — Parle bas, Baudet, dist le che- « val, car, si les garsons t'entendent, à grands coups « de fourche ils te pelauderont si dru qu'il ne te « prendra volonté de baudoujner. Nous n'osons « céans seulement roidir le bout, voire fust-ce pour « uriner, de peur des coups : du reste, aises comme <( rois. — Par l'aube du bas que je porte, dist l'asne, « je te renonce, et dis fy de ta litière, fy de ton « foin et fy de ton avoine ; vivent les chardons des « champs, puisqu'à plaisir on y roussine ! Manger « moins et tousjours roussiner son coup est ma de- « vise; de ce nous autres faisons foin et pitance. « O Monsieur le Roussin, mon amy, si tu nous « avois veu en foires, quand nous tenons nostre « chapitre provincial, comment nous baudouynonsà « guogo pendant que nos maistresses vendent leurs « oisons et poussins ! » Telle fut leur départie. J'ay dit. » A tant se teut Panurge, et plus mot ne sonnoit. Pantagruel l'admonestoit conclure le propos. Mais ^ditue respondit : « A bon entendeur ne faut qu'une paroUe. J'entends tresbien ce que par cest Rabelais. V, J 34 LIVRE V, CHAPITRE VII apologue de l'asne et du cheval voudriez dire et inférer, mais vous estes honteux. Sachez qu'icy n'y a rien pour vous, n'en parlez plus. — Si aj-je, dist Panurge, n'agueres icy veu une Abbegesse à blanc plumage, laquelle mieux vaudroit chevaucher que mener en main. Et si les autres sont dams oiseaux, elle me sembleroit dame oiselle , je dis cointe et jolie, bien valant un péché ou deux. Dieu me le pardoint parlant, je n'y pensois point en mal : le mal que j'y pense me puisse soudain advenir! » CHAPITRE VIII Comment nous fust monstre Papcgaut à grande difficulté. E tiers jour continua en festins etmes- mes banquets que les deux jours précédents, auquel jour Pantagruel re- queroit instamment veoir Papegaut; mais iEditue respondit qu'il ne se laissoit ainsi fa- cilement veoir. « Comment, dist Pantagruel , a-il l'armet de Pluton en teste, l'anneau de Gygés es griffes, ou un chameleon en sein, pour se rendre invisible au monde? — Non, respondit i£ditue, mais il par nature est à veoir un peu difficile. Je donneray toutesfoys ordre que le puissiez veoir si faire se peut. » Ce mot achevé, nous laissa au iieu grignotans. PANTAGRUEL 35 Un quart d'heure après, retourné, nous dist Pa- pegaut estre pour ceste heure visible, et nous mena en tapinois et silence droit à la cage en laquelle ilestoit acroué, accompagné de deux petits Cardingaux et de six gros et gras Evesgaux. Panurge curieusement considéra sa forme, ses gestes, son maintien; puis s'escria à haute voix, disant : « En mal an soit la beste ! il semble une duppe. — Parlez bas, dit iEditue, de par Dieu ; il a aureilles, comme sage- ment nota Michael de Matlscones. — Si a bien une duppe, dit Panurge. — Si une fois il vous entend ainsi blasphemans, vous estes perdus, bonnes gens. Voyez vous là dedans sa cage un bassin ? D'iceluy sortira foudre, tonnoirre, esclairs, diables et tempeste, par lesquels en un moment serez cent pieds sous terre abismez. — Mieux seroit, dit frère Jehan, boire et banqueter. » Panurge restoit en contemplation véhémente de Papegaut et de sa compagnie, quand il apperceut au dessouz de sa cage une chevêche. Adonc s'escria, disant : a Par la vertu Dieu, nous sommes icy bien pippez à plaines pippes, et mal equippez. Il y a, par Dieu, de la pipperie, fripperie et ripperie tant et plus en ce manoir. Regardez là ceste che- vêche ; nous sommes, par Dieu, assassinez. — Parlez bas, de par Dieu, dist i£ditue, ce n'est mie une chevêche; il est masle. c'est un noble chevecier. — Mais, dist Pantagruel, faictes nous icy quelque peu Papegaut chanter, afin qu'oyons son armonie. 36 LIVRE V, CHAPITRE VIII — Il ne chante, respondit ^Editue, qu'à ses jours, et ne mange qu'à ses heures. — Non fay-je, dit Panurge ; mais toutes les heures sont miennes. Allons doncques boire d'autant. — Vous, dit i£ditue, parlez à ceste heure correct : ainsi parlans jamais ne serez hérétique. Allons, j'en suis d'opi- nion. » Retournans à la beuverie, apperceusmes un vieil Evesgaux à teste verde, lequel estoit acroué, accom- pagné d'un soufflegan et de trois Onocrotales, oi- seaux joyeux, et ronfloient sous une feuillade. Prés luy estoit une jolie Abbegesse, laquelle joyeusement chantoit, et y prenions plaisir si grand que desirions, tous nos membres en aureilles convertis, rien ne perdre de son chant, et du tout, sans ailleurs estre distrait , y vaquer. Panurge dit : « Ceste belle Abbegesse se rompt la teste à force de chanter, et ce gros vilain Evesgaut ronfle ce pendant ; je le feray bien tantost chanter, de par le diable. » Lors sonna une cloche pendante sus sa cage; mais, quelque sonnerie qu'il fist, plus fort ronfloit Evesgaut, point ne chantoit. u Par Dieu, dist Panurge, vieille buze, par moyen autre bien chanter je vous feray. » Adonques print une grosse pierre, le voulant ferir par la moitié. Mais yEditue s'escria, disant : « Homme de bien, frappe, feris, tue et meurtris tous roys et princes du monde, en trahison, par venin ou autrement, quand tu voudras, déniche des cieux les anges, de tout auras pardon du Pape- PANTAGRUEL 87 gaut; à ces sacrez oiseaux ne touche, d'autant qu'aymes la vie, le profit, le bien, tant de toy que de tes parens et amis vifs et trespassez ; encores ceux qui d'eux après naistroient en seroient infor- tunez! Considère bien ce bassin. — Mieux doncques vaut, dit Panurge, boire d'autant et banqueter. — Il dit bien, monsieur Antitus, dist frère Jehan; cy voyans ces diables d'oiseaux, ne faisons que blas- phémer; vuydant vos bouteilles et pots, ne faisons que Dieu louer. Allons donques boire d'autant. O le beau mot ! » Le quatriesme jour, après boire (comme entendez), nous donna iEditue congé. Nous luy fismes présent d'un beau petit cousteau perguois, lequel il print plus à gré que ne fist Artaxerxes le voirre d'eaue froide que luy présenta un païsant, et nous remercia courtoisement; envoya en nos navires re- freschissement de toutes munitions; nous soubhaita bon voyage, et venir à sauvement de nos personnes et fin de nos entreprinses, et nous fist promettre et jurer par Jupiter Pierre que nosire retour seroitpar son territoire. Enfin nous dist : « Amis, vous notterez que par le monde y a beaucoup plus de couil- lons que d'hommes, et de ce vous souvienne. » 38 LIVRE V, CHAPITRE IX CHAPITRE IX Comment nous descendisnies en l'Isle des Ferremens. ous estans bien àpoinct sabourez l'es- tomach, eusmes vent en pouppe, et fust levé nostre grand artemon, dont advint qu'en moins de deux jours arri- vasmes en l'Isle des Ferremens, déserte et de nul habitée, et y veismes grand nombre d'arbres portans marroches, piochons, serfouettes, faux, faucilles, bêches, truelles, congnées, serpes, scies, doloueres, forces, scizeaux, tenailles, pelles, virolets et vibrequins. Autres portoient daguenets, poignards, sangdedez, ganivets, poinssons, espées, verduns, braquemarts, cimeterres, estocs, raillons et cousteaux. Quiconque en vouloit avoir ne falloit que crous1er l'arbre, soudain tomboient comme prunes; d'a- vantage, tombans en terre rencontroient une espèce d'herbe, laquelle on nommoit fourreau, et s'engai- noient là dedans. A la cheute se falloit bien garder qu'ils ne tombassent sur la teste, sur les pieds, ou autres parties du corps, car ils tomboient de poincte : c'estoit pour droit engainer, et eussent affollé la personne. Dessoubz ne sçay quels autres arbres, je vis certaines espèces d'herbes, lesquelles croissoient comme PANTAGRUEL 89 piques, lances, javelines, halebardes, vouges, pertuizanes, rançons, fourches, espieux, croissantes haut. Ainsi qu'elles touchoient à l'arbre , rencontroient leurs fers et allumelles, chascune competante à sa sorte. Les arbres supérieures ja les avoient apprestées à leur venue et croissance, comme vous apprestez les robes des petis enfans quand les vou-. lez desmailloter, afin que désormais n'abhorrez l'opinion de Platon, Anaxagoras et Democritus. Furent-ils petis philosophes? Ces arbres nous sembloient animaux terrestres, non en ce différentes des bestes qu'elles n'eussent cuir, graisse, chair, veines, artères, liguamens, nerfs, cartilages, adenes, os, mouelle, humeurs, matrices, cerveau et articulations congneues, car elles en ont, comme bien déduit Theophraste, mais en ce qu'elles ont la teste, c'est le tronc en bas; les cheveux, ce sont les racines en terre; et les pieds, ce sont les rameaux contremont, comme si un homme fesoit le chesne fourcheu. Et ainsi comme vous, Verollez, de loin à vos jambes ischiatiques, à vos omoplates, sentez la venue des pluyes, des vents, du serain, tout changement de temps, aussi à leurs racines, caudices, gommes, medulles, elles pressentent quelle sorte de baston des- souz elles croist et leur préparent fers et allumelles convenantes. Vray est qu'en toutes choses. Dieu excepté, advient quelquefois erreur. Nature mesme n'en est exempte quand elle produit choses monstrueuses et ^O LIVRE V, CHAPITRE IX animaux difformes. Pareillement en ces arbres je notay quelque faute, car une demye picque crois- sante hors en l'air souz ces arbres ferrementiportes, en touchant les rameaux, en lieu de fer, rencontra un balay : bien, ce sera pour ramonner les cheminées; une pertuizane rencontra des cizailles : tout est bon, ce sera pour oster les chenilles des jardins; une hampe de hallebarde rencontra le fer d'une faux, et sembloit hermaphrodite : c'est tout un, ce sera pour quelque faucheur. C'est belle chose croire en Dieu ! Nous retournans à nos navires, je vis derrière je ne sçay quel buysson je ne sçay quelles gens faisans je ne sçay quoy et je ne sçay comment, aguisans je ne sçay quels ferremens, qu'ils avoient je ne sçay où et ne sçay en quelle manière. CHAPITRE X Comment Pantagriicl arriva en l'Isle de Cassade. ELAissANS l'Isle des Ferremens, conti- 'nuasmes nostre chemin; le jour ensuyvant entrasmes en l'Isle de Cassade , vraye idée de Fontainebleau, car la terre y est si maigre que les os (ce sont rocs) luy persent la peau, areneuse, stérile, mal saine et mal plaisante. Là nous monstra nostre pillot deux petits rochers carrez à huit csgalles pointes en PANTAGRUEL 4I cube, lesquelles, à l'apparence de leur blancheur, me sembloient esire d'albastre, ou bien couvers de neige ; mais il les nous asseura estre d'osselets. En iceux disoit estre à six estages le manoir noir de vingt diables de hazard, tant redoutez en nos pays, desquels les plus grands bessons et accouplez il nommoit Séries^ les plus petits Ambezas, les autres moyens Quine, Quaderne, Ternej Double Deux; les autres escouUetez il nommoit Six et cinq, Six et quatre. Six et trois. Six et deux. Six et as. Cinq et quatre. Cinq et trois, et ainsi consécutivement. Lors je notay que peu de joueurs sont par le monde qui ne soient invocateurs de diables : car, jettans deux dez sur table , quand en dévotion ils s'escryent « Senes, mon amy », c'est le grand diable; « Ambezas, mon mignon », c'est le petit diable; « Quatre et deux, mes enfans », et ainsi des autres; ils invoquent les diables parleurs noms et surnoms. Et non seulement les invoquent, mais d'iceux se disent amis et familiers. Vray est que ces diables ne vien- nent tousjours à souhait sus l'instant, mais en ce sont -ils excusables : ils estoyent ailleurs, selon la dacte et priorité des invoquans , partant ne faut dire qu'ils n'ayent sens et oreilles. Ils en ont, je vous dy, belles. Puis nous dit qu'autour et à bord de ces rochers carrez plus a esté faict de brix, de naufrages, de pertes de vies et de biens, qu'autour de toutes les Syrtes, Caribdes, Siraines, Scylle, Strophades et 6 42 LIVRE V, CHAPITRE X goufres de toute la mer. Je le creus facilement, me recordant que jadis entre les sages Egyptiens Neptune estoit designé par le premier cube en lettres hierogliphiques, comme Apollo par As, Diana par Deux, Minerve par Sept, etc. Là aussi nous dist estre un flasque de Sang greal, chose divine et à peu de gens congnue. Panurge fist tant par belles prières avec les sin- dicqs du lieu qu'ils le nous monstrerent, mais ce fut avec plus de cérémonie et solennité plus grande trois fois qu'on ne monstre à Florence les Pandectes de Justinian, ne la Veronnique à Rome. Je ne vis onques tant de scendeaux, tant de flambeaux, de torches, de glimpes et d'agiots. Finalement, ce qui nous fut monstre estoit le visage d'un connin rosty. Là ne veismes autres choses mémorable, fors Bonnes Mine, femme de Mauvais Jeu, et les cocques des deux œufs jadis ponnus et esclos par Leda, desquels naquirent Castor et Polux, frères d'Helaine la belle. Les sindicqs nous en donnèrent une pièce pour du pain. Au départir achetasmesune botte de chapeaux et bonnets de Cassade, à la vente desquels je ne doute que peu ferons de profit. Je croy qu'à l'usage encores moins en feront ceux qui de nous les achèteront. PANTAGRUEL CHAPITRE XI Comment nous passasmes le Guichet, habite par Grippe-minaud, Archiduc des Chats-fourrez. E là passasmes Condemnation, qui est une autre isle toute déserte; passas- mes aussi le Guichet, auquel lieu Pantagruel ne voulut descendre, et fîst tresbien, car nous y fusmes faits prisonniers, et ar- restez de faict, par le commandement de Grippeminaud, Archiduc des Chats-fourrez, parce que quelqu'un de nostre bande voulut vendre à ,un ser- rargent des chapeaux de Cassade. Les Chats-fourrez sont bestes moult horribles et espouventables; ils mangent les petits enfans , et paissent sus des pierres de marbre. Advisez, Beuveurs, s'ils ne devroient bien estre camus. Ils ont le poil de la peau non hors sortant , mais au dedans caché, et portent pour leur symbole et devise, tous et chascun d'eux, une gibbeciere ouverte, mais non tous en une manière, car aucuns la portent attachée au col, autres en escharpe, autres sus le cul, autres sus la bedaine, autres sur le costé, et le tout par raison et mistere. Ont aussi les griphes tant fortes, longues et asserées, que rien ne leur eschappe depuis qu'une fois l'ont mis entre leurs serres. Et se couvrent les testes aucunefois de bonnets à quatre goutieresou braguettes, autres de bonnets à revers, 44 LIVRE V, CHAPITRE XI autres de mortiers, autres de caparassons mortifiez. Entrans en leur tapinaudiere, Nous dist un Gueux de l'Hostiere^ auquel avons donné demy teston : « Gens de bien, Dieu vous doint de leans bien tost en saul- veté sortir. Considérez bien le minois de ces vail- lans pilliers , arboutans de Justice grippe-minaudiere, et notez que, si vivez encore six olympiades et l'aage de deux chiens, vous verrez ces Chatsfourrez seigneurs de toute l'Europe et possesseurs pacifiques de tout le bien et domaine qui est en icelle, si en leurs hoirs, par divine punition, soubdain ne deperissoit le bien et revenu par eux injus- tement acquis; tenez-le d'un gueux de bien. « Parmy eux règne la Sexte-Essence, moyennant laquelle ils grippent tout, dévorent tout et conchient tout; ils pendent, ils bruslent, escartelent, décapitent, meurdrissent, emprisonnent, ruinent et minent tout sans discrétion de bien et de mal. Car parmy eux vice est vertu appelle, meschanceté est bonté surnommée, trahison a nom de feauté, larrecin est dict libéralité ; pillerie est leur devise, et par eux faicte est trouvée bonne de tous humains, ex- ceptez moy les hérétiques; et le tout font avec souveraine et irréfragable authorité. Pour signe de mon pronostic, adviserez que leans sont les mangeoires au dessus des rasteliers. De ce quelque jour vous souvienne. Et si jamais pestes au monde, fa- PANTAGRUEL 43 mine ou guerre, vorages, cateclismes, conflagrations, malheur, adviennent^ ne les attribuez, ne les referez aux conjunctions des planettes maléfiques, aux abus de la cour romaine ou tyrannie des roys et princes terriens, à l'imposture des caphars, hérétiques, faux prophètes, à la malignité des usuriers, faux monnoyeurs, rongneurs de testons, n'a l'igno- rance, impudence, imprudence des médecins, cirur- giens, apoticaires, n'a la perversité des femmes adultères, venefiques, infanticides ; attribuez-le tout à leur ruine indicible, incroiable, inestimable meschanceté , laquelle est continuellement forgée et exercée en l'officine des Chats-fourrez, et n'est au monde congnue non plus que la cabale des Juifs ; pourtant n'est elle détestée , corrigée et punie , comme seroit de raison. Mais, si elle est quelque jour mise en évidence et manifestée au peuple, il n'est et ne fut orateur tant éloquent qui par son art le retint, ne loy tant rigoureuse et drachonique qui par crainte de peine le gardast, ne magistrat tant puissant qui par force l'empeschast de les faire tous vifs là dedans leur rabouliere felonnement brusler. « Leurs enfans propres Chats-fourillons et autres parens les avoyent en horreur et abomination. C'est pourquoy, ainsi que Hannibal eut de son père Amilcar, souz solennelle et religieuse adjuration, commandement de persécuter les Romains tant qu'il vivroit, ainsi ay-je de feu mon père injonction 4b LIVRE V, CHAPITRE XI icy hors demeurer, attendant que là dedans tombe la fouldre du ciel et en cendre les réduise comme autres Titanes, prophanes et theomaches, puisque les humains tant et tant sont des cueurs endurciz que le mal parmy eux advenu, advenant et à venir, ne recordent, ne sentent, ne prevoyent, ou le sentens n'osent, ne veulent, ne peuvent les exterminer. — Qu'est-ce cela? dist Panurge ; ha! non, non, je n'y vois pas, par Dieu! Retournons, retournons, dis-je, de par Dieu ! Ce noble gueux m'a plus fort estonné Que si du ciel en automne eust tonné. » Retournans, trouvasmes la porte fermée, et nous fut dict que là facilement on y entroit comme en Averne, à issir restoit la difficulté , et que ne sorti- rions hors en manière que ce fust sans bulletin et descharge de l'assistance , par ceste seule raison qu'on ne s'en va pas des foyres comme du marché, et qu'avions les pieds pouldreux. Le pis fut quand passasmes le Guichet, car nous fusmes présentez pour avoir nostre bulletin et descharge devant un monstre le plus hideux que jamais fust descrist. On le nommoit Grippe-minaud. Je ne vous le sçaurois mieux comparer qu'à Chimère, ou à Sphinx et Cerberus, ou bien au simulachre d'Osiris, ainsi que le figuroyent les Egyptiens, par trois lestes ensemble joinctes, sçavoir est : d'un lyon rugient, d'un chien flattant et d'un loup baislant, entortillées d'un dra- PANTAGRUEL 47 gon soy mordant la queue, et de rayons scintillans à l'entour. Les mains avoit plaines de sang, les griphes comme de harpye, le museau à bec de corbin, les dens d'un sanglier quadrannier, les yeux flam- boyans comme une gueule d'enfer, tout couvert de mortiers entrelassez de pillons; seulement apparoissoyent les gryphes. Le siège d'iceluy, et de tous ses coUateraulx Chats-garaniers, estoit d'un long rattelier tout neuf, au dessus duquel, par forme de revers instablées, estoient mangeoires fort amples et belles, selon l'advertissement du Gueux. A l'endroit du siège principal estoit l'image d'une vieille femme tenant en main dextre un fourreau de faucille, en senestre une ballance, et portant bezicles au nez. Les coupes de la ballance estoient de deux gibbescieres veloutées, l'une pleine de billon et pendente , l'autre vuide et longue , eslevée au dessus du tresbuchet. Et suis d'opinion que c'estoit le pourtraict de Justice grippe-minaudiere , bien abhorrente de l'institution des antiques Thebains, qui erigeoyent les statues de leurs dicastes et juges, après leur mort, en or et argent, en marbre, selon leur mérite, toutes sans mains. Quand fusmes devant luy présentez, ne sçay quelle sorte de gens, tous vestus de gibbescieres et de sacs, à grands lambeaux d'escritures, nous firent sus une selette asseoir. Panurge disoit : « Gallefretiers, mes amis, je ne suis que trop bien ainsi debout, aussi bien elle est trop basse pour homme qui 48 LIVRE V, CHAPITRE XI a chausses neufves et court pourpoint. —Assoyezvous-là, respondirent-ils, et que plus on ne vous le die. La terre présentement s'ouvrira pour tous vifs vous engloutir si faillez à bien respondre. » CHAPITRE XII Comment par Grippe-minaud nous fut proposé un énigme. i^ UAND fusmes assis, Grippe-minaud, au millieu de ses Chats-fourrez, nous dist en parolle furieuse et enrouée : « Or çà, or çà, or çà. — A boire, à boire çà, » disoit Panurge entre sesdens. « Une bien jeune et toute blondelette Conceut un fils Etyopien sans père; Puis l'enfanta sans douleur la tendrette, Quoy qu'il sortist comme faict la vipère, L'ayant rongé en moût grand vitupère Tout l'un des flancs, pour son impatience ; Depuis passa mons et vaux en fiance, Par l'air volant, en terre cheminant, Tant qu'estonna l'amy de sapience, Qui l'estimoit estre humain animant. « Or çà , respons moy, dist Grippe-minaud, à cest énigme , et nous resoulz présentement que c'est, or çà. — Or de par Dieu, respondis-je, si j'avois Sphinx en ma maison, or de par Dieu, PANTAGRUEL 49 comme l'avoit Verres, un de vos précurseurs, or de par Dieu, resouldre pourrois l'énigme, or de par Dieu; mais certes je n'y estois mie, et suis, or de par Dieu, innocent du faict. — Or çà, dit Grippeminaud, par Styx, puis qu'autre chose ne veux dire, or çà, je te monstreray, or çà, que meilleur te seroit estre tombé entre les pattes de Lucifer, or çà, et de tous les diables, or çà, qu'entre nos griphes, or çà ; les vois-tu bien ? Or çà, malautru, nous allègues tu innocence, or çà, comme chose digne d'eschap- per nos tortures? Or çà, nos loix sont comme toille d'araignes, or çà: les simples mouscherons et petits papillons y sont prins, or çà ; les gros taons malfaisans les rompent, or çà, et passent à travers, or çà. Semblablement, nous ne cherchons les gros lar- rons et tyrans, or çà; ils sont de trop dure digestion, or çà, et nousaffolleroient, or çà; vous autres gentils innocens, or çà, y serez bien innocentez, or çà; le grand Diable, or çà, vous y chantera Messe , or çà . » Frère Jean, impatient de ce qu'avoit déduit Grippe-minaud : «Hau, Monsieur le Diable engipponné, comment veux-tu qu'il responde d'un cas lequel il ignore? Ne te contente-tu de vérité? — Or çà, dist Grippe-minaud, encores n'estoit de mon règne advenu, or çà , qu'icy personne sans premier estre interrogué parlast, or çà. Qui nous a deslié ce fol enragé icy? — Tu as menty, mastin, dist frère Jean sans les lèvres mouvoir. — Or çà, Rabelais. V. n 5o LIVRE V, CHAPITRE XII quand seras en rang de respondre, or çà, tu auras prou affaire, or çà, maraut. — Tu as menty, disoit frère Jean en silence. — Pense-tu estre en la forest de l'Académie, or çà, avec les ocieux veneurs et inquisiteurs de vérité, or çà? Nous avons bien icy autre chose à faire, or çà; icy on respond, je dis, or çà, or çà, catégoriquement, de ce que l'on ignore, or çà; on confesse avoir faict, or çà, ce qu'on ne fist onques, or çà; on proteste sçavoir ce que jamais on n'apprint, or çà; on faict prendre patience en enrageant, or çà; on plume l'oye sans la faire crier, or çà. Tu parles sans procuration, or. cà, je le voj bien, or çà, tes fortes fiebvres quartaines, or çà, qui te puissent espouser, or çà ! — Diables, s'escria frère Jean, Archidiables, Protodiables, Pantodiables, tu donques veux marier les moines, ho, hu, ho, hou! Je te prens pour hérétique. » PANTAGRUEL Ol CHAPITRE XIII Comment Panurge expose Venigme de Grippe-minaud. RIPPE-MINAUD, faisant semblant n'entendre ce propos, s'adresse à Panurge, disant : « Or çà, or çà, or çà, et toy, Guoguelu, n'y veux tu rien dire? — Révérend père en diable, respondit Panurge, or de par le diable là, je voy clerement que la peste est icy pour nous, or de par le diable là, veu qu'inno- cence n'y est point en seureté, et que le diable y chante messe, or de par le diable là. Je vous prie que pour tous je la paye, or de par le diable là, et nous laisse aller. Je n'en puis plus, or çà, de parle diable là. — Aller! dit Grippe-minaud; or çà, encores n'advint depuis trois cens ans en çà, or çà, que personne eschappast de céans sans y laisser du poil, or çà, ou de la peau pour le plus souvent, or çà. Car quoy? or çà, ce seroit à dire que par devant nous icy serois injustement convenu, or çà, et de par nous injustement traité, or çà; malheureux es-tu bien, or çà; mais encoresplus le seras, or çà, si ne responds à l'énigme proposé; or çà, que veutil dire, or çà? — C'est, or de par le diable là, respondit Panurge, un cosson noir né d'une febve blanche, or de par le diable là, par le trou qu'il avoit fait la 52 LIVRE V, CHAPITRE XIII rongeant, or de par le diable là, lequel aucunefois voile , aucunefois chemine en terre , or de par le diable là, dont fut estimé de Pythagoras, premier amateur de sapience, c'est en grec philosophe, or de par le diable là, avoir d'ailleurs par metempsichosie ame humaine receue, or de par le diable là. Si vous autres estiez hommes, or de parle diable là, après vostre maie mort, selon son opinion, vos âmes entreroient en corps de cossons, or de par le diable là, car en ceste vie vous rongez et mangez tout; en l'autre : Vous rongerez, comme vipères, Les costez propres de vos mères, or de par le diable là. — Cor Dieu, dit frère Jean, de bien bon cueur je souhaiterois que le trou de mon cul devienne febve, et autour soit de ces cossons mangé. » Panurge, ces motz achevez, jetta au milieu du parquet une grosse bource de cuir plaine d'escus au soleil. Au son de la bource commencèrent tous les Chais-fourrez jouer des griphes, comme si fus- sent violons démanchez , et tous s'escrierent à haulte voix, disans : « Ce sont les espices; le procès fut bien bon, bien friant et bien espicé. Ils sont gens de bien. — C'est or, dit Panurge, je dis escus au soleil. — La Cour, dist Grippe-minaud, l'en- tend, or bien, or bien, or bien. Allez, enfans, or bien, et passez outre, or bien; nous ne sommes PANTAGRUEL 53 tant diables, or bien, que sommes noirs, or bien, or bien, or bien. « Issans du guischet, fusmes conduits jusques au port par certains griphons de montagnes. Avant entrer en nos navires fusmes par iceux advertis que n'eussions à chemin prendre sans premier avoir faict presens seigneuriaux, tant à la Dame Grippe-minaude qu'à toutes les Chattes-fourrées, autrement avoient commission nous remener au guischet. « Bren ! respondit frère Jean ; nous icy à l'escart visiterons le fond de nos deniers, et donnerons à tous contentement. — Mais, dirent les griphons, n'oubliez le vin des pauvres diables. — Des pauvres diables, respondit frère Jean, jamais n'est en oubly le vin, mais est mémorial en tout pais et toutes saisons. » CHAPITRE XIV Comment les Chats-fourrez vivent de corruption. ES paroles n'estoient achevées quand frère Jean apperceut soixante et huict galleres et frégates arrivantes au port. Là soudain courut demander nouvelles , ensemble de quelle marchandise estoient les vais- seaux chargez. Vit que tous chargez estoient de venaison, levraux , chappons, palombes, cochons, chevreaux, vaneaux, poullets, canards, albrans. D4 LIVRE V, CHAPITRE XIV oisons et autres sortes de gibier. Parmy aussi apperceut quelques pièces de velours, satin et damas. Adoncques interrogua les voyagiers où et à qui ils portoient ces frians morceaux. Ils respondirent que c'estoit à Grippe-minaud, aux Chats-fourrez et Chattes-fourrées. « Comment, dit frère Jean, appellez-vous ces drogues-là? — Corruption, respondoient les voiagers. — Ils, doncques, dist frère Jean, de corruption vivent, en génération périront. Par la vertu Dieu, c'est cela; leurs pères mangèrent les bons gentilshommes qui par raison de leur estât s'exer- çoient à la vollerie et à la chasse pour plus estre en temps de guerre escorts et ja endurcis au travail. Car venation est comme un simulachre de bataille, et onques n'en mentit Xenophon , escrivant estre de la vénerie comme du cheval deTroye, yssus tous bons chefs de guerre. Je ne suis pas clerc, mais on me l'a dit, je le croy. Les âmes d'iceux, selon l'opi- nion de Grippe-minaud, après leur mort entrent en sangliers, cerfs, chevreaux, hérons, perdrix et autres tels animaux, lesquels avoient leur première vie durante tousjours aimez et cherchez. (( Ores ces Chats-fourrez, après avoir leurs chas- teaux, terres, dommaines, possessions, rentes et revenus destruit et dévoré, encores leurs cherchent-ils le sang et l'ame en l'autre vie. O le gueux de bien qui nous en donna advertissement à l'enseigne de la Mangeoire instablée au dessus du PANTAGRUEL 55 Râtelier ! — Voire mais, dit Panurge aux voyagers, on a faict crier de par le grand Roy que per- sonne n'eust, sur peine de la hart, prendre cerfs ne biches, sangliers ne chevreaux. — Il est vray, respondit un pour tous, mais le grand Roy est tant bon et tant bénin, ces Chats-fourrez sont tant enragez et affamez de sang chrestien, que moins de peur avons nous offenceans le grand Roy que d'espoir n'entretenans ces Chats-fourrez par telles corruptions; mesmement que demain le Grippeminaud marie une sienne Chatte-fourrée avec un gros Mitouard, Chat bien fourré. Au temps passé on les appelloit machefoins; mais, las ! ils n'en maschent plus. Nous de présent les nommons mache-levraux, mache-perdrix, mache-beccasses, mache-faisans, mache-poullets, mache-chevreaux, mache-connils, mache-cochons; d'autres viandes ne sont alimentez. — Bren, bren ! dist frère Jean, l'année prochaine on les nommera mache-estrons, machefoires, mache-merdes; me voulez-vous croire? — Ouy dei, respondit la brigade. — Faisons, dit-il, deux choses : premièrement, saisissons-nous de tout ce gibbier que voyez cy; aussi-bien suis-je fasché de saleures, elles m'eschauffent les hypocondres : j'enten le bien payant; secondement, retournons au guischet, et mettons à sac tous ces diables de Chats-fourrez. — Sans faute, dist Panurge, je n'y vais pas; je suis un peu couart de ma nature. » 56 LIVRE V, CHAPITRE XV CHAPITRE XV Comment frère Jean des Ento meures délibère mettre à sac les Chats-foiirrez. ERTUS de froc, dist frère Jean, quel .voyage icy faisons-nous? C'est un voyage de foirards, nous ne faisons 'que vessir, que peder , que fîanter , que ravasser, que rien faire. Cor dieu ! ce n'est pas mon naturel; si tousjours quelque acte héroïque ne fais, la nuictje ne peux dormir. Donques vous m'avez en compagnon prins pour en cestuy voyage messe chanter et confesser? Pasques de soles! le premier qui y viendra, il aura en pénitence soy comme las- che et meschant jecter au fond de la mer, en déduction des peines de purgatoire, je dis la teste la première. Qui a mis Hercules en bruit et renommée sempiternelle? N'esse que il, peregrinant par le monde, mettoit les peuples hors de tyrannie, hors d'erreur, de dangers et engaries ? Il mettoit à mort tous les brigans, tous les monstres, tous les serpens venimeux et bestes malfaisantes. Pourquoy ne suy- vons-nous son exemple, et comme il faisoit ne faisons-nous en toutes les contrées que passons? Il delîist les Stymphalides, l'Hydre de Lerne, Cacus, Antheus, les Centaures. Je ne suis pas clerc, les ders le disent. « A son imitation deffaisons et mettons à sac ces PANTAGRUEL Sj Chats-fourrez, ce sont tiercelets de diables, et délivrons ce pais de tyrannie. Je renie Mahon, si j'estois aussi fort et puissant qu'il estoit, je ne vous demanderois n'ayde ne conseil; çà, irons-nous? Je vous asseure que facilement nous les occirons, et ils l'endureront patiemment, je n'en doute, veu que de nous ont patiemment enduré des injures plus que dix truyes ne boyroient de lavailles. Allons ! — Des injures, dis-je, et deshonneur ils ne se soucient, pourveu qu'ils ayent escus en gibbeciere, voire fussent-ils tous breneux, et les defferions peult-estre, comme Hercules; mais il nous défaut le commandement d'Euristheus, et rien plus pour ceste heure, fors que je souhaitte parmy eux Jupiter soy pourmener deux petites heures en telle forme que jadis visita Semelé sa mye, mère première du bon Baccus. — Dieu, dist Panurge, nous a faict belle grâce d'eschapper de leurs griphes; je n'y retourne pas, quant est de moy; je me sens encore esmeu et altéré de l'ahan que j'y paty. Et y fus grandement fasché pour trois causes : la première, pource que j'y estois fasché; la seconde, pource que j'y estois fasché; la tierce, pource que j'y estois fasché. Escoute icy de ton aureille dextre, frère Jean, mon couillon gauche : toutes et quantes fois que voudras aller à tous les diables, devant le tribunal de Minos, iEacus, Rhadamanthus et Dis, je suis prest te faire compaignie indissoluble, avec toy passer 58 LIVRE V, CHAPITRE XV Acheron, Styx, Cocyte, boire plain godet du fleuve Lethé, payer pour nous deux à Charon le naute de sa barque; pour retourner au guischet, si de fortune veux retourner, saisis toy d'autre compaignie que de la mienne, je n'y retourneray pas; ce mot te soit une muraille d'arain. Si par force et violence ne suis mené, je n'en approcheray, tant que ceste vie je vivray, en plus que Calpe d'Abila. Ulisses retourna-il quérir son espée en la caverne du Cyclope ? Ma dia non; au guischet je n'ay rien oublié, je n'y retourneray pas. — O ! dist frère Jean, bon cueur et franc compagnon de mains paralitiques ! Mais parlons un peu par escot, docteur subtil : pourquoy est-ce, et qui vous meut leur jetter la bourse plaine d'escus? En avons-nous trop? N'eust-ce assez esté leur jecter quelques testons rongnez ? — Parce, respondit Panurge, qu'à tous périodes de propos Grippe-minaud ouvroit sa gibbeciere de velours, exclamant : « Or çà, or çà, or çà ! y> De là je prins conjecture comme pourrions francs et délivres eschapper, leur jectant : a Or là, or là de par Dieu, « or là de par tous les diables là ! » Cargibbesciere de velours n'est reliquaire de testons ne menue monnoye, c'est un receptable d'escus au soleil; entends-tu, frère Jean, mon petit couillaud ? Quant tu auras autant rousty comme j'ay, et esté, comme j'ay esté, rousty, tu parleras autre latin. Mais par leur injonction il nous convient outre passer. « PANTAGRUEL Les gallefretiers tousjours au port attendoient en expectation de quelque somme de deniers. Et, voyans que voulions faire voile, s'adressent à frère Jean, l'advertissant qu'outre n'eust à passer sans paier le vin des appariteurs, selon la taxation des espices faictes. « Et Sainct Hurluburlu ! dist frère Jean, estes-vous encores icy, griphons de tous les diables? Ne suis-je icy assez fasché sans m'importuner davantage? Le cordieu, vous aurez vostre vin à ceste heure, je vous le promets seurement. i> Lors , desgainant son bracquemard , sortit hors la navire, en délibération de felonnement les occire; mais ils gagnèrent le grand gallot , et plus ne les aperceusmes. Non pourtant feusmes nous hors de fascherie_, car aucuns de nos mariniers, par congé de Pantagruel, le temps pendant qu'estions devant Grippeminaud, s'estoient retirez en une hostellerie prés le havre pour banqueter et soy quelque peu de temps refraichir. Je ne sçay s'ils avoient bien ou non payé Tescot; si est-ce qu'une vieille hostesse, voyant frère Jean en terre, luy faisoit grande complainte, présent un serrargent gendre d'un des Chats-fourrez et deux recors de tesmoings. Frère Jean, impatient de leurs discours eî allégations, demanda : « Gallefretiers, mes amis, voulez- vous dire en somme que nos matelots ne sont gens de bien? Je maintien le contraire, par justice je le vous prouveray ; c'est ce maistre bracquemard icy, » 6o LIVRE V, CHAPITRE XV Ce disant, s'escrimoit de son biacquemard. Les païsans se meirent en fuite au trot : restoit seule- ment la vieille, laquelle protestoit à frère Jean que ces matelots estoient gens de bien ; de ce se complaignoit qu'ils n'avoient rien payé du lict auquel après disner ils avoient reposé, et pour le lict de- mandoit cinq sols tournois. « Vrayement, respondit frère Jean, c'est bon marché ; ils sont ingrats, et n'en auront tousjours à tel prix; je le payeray volontiers, mais je le voudrois bien voir. » La vieille le mena au logis et luy montra le lict, et, l'ayant loué en toutes ses qualitez, dist qu'elle ne faisoit de l'encherie si en demandoit cinq sols. Frère Jean luy bailla cinq sols, puis avec son brac- quemard fendit la coytte et coissin en deux, et par les fenestres mettoit la plume au vent, quant la vieille descendit criant à l'aide et au meurtre, en s'amusant à recuillir sa plume. Frère Jean, de ce ne se souciant, emporta la couverture, le mathelats et les deux linceux en nostre nef, sans estre veu de personne, car l'air estoit obscurcy de plume comme de neige, et les donna es matelots. Puis dist à Pantagruel là les licts estre à beaucoup meilleur marché qu'en Chinonnois, quoy qu'y eussions les célèbres oyes de Pautilé, car pour le lict la vieille ne luy avoit demandé que cinq douzains, lequel en Chinonnois ne vaudroit moins de douze francs. Si tost que frère Jean et les autres de la compagnie furent dans la navire, Pantagruel fist voile. PANTAGRUEL 6l Mais il s'esleva un siroch si véhément qu'ils perdirent routte, et, quasi reprenant les erres du pays des Chats-fourrez, ils entrèrent en un grand gouffre, duquel la mer estant fort haute et terrible , un mousse qui estoit au haut du trinquet cria qu'il voyoit encore les fascheuses demeures de Grippeminaud , dont Panurge, forcené de peur, s'escrioit : « Patron , mon ami , maugré les vents et les vagues, tourne bride. O mon ami, ne retournons point en ce meschant pays, où j'ay laissé ma bourse ! » Ainsi le vent les porta prés d'une isle à laquelle toutefois ils n'osèrent aborder de prime face, et entrèrent à bien un mille de là, prés de grands rochers. CHAPITRE XVI Comment Pantagruel arriva en l'isle des Apedeftes à longs doigts et mains crochues, et des terribles aventures et monstres quil y veit. I tost que les ancres furent jectées et le vaisseau asseuré, l'on descendit l'es- ^quif. Après que le bon Pantagruel eut ait les prières et remercié le Seigneur de l'avoir sauvé de si grand danger, il entra et toute sa compagnie dans l'esquif pour prendre terre, ce qui leur fut fort aisé, car, la mer estant calme 02 LIVRE V, CHAPITRE XVI et les ventz baissez, en peu de temps ils furent aux rochiers. Comme ils eurent prins terre, Epistemon, qui admiroitl'assiete du lieu et l'estrangeié des rochiers, advisa quelques habitans dudict pajs. Le premier à qui il s'adressa estoit vestu d'une robbe gocourte, de couleur de Roy, avoit le pourpoinct de demyostade à bas de manches de satin , et le haut estoit de chamois, le bonnet à la coquarde, homme d'as- sez bonne façon, et, comme depuis nous sceumes, il avoit nom Gaingne-beaucoup. Epistemon luy demanda comme s'appelloyent ces rochers et vallées si estranges. Gaingne-beaucoup luy dist que le pays des rochiers estoit une colonie tirée du pays de Procuration, et l'appelloient les Cahiers, et qu'au delà des rochiers, ayant passé un petit guay, nous trouverions l'isle des Apedeftes. « Vertu de Extravagantes ! dist frère Jean , et vous aultres, gens de bien, de quoy vivez-vous icy ? Sçaurions nous boire en vostre voirre ? Car je ne vous voy aucuns outils que parchemins, cornets et plumes. — Nous ne vivons, respondit Gaingne-beaucoup, que de cela aussi, car il faut que tous ceux qui ont affaire en l'isle passent par nos mains. — Pourquoy ? dit Panurge. Estes-vous barbiers, qu'il faut qu'ils soient testonnez? — Ouy, dit Gaingne-beaucoup, quant aux testons de la bourse. — Par Dieu, dist Panurge, vous n'aurez de moy denier ny maille; PANTAGRUEL 63 mais je vous prie, beau Sire, menez-nous à ces Apedeftes, car nous venons du pays des Sçavans, où je n'ay gueres gaingné. » En devisant, ils arrivèrent en l'isle des Apedeftes, car l'eau fut tantost passée. Pantagruel fut en grande admiration de la structure de la demeure et habitation des gens du pays, car ils demeurent en un grand pressouer, auquel on monte prés de cin- quante degrez, et avant que d'entrer au maistre pressouer, car leans y a des petits, grands, secrets, moyens, et de toutes sortes, vous passez par un grand peristile, où vous voyez en paysaige les ruines presque de tout le monde, tant de potences de grans larrons, tant de gibets, de questions, que cela nous feit peur. Voyant Gaingne-beaucoup que Pantagruel s'amusoit à cela : « Monsieur, dit-il, allons plus avant, cecy n'est rien. — Comment, dit frère Jean, ce n'est rien ? Par l'ame de ma bra- guette eschauffée, Panurge et moy tremblons de belle faim. J'aymerois mieux boire que veoir ces ruines ici, — Venez », dist Gaingne-beaucoup. Lors nous mena à un petit pressouer qui estoit caché sus le derrière, que l'on appelloit, en lan- guaige de Vïsle, Pithies. Là ne demandez pas si maistre Jean se traicta, et Panurge, car saulcissons de Millan, coqs d'Inde, chappons, autardes, malvoisie et toutes bonnes viandes estoient prestes et fort bien accoustrées. Un petit bouteillier, voyant 64 LIVRE V, CHAPITRE XVI que frère Jean avoit donné une œillade amoureuse sus une bouteille qui estoit prés d'un buffet, séparée de la trouppe bouteillique , dist à Pantagruel : « Monsieur, je voy que l'un de vos gens faict l'a- mour à cette bouteille ; je vous supplie qu'il n'y soit touché, car c'est pour Messieurs. —Comment ! dist Panurge, il y a donc des Messieurs céans? L'on y vendange, à ce que je voy. » Alors Gaingnebeaucoup nous feit monter par un petit degré ca- ché en une chambre, par laquelle il nous monstra les Messieurs qui estoyent dans le grand pressouer, auquel il nous dit qu'il n'estoit licite à homme d'y entrer sans congé, mais que nous les verrions bien par ce petit goulet de fenestre sans qu'ils nous vissent. Quand nous y fusmes, nous advisasmes dans un grand pressouer vingt ou vingt cinq gros pendars à l'entourd'un grand bourreau tout habillé de verd, qui s'entreregardoyent, ayans les mains longues comme jambes de grue, et les ongles de deux pieds pour le moins, car il leur est défendu de lesrongner jamais, de sorte qu'ils leur deviennent croches comme rançons ou rivereaux; et sur l'heure fut amenée une grosse grappe de vignes qu'on ven- dange en ce pays-là, du plant de VExtraordinaire, qui souvent pend à eschalats. Si tost que la grappe fut là, ils la meirent au pressouer, et n'y eut grain dont pas un ne presseurast de l'huyle d'or, tant que la pauvre grappe fut rapportée si seiche PANTAGRUEL 65 et espluchée qu'il n'y avoit plus jus ne liqueur du monde. Or nous comptoit Gaingne-beaucoup qu'ils n'ont pas souvent ces grosses-là, mais qu'ils en ont tousjours d'autres sus lepressouer. « Mais, mon compère, dist Panurge, en ont-ils de beaucoup de plants ? — Oui, dit Gaingne-beaucoup ; voyez-vous bien ceste-là petite que vous voyez qui s'en va remettre au pres- souer? C'est celle du plant des Décimes; ils en ti- rèrent desja l'aultre jour jusques au pressurage, mais l'huile sentoit le coffre au prestre, et Messieurs n'y trouvèrent pas grands appigrets. — Pourquoy donc, dist Pantagruel, la remettent-ils aupressouer? — Pour veoir, dit Gaingne-beaucoup, s'il y a poinct quelque omission de jus ou recepte dedans le marc. — Et, vertu Dieu, dit frère Jean, appellez- vous ces gens-là ignorans? Comment diable! ils tireroient de l'huile d'un mur. —Aussi font-ils, dist Gaingne-beaucoup, car souvent ils mettent au pres- souer des chasteaulx, des parcs, des forests, et de tout en tirent l'or potable. — Vous voulez dire portable, dit Epistemon. — Je dy potable, dist Gaingne-beaucoup, car l'on en boit céans maintes bouteilles que l'on ne bevroit pas. Il y en a de tant de plants que l'on n'en sçait le nombre. Passez jusques icy, et voyez dans ce courtil : en voila plus de mille qui n'attendent que l'heure d'estre pressurez; en voyla du plant gênerai, voyla du particulier, des Fortifications, des Emprunts, des Dons, des Rabelais. V. o 66 LIVRE V, CHAPITRE XVI Casuels, des Domaines, des Menus Plaisirs, des Postes, des Offrandes, de la Maison. — Et qui est ceste grosse-là, à qui toutes ces petites sont à l'en- viron? — C'est, dit Gaingne-beaucoup, de VEspargne, qui est le meilleur plant de tout ce pays; quand on en pressure de ce plant, six mois après il n'y a pas un de ces Messieurs qui ne s'en sente, n Quand ces Messieurs furent levez, Pantagruel pria Gaingne-beaucoup qu'il nous menast en ce grand pressouer, ce qu'il feit volontiers. Si tost que fusmes entrez , Epistemon , qui entendoit toutes langues, commença à monstrer à Pantagruel les devises du pressouer, qui estoit grand et beau, faict, à ce que nous dit Gaingne-beaucoup, du bois de la Croix, car sur chacun ustencile estoyent escripts les noms de chacune chose en langue du pays.Lavizdu pressouer s'appelloit recepfc ; la met, despense; la croue, estât; le tesson, deniers comptez et non receus; les fusls, souffrance; les belliers, radietur;\es jumelles, recuperetiir ; les cuves, plus valleur; les ansées, rooles; les fouUouaires, acquits; les hottes, validation; les portoueres, ordonnance vallable; les seilles, le pouvoir; l'entonnouer, le quittus. « Par la Royne des Andouilles, dist Panurge, toutes les hierogliphiques d'Egypte n'approchèrent jamais de ce jargon; que diable, ces mots-là ren- contrent de picques comme crottes de chèvre. Mais pourquoy, mon compère, mon amy, appelle- PANTAGRUEL 6y on ces gens icy ignorans ? — Parce, dist Gaingnebeaucoup, qu'ils ne sont et ne doivent nullement estre clercs, et que céans par leur ordonnance tout se doibt manier par ignorance, et n'y doibt avoir raison, sinon que Messieurs l'ont dict, Messieurs le veulent y Messieurs l'ont ordonné. — Par le vray Dieu, dist Pantagruel, puisqu'ils gaingnent tant aux grappes, le serment leur peut beaucoup valloir. — En doubtez-vous? dist Gaingne-beaucoup, il n'est mois qu'ils n'en ayent ; ce n'est pas comme en vos pays, où le serment ne vous vaut rien qu'une fois l'année. » De là, pour nous mener par mille petits pressouers, en sortant nous advisasmes un autre petit bourreau, à l'entour duquel estoient quatre ou cinq des Ignorants crasseux, choleres comme asnes à qui l'on attache une fusée aux fesses, qui sur un petit pressouer qu'ils avoient là repassoyent encores le marc des grappes après les autres ; l'on les appelloit, en langage du pays, Courracteurs. « Ce sont les plus rébarbatifs villains, à les veoir, dist frère Jean, que j'aye point apperceu. » De ce grand pressouer nous passasmes par infinis petits pressouers tous plains de vendangeurs qui espluchent les grains avecques des ferremens qu'ils appellent articles de Compte, et fînablement arrivasmes en une basse salle où nous veismes un grand dogue à deux testes de chien, ventre de loup, griffé comme un diable de Lamballe, qui estoit là nourry de laict d'amendes, et estoit ainsi délicatement par l'ordon- 68 LIVRE V, CHAPITRE XVI nance de Messieurs traicté, parce qu'il n'y avoit celuy à qui il ne valust bien la rente d'une bonne métairie ; ils l'appelloient, en langue d'Ignorance, Dupple. Sa mère estoit auprès, qui estoit de pareil poil et forme, hormis qu'elle avoit quatre testes, deux masles et deux femelles, et elle avoit nom Quadruple, laquelle estoit la plus furieuse beste de leans et la plus dangereuse, après sa grand'mere, que nous veismes enfermée en un cachot, qu'ils appelloyent Omission de recepte. Frère Jean, qui avoit tousjours vingt aulnes de boyaux vuides pour avaller une saulgrenée d'advocats, se commençant à fascher, pria Pantagruel de penser du disner, et de mener avecques luy Gaingne-beaucoup, de sorte qu'en sortant de leans par la porte de derrière, nous rencontrasmes un vieil homme enchaisné, demy ignorant, demy sçavant, comme un androgyne de diable, qui estoit de lu- nettes caparassonné comme une tortue d'escailles, et ne vivoit que d'une viande qu'ils appellent en leur patois Appellations. Le voyant, Pantagruel demanda à Gaingne-beaucoup de quelle race estoit ce Protenotaire, et comment il s'appeloit. Gaingne-beaucoup nous compta comme de toute ancienneté il estoit leans, à grand regret, de Messieurs enchaisné, qui le faisoyent presque mourir de faim, et s'appelloit Kevisit. « Par les saincis couillons du Pape, dit frère Jean, je ne m'esbahis pas si Messieurs les Ignorans font grand PANTAGRUEL 69 cas de ce papelard là. Par Dieu, il m'est advis, amy Panurge, si tu y regardes bien, qu'il a le minois de Grippe-minaud ; ceux-cy, tous ignorans qu'ils sont, en savent autant que les autres. Je le renvoyerois bien d'oii il est venu à grans coups d'anguillade. — Par mes lunettes orientales, dist Panurge, frère Jean, mon amy, tu as raison, car, à veoir la trogne de ce faux villain Kevisit, il est encores plus ignorant et meschant que ces povres Ignorans icy, qui grappent au moins mal qu'ils peuvent, sans longs procez , et qui en trois petits mots vendangent le clos sans tant d'interlocutoires ny decrotoires, dont ces Chatz-fourrez en sont bien faschez. » CHAPITRE XVII Comment nous passasmes Outre^ et comment Panurge y faillit d'estre tué. us l'instant nous prinsmes la routte d'Outre, et contasmes nos adventures f à Pantagruel, qui en eut commisération bien grande et en fist quelques élégies par passe-temps. Là arrivez, nous refraischis- mes un peu, et puisasmes eau fraische, prinsmes aussi du bois pour nos munitions. Et nous sembloient les gens du pays, à leur phisionomie, bons compagnons et de bonne chère. Us estoient tous oultrés, et tous pedoient de qO LIVRE V, CHAPITRE XVII graisse ; et apperceusmes , ce que n'avois encores veus en païs autre, qu'ils deschiquetoient leur peau pour y faire bouffer la graisse , ne plus ne moins que les sallebrenaux de ma patrie descouppent le hault de leurs chaussespoury faire bouffer le taffetas. Et disoient ce ne faire pour gloire et ostentation, mais autrement ne pouvoient en leur peau. Ce faisant aussi plus soudain devenoient grands, comme les jardiniers incisent la peau des jeunes arbres pour plustost les faire croistre. Prés le havre estoit un cabaret , beau et magnifique en extérieure apparence, auquel accourir voyans nombre grand de peuple Outré , de tous sexes, toutes aages et tous estats, pensions que là fut quelque notable festin et banquet. Mais nous fut dit qu'ils estoient invitez aux crevailles de Thoste, et y alloient en diligence proches, parenz et alliez. N'entendans ce gergon, et estimans qu'en icelluy pays festin on nommast crevailles, comme deçà nous appelions enfiansailles, espousailles, velenailles, tondailles, mestivailles, fusmes advertis que l'hoste en son temps avoit esté bon raillard, grand grignoteur, beau mangeur de souppes lionnoises, notable compteur de horloge, éternellement disnant comme l'hoste de Rouillac , et, ayant ja par dix ans pedé graisse en abondance, estoit venu en ses crevailles, et, selon l'usaige du pays, finoit ses jours en crevant, plus ne pouvant le perytoine et peau par tant d'années deschiquetée clorre et retenir ses trippes PANTAGRUEL 7 qu'elles ne effondrassent par dehors, comme d'un tonneau deffoncé. a Et quoy, dist Panurge, bonnes gens, ne luy sauriez vous bien à poinct, avecques bonnes grosses sangles ou bons gros cercles de cormier, voire de fer, si besoin est, le ventre relier? Ainsi lié ne jetteroit si aisément ses fons hors, et si tost ne creveroit. » Ceste parolle n'estcit achevée, quant nous entendismes en l'air un son haut et strident, comme si quelque gros chesne esclatoit en deux pièces. Lors fut dit par les voisins que ses crevailles estoient faictes, et que cestuy esclat estoit le ped de la mort. Là me souvint du vénérable abbé de Castilliers, celuy qui ne daignoit biscoter ses chambrières nisi in PontificaUbuSj lequel, importuné de ses parens et amis de resigner sur ses vieux jours son abbaye, dist et protesta que point ne se despouilleroit devant soy coucher, et que le dernier ped que feroit sa paternité seroit un ped d'abbé. LIVRE V, CHAPITRE XVIII CHAPITRE XVIII Comment nostre natif fut encarrée, et feusmes aidez d'aucuns voyagiers qui tenaient de la Quinte. YANS serpé nos ancres et gumenes, feismes voile au doux zephyre. Environ 2 22 miles se leva un furieux turbillon de vens divers, autour duquel avec le trinquet etboulingues quelque peu temporisasmes, pour seulement n'estre dicts mal obeïssans au pilot, lequel nous asseuroit , veue la douceur d'iceux vens , veu aussi leur plaisant combat , ensemble la sérénité de l'air et tranquilité du courant, n'estre ny en espoir de grand bien , ny en crainte de grand mal , partant à propos nous estre la sentence du philosophe qui commandoit soustenir et abstenir, c'est à dire temporiser. Tant toutesfoys dura ce turbillon qu'à nostre re- queste, importuné, le pilot essaya le rompre et sui- vre nostre routte première. Defaict, levant le grand artemon, et à droitte calamité du boussole dressant le gouvernail, rompit, moyennant un rude cole sur- venant, le turbillon susdict. Mais ce feut, en pareil desconfort, comme si, evitans Charybde , feussions tombez en Scylle. Car à deux miles du lieu feurent nos naufs encarrées par-my les arènes, telles que sont les ratz Sainct Mahieu. PANTAGRUEL y3 Toute nostre chorme grandement se contristoit, et force vent à travers lesmejanes; mais frère Jean onques ne s'en donna melancholie, ains consoloit maintenant l'un, maintenant l'autre, par douces parolles, leur remonstrant que de brief aurions secours du Ciel , et qu'il avoit veu Castor sus le bout des antennes. « Plust à Dieu , dist Panurge , estre à ceste heure à terre, et rien plus, et que chascun de vous autres, qui tant aimez la marine, eussiez deux cens mille escus : je vous mettrois un veau en mue, et refraischirois un cent de fagots pour vostre retour. Allez, je consens jamais ne me marier: faictes seu- lement que je sois mis en terre, et que j'aye cheval pour m'en retourner, de valet je me passeray bien. Je ne suis jamais si bien traité que quand je suis sans valet. Plante jamais n'en menoit, disant le nombre de nos croix, c'est à dire afflictions, ennuis, fascheries, estre selon le nombre de nos valets, voire fussent-ils sans langue, qui est la partie plus dangereuse et maie qui soit à un valet, et pour laquelle seule furent inventées les tortures, questions et géhennes sur les valets, ailleurs non; combien que les cotteurs de droict, en ce temps, hors ce royaume, le ayent tiré à conséquence alogique, c'est à dire desraisonnable. » En icelle heure vint vers nous droit aborder une navire chargée de tabourins, en laquelle je recognu quelques passagers de bonne maison, entre autres Henry Cotiral, compaignon vieux, lequel à sa 74 LIVRE V, CHAPITRE XVIII ceinture un grand viet-daze portoit, comme les femmes portent patenostres , et en main senestre tenoit un gros, gras, vieux et salle bonnet d'un taigneux ; en sa dextre tenoit un gros trou de chou. De prime face qu'il me recognut, s'escria de joye, et me dist : « En aj-je? Voyez-ci, monstrant le viet-daze, le vray Algamana : cestuy bonnet doctoral est nostre unique Elixio; et cecy, monstrant le trou de chou, c'est Lunaria major. Nous la ferons à vostre retour. — Mais, di-je, d'où venez ? où allez? qu'apportez ? avez senty la marine ? » Il luy res- pond : « De la Quinte ; en Touiaine ; alchymie ; jusques au cul. — Et quels gens, di-je, avez là avec vous sus le tillac? —Chantres, respondit-il, musiciens, poëtes, astrologues, rimasseurs, geomantiens, alchimistes, horlogiers; tous tiennent de la Quinte, ils en ont lettres d'avertissement belles et amples. » Il n'eut achevé ce mot, quand Panurge, indigné et fasché, dist : « Vous donques qui faictes tout, jusques au beau temps et petis enfans, pourquoy icy ne prenez le cap, et sans delay en plain courant nous révo- quez ? — J'y allois, dist Henry Coliral ; à ceste heure, à ce moment, présentement serez hors du fond. » Lors feit deffoncer 7532810 gros tabourins d'un costé, cestuy costé dressa vers le gaillardet, et estroitement lièrent en tous les endroits les gumenes, print nostre cap en pouppe et l'attacha aux PANTAGRUEL 75 bitons. Puis en premier hourt nous serpa des arènes avec facilité grande, et non sans esbattement, car le son des tabourins, adjoint le doux murmur du gravier et le celeusme de la chorme, nous rendoient harmonie peu moindre que celle des astres rotans, laquelle dit Platon avoir par quelques nuicts ouye dormant. Nous, abhorrans d'estre envers eux ingrats pour ce bienfait reputez, leurs départions de nos andouilles, amplissions leurs tabourins de saucisses, et tirions sur le tillac soixante et deux aires de vin, quand deux grans physeteres impétueusement abor- dèrent leur nauf, et leur jetterent dedans plus d'eau que n'en contient la Vienne depuis Chinon jusques à Saulmur, et en emplirent tous leurs tabourins, et mouillèrent toutes leurs antennes, et leurs baignoient les chausses par le collet. Ce que voyant Panurge, entra en joye tant excessifve, et tant exerça sa râtelle, qu'il en eut la colique plus de deux heures. « Je leurvoulois, dit-il, donner leur vin, mais ils ont eu leur eau bien à propos. D'eaue douce ils n'ont cure, et ne s'en servent qu'à laveries mains. De bourach leur servira ceste belle eau sallée, de nitre et sel ammoniac, en la cuisine de Geber. » Autre propos ne nous fut loisible avec eux tenir, le tourbillon premier nous tollissant liberté de timon. Et nous pria le pilot que laississions d'orenavant la mer nous guider, sans d'autre chose nous empescher que de faire chère lie; et pour l'heure yO LIVRE V, CHAPITRE XVIII nous convenoit costoyer cestuy turbillon et obtempérer au courant, si sans danger voulions au royaume de la Qiiinte parvenir. CHAPITRE XIX Comment nous arrivasmes au Koyaurnc de la QuinteEssence, nommé Entclechie. YANS prudemment coustoyé le turbillon par l'espace d'un demy jour, au troi- sième suivant nous sembla Tair plus serain que de coustume, et en bon sauvement descendismes au port de Mateotechnie, peu distant du palais de la Quinte-Essence. Descendans au port, trouvasmes en barbe grand nombre d'archiers et gens de guerre, lesquels gardoient l'ar- senac; de prime arrivée ils nous feisrent quasi peur, car ils nous feisrent à tous laisser nos armes, et roguement nous interroguerent, disant : « Compères, de quels pais est la venue? — Cousins, respondit Panurge, nous sommes Tourengeaux. Ores venons de France, convoiteux de faire révérence à la Dame Quinte Essence, et visiter ce trescelebre royaume d'Entelechie. — Que dites- vous ? interroguent-ils. Dites-vous Entelechie, ou Endelechie ? — Beaux-cousins, respondit Panurge, nous sommes gens simples et idiots; excusez la rusticité de nostre langage, car au demourant les PANTAGRUEL 77 cœurs sont francs et loyaux. — Sans cause, direntils, ne vous avons sus ce différent interrogez, car grand nombre d'autres ont icy passé de vostre païs de Touraine, lesquels nous sembloient bons lour- daux, et parloient correct; mais d'autre païs sont icy venus ne sçavons quels outrecuidez, fiers comme Escossois, qui contre nous à l'entrée vouloient obs- tinément contester; ils ont esté bien frottez, quoy qu'ils monstrassent visaige rubarbatif. « En vostre monde avez-vous si grande superfluité de temps que ne sçavez en quoy l'employer, fors ainsi de nostre Dame Royne parler, disputer et impudentement escrire? Il estoit bien besoin que Ciceron abandonnast sa Republique pour s'en empescher, et Diogenes Laërtius, et Theodorus Gaza, et Argyropile, et Bessarion, et Politian, et Budé, et Lascaris, et tous les diables de sages fols, le nombre desquels n'estoit assez grand s'il n'eust esté recentement accreu par Scaliger, Bigot, Chambrier, François Fleury, et ne sçay quels autres tels jeunes haires esmouchetez. Leur maie angine, qui leur suffocast le gorgeron avec l'epi- glotide ! Nous les... — Mais quoy diantre ! ils flattent les diables, disoit Panurge entre les dents. — Vous icy n'estes venus pour en leur folie les soustenir, et de ce n'avez procuration : plus aussi d'iceulx ne parlerons. « Aristoteles, prime homme et paragon de toute philosophie, feut parrain de nostre Dame Royne ; ^8 LIVRE V, CHAPITRE XIX il tresbien et proprement la nomma Entelechie. Entelechie est son vray nom; s'aille chier qui au- trement la nomme ! Qui autrement la nomme erre, par tout le Ciel ! Vous soyez les tresbien venus. » Ils nous présentèrent l'accolade; nous en feusmes tous resjouys. Panurge me dist en l'aureille : « Compaignon, as-tu rien eu peur en ceste dernière boutée ? — Quelque peu, respondy-je. — J'en ay, dist-il, plus eu que jamais n'eurent les soldats d'Ephraïm quand par les Galaadites feurent occis et noyez pour en lieu de Schibboleth dire Sibbolcth. Et n'y a homme, pour tout faire, en Beauce, qui bien ne m'eust avec une charrete de foin estouppé le trou du cul. » Depuis nous mena le capitaine au palais de la Royne en silence et grandes cérémonies. Pantagruel luy vouloit tenir quelque propos, mais, ne pouvant monter si haut qu'il estoit, souhaitoit une eschelle ou des eschasses bien grandes. Puis dist : « Baste! si nostre Dame la Royne vouloit, nous serions aussi grans comme vous. Ce sera quand il luy plaira. » Par les premières galleries rencontrasmes grand tourbe de gens malades, lesquels estoient installez diversement, selon la diversité des maladies, les ladres à part, les empoisonnez en un lieu, les pestiferez ailleurs, les verolez en premier rang; ainsi de tous autres. PANTAGRUEL 79 CHAPITRE XX Comment la Quinte-Essence guarissoit les maladies par chansons. SS N la seconde gallerie nous feut par le p capitaine monstre la Dame, jeune, et si avoit dixhuict cens ans pour le Tsrr-.v^ moins, belle, délicate, vestue gorgiasement, au milieu de ses damoiselles et gentilshommes. Le capitaine nous dist : « Heure n'est de parler à elle, soyez seulement spectateurs attentifs de ce qu'elle faict. Vous, en vostres royaumes, avez quelques roys lesquels phantastiquement guarissent d'aucunes maladies, comme scrophules, mal sacré, fiebvres quartes, par seule apposition des mains. Geste nostre Royne de toutes maladies guarist sans y toucher, seulement leur sonnant une chanson selon la competance du mal. » Puis nous monstra les orgues desquelles sonnant faisoit ces admirables guarisons. Icelles estoient de façon bien estrange, car les tuyaux estoient de casse en canon, le sommier de gaiac, les marchettes de rubarbe, le suppied de turbith, le clavier de scammonie. Lors que considérions ceste admirable et nouvelle structure d'orgues, par ses abstracteurs, spodizateurs, massiteres, pregustes, tabachins, chachanins, neemanins, rabrebans, nercins, rozuins, nedibins, nearins, sagamions, perazons, chesinins, sarins, so- 8o LIVRE V, CHAPITRE XX trins, aboth, enilins, archasdarpenins, mebins, gi- borins et autres siens officiers, furent les lépreux introduits. Elle leur sonna une chanson, je ne sçay quelle : soudain furent etparfaictement guaris. Puis feurent introduits les empoisonnez; elle leur sonna une autre chanson, et gens debout. Puis les aveugles, les sourds, les muets, leurs appliquant de mesme. Ce que nous espouvanta, non à tort, et tombasmes en terre, nous prosternans comme gens ecstatiques et ravis en contemplation excessive et admiration des vertus qu'avions veu procéder de la Dame, et ne fut en nostre pouvoir mot aucun dire. Ainsi restions en terre , quand elle , touchant Pantagruel d'un bouquet de rose franche, lequel elle tenoit en main, nous restitua le sens et le fist tenir en pieds. Puis nous dist en parolles byssines, telles que vouloit Parysatis qu'on proferast parlant à Cyrus son fils, ou pour le moins de taffetas armoisi : « L'honesteté scintilante en la circonférence de vos personnes jugement certain me fait de la vertu latente au centre de vos esprits, et, voyant la suavité melliflue de vos disertes Révérences, facilement me persuade le cœur vostre ne patirvice aucun, n'aucune stérilité de sçavoir libéral et hautain, ains abonder en plusieurs peregrines et rares disciplines, lesquelles à présent plus est facile par les usages communs du vulgaire imperit désirer que rencontrer, c'est la raison pourquoy je, dominante par le passé PANTAGRUEL 8l à toute affection privée, maintenant contenir ne me peux vous dire mot trivial au monde, c'est que soyez les biens, les plus, les tresque bien venus. — Je ne suis point clerc, me disoit secrètement Panurge, respondez si voulez. » Je toutesfois ne respondis, non fist Pantagruel, et demeurions en silence. Adonques dist la Royne : « En oestre vostre taciturnité congnoy-je que non seulement este issus de l'eschole pythagorique, de laquelle print racine en successive propagation l'antiquité de mes progeniteurs, mais aussi que en Egypte, célèbre officine de haute philosophie, mainte lune rétrograde, vos ongles mords avez, et la teste d'un doigt grattée. En l'eschole de Pythagoras, taciturnité de congnoissance estoit symbole, et silence des Egyptiens recongnu estoit en louange deïfique, et sacrifioient les pontifes en Hieropolis au grand Dieu en silence, sans bruit faire ne mot sonner. Le dessein mien est n'entrer vers vous en privation de gratitude, ains par vive formalité, encores que matière se voulust de moy abstraire, vous excentriquer mes pensées. » Ces propos achevez, dressa sa parolle vers ses officiers, et seulement leur dist : « Tabachins, à Panacée. » Sus ce mot les tabachins nous dirent qu'eussions la dame Royne pour excusée si avec elle ne disnions, car à son disner rien ne mangeoit, fors quelcjues cathegories,, jecabots, eminins, diRabelais. V. i j 82 LIVRE V, CHAPITRE XX mlons, abstractions, harborins, chelimins, secondes intentions, caradoth, antithèses, metempsichosies, transcendentes prolepsies. Puis nous menèrent en un petit cabinet tout contrepointé d'allarmes; là feusmes traictez Dieu sçait comment. On dict que Jupiter en la peau diphtere de la chèvre C|ui l'allaicta en Candie, de laquelle il usa comme de pavois combatans les Titanes, pourtant est-il surnommé Egiuchus, escrit tout ce que l'on fait au monde. Par ma soif, beuveurs mes amis, en dixhuict peaux de chèvres on ne sauroit, les bonnes viandes qu'on nous servit, les entre- mets et la bonne chère qu'on nous fîst, descrire, voire fust ce en lettres aussi petites que dit Cice- ron avoir veu VIliade d'Homère, tellement qu'on la couvroit d'une coquille de noix. De ma part, encores que j'eusse cent langues, cent bouches et la voix de fer, avec la copie melliflue de Platon, je ne saurois en quatre Uvres vous en exposer la tierce d'une seconde. Et me disoit Pantagruel que, selon son imagination, la Dame à ses Tabachins disant : « à Panacée » , leur donnoit le mot symbolique entre eux de chère souveraine, comme « en Apollo » disoit Luculle, quand festoyer vouloit ses amis sin- gulièrement, encores qu'on le print à l'improviste, ainsi que quelques fois faisoient Ciceron et Hortensius. PANTAGRUEL 83 CHAPITRE XXI Comment la Koyne passait temps après disner. E disner parachevé, fusmes par un chachanin menez en la salle de la Dame, et veismes comment, selon sa coustume, après le past, elle, accompaignée de ses damoiselles et princes de sa cour, sassoit, tamisoit, belutoit et passoit le tempS avec un beau et grand sas de soye blanche et bleue. Puis apperceus que , revoquans l'antiquité en usaige, ils jouèrent ensemble aux Cordace, Emmelie, Sicinnie, Nicatisme, Thracie, Calabrisme, Molossicque, Cernophore, lambicques, Persicque, Phrygie, Mongas, Thermanstrie, Florule, Pyrricque, et mille autres danses. Depuis, par son commandement, visitasmes le palais, et vismes choses tant nouvelles, admirables et estranges, qu'y pensant suis encores tout ravy en mon esprit. Rien toutesfois plus par admiration ne subveriit nos sens que l'exercice des gentils- 84 LIVRE V, CHAPITRE XXI hommes de sa maison, abstracteurs, perazons, nedibins, spodizateurs et autres, lesquels nous dirent franchement, sans dissimulation, que la dame Royne faisoit tout impossible, et guarissoit les incurables seulement; eux, ses officiers, faisoientet guarissoient le reste. Là je vy un jeune parazon guarir les verolez, je dy de la bien fine, comme vous diriez de Rouen, seulement leur touchant le vertèbre dentiforme d'un morceau de sabot par trois fois. Un autre je vy hydropique parfaictement guarir, tympanistes, ascites et hyposargues, leur frappant par neuf fois sur le ventre d'une bezaguë Tenedie, sans solution de continuité. Un guarissoit de toutes fiebvres quartes sur l'heure, seulement leurs pendant à la cinture sus le costé gauche une queue de renard [alopex est nommé des Grecs). Un du mal des dents, seulement lavant par trois fois la racine de la dent affligée avec vinaigre suzat, et au soleil par demye heure la laissant dessei- cher. Un autre toute espèce de goutte, fust chaude, fust froide, fust naturelle, fust accidentalle, seule- ment faisant es goutteux clorre la bouche et ouvrir les yeux. Un autre je vy lequel en peu d'heures guarist neuf bons gentils-hommes antiques du mal Sainct François, les ostant de toutes debtes^ et à chacun PANTAGRUEL 85 d'eux mettant une corde au col, à laquelle pendoit une bourse pleine de dix mille escus au soleil. Un autre par engin mirifique jettoit les maisons par les fenestres; ainsi restoient emundées d'air pestilent. Un autre guarissoit toutes les trois manières d'hetiques, atrophes, tabides, emaciez, sans bains, sans laict tabian, sans dropace, pication n'autre médicament, seulement les rendant moynes par trois mois. Et nous affermoit que, si en estât monachal ils n'engraissoient, ne par art ne par nature jamais n'engraisseroient. Un autre vy accompagné de femmes en grand nombre par deux bandes : l'une estoit de jeunes fillettes saffrettes, tendrettes, blondelettes, gratieuses et de bonne volonté, ce me sembloit; l'autre de vieilles edentées, chassieuses, riddées, bazanées, cadavéreuses. Là fut dit à Pantagruel qu'il refondoit les vieilles, les faisant ainsi rejeunir, et telles, par son art, devenir qu'estoient les fillettes là présentes, lesquelles il avoit cestuyjourreffondues et entièrement remises en pareille beauté, forme, élégance, grandeur et composition des membres comme estoient en l'aage de quinze et seize ans, excepté seulement les talons, lesquels leurs restent trop plus courts que n'avoyent en leur première jeunesse. Cela estoit la cause pourquoy elles dorénavant à toutes rencontres d'hommes seront moult subjettes et faciles à tomber à la renverse. 86 LIVREV, CHAPITREXXI La bande des vieilles attendoit l'autre fournée en grande dévotion, et l'importunoient en toute instance, alleguans que chose est en nature intolérable quand beauté fault A cul de bonne volonté. Et avoit en son art pratique continuelle et gain plus que médiocre. Pantagruel interroguoit si par fonte pareillement faisoit les hommes vieux rejeunir? Respondu luy fut que non, mais la manière d'ainsi rejeunir estre par habitation avec femme refondue, car là on prenoit ceste quinte espèce de vérole nommée la Pellade, en grec Ophiasis, moyennant laquelle on change de poil et de peau, comme font annuellement les serpcns, et en eux est jeunesse renouvellée, comme au phénix d'Arabie. C'est la vraye fontaine de Jouvence. Là, soudain, qui vieux estoit et décrépit devient jeune, alaigre et dispos, comme dit Euripides estre advenu à lolaûs; comme advint au beau Phaon, tant aimé de Sappho, par le bénéfice de Venus; à Tithone, par le moyen d'Aurore; à Eson , par l'art de Medée, et à Jason pareillement, qui, selon le tesmoignage de Pherecides et de Simonides, fut par icelle reteint et rejeuny; et comme dict Eschylus estre advenu es nourrices du bon Bacchus, et à leurs maris aussi. PANTAGRUEL 87 CHAPITRE XXII Comment les officiers de la Quinte diversement s'exercent^ et comment la Dame nous retint en estât d'abstracteurs. ^ZÎlnS E ^y api'és grand nombre de ses offi- ^^^ ciers susdits, lesquels blanchissoient ]i0^ les Ethiopiens en peu d'heures, du S^ fond d'un panier leur frottant seu- lement le ventre; Autres à trois couples de regnards souz un joug aroient le rivage areneux, et ne perdoient leur se- • mence; Autres lavoient les tuilles, et leur faisoier.t perdre couleur; Autres tiroient eau des pumices, que vous appeliez pierre ponce, la pillant long temps en un mortier de marbre, et luy changeoient substance; Autres tondoient. les asnes, et y trouvoient toison de laine bien bonne; Autres cueilloient des espines raisins, et figues des chardons; Autres,tiroient laict des boucs, et dedans un crible le recevoient, à grand profit de mesnage; Autres lavoient les testes des asnes, et n'y per- doient la laixive ; 88 LIVRE V, CHAPITRE XXII Autres chassoient aux vents avec des rets, et y prenoient escrevisses decumanes. J'y vy un jeune spodizateur lequel artificiel- lement tiroit des peds d'un asne mort, et en vendoit l'aune cinq sols; Ung aultre putrefioit des sechaboths. O la belle viande ! Mais Panurge rendit vilainement sa gorge, voyant un archasdarpenim lequel faisoit putréfier grande doye d'urine humaine en fiant de cheval, avec force merde chrestienne. Fy, le vilain ! Il toutesfois nous respondit que d'icelle sacrée distillation abreuvoit les roys et grans princes, et par icelle leur allon- geoit la vie d'une bonne toise ou deux. Autres rompoient les andouilles au genoil; Autres escorchoient les anguilles par la queue, et ne crioient les dictes anguilles avant que d'estre escorchées, comme font celles de Melun; Autres de néant faisoient choses grandes, et grandes choses faisoient à néant retourner; Autres coupoient le feu avec un cousteau, et puisoient l'eau avec un rets; Autres faisoient de vessies lanternes, et de nues poisles d'airain. Nous en veismes douze autres banquetans souz une fueillade, et beuvans en belles et amples retumbes vins de quatre sortes, frais et délicieux à tous, et à toute reste, et nous fut dit qu'ils haulsoient le temps selon la manière du lieu, et qu'en ceste PANTAGRUEL 89 manière Hercules jadis haulsa le temps avec Atlas; Autres faisoient de nécessité vertu, et me sembloit l'ouvrage bien beau et à propos; Autres faisoient alchimie avec les dens : en ce faisant emplissoient assez mal les selles percées; avoient toutesfois le bast advantageux; Autres dedans un long parterre songneusement mesuroient les saux des pusses, et cestuy acte m'af- fermoient estre plus que nécessaire au gouvernement des royaumes, conduictes des guerres, administrations des republicques, allegant que Socrates, lequel premier avoit des cieux en terre tiré la Philosophie, et d'oisive et curieuse l'avoit rendue utile et profitable, employoit la moitié de son estude à mesurer le saux des pusses, comme atteste Aristo- phanes le Quintessential. Je vy deux giborins à part sur le haut d'une tour, lesquels faisoient sentinelle, et nous fut dit qu'ils gardoient la lune des loups. J'en rencontray quatre autres en un coin de jar- din amèrement disputans et prests à se prendre au poil l'un l'autre. Demandant dont sourdoit leur dif- férent, entendy que ja quatre jours estoient passez depuis qu'ils avoient commencé disputer de trois hautes et plus que physicales propositions à la résolution desquelles ils se promettoient montaignes d'or. La première estoit de l'ombre d'unasne couillard, l'autre de la fumée d'une lanterne, la tierce de poil de chèvre sçavoir si c'estoit laine. Puis nous 90 LIVRE V, CHAPITRE XXII fut dit que chose estrange ne leur sembloit estre deux contradictoires vrayes en mode, en forme, en figure et en temps, chose pour lacjuelle les sophistes de Paris piustost se feroient desbaptiser que la confesser. Nous curieusement considerans les admirables opérations de ces gens, survint la Dame avec sa noble compagnie, ja reluisans le clair Hesperus. A sa venue fusmes derechef en nos sens espouventez et esblouys en nostre veue. Incontinent nostre effroy apperceut, et nous dist : « Ce que fait les humains pensemens esgarer par les abismes d'admiration n'est la souveraineté des effects, lesquels apertement ils esprouvent naistre des causes naturelles, moyennant l'industrie des sages artisans ; c'est la nouveauté de l'expérience entrant en leurs sens, non prevoyans la facilité de l'œuvre, quant jugement serain associe estude diligent. Pourtant soyez en cerveau, et de toute frayeur vous despouillez si d'aucune estes saisis à la considération de ce que voyez par mes officiers estre fait. Voyez, entendez, contemplez à vostre libre arbitre tout ce que ma maison contient, vous peu à peuemancipansdu servage d'ignorance. Le cas bien me siet en volonté, pour de laquelle vous donner enseignement non feint, en contemplation des studieux désirs desquels me semblez avoir en vos cœurs fait insigne mont-joye et suffi- sante preuve, je vous retiens présentement en estât et office de mes abstracteurs. Par Geber, mon pre- PANTAGRUEL 91 mier labachin, y serez descris au partement de ce lieu. » Nous la remerciasmes humblement sans mot dire, acceptasmes l'offre du bel estât qu'elle nous donnoit. CHAPITRE XXIII Comment fut la Koyne à soupper servicj et comment elle mangeoit. \ A dame, ces propos achevez, se re- '1 tourna vers ses gentils-hommes, et •leurs dist : « L'orifice du stomach, =^^ commun ambassadeur pour ravitaille- ment de tous membres, tant inférieurs que supérieurs, nous importune le leur restaurer par apposition de idoines alimeris ce que leur est decheut par action continue de la naïfve chaleur en l'humidité radicale. Spodizateurs, cesinins, nemains et perazons, par vous ne tienne que promptement ne soient tables dressées, foisonnantes de toute légi- time espèce de restaurans. Vous aussi, nobles pregustes, accompagnez de mes gentils massitéres, l'espreuve de vostre industrie passementée de soing et diligence fait Cjue ne vous puis donner ordre que desordre ne sovt en vos offices et vous teniez tousjours sur vos gardes. Seulement vous ramenter faut ce que faictes. » 92 LIVRE V, CHAPITRE XXIII Ces mots achevez, se retira avec part de ses damoiselles quelque peu de temps, et nous fut dict que c'estoit pour soy baigner, comme estoit la coustume des anciens, autant usitée comme est entre nous de présent laver les mains avant le past. Les tables feurent promptement dressées, puis feurent couvertes de napes tresprecieuses. L'ordre du service fut tel que la Dame ne mangea rien fors céleste anibrosie, rien ne beut que nectar divin. Mais les seigneurs et dames de sa maison furent, et nous avec eux, serviz de viandes rares, friandes et précieuses, si onques en songea Appicius. Sus l'issue de table fut apporté un pot pourry, si par cas famine n'eust donné tresves; et estoit de telle amplitude et grandeur que la plataine d'or la- quelle Pythius Bithius donna au roy Daire à peine l'eust couvert. Le pot pourry estoit plain de potages d'espèces diverses, sallades, fricassées, saulgrenées, cabirotades, rousty, boully, carbonnades, grandes pièces de bœuf salle, jambons de haulte taille, saulmates déifiques, pastisseries, tarteries, un monde de coscotons à la moresque, formages, joncades, gelées, fruicts de toutes sortes. Le tout me sembloit bon et friand; je toutefois n'y tastay, pour estre bien remply et refaict. Seulement ay vous advertir que là vy des pastez en paste, chose assez rare, et les pastez en paste estoient pastez en pot. Au fond d'iceluy j'apperceu force dez, cartes, tarots, luettes, eschets et tabliers, avec plaine tasse PANTAGRUEL 98 d'escuz au soleil pour ceux qui jouer voudroient. Au dessous finablement j'advisay nombre de mulles bien phalerées, avec housses de velours, ha- quenées de mesme à usance d'hommes et femmes, lictieres bien veloutées pareillement ne sçaj combien, et quelques coches à la Ferraroise pour ceux qui voudroient aller hors à l'esbat. Cela ne me sembla estrange, mais je trouvay bien nouvelle la manière comment la Dame mangeoit. Elle ne maschoit rien, non qu'elle n'eust dens fortes et bonnes, non que ses viandes ne re- quissent mastication, mais tel estoit son usage et coustume. Les viandes, desquelles ses pregustes avoient fait essay, prenoient ses massiteres, et noblement les luy maschoient, ayans le gosier doublé de satin cramoisi, à petites nervures et canetilles d'or, et les dens d'ivoire bel et blanc, moyennent lesquelles, quand ils avoient bien à poinct masché les viandes, ils les luy couloient par un embut d'or fin jusques dedens l'estomach. Par mesme raison nous fut dict qu'elle ne fiantoit sinon par procuration. 94 LIVRE V, CHAPITRE XXIV CHAPITRE XXIV Comment fut en présence de la Qiiintc faict un bal joyeux en forme de tournay. E soupper parfait, fut en présence de la Dame faict un bal en mode de tournaj, digne non seulement d'estre regardé, mais aussi de mémoire éternelle. Pour iceluy commencer fut le pavé de la salle couvert d'une ample pièce de tapisserie veloutée, faite en forme d'eschicjuier, savoir est à carreaux, moitié blanc, moitié jaulne, chascun large de trois palmes, et carré de tous coustez, quant en la salle entrèrent trente deux jeunes personnages, desquels seize estoient vestus de drap d'or, sçavoir est huict jeunes nymphes, ainsi que les peignoient les anciens en la compagnie de Diane, un roy, une royne, deux custodes de la Rocque, deux chevaliers et deux archiers. En semblable ordre estoient seize autres vestus de drap d'argent. Leur assiette sus la tapisserie fut telle : les roys se tindrent en la dernière ligne, sus le quatriesme carreau, de sorte que le roy auré estoit sus le carreau blanc, le roy argenté sus le carreau jaulne; les roynes à costé de leurs roys, la dorée sus le carreau jaulne, l'ar- gentée sus le carreau blanc; deux archiers auprès de chascun costé, comme gardes de leurs roys et PANTAGRUEL 95 roynes; auprès des archiers deux chevaliers; auprès des chevaliers deux custodes; au ranc prochain devant eux estoientles huict nymphes. Entre les deux bandes des nymphes restoient vuides quatre rancs de carreaux. Chascune bande avoit de sa part ses musiciens vestus de pareille livrée, uns de damas orengé, autres de damas blanc; et estoient huict de chascun costé avec instrumens tous divers, de joyeuse in- vention, ensemble moult concordans et mélodieux à merveilles, varians en tons, en temps et mesure, comme requeroit le progrez du bal : ce que je trouvois admirable, attendu la numereuse diversité de pas, de desmarches, de saux, sursaux, retours, fuites, embuscades, retraictes et surprinses. Encore plus transcendoit opinion humaine, ce me sembloit, que les personnages du bal tant soudain entendoient le son qui competoit à leurs desmarche ou retraicte, que plustot n'avoit signifié le ton la musique qu'ils se poussoient en place designée, non - obstant que leur procédure fust toute diverse. Car les nymphes, qui sont en première filliere comme prestes d'exciter le combat, marchent contre leurs ennemis droit en avant, en forme d'un carreau en outre, exceptée la première desmarche, en laquelle leur est libre passer deux carreaux. Elles seulles ja- mais ne reculent. S'il advient qu'une d'entr'elles passe jusques à la filliere de son roy ennemy, elle est couronnée royne de son roy, et prent et des- 96 LIVRE V, CHAPITRE XXIV marche d'orenavant en mesme privilège que la royne; autrement jamais ne ferissent les ennemis que en ligne diagonale obliquement, et devant seulement. Ne leur est toutesfois, n'a autres, loisible prendre aucuns de leurs ennemis, si le pre- nant elles laissoient leur roy descouvert et en prinse. Les roys marchent et prennent leurs ennemis de toutes faces en carré, et ne passent que de carreau blanc et prochain au jaune, et au contraire; exceptez qu'à la première desmarche, si leurfilliere estoit trouvée vuide d'autres officiers, fors les custodes, ils le peuvent mettre en leur siège, et àcostédeluj se retirer. Les roynes desmarchent et prennent en plus grande liberté que tous autres, sçavoir est en tous endroits et en toutes manières, en toutes sortes, en ligne directe, tant loing que leur plaist, pourveu que ne soit des siens occupé, et diagonale aussi, pourveu que soit en couleur de son assiette. Les archiers marchent tant en avant comme en arrière, tant loing que prés. Aussi jamais ne varient la couleur de leur première assiette. Les chevaliers marchent et prenent en forme li- gneare, passant un siège franc, encores qu'il fust occupé ou des siens ou des ennemis, et au second soy posans à dextre ou à senestre, en variation de couleur, qui est sault grandement dommageable à partie adverse, et de grande observation. Car ils ne prennent jamais à face ouverte. PANTAGRUEL 97 Les custodes marchent et prenent à face tant à dextre qu'à senestre, tant arrière que devant, comme les rojs, et peuvent tant loing marcher qu'ils voudront en siège vuide, ce que ne font les roys.La loy commune es deux parties estoit, en fin dernière du combat, assiéger et clorre le roydepart adverse en manière qu'évader ne peust de costé quelconque. Iceluy ainsi clos, fuir ne pouvant, ny des siens estre secouru, cessoit le combat et per- doit le roy assiégé. Pourdonques de cestuy inconvénient le guarentir, il n'est celuy ne celle de sa bande qui n'y offre sa vie propre, et se prenent les uns les autres de tous endroicts, advenant le son de la musique. Quand aucun prenoit un prisonnier de part contraire, luy faisant la reverance, luy frappoit doucement en main dextre, le mettoit hors le par- quet et succedoit en sa place. S'il advenoit qu'un des roys fust en prise, n'estoit licite à partie adverse le prendre; ainsi estoit fait rigoreux com- mandement à celuy qui l'avoit descouvert, ou le tenoit en prise, luy faire profonde reverance, et l'advertir, disant : « Dieu vous gard' » , afin que de ses officiers fust secouru et couvert, ou bien qu'il changeast de place, si par malheur ne pouvoit estre secouru. N'estoit toutesfoisprins de partie adverse, mais salué le genoil gauche en terre, luy disant : « Bon jour. )) Là estoit fin du tournay, Rabelais. V, ,3 LIVRE V, CHAPITRE XXV CHAPITRE XXV Comment les trente deux personnages du bal combatent. iNsi posées en leurs assiettes les deux f\ compagnies, les musiciens commencent ensemble sonner en intonation martiale, assez espouventablement, comme à l'assault. Là voyons les deux bandes fré- mir, et soy affermer pour bien combatre, venant l'heure du hourt, qu'ils seront évoquez hors leur camp. Quand soudain les musiciens de la bande argentée cessèrent, seulement sonnoient les or- ganes de la bande aurée, en quoy nous estoit signifié que la bande aurée assailloit. Ce que bien tost advint, car à un ton nouveau veismes que la nymphe parquée devant la royne fist un tour entier à gausche vers son roy, comme demandant congé d'entrer en combat, ensemble aussi saluant toute sa compagnie. Puis desmarcha deux carreaux avant en bonne modestie, et fist d'un pied révérence à la bande adverse, laquelle elle assailloit. Là cessèrent lesmusiciens aurez, commencerentlesargentez. Icy n'est à passer en silence que la nymphe, avoir en tour salué son roy et sa compagnie, afin qu'eux ne restassent ocieux, pareillement la resa- luerent en tour entier gyrans à gausche, exceptée la royne, laquelle vers son roy se destourna à dex- PANTAGRUEL 99 tre, et fut ceste salutation de tous desmarchans observée en tout le discours du bal, le ressaluement aussi, tant d'une bande comme de l'autre. Au son des musiciens argentez desmarcha la nymphe argentée, laquelle estoit parcjuée devant sa royne, son roy saluant gratieusement, et toute sa compagnie, eux de mesme la resaluans, comme a esté dict des aurées, excepté qu'ils tournoient à dextre et leur royne à senestre; se posa sus le se- cond carreau avant, et, faisant révérence à son adversaire, se tint en face de la première nymphe aurée, sans distance aucune, comme preste à combatre, ne fust qu'elles ne frappent que des costez. Leurs compagnes les suyvent, tant aurées comme argentées, en figure intercalaire, et là font comme apparence de escarmoucher, tant que la nymphe aurée, laquelle estoit première en camp entrée, frappant en main une nymphe argentée à gausche, la mist hors du camp et occupa son lieu. Mais bien tost, à son nouveau des musiciens, fut de mesme frappée par l'archer argenté; une nymphe aurée le fist ailleurs serrer; le chevalier argenté sortit en camp ; la royne aurée se parqua devant son roy. Adonc le roy argenté change place, doutant la furie de la royne aurée, et se tira au lieu de son custode à dextre, lequel lieu sembloit tresbienmuny et en bonne défense. Les deux chevaliers qui tenoient à gausche, tant aurez qu'argentez, desmarchent et font amples lOO LIVRE V, CHAPITRE XXV prinses des nymphes adverses, lesquelles ne pouvoient arrière soy retirer, mesmement le chevalier auré, lequel met toute sa cure à prinse de nymphes. Mais le chevalier argenté pense chose plus importante, dissimulant son entreprinse, et, quelquefois qu'il a peu prendre une nymphe aurée, il la laisse et passe outre, et a tant faict qu'il s'est posé prés ses ennemis, en lieu auquel il a salué le roy advers, et dit : « Dieu vous gard'. » La bande aurée, ayant cestuy advertissement de secourir son roy, fremist toute, non que facilement elle ne puisse au roy secours soudain donner, mais que, leur roysaulvant, ils perdoient leur custode dextre, sans y pouvoir remédier. Adonques se retira le roy auré à gausche, et le chevalier argenté print le custode auré, ce que leur fut en grande perte. Toulesfois la bande aurée délibère de s'en venger, et l'envi- ronnent de tous costez, à ce que reffuir il ne puisse ny eschapper de leurs mains; il faict mille efforts de sortir, les siens font mille ruses pour le garentir, mais en fin la royne aurée le print. La bande aurée^ privée d'un de ses supposts, s'es- vertue, et à tors et à travers cherche moyen de soy venger, assez incautement, et fait beaucoup de dommage parmy l'ost des ennemis. La bande argentée dissimule et attend l'heure de revanche, et-presente une de ses nymphes à la royne aurée, luy ayant dressé une embuscade secrète, tant qu'à la prinse de la nymphe peu s'en faillit que l'archer auré ne PANTAGRUEL lOI surprint la royne argentée. Le chevalier auré in- tente prinse de roy et royne argentée, et dit : « Bon jour. » L'archer argenté les salue; il fut prins par une nymphe aurée ; icelle fut prinse par une nymphe argentée. La bataille est aspre. Les custodes sortent hors de leurs sièges au secours; tout est en meslée dangereuse ; Enyo encores ne se déclare. Aucunefois tous les argentez enfoncent jusques à la tente du roy auré, soudain sont repoussez. Entre autres la royne aurée fait grandes prouesses, et d'une venue prent l'archer, et costoyant prent le custode argenté. Ce que voyant, la royne ar- gentée se met en avant et foudroyé de pareille hardiesse, et prent le dernier custode auré et quel- ques nymphes pareillement. Les deux roynes combatirent longuement, part taschant de s'entresurprendre, part pour soy sauver et leurs roys contregarder. Finalement la royne aurée prit l'argentée, mais soudain après elle fut prinse par l'archer argenté. Là seule- ment au roy auré restèrent trois nymphes, un archer et un custode. A l'argenté restoient trois nymphes et le chevalier dextre, ce que fut cause qu'au reste plus cautement et lentement ils combatirent. Les deux roys sembloient dolens d'avoir perdu leurs dames roynes tant aimées, et est tout leur es- tude et tout leur effort d'en recevoir d'autres, s'ils I02 LIVRE V, CHAPITRE XXV peuvent, de tout le nombre de leurs nymphes, à ceste dignité et nouveau mariage, les aimer joyeusement, avec promesses certaines d'y estre re- ceues si elles pénètrent jusques à la dernière filliere du roy ennemy. Les aurées anticipent, et d'elles est créé une royne nouvelle, à laquelle on impose une couronne en chef, et baille l'on nouveaux ac- coustremens. Les argentées suyvent de mesme, et plus n'estoit qu'une ligne que d'elles ne feust royne nouvelle créée ; mais en cestuy endroit le custode auré la guettoit; pourtant elle s'arresta quoy. La nouvelle royne aurée voulut, à son advenement, forte, vaillante et belliqueuse se monstrer. Fist grans faicts d'armes parmy le camp. Mais en ces entrefaictes le chevalier argenté print le custode auré, lequel gardoit la metedu camp ; par ce moyen fut faicte nouvelle royne argentée, laquelle se voulut semblablement vertueuse monstrer à son nouveau advenement. Fut le combat renouvelle plus ardent que devant. Mille ruses, mille assaulx, mille desmarches furent faictes, tant d'un costé que d'autre, si bien que la royne argentée clandestinement entra en la tente du roy auré, disant : « Dieu vous gard' », et ne peust estre secouru que par sa nouvelle royne. Icelle ne fist difficulté de soy opposer pour le sauver. Adonques le chevalier argenté, voltigeant de tous costez, se rendoit prés sa royne, et misrent le PANTAGRUEL Io3 roy auré en teldesarroy que pour son salut luy convint perdre sa royne. Mais le roy auré print le chevalier argenté. Ce nonobstant l'archer auré, avec deux nymphes qui restoient, à toutes leurs puis- sances defendoient leur roy; mais en fin tous fu- rent prins et mis hors le camp, et demoura le roy auré seul. Lors de toute la bande argentée luy fut dit en profonde révérence : « Bon jour », comme restant le roy argenté vainqueur. A laquelle parolle les deux compagnies de musiciens commencèrent en- semble sonner, comme victoire. Et print fin ce premier bal en tant grande allégresse^ gestes tant plaisans, maintien tant honneste, grâces tant rares, que nous fusmes tous en nos esprits rians comme gens ecstatiques, et non à tord nous sembloit que nous fussions transportez es souveraines délices et dernière félicité du ciel Olimpe. Fini le premier tournay, retournèrent les deux bandes en leur assiette première, et, comme avoient combatu paravant, ainsi commencèrent à combatre pour la seconde fois, excepté que la musique fut en sa mesure serrée d'un demy temps plus que la précédente, les progrez aussi totalement difîerens du premier. Là je vy que la royne aurée, comme despitée de la route de son armée, fut par l'intonation de la musique évoquée, et se mist des premières en camp avec un archer et un chevalier, et peu s'en faillit 104 LIVRE V, CHAPITRE XXV qu'elle ne surprint le roy argenté en sa tente au millieu de ses officiers. Depuis, voyant son entreprinse descouverte, s'escarmoucha parmy latrouppe, et tant desconfit de nymphes argentées et autres officiers que c'estoit cas pitoiable les voir. Vous eussiez dit que ce fut une autre Panthasilée Amazone foudroyante par le camp des Grégeois ; mais peu dura cestuy esclandre, car les argentées, fre- missans à la perte de leurs gens, dissimulans toutefois leur dueil, luy dressèrent occultement en embuscade un archer en angle lointain et un chevalier errant, par lesquels elle fut prinse et mise hors le camp. Le reste fut bien tost deffait. Elle sera une autre fois mieux advisée, prés de son roy se tiendra, tant loin ne s'escartera, et ira quand aller faudra, bien autrement accompagnée. Là doncques restèrent les argentez vainqueurs, comme devant. Pour le tiers et dernier bal se tindrent en pieds les deux bandes, comme devant, et me semblèrent porter visage plus gay et délibéré qu'es deux precedens. Et fut la musique serrée en la mesure plus que de hemiole, en intonation phrygienne et belli- que, comme celle qu'inventa jadis Marsyas. Adonques commencèrent tournoyer et entrer en combat, avec telle légèreté qu'en un temps de la musique ils faisoient quatre desmarches, avec les révérences de tours competans, comme avons dit dessus, de mode que ce n'estoient que saux , gambades et PANTAGRUEL Io3 voltigemenspetauristiques entrelassez les uns parmy les autres. Et, les voyans sus un pied tournoyer après la révérence faite, les comparions au mouvement d'une rhombe girante au jeu des petis enfans, moyennant les coups de fouet, lors que tant subit est son tour que son mouvement est repos, elle semble quiète, non soy mouvoir, ains dormir, comme ils le nomment. Et y figurant un point de quelque couleur, semble à nostre veue non point estre, mais ligne continue, comme sagement Ta noté Cusane, en matière bien divine. Là nous n'oyons que frappemens de mains, et episemasies à tous destroits réitérez, tant d'une bande que d'autre. Il ne fut onques tant severe Caton, ne Crassus l'ayeul tant agelaste, ne Timon Athénien tant misanthrope, ne Heraclitus tant abhorrant du propre humain qui est rire, qui n'eust perdu contenance, voyant au son de la musique tant soudaine, en cinq cens diversitez, si soudain se mouvoir, desmarcher, sauter, voltiger, gambader, tournoyer ces jouvenceaux avecq' les roynes et nymphes, en telle dextérité qu'onques l'un ne fist empeschement à l'autre. Tant moindre estoit le nombre de ceulx qui res- toient en camp, tant estoit le plaisir plus grand, veoir les ruses et destours desquels ils usoient pour surprendre l'un l'autre, selon que par la musique leur estoit signifié. Plus vousdiray : si ce spectacle plus qu'humain nous rendoit confus en nos sens, 14 I06 LIVRE V, CHAPITRE XXV estonnez en nos esprits et hors de nous mesmes, encores plus sentions nous nos cœurs esmeus et ef- frayez à l'intonation de la musique; et croyrois fa- cilement que par telle modulation Ismenias excita Alexandre le Grand, estant à table et disnant en repos, à soy lever et armes prendre. Au tiers tour- nay fut le roy auré vainqueur. Durant lesquelles dances la Dame invisiblement disparut, et plus ne la vismes. Bien fusmes menez par les Michelots de Geber, et là fusmes inscripts en Testât par elle ordonné. Puis, descendans au port de Mateotechnie, entrasmes en nos navires, entendans qu'avions vent en pouppe, lequel si re- fusions sur l'heure, à peine pourroit estre recouvert de trois quartiers brisans. CHAPITRE XXVI Comment nous descendismes en l'Isle d'Odes, en laquelle les chenùns cheminent. VOIR par deux jours navigé, s'offrit à nostre veue l'Isle d'Odes, en laquelle vismes une chose mémorable. Les che- mins y sont animaux, si vraye est la sentence d'Aristoteles disant argument invincible d'un animant si se meut de soy mesme. Car les chemins cheminent comme animaux, et sont les uns chemins errans, à la semblance des planètes ; PANTAGRUEL 7 autres chemins passans, chemins croisans, chemins traversans. Et vy que les voyagiers souvent es habitans du pays demandoient : « Où va ce chemin? et cestuy-cy? » On leurrespondoit : « Entre Midy et Fevrolles, à la paroisse, à la ville, à la rivière. » Puis, se guidans au chemin oportun sans autre- ment se peiner ou fatiguer, se trouvoient au lieu destiné, comme vous voyez advenir à ceux qui de^ Lyon en Avignon et Arles se mettent en basieau sur le Rosne; et comme vous savez qu'en toutes choses il y a de la faute, et rien n'est en tous endroits heureux, aussi là nous fut dict estre une manière de ^ens lesquels ils nommoient Guetteurs de chemins et Batteurs de pavez, et les pauvres che- mins les craignoient et s'esloignoient d'eux comme des brigans. Ils les guettoient au passage comme on fait les loups à la traînée et les bécasses au fillet. Je vy un d'iceux lequel estoit appréhendé de la justice, pource qu'il avoit prins injustement, malgré Pallas, le chemin de l'escole : c'estoit le plus long; un autre se ventoit avoir prins de bonne guerre le plus court, disant luy estre tel advantage à ceste rencontre que premier venoit à bout de son entreprinse. Aussi dist Carpalim à Epistemon , quelque jour le rencontrant sa pissotière au poing, contre une muraille pissant, que plus ne s'esbahissoit si tousjours premier estoit au lever du bon Pantagruel, car il tenoit le plus court et le moins chevauchant. Io8 LIVRE V, CHAPITRE XXVI Je y recongnu le grand chemin de Bourges, et le vy marcher à pas d'abbé, et le vy aussi fuir à la venue de quelques charretiers qui le menassoient fouller avec les pieds de leurs chevaux et luy faire passer les charrettes dessus le ventre, comme Tullia fist passer son charriot dessus le ventre de son père Servius Tullius, sixiesme roy des Romains. Je y recongnu pareillement le vieu quemin de Peronne à Sainct Quentin, et me sembloit quemin de bien de sa personne. Je y recongnu entre les rochers le bon vieulx chemin de la Ferrate sus le mont d'un grand Ours. Le voyant de loin, me souvint de Sainct Hierosme en peinture, si son ours eust esté lyon, car il estoit tout mortifié, avoit la longue barbe toute blanche et mal peignée :vouseussiez proprementdit que fussent glassons; avoit sur soy force grosses patenostres de pinaslre mal rabottées, et estoit comme à genoillons, et non debouf ne couché du tout, et se battoit la poitrine avec grosses et rudes pierres. Il nous fîst peur et pitié ensemble. Le regardant, nous tira à part un bachelier courant du pais, et, monstrant un chemin bien licé, tout blanc et quelque peu feustré de paille, nous dist : « Dorénavant ne desprisez l'opinion de Thaïes Milesien, disant l'eau estre de toutes choses le commencement; ne la sen- tence d'Homcrc, affermant toutes choses prendre naissance de l'Océan. Ce chemin que voyez nasquit d'eau, et s'y en retournera ; devant deux mois les PANTAGRUEL IO9 basteaux par-cy passoient, à ceste heure y passent les charrettes. — Vrayement, dist Pantagruel, vous nous la baillez bien piteuse! En nostre monde nous en voyons tous les ans de pareille transformation cinq cens et davantage. y> Puis, considerans les alleures de ces chemins mouvans, nous dist que, selon son jugement. Philolaùs et Aristarchus avoient en icelle isle philosophé, Seleucus prins opinion d'affermer la terre véritablement autour des pôles se mouvoir, non le ciel, encores qu'il nous semble le contraire estre vérité, comme, estans sur la rivière de Loire, nous semblent les arbres prochains se mouvoir, toutesfois ils ne se mouvent, mais nous par le decours du batteau. Retournans à nos navires, vismes que prés le rivage on mettoit sus la roue trois guetteurs de chemins qui avoient esté prins en embuscade, et brusloit à petit feu un grand paillard, lequel avoit battu un chemin et luy avoit rompu une coste, et nous fut dict que c'estoit le chemin des aggeres et levées du Nil en Egypte. IIO LIVRE V, CHAPITRE XXVII CHAPITRE XXVII Comment passasmes Vlsle des Esclots^ et de l'Ordre des frères Fredons. ^EPUis passasmes l'Isle des Esclots, les- quels ne vivent que de souppes de merlus; fusmes toutesfois bien recuil- #^^^£i^.lis et traitez du roy de l'Isle, nommé Benius, tiers de ce nom, lequel après boire nous mena voir un monastère nouveau, fait, érigé et basty par son invention pour les frères Fredons : ainsi nommoit-il ses religieux, disant qu'en terre ferme habitoient les frères petits serviteurs et amis de la douce Dame, item les glorieux et beaux frè- res mineurs, qui sont semi-briefs de bulles, les frères minimes haraniers enfumez, aussi les frères mi- nimes crochus, et que du nom plus diminuer ne pouvoit qu'en fredons. Par les statuts et bulle patente obtenue de la Quinte, laquelle est de tous bons accords, ils estoient tous habillez en brusleurs de maisons, excepté qu'ainsi que les couvreurs de maisons en Anjou ont les genoux contrepointez, ainsi avoient-ils les ventres carrelez, et estoient les carreleurs de ventre en grande réputation parmy eux. Ils avoient la braguette de leurs chausses à forme de pantoufle, et en portoient chascun deux, l'une devant et l'autre derrière cousue, affermans par PANTAGRUEL III ceste duplicité braguatine quelques abscons et horrifiques misteres estre duement représentez. Ils portoient souliers ronds comme bassins, à l'imita- tion de ceux qui habitent la mer areneuse; du de- mourant avoient barbe rase et pieds ferrats. Et, pour monstrer que de fortune ils ne se soucient, il les faisoit raire et plumer comme cochons la partie postérieure de la teste, depuis le sommet jusques aux omoplates. Les cheveux en devant depuis les os bregmatiques croissoient en liberté. Ainsi contrefortunoient comme gens aucunement ne se soucians des biens qui sont au monde. Deffians davantage Fortune la diverse, portoient, non en main comme elle, mais à la ceincture, en guise de patenostres, chascun un rasouer tranchant, lequel ils esmouloient deux fois le jour et afhloient trois fois de nuict. Dessus les pieds chascun portoit une boulle ronde, parce qu'est dict Fortune en avoir une soubs ses pieds. Le cahuet de leurs scaputions estoit devant attaché, non derrière; en ceste façon avoient le vi- saige caché, et se moquoient en liberté tant de Fortune comme des fortunez, ne plus ne moins que font nos damoiselles quand c'est qu'elles ont leur cachelaid, que vous nommez touret de nez; les anciens le nomment chareté, parce qu'il couvre en elles de péchez grande multitude. Avoient aussi tousjours patente la partie postérieure de la teste, comme nous avons le visaige; 112 LIVRE V, CHAPITRE XXVII cela estoit cause qu'ils alloientde ventre ou de cul, comme bon leur sembloit. S'ils alloient de cul, vous eussiez estimez estre leur alleure naturelle, tant à cause des souliers ronds que de la braguette précédente; la face aussi derrière rase et peinte rude- ment, avec deux yeux, une bouche, comme vous voyez es nois indiques. S'ils alloient de ventre, vous eussiez pensé que fussent gensjouans au chapifou. C'estoit belle chose de les voir. Leur manière de vivre estoit telle. Le clair Lucifer commençant apparoistre sus terre, ils s'entre- bottoient et esperonnoient l'un l'autre par charité. Ainsi bottez et esperonnezdormoient, ou ronfloient pour le moins, et dormans avoient beziclesau nez, ou lunettes pour pire. Nous trouvions ceste façon de faire estrange, mais ils nous contentèrent en la response, nous remonstrans que, le jugement final lors que seroit, les humains prendroient repos et sommeil. Pour donques evidentement monstrer qu'ils ne refîusoient y comparoistre, ce que font les fortunez, ils se te- noient bottez, esperonnez et prests à monter à cheval quand la trompette sonneroit. Midy sonnant, notez que leurs cloches estoient, tant de l'horloge que du batail de l'église et refec- touer, faictes selon la divise pontiale, savoir est de fin dumet contrepointé, et le batail estoit d'une queue de renard; midy donques sonnant, ils s'es- veilloient et desbottoient, pissoient qui vouloir, et PANTAGRUEL Il3 esmeutissoient qui vouloit, esternuoient qui vouloit. Mais tous, par contrainte, statut rigoureux, amplement et copieusement baisloient, se desjeu- noient de baisler. Le spectacle me sembloit plai- sant; car, leurs bottes et espérons mis sus un rastelier, ils descendoient aux cloistres, là se lavoient curieusement les mains et la bouche, puis s'asseoient sus une longue selle, et se curoient les dens jus- ques à ce que le prevost fist signe, sifflant en paume; lors chascun ouvroit la gueule tant qu'il pouYoit, et baailloient aucunefois demie heure, aucunefois plus, aucunefois moins, selon que le prieur jugeoit le desjuner estre proportionné à la feste du jour; après cela faisoient une belle procession en laquelle ils portoient deux bannières, en l'une desquelles estoit en belle peinture le pourtrait de Vertu, en l'autre de Fortune. Un Fredon pre- mier portoit la bannière de Fortune, après luy marchoit un autre portant celle de Vertu, en main tenant un aspersoir mouillé en eau mercuriale, descrite par Ovide en ses Fastes, duquel continuelle- ment il comme sonettoit [fouettoit?] le précèdent Fredon portant Fortune. « Cest ordre, dist Panurge, est contre la sen- tence de Ciceron et des Académiques, lesquels veulent Vertu précéder, non suyvre Fortune. » Nous fut toutesfois rernonstré qu'ainsi leur convenoit-il faire, puisque leur intention estoit fustiguer Fortune. Rabelais. V. i 5 114 LIVRE V, CHAPITRE XXVII Durant la procession ils fredonnoient entre les dents mélodieusement ne sçay quelles antiphones, car je n'entendois leur patelin, et, ententivement escoutant, aperceu qu'ils ne chantoient que des aureilles. O la belle armonie, et bien concordante au son de leurs cloches! Jamais ne les voirrez discor- dans. Pantagruel fist un notable mirifique sus leur procession, et nous dist : « Avez-vous veu et noté la finesse de ces Fredons icy? Pour parfaire leur procession, ils sont sortis par une porte de l'église et sont entrez par l'autre. Ils se sont bien gardez d'entrer par où ils sont yssus. Sus mon honneur, ce sont quelques fines gens, je dy fins à dorer, fins comme une dague de plomb, fins non affinez, mais affinans, passez par estamine fine. — Cette finesse, dist frère Jean, est extraicte d'occulte philosophie, et n'y entends au diable rien. — D'autant, respondit Pantagruel, est elle plus redoutable que l'on n'y entend rien; car finesse entendue, finesse preveue, finesse descouverte, perd de finesse et l'essence et le nom : nous la nommons lourderie. Sus mon honneur qu'ils en savent bien d'autres. » La procession achevée comme pourmenement et exercitation salubre, ils se retiroient en leur refectoir, et dessous les tables se mettoient à genoux, s'appuyans la poictrine et stomach chacun sus une lanterne. Eux estans en cest estât, entroit un grand Esclot, ayant une fourche en main, et là les traitoit PANTAGRUEL Il5 à la fourche : de sorte qu'ils commençoient leur repas par fourmage, et l'achevoient par moustarde et laictue, comme tesmoigne Martial avoir esté l'u- sage des anciens. En fin on leur presentoit à chas- cun d'eux une platelée de moustarde, et estoient servis de moustarde après disner. Leur diette estoit telle. Au dimanche ils mangeoient boudins, andouilles, saucissons, frican- deaux, hastereaux, caillettes, exceptez tousjours le fourmage d'entrée et moustarde pour l'issue. Au iundy beaux pois au lard, avec ample comment et glose interlineare. Au mardy force pain benist, fouaces, gasteaux, galettes biscuites. Au mercredy rustrerie : ce sont belles testes de mouton, testes de veau, testes de bedouaux, lesquelles abondent en icelle contrée. Au jeudy potages de sept sortes, et moustarde éternelle parmy. Au vendredy rien que cormes, encore n'estoient-elles trop meures, selon que juger je pouvois à leur couleur. Au samedy rongeoient les os; non pourtant estoient-ils pauvres ne souffreteux, car un chascun d'eux avoit bénéfice de ventre bien bon. Leur boire estoit un antifortu- nal : ainsi appelloient-ils ne sçay quel bruvage du pays. Quand ils vouloient boire ou manger, ils rabbattoient leur cahuet de leurs scaputions par le devant, et leur servoit de baviere. Le disner parachevé, ils prioient Dieu tresbien, et tout par fredons. Le reste du jour, attendans le jugement final, ils s'exerçoient à œuvre de charité. llb LIVRE V, CHAPITRE XXVII au dimanche se pelaudans l'un l'autre, au lundy s'entrenazardans, au mardy s'entre-esgratignans, au mercredy s'entremouchans, au jeudy s'entretirans les vers du nez, au vendredy s'entrechatouillans, au samedy s'entrefouettans. Telle estoit leur diette quand ils residoient en couvent; si par commandement du prieur claustral ils issoient hors, défense rigoureuse, sur peine horrifique, leur estoit faite poisson lors ne toucher, ne manger, qu'ils seroient sus mer ou rivière, ne chair telle qu'elle fust lorsque ils seroient en terre ferme, afin qu'à un chascun fust évident qu'en jouyssans de l'objet ne jouyssoient de la puissance et concupiscence, et ne s'en esbranloient non plus que le roc Marpesian; le tout faisoient avec antiphones compétentes et à propos tousjours chantans des aureilles, comme avons dit. Le soleil soy couchant en rOcean, ils bottoient et esperonnoient l'un l'autre comme devant, et, bezicles au nez, se composoient à dormir. A la minuit l'Esclot entroit, et gens debout; là esmailloient [esmouloient?] et affilloient leurs rasouers, et, la procession faite, mettoient les tables sus eux, et repaissoient comme devant. Frère Jehan des Entommeures, voyant ces joyeux frères Fredons, et entendant le contenu de leurs statuts, perdit toute contenance , et, s'escriant hautement, dist : « O le gros rat à la table ! Je romps cestuy-là, et m'en vois par Dieu de pair. O PANTAGRUEL 117 que n'est icy Priapus, aussi bien' que fust aux sacres nocturnes de Canidie, pour le veoir à plein fond peder, et contrepedant fredonner ! A ceste heure congnois-je en vérité que sommes en terre antic- thone et antipode. En Germanie Ton demolist monastères et deffroque on les moynes; icy on les érige à rebours et à contrepoil. » CHAPITRE XXVIII Comment Panurge, interroguant un frère Fredon, n'eust response de luy qu'en monosillabes. ANURGE, depuis nostre entrée, n*avoit autre chose que profondement contemplé les minois de ces royaux Fre- dons; adonc tira par la manche un d'iceux, maigre comme un diable soret, et luy de- manda : « Frater, Fredon, Fredon, Fredondille, où est la garse? » Le Fredon luy respondit : « Bas. Pan. En avez-vous beaucoup céans? Fr. Peu. Pan. Combien au vray sont elles? Fr. Vingt. Pan. Combien en voudriez vous? Fr. Cent. Pan. Où les tenez vous cachées? Fr. Là. Pan. Je suppose qu'elles ne sont toutes d'un aage ; mais quel corsage ont elles? Fr. Droit. Pan. Le taint, quel? Fr. Lys. Il8 LIVRE V, CHAPITRE XXVIII Pan. Les cheveux? Fr. Blonds. Pan. Les yeulx, quels? Fr. Noirs. Pan. Les tetins ? Fr. Ronds. Pan. Le minois? Fr. Coinct. Pan. Les sourcils? Fr. Mois. Pan. Leurs attraicts ? Fr. Meurs. Pan. Leur regard? Fr. Franc. Pan. Les pieds, quels? Fr. Plats. Pan. Les talons? Fr. Courts. Pan. Le bas, quel? Fr. Beau. Pan. Et les bras? Fr. Longs. Pan. Que portent elles aux mains? Fr. Gands. Pan. Les anneaux du doigt, quoy? Fr. D'or. Pan. Qu'employez à les vestir? Fr. Drap. Pan. De quel drap les vestez vous? Fr. Neuf. Pan. De quelle couleur est-il? Fr. Pcrs. Pan. Leur chapperonnage, quel ? Fr. Bleu. Pan. Leur chaussure, quelle? Fr. Brun. Pan. Touts les susdits draps, quels sont-ils ? Fr. Fins.Pan. Qu'est ce de leurs soulliers? Fr. Cuir. Pan. Mais quels sont-ils volontiers? Fr. Ords. Pan. Ainsi marchent en place? Fr. Tost. Pan. Venons à la cuisine, je dis des garses, et sans nous haster espluchons bien tout par le menu. Qu'y a il en cuisine? Fr. Feu. Pan. Qui entretient ce feu là? Fr. Bois. Pan. Ce bois icy, quel est il? Fr. Sec. Pan. De quels arbres le prenez? Fr. D'ifz. PANTAGRUEL II9 Pan. Le menu et les fagots? Fr. D'houst. Pan. Quel bois bruslez en chambre? Fr, Pins. Pan. Et quels arbres encores? Fr. Teils. Pan. Des garses susdites, j'en suis de moitié, comment les nourrissez vous? Fr. Bien. Pan. Que mangent elles? Fr. Pain. Pan. Quel? Fr. Bis. Pan. Et quoy plus? Fr. Chair. Pan. Mais comment? Fr. Rost. Pan. Mangent elles point souppes ? Fr. Point. Pan. Et de pâtisserie? Fr. Prou. Pan. J'en suis; mangent elles point poisson? Fr. Si. Pan. Comment? Et quoy plus? Fr. Œufs. Pan. Et les aiment? Fr. Cuits. Pan. Je demande comment cuits? Fr. Durs. Pan. Est ce tout leur repas? Fr. Non. . Pan. Quoy donc ? Qu'ont elles d'avantage ? Fr. Bœuf. Pan. Et quoy plus? Fr. Porc. Pan. Et quoy plus? Fr. Oyes. Pan. Quoy d'abondant? Fr. Jars. Pan. Item ? Fr. Coqs. Pan. Qu'ont elles pour leur saulce ? Fr. Sel. Pan. Et pour les friandes? Fr. Moust. Pan. Pour l'issue du repas? Fr. Ris. Pan. Et quoy plus? Fr. Laict. Pan. Et quoy plus? Fr. Pois. Pan. Mais quel pois entendez vous ? Fr. Verds. I20 LIVRE V, CHAPITRE XXVIII Pan. Que mettez-vous avec? Fr. Lard. Pan. Et des fruicts? Fr. Bons. Pan. QuojPFr. Cruds. Pan. Plus? Fr. Noix. Pan. Mais comment boivent elles? Fr. Net. Pan. Quoy ? Fr. Vin. Pan. Quel? Fr. Blanc. Pan. En hjver? Fr. Sain. Pan. Au printemps? Fr. Brusq. Pan. En esté? Fr. Frais. Pan. En automne et vendange? Fr. Doux. — Pote de froc, s'escria frère Jehan, comment ces mastinesicy fredonniques devroient estre grosses, et comment elles devroient aller au trot,veu qu'elles repaissent si bien et copieusement ! —Attendez, dist Panurge, que j'achève : « Quelle heure est quand se couchent? Fr. Nuict. Pan. Et quand elles se lèvent? Fr. Jour. — Voicy, dist Panurge, le plus gentil Fredon que je chevauchay de cest an. Pleust à Dieu, et au benoist sainct Fredon, et à la benoiste et digne vierge saincte Fredonne, qu'il fust premier président de Paris ! Vertugoy ! mon ami, quel expéditeur de causes, quel abreviateur de procès, quel vuydeurde débats, quel esplucheur de sacs, quel fueilleteur de papiers, quel minuteur d'escritures ce seroit ! Or maintenant venons sus les autres vivres, et par- PANTAGRUEL 121 Ions à traits et à sens rassis de nosdictes sœurs en charité. « Quel est le formulaire? Fr. Gros. Pan. a l'entrée? Fr. Frais. Pan. Au fond? Fr. Creux. Pan. Je disois qu'il y faict ? Fr. Chaud. Pan. Qu'y a il au bord ? Fr. Poil. Pan. Quel? Fr. Roux. Pan. Et celuy des plus vieilles? Fr. Gris. Pan. Le sacquement d'elles, quel? Fr. Prompt. Pan. Le remuement des fesses? Fr. Dru. Pan. Toutes sont voltigeantes? Fr. Trop. Pan. Vos instrumens, quels sont-ils? Fr. Grands. Pan. En leur marge, quels? Fr. Ronds. Pan. Le bout, de quelle couleur? Fr. Bail. Pan. Quand ils ont fait, quels sont-ils ?Fr. Coys. Pan. Les genitoires, quels sont? Fr, Lourds. Pan. En quelle façon troussez? Fr. Prés. Pan. Quand c'est faict, quels deviennent ? Fr. Mats. Pan. Or, par le serment qu'avez faict, quant voulez habiter, comment les projettez-vous ? Fr. Jus.Pan. Que disent elles en culletant ? Fr. Mot. Pan. Seulement elles vous font bonne chère ; au demourant elles pensent au joly cas? Fr. Vray. Pan. Vous font elles des enfans ? Fr. Nuls. Pan. Comment couchez ensemble ? Fr. Nuds. Pan. Par ledit serment qu'avez faict, quantes i6 122 LIVRE V, CHAPITRE XXVIII fois de bon compte ordinairement le faictes vous par jour ? Fr. Six. Pan. Et de nuict ? Fr. Dix. — Cancre ! dist frère Jelian, le paillard ne dai- gneroit passer seize, il est honteux. — Voire, le ferois tu bien autant, frère Jean? Il est, par Dieu, ladre verd. « Ainsi font les autres ? Fr. Tous. Pan. Qui est de tous le plus galland? Fr. Moy. Pan. N'y faictes vous onques faute? Fr. Rien. Pan. Je perds mon sens en ce poinct. Ayans vuydé et espuysé en ce jour précèdent tous vos vases spermatiques, au jour subsequant y en peut il tant avoir? Fr. Plus. Pan. Ils ont, ou je resve, l'herbe de l'Indie célé- brée par Theophraste. Mais si, par empeschement légitime ou autrement, en ce déduit advient quelque diminution de membre, comment vous en trouvez vous? Fr. Mal. Pan. Et lors, que font les garses ? Fr. Bruit. Pan. Et si cessiez un jour? Fr. Pis. Pan. Alors, que leur donnez vous? Fr. Trunc. Pan. Que vous font elles pour lors? Fr. Bren. Pan. Que dis tu ? Fr. Peds. Pan. De quel son ? Fr. Cas. Pan. Comment les chastiez vous? Fr. Fort. Pan. Et en faictes quoy sortir? Fr. Sang. Pan. En cela devient leur tain? Fr. Tainct. Pan. Mieux pour vous il ne seroit? Fr. Painct. PANTAGRUEL 123 Pan. Aussi restez vous tousjours? Fr. Craints. Pan. Depuis elles vous cuident? Fr. Saincts. Pan. Par ledit serment de bois qu'avez fait, quelle est la saison de l'année quand plus lasches lefaictes? Fr. Aoust. Pan. Celle quand plus brusquement? Fr. Mars. Pan. Au reste vous le faictes? Fr. Gay. » Alors dist Panurge en soubriant : ce Voici le pauvre Fredon du monde ! Avez-vous entendu comment il est résolu, sommaire et compendieux en ses responses ? Il ne rend que monosyllabes. Je croy qu'il feroit d'une cerize trois morceaux. — Corbieu, dist frère Jehan, ainsi ne parle il mie avec ses garses; il y est bien polysyllabe; vous parlez de trois morceaux d'une cerise : par Sainct Gris, je jurerois que d'une espaule de mouton il ne feroit cjue deux morceaux, et d'une quarte de vin qu'un traict. Voyez comment il est hallebrené. — Ceste, dist Epistemon, meschante freraille de moines sont par tout le monde ainsi aspres sus les vivres, et puis nous disent qu'ils n'ont que leur vie en ce monde. Que diable ont les roys et grans princes? » 24 LIVRE V, CHAPITRE XXIX CHAPITRE XXIX Comment l'institution de Quaresme desplait à Epistemon. VEZ vous, dist Epistemon, noté comment ce meschant et malautru Fredon nous a allégué mars comme mois de ruffîennerie? — Ouy, respondit Pantagruel; toutesfois il est tousjours en quaresme, le- quel a esté institué pour macérer la chair, mortifier les appétits sensuels etreserrer les furies vénériennes. — En ce, dist Epistemon, pouvez vous juger de quel sens estoit celuy pape qui premier l'institua, qu£ ceste vilaine savatte de Fredon confesse soy n'estre jamais plus embrené en paillardise qu'en la saison de quaresme ; aussi, par les évidentes raisons produites de tous bons et sçavans médecins, affer- mans en tout le decours de l'année n'estre viandes mangées plus excitantes la personne à lubricité qu'en cestuj temps : febves, poix, phaseols, chiches, oignons, noix, huytres, harans, saleures, garon, salades toutes composées d'herbes veneriques , comme eruce, nasitord, targon, cresson, berle, res- ponse, pavot cornu, haubelon, figues, ris, raisins. — Vous, dist Pantagruel, seriez bien esbahy si, voyant le bon Pape instituteur du sainct quaresme estre lors la saison quand la chaleur naturelle sort du centre du corps, auquel s'cstoit contenue durant PANTAGRUEL 125 les froidures de Thyver, et se dispert par la circon- férence des membres, comme la sesve faict es arbres, auroit ces viandes qu'avez dictes ordonnées pour aider à la multiplication de l'humain lignage. Ce que me l'a faict penser est qu'au papier baptistère de Touars plus grand est le nombre des enfans en octobre et novembre nez qu'es dix autres mois de l'année, lesquels, selon la supputation rétrograde, tous estoient faits, conceus et engendrez en quaresme. — Je, dist frère Jean, escoute vos propos, et y prens plaisir non petit; mais le curé de Jambet attribuoit ce copieux engrossissement de femmes non aux viandes de quaresme, mais aux petits questeurs voultés, aux petits prescheurs bottés, aux petits confesseurs crottés, lesquels damnent, par cestuy temps de leur empire, les ribaulx mariez trois toises au desoubs des grifes de Lucifer. A leur terreur les mariez plus ne biscotent leurs chambrières,, se reti- rent à leurs femmes. J'ay dict. — Interprétez, dist Epistemon, l'institution de quaresme à vostre phantasie, chascun abonde en son sens ; mais à la suppression d'iceluy, laquelle me semble estre impendente, s'opposeront tous les médecins, je le sçay, je leur ay ouy dire. Car sans le quaresme seroit leur art en mespris, rien ne gaigneroient, personne ne seroit malade. En quaresme sont toutes maladies semées : c'est la vraye pépinière, la naïfve couche et promoconde de tous maux. En- 120 LIVRE V, CHAPITRE XXIX cores ne considérez que, si quaresme faict les corps pourrir, aussi faict il les âmes enrager. Diables alors font leurs efforts, caffards alors sortent en place, cagots tiennent leurs grands jours, foires, sessions, stations, perdonnances, confessions, fouettemens, anathematisations. Je ne veux pourtant inférer que les Arimaspians soient en cela meilleurs que nous, mais je parle à propos. — Or çà, dist Panurge, couillon cultant et fre- donnant, que vous semble de cestuy-cy? Est-il pas hérétique? Fr. Très. Pan. Doibt il pas estre bruslé? Fr. Doibt. Pan. Et le plustost qu'on pourra? Fr. Soit. Pan. Sans le faire pourbouillir? Fr. Sans. Pan. En quelle manière donques? Fr. Vif. Pan. Si qu'en fin s'en ensuyve? Fr. Mort. Pan. Car il vous a trop faschë? Fr. Las! Pan. Que vous sembloit il estre? Fr. Fol. Pan. Vous dictes fol ou enragé? Fr. Plus. Pan. Que voudriez vous qu'il fust? Fr. Ars. Pan. On en a bruslé d'autres? Fr. Tant. Pan. Qui estoient hérétiques? Fr. Moins. Pan. Encore en bruslera on? Fr. Maints. Pan. Les rachepterez vous? Fr. Grain. Pan. Les faut il pas tous brusler? Fr. Faut. — Je ne sçay, dist Epistemon, quel plaisir vous prenez raisonnant avecques ce meschant penaillon de moyne; mais, si d'ailleurs ne m'estiez congnu, vous me créeriez en l'entendement opinion de vous PANTAGRUEL 127 peu honorable. — Allons, de par Dieu, dist Pa- nurge, je l'emmenerois volontiers à Gargantua, tant il me plaist; quand je seray marié, il serviroit à ma femme de fou. — Voire teur, dist Epistemon , par la figure tmesis. — A ceste heure, dist frère Jehan en riant, as tu ton vin, pauvre Panurge; tu n'es- chappe jamais que tu ne sois cocujusques au cul. » CHAPITRE XXX Comment nous visitasmes le pays de Satin. 'M ^ J^ OYEUX d'avoir veu la nouvelle religion J!^^ des frères Fredons, navigasmes par lc|j^^ deux jours; au troisiesme descouvrit ^^fe^É^nostre pilot une isle belle et déli- cieuse sur toutes autres. On l'appelloit l'Isle de Frize, car les chemins estoient de frize. En icelle estoit le pays de Satin, tant renommé entre les pages de cour, duquel les arbres et herbes jamais ne perdoient fleur ne fueilles, et estaient de damas et velous figuré. Les bestes et oiseaux estoient de tapisserie. Là nous vismes plusieurs bestes, oiseaux et arbres, tels que les avons de par deçà en figure, grandeur, amplitude et couleur, excepté qu'ils ne mangeoient rien et point ne chantoient, point aussi ne mordoient ils comme font les nostres. Plusieurs aussi y vismes que n'avions encores veu; entre autres y vismes divers elephans en 125 LIVRE V, CHAPITRE XXX diverse contenance; sus tous j'y notayles sixmasles et six femelles présentez à Rome en théâtre par leur instituteur, au temps de Germanicus, nepveu de l'empereur Tibère, elephans doctes, musiciens, philosophes, danseurs, pavaniers, baladins; et estoient à table assis en belle composition, beuvans et mangeans en silence, comme beaux Pères au re- fectouer. Ils ont le museau long de deux coudées, et le nommons proboscide, avec lequel ils puisent eau pour boire, prennent palmes, prunes, toutes sortes de mangeaille, s'en deffendent et offendent comme d'une main, et au combat jettent les gens haut en l'air, et à la cheute les font crever de rire. Ils ont joinctures et articulations es jambes; ceux qui ont escrit le contraire n'en veirent jamais qu'en peinture. Entre leurs dents ils ont deux grandes cornes, ainsi les appelloit Juba; et dit Pausanias estre cornes, non dents; Philostrate tient que soient dents, non cornes; ce m'est tout un, pourveu qu'entendiez que c'est le vray yvoire, et sont lon- gues de trois ou quatre coudées, et sont en la mandibule supérieure, non inférieure. Si croyez ceux qui disent le contraire, vous en trouverez mal, voire fust ce Elian, tiercelet de menterie. Là, non ailleurs, en avoit veu Pline, dansans aux sonnettes sus cordes et funambules, passans aussi sus les tables en plain banquet sans olfenser les beuveurs beuvans. J'y vy un rhinocéros du tout semblable à cestuy PANTAGRUEL 129 que Henry Clerberg m'avoit autrefois monstre, et peu differoit d'un verrat qu'autrefois j'avois veu à Limoges, excepté qu'il avoit une corne au mufle longue d'une coudée, et pointue, de laquelle il osoit entreprendre contre un éléphant en combat, et d'icelle le poignant sous le ventre, qui est la plus tendre et débile partie de l'elephant, le rendoit mort par terre. J'y vy trente deux unicornes : c'est une beste félonne à merveilles, du tout semblable à un beau cheval, excepté qu'elle a la teste comme un cerf^ les pieds comme un éléphant, la queue comme un sanglier , et au front une corne aiguë , noire ^ et longue de six ou sept pieds, laquelle ordinaire- ment luy pend en bas comme la creste d'un coq d'Inde; elle, quand veut combattre ou autrement s'en aider, la levé roide et droite. Une d'icelles je vy, accompagnée de divers animaux sauvages, avec sa corne emunder une fontaine. Là me distPanurge que son courtaut ressembloit à ceste unicorne, non en longueur du tout, mais en vertu et propriété. Car, ainsi comme elle purifioit l'eau des mares et fontaines d'ordure ou venin aucun qui y estoit, et ces animaux divers en seureté venoient boire après elle, ainsi seurement on pouvoit après luy fatrouiller sans danger de chancre, vérole, pisse-chaude, pouUains, grèves et tels autres menus suffrages : car, si mal aucun estoit au trou méphitique, il esmondoit tout avec sa corne nerRabelais. V. i -j l3o LIVRE V, CHAPITRE XXX veuse. « Quand, dist frère Jehan, vous serez marié, nous ferons l'essay sus vostre femme, pour l'amour de Dieu soit, puisque nous en donnez instruction fort salubre. — Voire, respondit Panurge, et soudain en l'estomac la belle petite pilulle agrégative de Dieu, composée de vingt deux coups de pongnart, à la Cesarine. — Mieux vaudroit, disoit frère Jehan, une tasse de quelque bon vin frais. » J'y vy la Toison d'Or conquise par Jason. Ceux qui ont dit nestre toison, mais pommes d'or, parce que |j(.-?jXa signifie pomme et brebis, avoient mal visité le pays de Satin. J'y vy un chameleon, tel que le descrit Aristoteles, et tel que me l'avoit quelquefois monstre Charles Marais, médecin insigne en la noble cité de Lyon sur le Rosne ; et ne vivoit que d'air non plus que l'autre. J'y vy trois hydres, telles qu'en avois ailleurs autrefois veu. Ce sont serpens ayans chascun sept testes diverses. J'y vy quatorze phœnix. J'avois leu en divers autheurs qu'il n'en estoit qu'un en tout le monde pour un aage; mais, selon mon petit jugement, ceux qui en ont escrit n'en veirent oncques ailleurs qu'au pays de Tapisseiie, voire fust-ce Lactance Firmian. J'y vy la peau de l'Asne d'or d'Apulée. J'y vy trois cens et neuf pélicans, six mille et seize oizeaux seleucides, marchans en ordonnance PANTAGRUEL l3l et devorans les sauterelles parmy les bleds ; des cynamolges, des argathyles, des caprimulges, des thynnuncules, des crotenotaires, voire, dis-je, des onocrotales avec leur grand gosier; des stymphalides, harpyes, panthères, dorcades, cemades, cynocéphales, satyres, cartasonnes, tarandes, ures, monopes, pephages, cèpes, neares, stères, cercopiteques, bisons, musimones, bytures, ophyres, stryges, gryphes. J'y vy la My-caresme à cheval; la My-aoust et la My-mars luy tenoient l'estaphe ; loups-garoux, centaures, tygres, léopards, hyènes, camelopardales, ériges. J'y vy une remore, poisson petit, nommé echeneis des Grecs, auprès d'une grande nauf, laquelle ne se mouvoit, encores qu'elle eust pleine voile en haute mer. Je croy bien que c'estoit celle de Perianderle tyran, laquelle un poisson tant petit arrestoit contre le vent. Et en ce pays de Satin, non ailleurs, l'avoit veue Mutianus. Frère Jean nous dist que par les cours de Parlement souloient jadis régner deux sortes de poisson , lesquels faisoient de tous poursuyvans, nobles, roturiers, pauvres, riches, grands, petits, pourrir les corps et enrager les âmes. Les premiers estoient poissons d'avril, ce sont maquereaux ; les seconds bénéfiques remores , c'est sempiternité de procès sans fin de jugement. Icy vy des sphynges, des raphes, des oinces^ des cephes, lesquels ont les pieds de devant comme les l32 LIVRE V, CHAPITRE XXX mains, et ceux de derrière comrxie les pieds d'un homme; des crocutes, des eales, lesquels sont grands comme hippopotames, la queue comme elephans, les mandibules comme sangliers, les cornes mobiles, comme sont les aureilles d'asne; des cucrocutes, bestes treslegeres, grandes comme asnes de Mirebalais, ont le col, la queue et poitrine comme un lion, les jambes comme un cerf, la gueule fendue jusques aux aureilles, et n'ont autres dents qu'une dessus et une autre dessous; elles parlent de voix humaine, mais lors mot ne sonnèrent. Vous dites qu'on ne veit oncques aire de sacre : vrayement j'y en vy onze, et les notay bien. J'y vy des hallebardes gaucheres, ailleurs n'en avois veu. J'y vy des menthichores, bestes bien estranges : elles ont le corps comme un lion, le poil rouge, la face et les aureilles comme un homme, trois rangs de dents entrant les unes dedans les autres, comme si vous entrelassiez les doigts des deux m.ains les uns dedans les autres; en la queue elles ont un aiguil- lon, duquel elles poignent, comme font les scor- pions, et ont la voix fort mélodieuse. J'y vy des catoblepes, bestes sauvages, petites de corps, mais elles ont les testes grandes sans proportion, à peine les peuvent lever de terre; elles ont les yeux tant vénéneux que quiconques les voit meurt soudainement, comme qui verroit un basilic. PANTAGRUEL l33 J'y vy des bestes à deux dos, lesquelles me sembloyent joyeuses à merveilles et copieuses en culetis, plus que n'est la mocitelle, avecques sempiternel remuement de cropions. J'y vy des escrevisses laictées, ailleurs jamais n'en avois veu, lesquelles marchoient en moult belle or- donnance, et les faisoit moult bon veoir. CHAPITRE XXXI Comment au pays de Satin nous veismes Ouy-dire, tenant eschole de tesmoignerie. ASSANS quelque peu avant en ce pays de Tapisserie, vismes la mer Méditerranée ouverte et descouverte jusques aux abismes, tout ainsi comme au gouffre Arabie se descovrit la mer Erithrée, pour faire chemin aux Juifs issans d'Egypte, Là je recongnu Triton sonnant de sa grosse conche, Glaucus, Proteus, Nereus et mille autres dieux et monstres marins. Vismes aussi nombre infîny de poissons en espèces diverses, dansans, volans, voltigeans, combatans, mangeans, respirans, belutans, chassans, dressans escarmouches, faisans embuscade, composans trefves, marchandans, jurans, s'esbatans. En un coing là prés vismes Aristoteles tenant une 3, LIVRE V, CHAPITRE XXXI lanterne, en semblable contenance que Ton peint l'hermite prés Sainct Christofle, espiant, considérant, le tout rédigeant par escrit. Derrière luy es- toient comme records de sergents plusieurs autres philosophes, Appianus , Heliodorus, Atheneus, Porphirius , Pancrates , Archadian , Numenius , Possidonius^ Ovidius, Oppianus, Olympius, Seleucus, Leonides, Agathocles, Theophraste, Damostrate, Mutianus, Nymphodorus, Elianus, cinq cens autres gens aussi de loisir, comme fut Chrysippus ou Aristarchus de Sole, lequel demeura cinquante huit ans à contempler Testât des abeilles, sans autre chose faire. Entre iceux j'y advisay Pierre Gylles, lequel tenoit un urinai en main, considérant en pro- fonde contemplation l'urine de ces beaux poissons. Avoir longuement considéré ce pays de Satin, dist Pantagruel : « J'ay icy longuement repeu mes yeux, mais je ne m'en peux en rien saouler, mon estomach brait de maleraigede faim. —Repaissons, repaissons, di-je, et tastons de ces anacampserotes qui pendent là-dessus. Fy ! ce n'est rien qui vaille. » Je donques prins quelques mirobalans qui pendoient à un bout de tapisserie, mais je ne les peu mascher n'avaller; et, les goustans, eussiez propre- ment dictet juré que fust soye retorsse, et n'avoient saveur aucune. On penseroit qu'Heliogabalus là eustpris, comme transsumpt de bulle, forme de festoyer ceux qu'il avoit long-tems fait jusner, leur promettant enfin bancquet somptueux, abon- PANTAGRUEL l35 dant, impérial, puis les paissoit de viandes en cire, en marbre, en potterie, en peintures et nappes figurées. Cerchans donques par ledit pays si viandes aucunes trouverions, entendismes un bruit strident et divers, comme si fussent femmes lavant la buée, ou traquets de moulins du Bazacle lez Toloze; sans plus séjourner nous transportasmes au lieu où c'estoit, etvismesun petit vieillard bossu, contrefait et monstrueux. On le nommoitOuy-dire ; il avoitla gueule fendue jusques aux aureilles, dedans la gueule sept langues, et la langue fendue en sept parties; quoy que ce fust, de toutes sept ensemblement parloit divers propos et languages divers; avoit aussi parmy la teste et le reste du corps autant d'aureilles comme jadis eut Argus d'yeux; au reste estoit aveugle et paralitique des jambes. Autour de luy je vy nombre innumerable d'hom- mes et de femmes escoutans et attentifs, et en re- congnu aucuns parmy latrouppe faisans bon minois, d'entre lesquels un pour lors tenoit une mappemonde, et la leur exposoit sommairement par petites aphorismes, et y devenoient clercs et sçavans en peu d'heure, et parloient de prou de choses prodigieuses elegantement et par bonne mémoire, pour la centiesme partie desquelles sçavoirne suffiroit la vie de l'homme : des Pyramides, du Nil, de Babylone , des Troglodites , des Hymantopodes , des Blemmies, des Pygmées, des Canibales, des Monts l36 LIVRE V, CHAPITRE XXXI Hyperborées, des Egipanes, de tous les Diables, et tout par Ouy-dire. Là je vy, selon mon advis, Hérodote, Pline, Solin, Berose, Philostrate, Mêla, Strabo, et tant d'autres antiques; plus Albert le Jacobin grand, Pierre Tesmoin , Pape Pie second, Volateran, Paulo Jovio le vaillant homme, Jacques Cartier, Chaiton Armenian, Marc Paule Vénitien, Ludovic Romain, Piètre Aliares, et ne sçay combien d'autres modernes historiens cachez derrière une pièce de tapisserie, en tapinois escrivans de belles besongnes, et tout par Ouy-dire. Derrière une pièce de velours figuré à fueille de menthe, prés d'Ouy-dire, je vy nombre grand de Percherons et Manceaux, bons estudians, jeunes assez ; et demandans en quelle faculté ils appliquoient leur estude, entendismes que là de jeunesse ils ap- prenoient estre tesmoins, et en cestuy art proufitoient si bien que, partans du lieu et retournez en leur province, vivoient honnestement du mestier de tesmoignerie, rendans seur tesmoignage de toutes choses à ceux qui plus donneroient par journée, et tout par Ouy-dire. Dictes en ce que voudrez, mais ils nous donnèrent de leurs chanteaux, et beusmes à leurs barils à bonne chère. Puis nous advertirent cordialement qu'eussions à espargner vérité, tant que possible nous seroit, si voulions parvenir en court de grans seigneurs. PANTAGRUEL CHAPITRE XXXII Comment nous fut descouvert le pais de Lanternois. ^AL traictez et mal repeus au païs de ^ Satin, navigasmes par trois jours; au I quatriesme en bon heur approchasmes ^l de Lanternois. Approchans , voyons sur mer certains petits feuz volans; de ma part, je pensois que fussent non lanternes, mais poissons, qui, de la langue flamboyans, hors la mer fissent feu, ou bien lampyrides, vous les appeliez les cicin- deles, là reluisans, comme au soir font en ma patrie, l'orge venant à maturité. Mais le pilot nous advertit que c'estoient lanternes des guets, lesquelles autour de la banlieue descouvroient le païs, et fai- soient escorte à quelques lanternes estrangeres, qui, comme bons cordeliers et jacobins, alloient là comparoistre au Chapitre provincial. Doutans toutesfois que fust quelque prognostic de tempeste, nous asseura qu'ainsi estoit. 38 LIVRE V, CHAPITRE XXXIII CHAPITRE XXXIII Comment nous descendismes au port des Lychnobiens et entrasmes en Lanternois. .^...v.^

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\.Q^. '^•i'J\\js l'instant entrasmes au port de LanI^Tternois. Là sus une haute tour recon- , gnut Pantagruel la lanterne de la Ro- ®T^^4o^ m chelle, laquelle nousfist bonne clarté. Vismes aussi la lanterne de Pharos, de Nauplion, et d'Acropolis en Athènes, sacrée à Pallas. Prés le port est un petit village habité par lesLychnobiens, qui sont peuples vivans de lanternes, comme en nos païs les frères briffaux vivent de nonnains, gens de bien et studieux. Demosthenes y avoit jadis lanterné. De ce lieu jusques au Palais fusmes conduicts par trois Obeliscolychnies , gardes militaires du havre, à baux bonnets comme Albanois, esquels exposasmes les causes de nos voyage et délibération, laquelle estoit là impetrer de la royne de Lanternois une lanterne pour nous esclairer et conduire par le voyage que faisions vers l'oracle de la Bouteille. Ce que nous promisrent faire, et volontiers, adjoustans qu'en bonne occasion etoportunité estions là arrivez, et qu'avions beau faire chois de lanternes, lors qu'elles tenoient leur Chapitre provincial. Advenans au palais royal, fusmes par deux lan- ternes d'honneur, sçavoir est la lanterne d'Aris- PANTAGRUEL ï3<) lophanes et la lanterne de Cleanthes, présentez à la royne, à laquelle Panurge, en langage lanter- nois, exposa briefvement les causes de nostre voyage; et eusmes d'elle bon recueil, et commandement d'assister à son soupper, pour plus facile- ment choisir celle que voudrions pour guide. Ce que nous pleut grandement, et ne fusmes negligens bien tout noter et tout considérer, tant en leurs gestes, vestemens et maintien, qu'aussi en l'ordre du service. La royne estoit vestue de cristallin vergé par art de tauchie, et azzeminé à ouvrage damasquin, pas- sementé de gros diamens. Les lanternes du sang estoient vestues, aucunes de strain, autres de pierres phengites; le demeurant estoit de corne, de papier, de toille cirée. Les fallots pareillement, selon leurs estais d'antiquité de leurs maisons. Seulement j'en advisay une de terre, comme un pot, en rang des plus gorgiases : de ce m'esbahissent, entendy que c'estoit la lanterne d'Epictetus, de laquelle on avoit autresfois refusé trois mile dragmes. J'y consideray diligentement la mode et accous- trement de la lanterne Polymyxede Martial, encore plus de ricosimyxe jadis consacrée par Canope, fille de Tisias. J'y notay tresbien la lanterne Pensile, jadis prinse deThebes au Temple d'Apollo Palatin, et depuis transportée en la ville de Cyme iEolicque par Alexandre le conquérant. J'en notay une autre insigne, à cause d'un beau fioc de soye cramoisine 140 LIVRE V, CHAPITRE XXXIII qu'elle avoit sus la teste, et me fut dit que c^estoit Bartole, lanterne de droit. J'en notay pareillement deux autres insignes, à cause des bourses declystere qu'elles portoient à la ceincture, et me fut dictque l'une estoit le grand et l'autre le petit luminaire des apoticaires. L'heure du soupper venue, la royne s'assit en premier lieu, consequemment les autres, selon leur degré et dignité. D'entrée de table toutes furent servies de grosses chandelles de moulle, excepté que la royne fut servie d'un gros et roidde flambeau flamboyant de cire blanche, un peu rouge par le bout; aussi furent les lanternes du sang exceptées du reste, et la lanterne provinciale de Mirebalais, laquelle fut servie d'une chandelle de noix, et la provinciale du Bas-Poitou, laquelle je vy estre servie d'une chandelle armée. Et Dieu sçait quelle lumière après elles rendoient avecques leurs mecherons. Exceptez icy un nombre de jeunes lanternes du gouvernement d'une grosse lanterne. Elles ne luisoient comme les autres, mais me sembloient avoir les paillardes couleurs. Après soupper nous retiras- mes pour reposer. Le lendemain matin la royne nous fîst choisir une lanterne, pour nous conduire, des plus insignes. Et ainsi prinsmes congé. PANTAGRUEL 141 CHAPITRE XXXIV Comment nous arrivasmes à l'oracle de la Bouteille. È osTRE noble lanterne nous esclairant r et conduisant en toute joyeuseté, arrivasmes en l'isle désirée, en laquelle estoit l'oracle de la Bouteille. Descendant Panurge en terre, fist sur un pied la gambade en l'air gaillardement, et dist à Pantagruel : « Aujourd'huy avons-nous ce que cherchons avecques fatigues et labeurs tant divers. » Puis se recom- manda courtoisement à nostre lanterne. Icelle nous commanda tous bien espérer, et, quelque chose qui nous apparust, n'estre aucunement effrayez. Approchans au temple de dive Bouteille, nous convenoit passer parmy un grand vinoble faict de toutes espèces de vignes, comme Phalerne, Malvoisie, Muscadet, Taige, Beaune, Mirevaux, Orléans, Picardent, Arbois, Coussi, Anjou, Grave, Corsicque, Verron, Neracet autres. Le dit vignoble fut jadis par le bon Bacchus planté avec telle bénédiction que tous temps il portoit feuille, fleur et fruict, comme les orangiers de Suraine. Nostre lan- terne magnifique nous commanda manger trois raisins par homme , mettre du pampre en nos souliers, et prendre une branche verde en main gauche. Au bout du vignoble passasmes dessous un arc antique, auquel estoit le trophée d'un beuveur bien 142 LIVRE V, CHAPITRE XXXIV mignonnementinsculpé, sçavoir est en un bien long ordre de flaccons, bourraches, bouteilles, fiolles, barils, barraux, pots, pintes, semaises antiques pendentes d'une treille ombrageuse. En autre, grande quantité d'ails, oignons, eschalottes, jambons, boutargues, parodelles, langues de bœuf fumées, for- mages vieux, et semblable confiture entrelassée de pampre, et ensemble par grande industrie fagottées avecquesdes ceps. En autre, cent formes de voerres, comme voerres à pied et voerres à cheval, cuveaux, retombes, hanaps, jadaux, salvernes, taces, gobelets, et telle semblable artillerie bacchique. En la face de l'arc, dessous le zoophore, estoient ces deux vers inscripts : Passant icy ceste poterne, Garny toy de bonne lanterne. « A cela, dist Pantagruel, avons nous pourveu, car en toute la région de Lanternois n'y a lanterne meilleure et plus divine que la nostre. » Cestuy arc finissoit en une belle et ample tonnelle, toute faicte de ceps de vignes, aornez de raisins de cinq cens couleurs diverses, et cinq cens diverses formes, non naturelles, mais ainsi composées par art d'agriculture, jaunes, bleus, tanez, azurez, blancs, noirs, verds, violets, riolez, piolez, longs, ronds, toranglés, couillonnez, couronnez, barbus, cabus, herbus. La fin d'icelle estoit close de trois antiques lierres, bien verdoyanset tous chargez PANTAGRUEL 1^3 de bagues. Là nous commanda notre illustrissime lanterne de ce lierre chascun de nous se faire un chappeau albanois et s'en couvrir toute la teste; ce que fut faict sans demeure. « Dessous, dist lors Pantagruel, ceste treille n'eust ainsi jadis passé la pontife de Jupiter. — La raison, dist nostre preclare lanterne, estoit mystique. Car y passant auroit le vin, ce sont les raisins, au-dessus de la teste, et sembloit estre comme maistrisée et dominée du vin, pour signifier que les pontifes et tous personnages qui s'adonnent et dédient à contemplation des choses divines doivent en tranquillité leurs esprits maintenir, hors toute perturbation de sens, laquelle plus est manifestée en yvrognerie qu'en autre passion, quelle que soit. « Vous pareillement au temple ne seriez receus de la dive Bouteille, estans par cy dessous passez, sinon que Bacbuc la noble pontife vist de pampre vos souliers plains, qui est acte du tout et par entier diamètre contraire au premier, et signification évi- dente que le vin vous est en mespris, et par vous conculqué et subjugué. — Je, dist frère Jean, ne suis point clerc, dont me desplaist; mais je treuve dedans mon bréviaire que en la révélation fut comme chose admirable veue une femme ayant la lune sous les pieds : c'estoit, comme m'a exposé Bigot, pour signifier qu'elle n'estoit de la race et nature des autres, qui toutes ont à rebours la lune en teste, et par conséquent le cerveau tousjours lunatique; cela 144 LIVRE V, CHAPITRE XXXIV m'induit facillement à croire ce que dites, Madame lanterne m'amie. » CHAPITRE XXXV Comment nous desccndisnies soubs terre pour entrer au temple de la Bouteille, et comment Chinon est la première ville du monde. iNSi descendismes sous terre par un arceau incrusté de piastre, peint au dehors rudement d'une danse de ^:^W!l-i^b femmes et satyres, accompagnans le vieil Silenus riant sus son asne. Là jedisois à Pantagruel : « Geste entrée me ré- voque en souvenir la cave peinte de la première ville du monde, car là sont peinctures pareilles, en pareille fraischeur, comme icy. — Où est, demanda Pantagruel, qui est ceste première ville que dites? — Chinon, di-je, ou Caynon, en Touraine. — Je sçay, respondit Pantagruel, où est Chinon, et la cave peinte aussi; j'y ai beu maints verres de vin frais, et ne fais doute aucune que Chinon ne soit ville antique; son blason l'atteste, auquel est dit deux ou trois fois : ... Chinon, Petite ville, grand renom, Assise sus pierre ancienne ; Au hault le bois, au pied la Vienne. PANTAGRUEL I45 Mais comment seroit-elle ville première du monde? Où le trouvez vous par escrit? Quelle conjecture en avez? — Je, dy, trouve en l'Escriture sacrée que Cayn fut premier bastisseur de villes; vray donques semblable est que la première, il, de son nom, nomma Caynon, comme depuis ont à son imitation tous autres fondateurs et instaurateurs de villes imposé leurs noms à icelles. Athené, c'est en grec Minerve, à Athènes; Alexandre à Alexandrie; Constantin à Constantinople; Pompée à Pompeiopolis, en Cilicie; Adrian à Adrianople; Canaan aux Cananéens; Saba aux Sabeians; Assur aux Assyriens; Ptolomaïs, Cesarea, Tiberium, Herodium, en Judée. » Nous tenans ces menus propos, sortit le grand flasque (nostre Lanterne i'appelloit phlosque) gouverneur de la dive Bouteille, accompagné de la garde du temple, et estoient tous Bouteillons François. Iceluy, nous voyans tyrsigeres, comme j'ay dit, et couronnez de lierre, recognoissant aussi nostre insigne lanterne, nous fist entrer en seureté, et commanda que droit on nous menast à la princesse Bacbuc, dame d'honneur de la Bouteille et pontife de tous les mystères. Ce que fut fait. Rabelais. V. [46 LIVRE V, CHAPITRE XXXVL CHAPITRE XXXVI Comment nous descendismes les degrez teiradiqueSy et de la peur qu'eut Panurge. EPUis descendismes un degré marbrin sous terre : là estoit un repos ; tournans à gauche, en descendismes deux autres : là estoit un pareil repos ; puis trois à destour, et repos pareil ; et quatre autres de mesme. Là demanda Panurge : « Est-ce icy? — Quant degrez , dist nostre magnifique lanterne , avez compté? — Un, respondit Pantagruel, deux, trois, quatre. — Quants sont-ce ? demanda elle. — Dix, respondit Pantagruel. — Par, dist elle, mesme tétrade pythagorique, multipliez ce qu'avez résultant. — Ce sont, dist Pantagruel, dix, vingt ^ trente, quarante. — Combien fait le tout? dist elle. — Cent, respondit Pantagruel. — Adjoustez, dist elle, le cube premier : ce sont huit ; au bout de ce nombre fatal trouverez la porte du temple. Et y notez prudentement que c'est la vraye Psycogonie de Platon, tant célébrée par les Academiens, et tant peu entendue, de laquelle la moictié est composée d'unité des deux premiers nombres plains de deux quadrangulaires et de deux cubiques. » Descendus ces degrez numeraulx sous terre. PANTAGRUEL 1 47 nou5 furent bien besoin premièrement nos jambes, car sans icellesne descendions qu'en rouUant comme tonneaux en cave basse; secondement, nostre preclare lanterne, car en ceste descente ne nous apparoissoit autre lumière en plus que si nous fus- sions au trou de Sainct Patrice en Hybernie, ou en la fosse de Trophonius en Boëtie. Descendus environ septante et huit degrez, s'escria Panurge, addressant sa parolle à nostre luysante lanterne ; « Dame mirifique, je vous prie de cœur contrit» retournons arrière. Par la mort bœuf, je meurs de malle peur. Je consens jamais ne me marier; vous avez prinsde peine et fatigues beaucoup pour moy. Dieu vous le rendra en son grand rendouer, je n'en seray ingrat issant hors ceste caverne des Troglodites. Retournons, de grâce. Je doubte fort que soit icy Tenare, par lequel on descend en enfer, et me semble que j'oy Cerberus abbayant. Escoutez, c'est luy, ou les aureilles me cornent; je n'ay à luy dévotion aucune, car il n'est mal des dens si grand que quant les chiens nous tiennent aux jambes. Si c'est icy la fosse de Trophonius, les lémures et lutins nous mangeront tous vifs, comme jadis ils mangèrent un des hallebardiers de Demetrius , par faute de bribes. Es tu là, frère Jean? Je te prie, mon bedon, tien toy prés de moy, je meurs de peur. As tu ton bragmard? Encores n'ay-je armes aucunes, n'offensives ne defîensives. Retournons. 148 LIVRE V, CHAPITRE XXXVI — J'y suis^ dist frère Jean, j'y suis; n'ayes peur, je te tien au collet ; dix huit diables ne t'emporteront de mes mains, encores que sois sans armes. Armes jamais au besoin ne faillirent quand bon cueur est associé de bon bras ; plustost armes du Ciel pleuveroient, comme au champs de la Crau, prés les fosses Mariannes en Provence, jadis pleurent cailloux (ils y sont encores) pour l'aide d'Hercules, n'ayant autrement dequoy combatre les deux enfans de Neptune. Mais quoy ? Descendons nous icy es lim- bes des petits enfans? Par Dieu, ils nousconchieront tous, ou bien en enfer à tous les diables? Cordieu, je les vous galleray bien, à ceste heure que j'ay du pampre en mes souliers. O que je me battray verde- ment ! Où est ce? où sont ils? Je ne crains que leurs cornes. Mais les deux cornes que Panurge marié portera m'en garentiront entièrement. Je le voy ja, en esprit prophétique^ un autre Acteon, cornant, cornu, cornancul. — Garde, Frater, dist Panurge, attendant qu'on marira les moines, que n'espouses la fiebvre quartaine. Car je puisse donc sauf et sain retourner de cestuy hypogée, en cas que je ne te la beline, pour seulement te faire cornigere, cornipetant; autrement pensé-je bien que la fiebvre quarte est assez mauvaise bague. Il me souvient que Grippe-minaud te la voulut donner pour femme, mais tu l'appellas hérétique. » Icy fut le propos interrompu par nostre splen- PANTAGRUEL 49 dide lanterne, nous remonstrantque là estoit le lieu auquel convenoit favorer et par suppression de parolles et taciturnité de langues. Du demourant fist response peremptoire que de retourner sans avoir le mot de ia Bouteille n'eussions d'espoir aucun, puisqu'une fois avions nos souliers feustrez de pampre. « Passons donques, dist Panurge, et donnons de la teste à travers tous les diables. A périr n'y a qu'un coup. Toutesfois je me reservois la vie pour quelque bataille. Boutons, boutons, passons outre. J'ay du courage tant et plus ; vray est que le cueur me tremble, mais c'est pour la froideur et relenteur de ce Cavayn. Ce n'est de peur, non, ne de fîebvre. Boutons, boutons, passons, poussons, pissons. Je m'appelle Guillaume sans peur. » CHAPITRE XXXVII Comment les portes du temple par soy mesme admirablement s*entr' ouvrirent. hr-j N fin des degrez rencontrasmes un portai de fin jaspe, tout compassé et basty à ouvrage et forme dorique, en Tss^r^Vs^ la face duquel estoit en lettres ioni- ques d^or trespur escripte ceste sentence : 'Ev oTvw oiXrfieioi, c'est à dire en vin vérité. Les deux portes l5o LIVRE V, CHAPITRE XXXVII estoient d'arain comme coiinthian, massives, faites à petites vinettes, enlevées et esmaillées mignonne- ment selon l'exigence de la sculpture , et estoient ensemble jointes et refermées esgalement en leur mortaise sans clavier et sans catenat, sans lyaison aucune. Seulement y pendoit un diamant indique, de la grosseur d'une febve egyptiatique, enchâssé en or brisé à deux pointes^ en figure exagone et en ligne directe. A chascun costé vers le mur pendoit une poignée de scordion. Là nous dist nostre noble lanterne qu'eussions son excuse pour légitime si elle desistoit plus avant nous conduire; seulement qu'eussions à obtempérer es instructions de la pontife Bacbuc, car entrer dedans ne luy estoit permis pour certaines causes, lesquelles taire meilleur estoit à gens vivans vie mortelle qu'exposer. Mais, en tout événement, nous commanda estre en cerveau, n'avoir frayeur ne peur aucune, et d'elle se confier pour la retraite. Puis tira le diamant pendant à la commissure des deux portes, et à dextre le jetta dedans une capse d'ar- gent, à ce expressément ordonnée ; tira aussi de Tessueil de chascune porte un cordon de soye cra- moisine, long d'une toise et demie, auquel pendoit le scordion, l'attacha à deux boucles d'or expres- sément pour ce pendantes aux costez, et se retira à part. Soudainement les deux portes, sans que personne y touchast, de soy mcsme s'ouvrirent, et s'ouvrant PANTAGRUEL l5l firent non bruit strident, non frémissement horrible, comme font ordinairement portes de bronze rudes et pesantes, mais doux et gratieux murmur retentissant par la voulte du temple , duquel soudain Pantagruel entendit la cause, voyant sous l'extré- mité de l'une et l'autre porte un petit cylindre, le- quel par sus l'esseuil joignoit la porte, et se tour- nant selon qu'elle se tiroit vers le mur, dessus une dure pierre d'ophytes, bien terse et esgalement polie, par son frottement faisoit ce doux et harmonieux murmur. Bien je m'esbahissois comment les deux portes, chascune par soy, sans l'oppression de personne, estoient ainsi ouvertes; pour cestuy cas merveilleux entendre, après que tous fusmes dedans entrez, je projettay ma veuë entre les portes et le mur, convoiteux de sçavoir par quelle force et par quel instrument estoient ainsi refermées, doutant que nostre amiable lanterne eust à la conclusion d'i- celles apposé l'herbe dite ethiopis , moyennant laquelle on ouvre toutes choses fermées ; mais j'apperceu que la part en laquelle les deux portes se fermoient, en la mortaise intérieure, estoit une lame de fin acier, enclavée sur la bronze corinthiane, J'apperceu d'avantage deux tables d'aimant indi- ques, amples et espoisses de demye paume, à couleur cerulée, bien licées et bien polies; d'icelles toute l'espoisseur estoit dedans le mur du temple l52 LIVRE V, CHAPITRE XXXVII engravée, à l'endroit auquel les portes entièrement ouvertes avoient le mur pour fin d'ouverture. Par doncques la rapacité violente de l'aimant, les lames d'acier, par occulte et admirable insti- tution de nature, patissoient cestuy mouvement ; consequemment les portes y estoient lentement ravies et portées, non tousjours toutesfois , mais seulement l'aimant susdit osté, par la prochaine session duquel Pacier estoit de l'obéissance qu'il a naturellement à l'aimant absout et dispensé ; ostées aussi les deux poignées de scordion , les- quelles nostre joyeuse lanterne avoit par le cor- don cramoisin eslongnées et suspendues, parce qu'il mortifie l'aimant et despouille de ceste vertu attractive. En l'une des tables susdites, à dextre, estoit ex- quisitement insculpé en lettres latines antiquaires ce vers iambique senaire : Ducunt volentemfata, nokntem trahunt. Les destinées meuvent celuy qui consent, tirent celuy qui refuse. En l'autre je veis à senestre, en majuscules lettres, elegantement insculpé ceste sentence : Toutes choses se meuvent a leur fin. PANTAGRUEL i53 CHAPITRE XXXVIII Comment le pavé du temple estait faict par emble- mature admirable. ^A^ EUES ces inscriptions, jettay mes yeux j^)) à la contemplation du manifique temple, )- et considerois l'incredible compacture ^ du pavé, auquel par raison ne peut estre ouvrage comparé qui onques soit ou ait esté dessous le firmament, fust-ce celuy du temple de Fortune en Preneste, au temps de Sylla, ou le pavé des Grecs appelle Asarotum^ lequel fist Sosistratus en Pergame. Car il estoit à ouvrage tesseré, en forme de petits carreaux, tous de pierres fines et polies, chascune en sa couleur naturelle : Tune de jaspe rouge tainct plaisamment de diverses macules, l'autre d'ophite , l'autre de porphyre, l'autre de lycoptalmie semé de scintiles d'or menues comme atomes, l'autre d'agathe à onde de petits flammeaux confus et sans ordre, de couleur laictée, l'autre de calcédoine trescher, l'autre de jaspe verd, avec certaines veines rouges et jaunes, et estoient en leur assiete départies par ligne diagonale. Dessus le portique, la structure du pavé estoit une emblemature, à petites pierres rapportées, chas- cune en sa naïfve couleur, servans au dessain des figures, et estoit comme si par dessus le pavé susdit on eust semé une jonchée de pampre, sans trop 1^4 LIVRE V, CHAPITRE XXXVIII curieux agensement : car en un lieu sembloit estre espandu largement, en l'autre moins, et estoit ceste infoliature insigne en tous endroits, mais singuliè- rement y apparoissoient . au demy jour, aucuns limassons en un lieu, rampans sus les raisins, en autre petits lisars courans à travers le pampre ; en autre apparoissoient les raisins à demy et raisins totalement meurs, par tel art et engin de l'archi- tecte composez et formez qu'ils eussent aussi faci- lement deceu les estourneaux et autres petis oiselets que fîst la peincture de Xeuxis Heracleotain. Quoy que soit, ils nous trompoient tresbien, car à l'endroit auquel l'architecte avoit le pampre bien espois semé, craignans nous offenser les pieds, nous marchions haut à grandes enjambées, comme on fait passant quelque lieu inégal et pierreux. Depuis jettay mes yeux à contempler la voulte du temple, avec les parois, lesquels estoient tous incrustez de marbre et porphyre, à ouvrage mosayque, avec une mirifique emblemature, depuis un bout jusques à l'autre, en laquelle estoit, commençant à la part senestre de Tentrée, en élégance incroiable représentée la bataille que le bon Bacchus gagna contre les Indians, en la manière que s'ensuit. PANTAGRUEL i55 CHAPITRE XXXIX Comment en l'ouvrage mosayque du temple estoit représentée la bataille que Bacchus gagna contre les Indians.u commencement estoient en figure diverses villes, villages, chasteaux, forteresses, champs et forests, toutes £ ardentes en feu. En figure aussi estoient femmes diverses forcenées et dissolues, lescjuelles metoient furieusement en pièces veaux, moutons et brebis toutes vives, et de leur chair se paissoient. Là nous estoit signifié comme Bacchus, entrant en Indie, mettoit tout à feu et à sang. Ce nonobstant^ tant fut des Indians desprisé qu'ils ne daignèrent luy aller encontre, ayans advertissement certain par leurs espions qu'en son ost n'estoient gens aucuns de guerre, mais seulement un petit bon homme, vieux, efféminé et tousjours yvre, accompagné de jeunes gens agrestes, tous nuds, tousjours dansans et sautans, ayans queues et cornes, comme ont les jeunes chevreaux, et grand nombre de femmes yvres. Dont se résolurent les laisser outre passer, sans y résister par armes, comme si à honte, non à gloire, deshonneur et ignominie leurs revint, non à honneur et prouesse, avoir de telles gens victoire. En cestuy despris, Bacchus tousjours gaignoit pais, et mettoit tout à l56 LIVRE V, CHAPITRE XXXIX feu, pource que feu et foudre sont de Bacchus les armes paternelles, et avant naistre au monde fut par Jupiter saulvé de foudre, sa mère Semelé et sa maison maternelle arse et destruite par feu, et sang pareillement, car naturellement il en faict au temps de paix et en tire au temps de guerre. En tesmoi- gnage sont les champs en l'isle de Samos, dits Pa- nema, c'est à dire tout sanglant, auquel Bacchus les Amazones acconceut, fuyantes de la contrée des Ephesians, et les mist toutes à mort par phlebotomie, de mode que le dit champ estoit de sang tout embeu et couvert. Dont pourrez doresnavant entendre , mieux que n'a descrit Aristoteles en ses Problèmes , pourquoy jadis on disoit en proverbe commun : « En temps de guerre ne mange et ne plante menthe. » La raison est, car en temps de guerre sont ordinaire- ment départis coups sans respect; donques l'homme blessé, s'il a celuy jour manié ou mangé menthe, impossible est, ou bien difficile, luy restreindre le sang. Consequemment estoit en la susdite emblemature figuré comment Bacchus marchoit en bataille, et estoit assis sur un char magnifique tiré par trois coubles de jeunes pards joints ensemble; sa face estoit comme d'un jeune enfant, pour enseignement que tous bons beuveurs jamais n'envieillissent, rouge comme un chérubin, sans un poil de barbe au manton. En teste portoit cornes agues, au dessus d'icelles une belle couronne faicte de pampre et de PANTAGRUEL I Sj raisins, avec une mitre rouge cramoisine , et estoit chaussé de brodequins dorez. En sa compagnie n'estoit un seul homme, toute sa garde et toutes ses forces estoient de Bassarides, Evantes, Euhyades, Edonides, Trieterides, ^gj" gies, Mimallones, Menades, Thyades etBacchides, femmes forcenées, furieuses, enragées, ceinctes de dragons et serpens vifs en Heu de ceinctures , les cheveux voletans en l'air, avecques frontaux de vignes, vestues de peaux de cerfs et de chèvres, portans en mains petites haches, tyrses, rançons, et hallebardes en forme de noix de pin, et certains petits boucliers légers, sonnans et bruyans quand on y touchoit tant peu feust, desquels elles usoient, quand besoin estoit, comme de tabourins et de tymbons. Le nombre d'icelles estoit septante et neuf mille deux cens vingt sept. L'avantgarde estoit menée par Silenus, homme auquel il avoit sa fiance totalle, et duquel par le passé avoit la vertu et magnanimité de courage et prudence en divers endroits congneu. C'estoit un petit vieillard tremblant, courbé, gras, ventru à plain basts, et les aureilles avoit grandes et droictes, le nez pointu et aquilin, et les sourcilles rudes et grandes comme un sillon; estoit monté sus un asne couillard; en son poing tenoit poursoy' appuyer un baston, pour aussi gallentement combatre, si par cas convenoit descendre en pieds, et estoit vestu d'une robbe jaulne à usage de femme. l58 LIVRE V, CHAPITRE XXXIX Sa compagnie estoit de jeunes gens champestres , cornus comme chevreaux et cruels comme lions, tous nuds, toujours chantans et dansans les cor- daces : on les appelloit Tityres et Satyres. Le nombre estoit octante cinq mille six vingts et treize. Pan menoit l'arrieregarde, homme horrifique et monstrueux. Car par les parties inférieures du corps il ressembloit à un bouc, les cuisses avoit velues, portoit cornes en teste droictes contre le ciel. Le visage avoit rouge et enflambé, et la barbe bien fort longue; homme hardy, courageux, hazardeux et facile à entrer en courroux; en main senestre portoit une fluste, en dextre un baston courbé; ses bandes estoient semblablement composées de Satyres, Hemipans, Aegipans, Sylvains, Faunes, Lé- mures, Lares, Farfadets et Lutins, en nombre de soixante et dixhuit mille cens et quatorze. Le signe commun à tous estoit ce mot : Evohe. PANTAGRUEL I Sg CHAPITRE XL Comment en Vemhlematare estait figuré le hourt et l'assaut que donnait le bon Bacchus contre les Indians. ONSEQUEMMENT estoit figuré le hourt et l'assaut que donnoit le bon Bacchus contre les Indians. Là consideroisque SilenuSj chef de l'avantgarde, suoit à grosses gouttes, et son asne aigrement tourmentoit; l'asne de mesmes ouvroit la gueule horrible- ment, s'esmouchoit, desmanchoit, s'escarmouchoit en façon espouvantable, comme s'il eust un freslon au cul. Les Satyres, capitaines, sergens de bandes, caps d'escadre, corporals, avec cornaboux sonnant les orthies, furieusement tournoyoient autour de l'ar- mée à saux de chèvres, à bons, à pets, à ruades et pennades, donnans courage aux compagnons de vertueusement combatre. Tout le monde en figure cryoit Evohe ! Les Menades premières faisoient in- cursion sur les Indians avec cris horribles et sons espouvantables de leurs tymbons et bouchers; tout le ciel en retentissoit, comme designoit l'emblemature, à fin que plus tant n'admirez l'art d'Apelles, Aristides Thebain, et autres qui ont painct les tonnerres, esclairs, foudres, vents, paroles, lémures, et les esprits. l6o LIVRE V, CHAPiTRE XL Consequemment estoit i'ost des Indians comme adverty que Bacchus mettoit leur pays en vastation. En front estoient les elephans, chargez de tours, avec gens de guerre en nombre infiny; mais toute l'armée estoit en routte, et contre eux et sus eux se tournoient et marchoient leurs elephans par le tumulte horrible des Bacchides et la terreur panique qui leur avoit le sens tollu. Là eussiez veu Silenus son asne aigrement talonner, et s'escrimer de son baston à la vieille escrime, son asne voltiger après les elephans la gueule bée, comme s'il brailloit, et braillant martiallement(en pareille braveté que jadis il esveilla la nymphe Lotis en plains Bacchanales, quand Priapus plein de priapisme la vouloit dor- mant priapiser sans la prier) sonnast l'assaut. Là eussiez veu Pan sauteler avec ses jambes tortes autour des Menades, avec sa fluste rustique les exciter à vertueusement combatre. Là eussiez aussi veu en après un jeune Satyre mener prisonniers dixsept roys, une Bacchide tirer avec ses ser- pens quarante et deux capitaines, un petit Faune porter douze enseignes prinses sur les ennemis, et le bon homme Bacchus sur son char se pourmener en seureté parmy le camp, riant, se gaudissant et beuvant d'autant à un chascun. En fin estoit représenté en figure emblématique le trophée de la victoire et triomphe du bon Bacchus. Son char triomphant estoit tout couvert de lierre prins et cueilly en la montagne Meros, et ce pour la PANTAGRUEL l6l rarité, laquelle hausse le pris de toutes choses en Indie, expressément d'icelles herbes. En ce depuis l'imita Alexandre le Grand en son triomphe Indique, et estoit le char tyré par elephans joints ensemble. En ce depuis l'imita Pompée le Grand, à Rome, en son triomphe aphricain. Dessus estoit le noble Bacchus beuvant en un canthare. En ce depuis l'imita Gains Marins après la victoire des Gimbres, qu'il obtint prés Aix en Provence. Toute son armée estoit couronnée de lierre, leurs tyrses, boucliers et tymbons en estoient couvers; il n'estoit l'asne de Sile- nus qui n'en fust capparaçonné. Es costez du char estoient les roys Indians, prins et liez à grosses chaisnes d'or; toute la brigade marchoit avec pompes divines en joye et liesse indicible, portant infinis trophées, ferculeset despouilles des ennemis, en joyeux epinicies et petites chansons villatiques et dithyrambes resonnans. Au bout estoit descript le pays d'Egipte avec le Nil et ses crocodilles, cercopitheces, ibides, singes, trochiles, ichneumones, hipopotames, et autres bestes à luy domestiques, et Bacchus marchant en icelle contrée à la conduite de deux beufs, sus l'un desquels estoit escript en lettres d'or Apis, sus l'autre Osyris, pource qu'en Egipte, avant la venue de Bacchus, n'avoit esté veu beuf ny vache. Rabelais. V. >2 LIVRE V, CHAPITRE XLI CHAPITRE XLI Comment le temple estait esclairé par une lampe admirable. VANT qu'entrer à Texposition de la Bouteille, je vous descrirayla figure admirable d'une lampe moyennant laquelle .estoit eslargie lumière partout le temple, tant copieuse qu'encor qu'il fust subterrain, on y voyoit comme en plein midy nous voyons le soleil cler et serain, luysant sur terre. Au milieu de la voulte estoit un anneau d'or massif attaché, de la grosseur de plein poing, auquel pendoient de grosseur peu moindre trois chesnes bien artificiellement faites, lesquelles, deux pieds et demy en l'air, comprenoient en figure triangle une lame de fin or, ronde, de telle gran- deur que le diamètre excedoit deux coudées et demye palme. En icelle estoient quatre boucles ou pertuys, en chascune desquelles estoit fixement re- tenue une boule vuyde, cavée par le dedans, ouverte du dessus comme petite lampe, ayant en cir- conferance environ deux palmes, et estoient toutes de pierres bien précieuses, l'une d'améthyste, l'autre de carboucle lybien, la tierce d'opalle, la quarte d'anthracite. Chascune estoit plaine d'eau ardente cinq fois distilce par alambic serpentin, inconsomptible comme l'huille que jadis mist Callimachus en PANTAGRUEL l63 la lampe d'or de Pallas en l'Acropolis d'Athènes, avec un ardent lychnion, faict part de lin abestin, comme estoit jadis au temple de Jupiter en Ammonie (et le veit Cleombrotus, philosophe tresstudieux), part de lin carpasien, lesquels par feu plustost sont renouveliez que consommez. Au dessouz d'icelle lampe, environ deux pieds et demy, les trois chesnes en leurs figures premières estoient embouclées en trois anses, lesquelles issoient d'une grande lampe ronde de cristalin trespur, ayans en diamètre une coudée et demye, laquelle au dessus estoit ouverte environ deux palmes; par ceste ouverture estoit au milieu posé un vaisseau de cristalin pareil, en forme de coucourde, ou comme à un urinai, et descendoit jusques au fonds de la grande lampe avec telle quantité de la susdicte eau ardente que la flamme du lin abestin estoit droicte- ment au centre de la grande lampe. Par ce moyen sembloit donc tout le corps spherique d'icelle ardre et enflamboyé, parce que le feu estoit au centre et poinct moyen. Et estoit difficile d'y asseoir ferme et constant regard, comme on ne peut au corps du soleil, estant la matière de merveilleuse perspicuité, et l'ouvrage tant diaphane et subtil, par la flexion des diverses couleurs, qui sont naturelles es pierres précieuses, des quatre petites lampes supérieures à la grand inférieure, et d'icelles quatre estoit la resplandeur en tous points inconstante et vacillante parle temple. 164 LIVRE V, CHAPITRE XII Venant d'avantage icelle vague lumière toucher sur la pollissure du marbre, duquel estoit incrusté tout le dedans du temple, apparoissoient telles couleurs que voyons en l'arc céleste quand le clair soleil touche les nues pluvieuses. L'invention estoit admirable, mais encores plus admirable, ce me sembloit, que le sculpteur avoit autour de la corpulance d'icelle lampe cristaline engravéeà ouvrage catagljphe une prompte et gail- larde bataille de petis enfans nuds, montez sus des petis chevaux de bois, avec lances de virolets et pavois faits subtilement de grappes de raisins entrelassées de pampre, avec gestes et effors puériles tant ingénieusement par art exprimez que nature mieux ne le pourroit. Et ne sembloient engravez dedans la matière, mais en bosse, ou pour le moins en crotesque apparoissoient enlevez totalement, moyennant la diverse et plaisante lumière, laquelle, dedans contenue, ressortissoit par la sculpture. PANTAGRUEL 65 CHAPITRE XLII Comment par la pontife Bacbuc nous fust monstre dedans le temple une fontaine fantastique. ONSiDERANS en ecstase ce temple miri- fique et lampe mémorable, s'offrit à nous la vénérable pontife Bacbuc avec sa compagnie, à face joyeuse et riante; et, nous voyans accoustrez comme a esté dit, sans difficulté nous introduit au lieu moyen du temple, auquel, dessouz la lampe susdite, estoit la belle fontaine fantastique. CHAPITRE XLIII Comment l'eau de la fontaine rendoit goust de vin, selon l'imagination des beuvans. s nous commanda estre hanaps, I^N^ tasses et gobelets présentez, d'or, !ii d'argent, de crystalin, de porcelaine, 2 et fusmes gratieusement invitez à boire de la liqueur sourdante d'icelle fontaine, ce que fismes tresvolontiers : car pour plainctive estoit une fontaine fantastique, d'estofîe et ouvrage plus précieux, plus rare et mirifique qu'onques n'en songea dedans les limbes Pluto. Le soubaste- l66 LIVRE V, CHAPITRE XLIII ment d'icelle estoit de trespur et treslimpide ala- bastre, haulteur ayant de trois palmes, peu plus, en figure heptagonne, esgalement party par dehors, avec ses stylobates, arulettes, cimasultes et undiculations doriques à Tentour. Par dedans estoit ronde exactement. Sus le poinct moyen de chascun angle et marge estoit assise une coulomne ventricule, en forme d'un cycle d'yvoire ou alabastre (les modernes architectes l'appellent portri), et es- toient sept en nombre total selon les sept angles. La longueur d'icelles, depuis les bases jusques aux architraves, estoit de sept palmes, peu moins, à juste et exquise dimension d'un diamètre passant par le centre de la circonférence et rotondité intérieure. Et estoit l'assiette en telle composition que, projettans la veuë derrière l'une, quelle que fust en sa cube, pour regarder les autres opposites, trouvions le cône pyramidal de nostre ligne visuale finer au centre susdit, et là recevoir, de deux opposites, ren- contre d'un triangle equilateral, duquel deux lignes partissoient esgalement la colomne. Celle que voulions mesurer, et passante d'un costé et d'autre, deux colomnes franches à la première tierce partie d'intervalle, rencontroient leur ligne basique et fon- damentale, laquelle par ligne consulte pourtraicte jusques au centre universal, esgalement mipartie, rendoit en juste départ la distance des sept colomnes opposites par ligne directe, principiante à l'angle PANTAGRUEL 167 obtus de la marge, comme vous sçavez qu'en toute figure angulaire impare un angle tousjours est au milieu des deux autres trouvé intercalant. En quoy nous estoit tacitement exposé que sept demis diamètres font en proportion géométrique amplitude et distance, peu moins, telle qu'est la circonferance de la figure circulaire de laquelle ils seroient extraicts, sçavoir est trois entiers avec une huitiesme et demie, peu plus, ou une septiesme et demie, peu moins, selon l'antique advertissement d'Euclides, Aristoteles, Archimedes et autres. La première colomne, sçavoir est celle laquelle à l'entrée du temple s'objectoit à nostre veuë, estant de saphir azuré et céleste; la seconde de hiacinthe naïfvement la couleur, avec lettres grecques A I en divers lieux, représentant de celle fleur, en laquelle fut d'Ajax le sang colericque converty; la tierce de diamant anachite, brillant et resplendissant comme foudre; la quarte de rubis baillay, masculin et amethistizant, de manière que sa flame et lueur finis- soit en pourpre et violet, comme est l'amethiste; la quinte d'emeraude, plus cinq cens fois magnifique qu'onques ne fut celle de Serapis dedans le labyrinthe des Egyptiens, plus floride et plus luysante que n'estoient celles qu'en lieu des yeux on avoit apposé au lion marbrin gisant prés le tombeau du roy Hermias; la sexte d'agathe, plus joyeuse et variante en distinctions de macules et couleurs que ne fut celle que tant chère tenoit Pirrhus, roy desEpy- l68 LIVRE V, CHAPITRE XLIII rotes; la septiesme de sienite transparente, en blancheur de berylle, avec resplendeur comme miel hymetian, et dedans y apparoissoit la lune, en figure et mouvement telle qu'elle est au ciel, pleine, silente, croissante ou décroissante : qui sont pierres par les antiques Caldeans et mages attribuées aux sept planettes du ciel. Pour laquelle chose par plus rude Minerve entendre, sus la première de saphir estoit, au dessus du chapiteau, à la vive et centrique ligne perpendiculaire, eslevée, en plomb elutian bien précieux, l'image de Saturne tenant sa faux, ayant aux pieds une grue d'or artificiellement esmaillée, selon la competance des couleurs, naïfvement deuz à l'oiseau saturnin; sus la seconde de hiacinthe tour- nant à gausche estoit Jupiter en estain jovetian, sus la poictrine un aigle d'or esmaillé selon le naturel; sus la troisiesme Phebus en or obrizé, en sa main dextre un coq blanc; sus la quatriesme en airain corinthien Mars, à ses pieds un lion; sus la cinquiesme Venus en cuyvre, matière pareille à celle dont Aris- tonides fist la statue d'Athamas, exprimant en rougissante blancheur la honte qu'il avoit contemplant Learche, son fils, mort d'une cheute à ses pieds; sus la sixiesme Mercure en hydrargyre, fixe, maleable et immobile, à ses pieds une cigogne; sus la septiesme la Lune en argent, à ses pieds un lévrier. Et estoient ces statues de telle hauteur, qui estoit la tierce partie des colonnes subjettes, peu plus, tant ingénieusement représentées, selon le portraict PANTAGRUEL 169 des mathématiciens, que le canon de Polycletus, lequel faisant fut dit l'art apprendre de l'art avoir fait, à peine y eust esté receu à comparaison. Les bases des colonnes, les chapiteaux, les architraves, zoophores et comices, estoient à ouvrage phrygien, massives, d'or plus pur et plus fin que n'en porte le Leede prés Montpelier, Gange en Indie, le Pau en Italie, l'Hebrus en Thrace, leTage en Espagne, le Pactol en Lydie; les arceaux entre les colomnes surgeans, de la propre pierre d'icelles jusques à la prochaine par ordre, sçavoir est de saphir vers le hiacinthe, de hiacinthe vers le dia- mant, et ainsi consécutivement. Dessus les arces et chapiteaux de colomne en face intérieure estoit une croppe, érigée pour couverture de la fontaine, la- quelle derrière l'assiette des planettes commençoit en figure heptagone, et lentement finissoit en figure spherique, et estoit de cristal tant emundé, tant diaphane et tant poly, entier et uniforme en toutes ses parties, sans venes, sans nuées, sans glassons, sans capilamens, que Xenocrates onques n'en vid qui fust à luy à parangonner. Dedans la corpulance d'icelle estoient par ordre en figure et characteres exquis artificiellement inscul- pez les douze signes du zodiaque, les douze mois de l'an, avec leurs proprietez, les deux solstices, les deux equinoxes, la ligne eclyptique, avec certaines plus insignes estoiles fixes autour du pol antartique, et ailleurs, par tel art et expression que je 22 yo LIVRE V, CHAPITRE XLIII pensois estre ouvrage du roy Necepsus ou de Petosiris, antique mathématicien. Sus le sommet de la croppe susdite, correspon- dant au centre de la fontaine, estoient trois unions eleichies, uniformes, de figure turbinée en totale perfection lachrimale, toutes ensemble cohérentes, en forme de fleur de lis, tant grandes que la fleur excedoit une palme. Du calice d'icelles sortoit un car- boucle gros comme un œuf d'autruche, taillé en forme heptagonne (c'est nombre fort aimé de Nature), tant prodigieux et admirable que, levans nos yeux pour le contempler, peu s'en faillit que perdissions la veuë : car plus flamboyant ne plus croissant est le feu du soleil, ne l'esclair; lors il nous apparoissoit tellement qu'entre justes estimateurs jugé facilement seroit plus estre en ceste fontaine et lampes cy-dessus descriptes de richesses et singularitez que n'en contiennent l'Asie, l'Aff'rique et l'Europe ensemble. Et eust aussi facilement obscurcy le pantharbe de loachas, magicien Indic, c^ue sont les estoilles par le soleil et clair midy. Aille maintenant se vanter Cleopatra, royne d'Egypte, avec ses deux unions pendens à ses aureilles, desquels l'un, présent Antonius triumvir, elle par force de vinaigre fondit en eau, estant à l'estimation de cent fois sexterces. Aille Pompeïe Plautine avec sa robbe toute couverte d'emeraudes et marguerites, en tissure alter- native, laquelle tiroit en admiration tout le peuple PANTAGRUEL 7 de la ville de Rome, laquelle on disoit estre fosse et magazin des vainqueurs larrons de tout le monde. Le coulement et laps de la fontaine estoit par trois tubules et canals faits de marguerites fines en l'as- siette de trois angles equilateraux promarginaires cy-dessus exposez, et estoientles canals produits en ligne limaciale bipartiente. Nous avions iceux considéré, ailleurs tournions nostre veuë, quand Bacbuc nous commanda entendre à l'exiture de l'eau; lors entendismes un son à merveille harmonieux, obtus toutesfois et rompu, comme de loin venant et soubterrain. En quoy plus nous sembloit délectable que si apert eust esté et de prés ouy. De sorte qu'autant comme les fenestres de nos yeux, nos esprits s'estoient oblectez à la contemplation des choses susdites, autant en restoit il aux aureilles, à l'audiance de ceste harmonie. Adonc nous dist Bacbuc : « Vos philosophes nient estre par vertu de figures mouvement fait ; oyez icy, et voyez le contraire. Par la seule figure limaciale que voyez bipartiente, ensemble une quintuple infoliature mobile à chascune rencontre intérieure, telle qu'est en la veine cave au lieu qu'elle entre le dextre ventricule du cueur, est ceste sacrée fontaine excolée, et par icelle une armonie telle qu'elle monte jusques à la mer de vostre monde. » Puis commanda qu'on nous fist boire. Car, pour clerement vous advertir, nous ne som- 172 LIVRE V, CHAPITRE XLIII mes du calibre d'un tas de veaux qui, comme les passereaux ne mangent sinon qu'on leur tappe la queue, pareillement ne boivent ne mangent sinon qu'on les rue à grands coups de levier; jamais personne n'esconduisons nous invitant courtoise- ment à boire. Puis nous interrogua Bacbuc, de- mandant que nous en sembloit. Nouslujfismesres- ponse que ce nous sembloit bonne et fresche eau de fontaine, limpide et argentine plus que n'est Argirondes en Etolie, Peneus en Thessalie, Axius en Mydonie, Cidnus en Cilicie, lequel, voyant Alexandre Macedon tant beau, tant clair et tant froid en cœur d'esté, composa la volupté de soy dedans baigner au mal qu'il prevoyoit luy advenir de ce tiansitoire plaisir. « Ha! dist Bacbuc, voila que c'est non considérer en soy ni entendre les mouvemens que faict la langue musculeuse, lorsque le boire dessus coule pour descendre en l'estomac. Gens peregrins, avez-vous les gosiers enduits, pavez et esmaillez, comme eut jadis Pythillus, dit Theutes, que de ceste liqueur deïfique onques n'avez le goust ne saveur recongneu? Apportez icy, dist à ses damoiselles, mes descrottoires que sçavez, à fin de leur racler, esmonder et nettoyer le palat. » Furent donques apportez beaux gros et joyeux jambons, belles grosses et joyeuses langues de bœuf fumées, saumades belles et bonnes, cervelats, boutargues, bonnes et belles saucisses de venaison, et tels autres ramonneurs de gosier; par son com- PANTAGRUEL 75 mandement nous en mangeasmes jusques là que confessions nos estomachs estre tresbienescurez, de soif nous /importunant assez fascheusement; donc nous dist : « Jadis un capitaine Juif, docte et chevaleureux, conduisant son peuple par les desers en extrême famine, impetra des cieux la manne, la- quelle leur estoit de goust tel par imagination que paravant realement leur estoient les viandes. Icy de mesme, beuvans de ceste liqueur mirifique, sentirez goust de tel vin comme l'aurez imaginé. Or imagi- nez et beuvez. « Ce que nous fîsmes. Puis s'escria Panurge, disant : « Par Dieu ! c'est ici vin de Beaune, meilleur qu'onques jamais je beus, ou je me donne à nonante et seize diables. O ! pour plus longuement le gouster, qui auroit le col long de trois coudées, comme desiroit Philoxenus, ou comme une grue, ainsi que souhaittoit Melanthius! — Foy de lanternier, s'escria frère Jean, c'est vin de Grèce, gallant et voltigeant, O ! pour Dieu, amye, enseignez-moy la manière comment tel le faictes. — A moy, dist Pantagruel, il me semble que sont vins de Mirevaux, car avant boire je l'imaginois. Il n'a que ce mal qu'il est frais, mais je dis frais plus que glasse, que l'eau de Nonacris et Dercé, plus que la fontaine de Conthoporie en Corinthe, laquelle glassoit l'estomach et les parties nutritives de ceux qui en beuvoient. — Beuvez, dist Bacbuc, une, deux ou trois fois, de rechef changeans d'imagination, telle trouverez au 174 LIVRE V, CHAPITRE XLIII goust, saveur ou liqueur comme l'aurez imaginé, Et doresnavant dictes qu'à Dieu rien soit impossible. — Onques, respondi-je, ne fut dit de nous: nous maintenons qu'il est tout puissant. » CHAPITRE XLIV Comment Bacbuc accoustra Panurge pour avoir le mot de la Bouteille. ES paroles et beuvettes achevées, Bacbuc demanda: « Quiestceluy de vous qui. veut avoir le mot de la dive Bouteille ? — Je, dist Panurge, vostre humble et petit entonnouer. — Mon amy, dist-elle, je n'ay à vous faire instruction qu'une, c'est que, venant à l'Oracle, ayez soin n'escouter le mot, sinon d'une aureille. —C'est, dit frère Jean, du vin à une aureille. r> Puis le vestit d'une galleverdine, l'encapitonna d'un beau et blanc béguin, l'affeubla d'une chausse d'hypocras^ au bout de laquelle, en lieu de floc, mist trois obélisques, l'enguentela de deux bra- guettes antiques, le ceingnit de trois cornemeuses liées ensemble, le baigna la face trois fois dedans la fontaine susdite, enfin luy jetta au visage une poignée de farine, mist trois plumes de coq sus le costé droit de la chausse hypocratique, le fist cheminer neuf fois autour de la fontaine, luy fist faire trois PANTAGRUEL .75 beaux petits sauts, luy fist donner sept fois du cul contre la terre, tousjours disant ne sçay quelles conjurations en langue ethrusque, et quelquefois lisant en un livre ritual, lequel prés elle portoit une de ses mystagogues. Somme, je pense que Numa Pompilius, roy second des Romains, Cerites de Tuscie et le sainct Capitaine Juif, n'instituèrent oncques tant de cérémonies que lors je vy, n'aussi les vaticinateurs memphitiques à Apis en Egipte, ne les Euboïens en la cité de Rhamnes à Rhamnasie, n'a Jupiter Ammon, n'a Feronia, n'usèrent les anciens d'observances tant religieuses comme là je considerois. Ainsi accoustré, le sépara de nostre compagnie et mena à main dextre par une porte d'or, hors le temple, en une chappelle ronde faite de pierres phengites et speculaires, par la solide speculance desquelles, sans fenestre n'autre ouverture, estoit receuë lumière du soleil, là luysant par le précipice de la roche couvrante le temple major, tant facile- ment et en telle abondance que la lumière sembloit dedans naistre, non de hors venir. L'ouvrage n'estoit moins admirable que fut jadis le sacré temple de Ravenne, ou en Egypte celuy de l'isleChemnis. Et n'est à passer en silence que l'ouvrage d'icelle chappelle ronde estoit en telle symmetrie compassé que le diamètre du project estoit la hauteur de la voûte. Au milieu d'icelle estoit une fontaine de fin alabas- 176 LIVRE V, CHAPITRE XLIV tre, en figure heptagonne, à ouvrage et infoliature singulière, pleine d'eau tant clere que pourroitestre un élément en sa simplicité, dedans laquelle estoit à demy posée la sacrée Bouteille, toute revestuëde pur cristalin, en forme ovale, excepté que le limbe estoit quelque peu patent plus qu'icelle forme ne porteroit. CHAPITRE XLV Comment la pontife Bacbuc présenta Panurge devant ladicte Bouteille. A fîst Bacbuc, la noble pontife, Panurge besser et baiser la marge de la fontaine, puis le fîst lever, et autour danser trois Ithymbons. Cela fait, luy commanda s'asseoir entre deux scelles, le cul à terre, là préparées. Puis desploya son Livre ritual, et, luy soufflant en l'oreille gausche, le fist chanter une epilenie, comme s'ensuit : E.Boilvin del ft se inp A S«.!mon PANURGE DEVANT LA DIVE BOUTEILLE ' Rabelais, L. 5, C.iS)

PANTAGRUEL 177 o BOUTEILLE PLEINE TOUTE DE PrlISTERES, d'une OREILLE JE t'escoute ; NE DIFFERES, ET LE MOT PROFERES A U Q_U E L PEND MON CUEUR. EN LA TANT DIVINE LICQ^UEUR, QUI EST DEDANS TES FLANS RECLOSE , BACHUS , QUE FUT d'iNDE VAINCQUEUR , TIENT TOUTE VERITE ENCLOSE. VIN TANT DIVIN, LOING DE TOY EST FORCLOSE TOUTE MENSONGE ET TOUTE TROMPERYE ; EN JOYE SOIT l'aME DE NOÉ CLOSE , LEQUEL DE TOY NOUS FEIST LA TEMPERYE. SONNE LE BEAU MOT, JE t'eN PRYE , QUI ME DOIBT OSTER DE MISERES. AINSI NE SE PERDE UNE GOUTTE DE TOY, SOIT BLANCHE, OU SOIT VERMEILLE, O BOUTEILLE, PLEINE TOUTE DE MISTERES. Rabelais. V, 23 iy8 LIVRE V, CHAPITRE XLV Ceste chanson parachevée, Bacbuc jetta je ne sçay quoy dedans la fontaine, et soudain commença l'eau bouillir à force, comme fait la grande marmite de Bourgueil quand y est feste à bastons. Panurge es- coutoit d'une aureille en silence, Bacbuc se tenoit près de luy agenouillée, quand de la sacrée Bouteille issit un bruit tel que font les abeilles naissantes de la chair d'un jeune taureau occis et accoustré selon l'art et invention d'Aristeus, ou tel que fait un guarot desbandant l'arbaleste, ou en esté une forte pluye soudainement tombant. Lors feut ouy ce mot: « Trinch. » « Elle est, s'escria Panurge, par la vertu Dieu, rompue ou feslée, que je ne mente; ainsi parlent les bouteilles cristallines de nos pays quand elles prés du feu esclattent. » Lors Bacbuc se leva, et print Panurge sous le bras doucettement, luy disant : a Amy, rendez grâces es Cieulx, la raison vous y oblige; vous avez prompte- ment eu le mot de la dive Bouteille. Je dy le mot plus joyeux, plus divin, plus certain qu'encores d'elle aye entendu depuis le temps qu'icy je ministre à son tressacré oracle. Levez-vous, allons au chapitre en la glose duquel est le beau mot inter- prété. — Allons, dist Panurge, de par Dieu. Je suis aussi sage que entan. Esclairez : ou est ce livre? Tournez: où est ce chapitre? Voyons ceste joyeuse glose. )) PANTAGRUEL 79 CHAPITRE XLVI Comment Bacbuc interprète le mot de la Bouteille. ACBUC, jettant ne sçay quoy dedans le timbre, dont soudain fut l'ebulition de j à l'eau restraincte, mena Panurge au (^^ê^^^^ temple major, au lieu central auquel €Stoit la vivifique fontaine. Là, tirant un gros livre d'argent en forme d'un demy muy, ou d'un quart de sentences, le puysa dedans la fontaine et luy <list: « Les philosophes, prescheurs et docteurs de vostre monde vous paissent de belles paroles par les aureilles, icy nous realement incorporons nos preceptionspar la bouche. Pourtant je ne vous dy : Lisez ce chapitre, voyez ceste glose. Je vous dy : Tasfez ce chapitre, avaliez ceste belle glose. « Jadis un antique prophète de la nation judaïque mangea un livre, et fut clerc jusques aux dents; présentement vous en boirez un, et serez clerc jusques au foye. Tenez, ouvrez les mandibules. » Panurge ayant la gueule bée, Bacbuc print le livre d'argent, et pensions que fust véritablement un livre, à cause de sa forme, qui estoit comme un bréviaire, mais c'estoist un veneré, vray et naturel flascon plein de vin Phalerne, lequel elle fist tout avaller à Panurge. c( Voicy, dist Panurge, un notable chapitre, et glose fort autentique; est-ce tout ce que vouloit ibo LIVRE V, CHAPITRE XL VI prétendre le niot de la Bouteille trimegiste? J'en suis bien, vrayement. — Rien plus, respondit Bacbuc, car Trinch est un mot panomphée, célèbre et entendu de toutes nations, et nous signifie : Beuvez. Vous dites en vostre monde que sac est vocable commun en toute langue, et à bon droit et justement de toutes nations receu. Car, comme est l'apologue d'Esope, tous humains naissent un sac au col, souffreteux par nature, et mandians l'un de l'autre. Roy souz le ciel tant puissant n'est qui passer se puisse d'autruy, pauvre n'est tant arrogant qui passer se puisse du riche, voire fust-ce Hippias le philosophe, qui faisoit tout. Encores moins se passe l'on de boire qu'on ne fait de sac. « Et icy maintenons que non rire, ains boire, est le propre de l'homme. Je ne dy boire simple- ment et absolument, car aussi bien boivent les bestes; je dy boire vin bon et frais. Notez, amis, que de vin divin on devient, et n'y a argument tant seur, ny art de divination moins fallace. Vos Académiques l'afferment rendans l'etimologie de vin, lequel ils disent en grec oTvoç, estre comme vis, force, puis- sance : car pouvoir il a d'emplir l'ame de toute vérité, tout sçavoir et philosophie. Si avez noté ce qui est en lettres ioniques escrit dessus la porte du temple, vous avez peu entendre qu'en vin est vérité cachée. La dive Bouteille vous y envoyé, soyez vous mesmes interprètes de vostre entreprinse. — Possible n'est, dist Pantagruel, mieux dire que PANTAGRUEL l8l fait ceste vénérable pontife; autant vous en dy-je lorsque premièrement men parlastes. Trinch doncques. Que vous dit le cœur, eslevé par enthusiasme bacchique? « Trinquons, dist Pamirge^ de par le bon Bacchus. Ha, ho, ho, je voiray bas culs De bref bien à poinct sabourez Par couilles et bien embourez De ma petite humanité. Qu'est-ce cy ? La paternité De mon cœur me dict seurement Que je seray non seulement Tost marié en nos quartiers, Mais aussi que bien volontiers Ma femme viendra au combat Vénérien : Dieu, quel débat Jy prevoy ! Je laboureray Tant et plus, et saboureray A guoguo, puis que bien nourry Je suis. C'est moy le bon mary. Le bon des bons. lo Pean ! lo Pean, lo Pean ! 10 mariage trois fois ! Çà, çà, frère Jean, je te fais Serment vray et intelligible Que cest oracle est infallible, 11 est seur, il est fatidique. LIVRE V_, CHAPITRE XLVII CHAPITRE XLVII Comment Panurge et les autres rithment par fureur poétique. ^^1 fjj s-TU, dist frère Jean, fol devenu ou vi^ enchanté? Voyez comme il escume, entendez comment il rithmaille. Que tous les diables a-il mangé? Il tourne les yeux en la teste comme une chèvre qui se meurt. Se retirera-il à l'escart? Fiantera-il plus loing? Mangera-il de l'herbe aux chiens pour descharger son thomas, ou à usage monachal mettra-il dedans la gorge le poing jusques au coude afin de se curer leshypochondres? Reprendra-il du poil de ce chien qui le mordit? Pantagruel reprend frère Jean et luy dit : " Croyez que c'est la fureur poétique Du bon Bacchus : ce bon vin eclyptique Ainsi fait sens et le faict cantiqueur. Car sans mespris A ses esprits Du tout espris Par sa liqueur, De cris en ris, De ris en pris. En ce pourpris, Faict son gent cœur Rhetoriqueur Roy et vaincueur De nos souris ; PANTAGRUEL l83 Et, veu qu'il est de cerveau phanatique, Ce me seroit acte de trop piqueur, Penser moquer un si noble trinqueur. — Comment! dist frère Jean, vous rithmez aussi? Par la vertu de Dieu, nous sommes tous poivrez. Plust à Dieu que Gargantua nous vist en cestuy estât! Je ne sçay, par Dieu, que faire de pareille- ment comme vous rithmer, ou non. Je n'y sçay rien toutesfois, mais nous sommes en rithmaillerie. Par sainct Jean, je rithmerai comme les autres, je le sens bien; attendez, et m'ayez pour excusé si je ne rithme en cramoisi : O DieUj père paterne. Qui muas l'eau en vin. Fais de mon cul lanterne. Pour luire à mon voisin. » Panurge continue son propos et dit : « Onq' de Pythias le tréteau Ne rendit par son chapiteau Response plus seure et certaine; Et croirois qu'en ceste fontaine Y soit nommément colporté Et de Delphes cy transporté. Si Pkuarque eust icy trinqué Comme nous, il n'eust révoqué En doute pourquoy les oracles Sont eh Delphes plus muts que macles, Plus ne rendent response aucune. La raison est assez commune : En Delphes n'est, il est icy. Le tréteau fatal ; le voicy. 184 LIVRE V, CHAPITRE XLVII Qui presagist de toutes choses : Car Athenaeus nous expose Que ce tréteau estoit Bouteille Pleine de vin à une aureille, De vin, je dis de vérité ; 11 n'est telle syncerité En Tart de divination Comme est l'insinuation Du mot sortant de la Bouteille. Çà, frère Jean, je te conseille, Cependant que sommes icy. Que tu ayes le mot aussi De la Bouteille trimegiste, Pour entendre se rien obsiste Que ne te doives marier ; Tien cy, de peur de varier, Et joue l'amorabaquine. Jectez luy un peu de farine. » Frère Jean respondit en fureur, et dist : « Marier! Par la grand' Bottine, Par le houseau de sainct Benoist, Tout homme qui bien me congnoist Jurera que feray le chois D'estre desgradé ras ainçois Qu'estre jamais engarié Jusques là que sois marié ; Cela ! que fusse spolié De liberté ! fusse lié A une femme désormais ! Vertu Dieu, à peine jamais Me liroit on à Alexandre, Ny à Ca2sar, ny à son gendre, N'au plus chevaleureux du monde. » Panurge, deffeublant sa gualleverdine et accous- trcment mistique, respondit : PANTAGRUEL l85 « Aussi seras tu, beste immonde. Damné comme une maie serpe. Et je seray comme une herpe Sauvé en paradis gaillard : Lors bien sus toy, pauvre paillard, Pisseray-je, je t'en asseure. Mais escoutez : advenant l'heure Qu'à bas seras au vieux grand diable, Si^ par cas assez bien croyable. Advient que dame Proserpine Fust espinée de l'espine Qui est en ta brague cachée, Et feust de fait amourachée De tadite paternité, Survenant l'oportunité Que vous feriez les doux accords Et luy montasses sus le corps. Par ta foy, envoyeras tu pas Au vin, pour fournir le repas Du meilleur cabaret d'Enfer, Le vieil ravasseur Lucifer? Elle ne fut onques rebelle Aux bons frères, et si fut belle. — Va, vieil fol, dist frère Jean, au diable ! Je ne saurois plus rithmer, la rithme meprent à la gorge; parlons de satisfaire icy. » 86 LIVRE V, CHAPITRE XLVIII CHAPITRE XLVIII Comment, avoir prins congé de Bacbuc, délaissent l'Oracle de la Bouteille. 'iCY satisfaire, respondit Bacbuc, ne soyez en esmoy, à tout sera satisfaict À de nous estes contens. Çàbasen ces îgions circoncentrales nous establis- sons le bien souverain non en prendre et recevoir, ains en eslargir et donner, et heureux nous reputons non si d'autruy prenons et recevons beaucoup, comme paraventure décrètent les sectes de vostre monde, ains si à autruy tousjours eslargissons et donnons beaucoup. Seulement vous prie vos noms et païs icy en ce Livre ritual par escrit nous laisser. » Lors ouvrit un beau et grand Livre, auquel, nous dictans, une de ses mystagogues excequant, furent avecques un stile d'or quelques traits projectez, comme si l'on eust escrit, mais de l'escriture rien ne nous apparoissoit. Cela faict, nous emplit trois oires de l'eau phantastique, et manuellement nous les baillant, dist : « Allez, amis, en protection de cette sphère intel- lectuale de laquelle en tous lieux est le centre et n'a en lieu aucun circonférence, que nous appelions Dieu. Et, venus en vostre monde, portez tesmoi- gnage que sous terre sont les grands trésors et choses admirables. Et non à tort Cerés, ja révérée PANTAGRUEL IO7 par tout l'univers parce qu'elle avoit montré et enseigné l'art d'agriculture, et par invention de bled aboly entre les humains le brutal aliment de gland, a tant et tant lamenté de ce que sa fille fut en nos régions subterraines ravie, certainement prévoyant que sous terre plus trouveroit sa fille de biens et excellences qu'elle sa mère n'avoit faict dessus. Qu'est devenu l'art d'évoquer des cieux la foudre et le feu céleste, jadis inventé par le sage Prometheus? Vous certes l'avez perdu; il est de vostre hémisphère departy, icy sous terre est en usage. Et à tort quelquefois vous esbahissez voyans villes conflagrer et ardre par foudre etfeuetheré, etignorans de qui, et par qui, et quelle part tiroit cestuy es- clandre horrible à vostre aspect, mais à nous familier et utile. Vos philosophes, qui se complaignent toutes choses estre par les anciens escriptes, rien ne leur estre laissé de nouveau à inventer, ont tort trop évident. Ce que du ciel vous apparoist, et appeliez phénomènes, ce que la terre vous exhibe, ce que la mer et autres fleuves contiennent, n'est comparable à ce qui est en terre caché. « Partant est equitablement le souverain Dominateur presques en toutes langues nommé par epithete de richesses. Il, quant leur estude addonneront et labeur à bien rechercher par imploration de Dieu souverain, lequel jadis les Egyptiens nommoient en leur langue l'Abscond, le Musse, le Caché, et, par ce nom l'invoquant, supplioient à eux se mani- l88 LIVRE V, CHAPITRE XLVIII fester et descouvrir, leur eslargira cognoissance et de soy et de ses créatures, par ainsi conduite de bonne lanterne. Car tous philosophes et sages anti- ques à bien seurement et plaisamment parfaire le chemin de la congnoissance divine et chasse de sa- pience ont estimé deux choses nécessaires, guyde de Dieu et compagnie d'homme. Ainsi entre les philosophes Zoroaster print Arimaspes pour compagnon de ses pérégrinations; Esculapius, Mercure; Orpheus, Musée; Pythagoras, Agleopheme; entre les princes et gens belliqueux, Hercules eut en ses plus difficiles entreprinsespour amy singulier Theseus; Ulysses, Diomedes; Eneas, Achates. Vous autres en avez autant fait prenans pour guide vostre illustre dame Lanterne. Or allez^ de par Dieu, qui vous conduie. » Fin du cinqiiiesme Livre des faids et dicts héroïques du noble Pantagruel. VARIANTES CINQUIÈME LIVRE Nous suivons le texte de l'édition de 1564, mais, comme le cinquième livre n'a été publié pour la première fois que plusieurs années après la mort de Rabelais, nous n'avons pas eu le même respect du texte que dans les quatre premiers livres, et toutes les fois que les leçons du manuscrit nous ont paru meilleures, nous les avons préférées. Nous donnons ici les passages du manuscrit qui ne sont pas dans l'édition de 1564. Prologue. Page 2, ligne 28. « J'entends bien... » On lit dans le manuscrit : « Plaist-i, Carneades ? Despartés, tous les diables. Il n'y viendra pas à vostre reigle ; car Neptun, par Lucilius intro- duict pour resolution d'un double pareil, oncques des Champs Elisiens evocquer ne le peult. J'entends bien... » Le Chapitre i* nuscrit : page 1 1 , commence ainsi dans le ma- (' Estans montez sus mer et navigué par plusieurs jours avecques bon vent, entendismes ung son, de loin venant...» 90 VARIANTES Le Chapitre XI, page 48, commence ainsi dans le manuscrit : n Quelques jours après, ayant failly plusieurs foys à faire naufrage, nous passasmes... » Chapitre XI, page 48, lignes 10-11 : parce que quel- qu'un de nostre bande voulust vendre... » On lit dans le manuscrit : « Parce que quelc'un de nostre bande avoit battu le Chicanoux, passant procuration. Les chatz... » Chapitre XXVI, page 109, à la fin, après « et levées du Nil en Egypte », le manuscrit ajoute à ce chapitre : c< Là davantaige nous fust dict que Panigon sur ses derniers jours s'estoit en ung hermitaige d'icelle Isle retiré, et vivoit en grande saincteté et vraye foy catholique, sans concupissance, sans affection, sans vice, en innocence, son prochain aymant comme soy mesmes et Dieu sur toutes choses ; par tant faisoit il plusieurs beaulx miracles. A nostre département de Clothu, je veiz le pourtraict mirifique de Varlet cherchant Maistre, jadis depainct par Charles Charmoys, Aurelian. » Chapitre XXVIII, page 128, à la fin : « Que diable ont les roys et grands princes ? », le manuscrit ajoute : '.(... dadvantaige? Ma foy, je m'anuye beaulcoup icy. — Allons chasciin, dist Panurge, à son affection ; mais, si une foys je suys marié à mon souhait, je feray encores une nouvelle Moynerve. Je n'entendz mye de moynes moynez ; ilz sont moynes moynans, et je les nourriray frères lenps (?) ou bien frères Narjorie (?) parfaictz. Hz n'yront pas si tost que ses gallandz Fredons icy. » Chapitre XXXIII, page 140, ligne 20, après « du gouvernement d'une grosse Lanterne », le manuscrit termine ainsi ce chapitre : « Là me souvint de Matheline, laquelle ne vouloit per- VARIANTES I9I mectre que l'on mist au corps huille ne chandelle ; aussi ne luysoient elles comme les aultres, mais me sembloient avoir les paillardes couleurs. » Puis vient dans le manuscrit : CHAP... Comment furent les dames Lanternes servies à soupper. Les vezes bouzines et cornemuses sonnèrent harmonieuse- ment, et leurs furent les viandes apportées. A l'entrée du premier service, la royne print en guise de pillules qui sentent si bon, je dis ante cibum, pour soy desgresser l'estonmatz, une cuillerée de petasine. Puys furent servies... » S'ensLiyt ce qui estoiî en marge et non compris au présent livre : Servato, in-4° lier., Panorgum ad nuptias. Les quatre quartiers du mouton que porta Hellé et Frixus au destroit de Propontide ; Les deux chevreaulx de la célèbre chèvre Amaltée, nourrisse de Jupiter ; Les fans de la cerfve bische Egerye^ consellere de Numa Fompillius ; Six oysons couvez par la digne oye îlmaticque, laquelle par son chanipt saulva la rocque Tarpée de Rome; Les cochons de la truye...; Le veau de la vache Ino, mal jadis gardée par Argus ; Le poulmon du regnard que Neptune et... Julius Pollux in canibus. Le cigne auquel se convertit Jupiter pour l'amour de Leda ; Le Beuf Apis de Menphes en Egipte, que reffusa sa pitance de la main de Germanicus César, Et six beufz desrobez par Cacus, recouvertz par Hercules ; Les deux chevreaulx que Coridon rescovrit pour Alexis ; Le sanglier Herimentien, Olimpicque et Calidonien; Les cramasteres du toreautant aymé de Pasiphé; 192 VARIANTES Le cerf auquel fut transformé Actheon ; Le foye de l'ourse Calixio... Des corquignolles savoreuses, Des genabins de haulte fus- Des happelourdes, taye, Des badigonyeuses. Des starabillatz, Des cocquemares à la vinai- Des cormeabotz, grette, Des cornameuz revestuz de Des coquecigrues, bize, Des etangourres. De la gendarmenoyre, Des ballivarnes en pasté, Des jerangoys, Des estroncs fins à la nasar- De la trismarmaillej dine. Des ordisopiratz, Des aucbares de mer, De la mopsopige, Des godiveaulx de lévrier Des brebasenas, bien bons, Des frondilles. Du promerdis, grand' viande. Des chinfreneaulx. Des bourbelettes, Des bubagaz, Primeronges, Des volepupinges. Des bregizollons, Des gafelages, Des lansbregotz. Des brenouzets. Des freleginingues, De la mirelaridaine. De la bistroye. De la croquepye. Des brigailles mortiffiées, En second service furent servies : Des ondrespondredetz, Du suif d'asnon. Des entreduchz. De la crotte en poil. De la friande vesianpenar- Du moinascon, derye. Des fanfreluches. Des baguenauldes. Des spopondrilloches. Des dorelotz de liepvre. Du Laisse moy en paix. Des bandelivagues, viande Du Tire toy là, rare, Du Boutte luy toy mesmes. Des manigoulles de levant. De la clacquemain. Des brinborions de ponnent, Du sainct balleran, De la petaradine. Des epiboches, Des notrodilles. Des ivrichaulx, VARIANTES 19Î De la vesse coulière, De la foyre en braye. De la baudaille, Des smubrelotz, Des Je renye ma vye^ Des hurtalis, De la patissandrye, Des ancrastabotz, Des babillebabous. De la marabire, Des sinsanbregoys, Des quaisse quesse, De cocquelicous, Des maralipes, Du brochaucultis, Des giboullées de mars. Des tricquebilles, Des hoppelatz, De la marnitandaille avec beau pissefort, Du merdignon, Des croquinpedaignes, Des tintaloyes, Des piedz à boulle. Des chinferneaulx, Des nez d'as de treffles en paste, Des pasques de solles, De estafillades, Des guyacoux. Pour le dernier service furent présentées : Des drogues sernogues, Des tricquedaudaines, Des gringuenauldes à la jon- cade. Des brededinsbrededas, De la galimaffrée à l'escafi- gnade, De barabinbarabas, Des mocquecroquettes, De la hucquemasche. De la tirelytantaine, Des neiges d'antan, desquelles ilz ont eu en abondance en Lanternois, Des gringaletz, jDu sallehort. Des rairelaridaines, Des mizenas. Des gresamines, fruict deli- cieulx, Des marioletz, De fricquenelles. De la piedebillorie, De la mouchancullade, Du souffle au cul myen. De la menigance, Des tritrepoluz, Des befaibemis, Des aliborrins, Des tirepetadans. Du coquerin. Des coquilles betissons, Du croquignologe, Des tinctamarrois. Pour déserte apportèrent ung plain plat de merde, couvert d'estrongs fleuris ; c'estoit ung plat plain de miel blanc, couvert d'une guimple de soye cramoisine. Rabelais. V, 2 5 194 VARIANTES Leur boitte feut en tirelarigotz, vaisseaulx beaulx et anîicques, et riens ne beuvoient fors elaiodes, breuvaige assez mal plaisant en mon goust, mais en Lanternois c'est boitte deiffique et s'enyvrent comme gens, si bien que je veiz une vieille lanterne edentée revestue de parchemin, lanterne ^ corporalle d'aultres jeunes lanternes, laquelle , criant aux semetieres lampades nostre extinguntur, feut tant ivre du breuvaige qu'elle, sur l'heure, y perdit vye et lumière ; et feut dict à Pantagruel que souvent en Lanternois ainsi peris- soi[en]t les lanternrs lanternées, mesmes au temps qu'elle[s] îenoi!^enjt chappitre. Le soupper finy, furent les tables levées. Lors, les menestriers plus que devant mélodieusement sonnantz, fut par la royne commancé ung bransle double, auquel tous et falotz et lanternes ensemble dansèrent. Depuys se relira la royne en son siege^ les aultres, aux dives sons des bouzines, dansèrent diversement, comme vous pourrez dire : Serre martin, C'est la belle franciscane. Dessus les marches d'Arras, Bastienne, Le trihorry de Bretaigne, Hely pourtant si estes belle, Les sept visaiges, La gaillarde, La revergasse. Les crapaulx et les grues, La marquise, Si j'ay mon joly temps perdu, L'espine, C'est à grand tort, La frique. Par trop je suys brunelte. De mon dueil triste, Quant m'y souvent, La gallioue, La goutte. Sainct Roc, Sanxerre, Nevers, Picardie la jolye, La doulourouze, Sans elle ne puys, Curé, venez donc, Je demeurre seulle, La mousque de Biscaye, L'entrée du fol, A la venue de Noël, La péronnelle, Le gouvernai, A la bannye, Foix, Verdure, Princesse d'amour. Le cueur est myen, Le cueur est bon, Jouyssance, VARIANTES 195 Marry de par sa femme, La gaye, Malemaridade, La pamine, Catherine, Jacqueline, Le grand helas, Tant ay d'ennuy, Mon cueur sera, La seignore, Beauregard^ Perrichon, Maulgré danger. Les grandz regretz, A l'ombre d'un buissonne;;, La douleur qui au cueur me blesse, La fleurye. Frère Pierre, Va t'en regretz, Toute noble cité. N'y boutés pas tout, Les regretz de l'aignau. Le bail d'Espagne, C'est simplement donné congé. Mon con est devenu sergent, Expect ung poc ou pauc, Le renon d'un esgaré. Qu'est devenu ma mignonne, En attendant la grâce, En elle n'ay plus de fiance. En plainctz et pleurs, je prens congé. Tire toy là, Guillot, Amours m'ont faict desplaisir, La patiance du Maure, Les soupirs du polin. Je ne sçay pas pourquoy, Chasteaubriant, Beure fraiz. Elle s'en va, La ducate. Hors de soulcy, Fortune, L'alemande, Les pensées de ma dame. Pensés tous la peur, Belle, à grand tort. Je ne sçay pas pourquoy, Helas ! que vous a faict mon cueur. Hé Dieu ! quelle femme j'a- voye, L'heure est venue de me plaindre. Mon cueur sera d'aymer. Qui est bon a ma sembtance, Il est en bonne heure né, De doleur de l'escuyer, La douleur de la charte, Le grand Alemant, Pour avoir faict au gré de mon amy, Les manteaulx jaulnes. Le moût de la vigne, Toute semblable, Cremonne, La mercière, La tripière. Mes enffans. Par faulx semblant, La valantinoise, Fortune à tort, Testimonium, Calabre, L'estrac, 196 VA R I A N T E s Faisons la, faisons, Noire et tannée, La belle Françoise, C'est une pensée, O loyal espoir. C'est mon plaisir, Biscaye, La doulourouse. Ce que sçavez, Qu'il est bon, Le petit helas, A mon retour, Je ne fay plus, Paouvres gensdarme; Le faulcheron, Ce n'est pas jeu, Beaulté, Tegratiroine, Patience, Navarre, Jac Bourdaing, Rouhault le fort. Noblesse, Tout au rebours, Cauldas, C'est mon mal, Diilcis arnica^ Le chault, Les chasteaulx, La girofflée, Vaz an moy. Jurez le prix, La nuyt, A Dieu m'envoys. Bon gouvernement, Mi sonnet, Amours, Espérance, Robinet, Triste plaisir, Rigoron, pirouy, L'oyselet, Pampelune, Hz ont menti, Ma joye. Ma cousine. Elle revient, A la moictié, Tous les biens, Ce qu'il vous plairra, Puys qu'en amour suys mal- heureux, A la verdure. Sur toutes les couleurs. En la bonne heure. Or faict il bon aymer. Mes plaisans champtz, Mon joly cueur. Bon pied, bon oeil, Hau, bergère, m'amye, La tisserande, La pavane, Hely, pourtant si estes belle, La marguerite. Or faict il bon, La laine, Le temps passé. Le joly boys, L'heure vient. Le plus dolent. Touche luy l'anticaille, Les hayes. Encores les veiz-je danser aux chansons de Poictou, die- VARIANTES 197 tes par un fallût de Sainct-Messant, or ung grand baislant de Partenay le Vieil. Notez, beuveurs, que tout alloit de hait, et se faisoient bien valoir les gentils fallotz avecques leurs jambes de boys. Sus la fin fut apporté vin de coucher, avecques belles mousches enculades, et feut cryé largesse, de par la royne, moyennant une boette de petasinne. Lors la royne nous octroya le choix d'une de ses Lanternes pour nostre conduicte, telle qu'il nous plairoit. Par nous futssieue et choisie la mye du grand M. P. Lamy, laquelle j'avois autresffoys congneue à bonnes enseignes. Elle pareillement me recongnoissoit, et nous sembla plus divine, plus hilique, plus docte, plus saige, plus diserte, plus humaine, plus débonnaire et plus ydoine que autre qui fut en la compaignye pour nostre conduicte. Remercians bien humblement la dame royne, feusmes ac- compaignez jusques à nostre nauf par sept jeunes fallotz balladins, ja luysant la claire Diane. Au départir du palais, je ouys la voix d'un grand fallot à jambe torte, disant que un bonsoir vault mieulx que autant de bons matins qu'il y a eu de chastaignes en farce d'oye depuys le déluge de Ogigés, voulant donner entendre qu'il n'est bonne chère que de nuyt, lorsque lanternes sont en place, accompaignées de leurs gentils fallotz. Telles chères le soleil ne peult veoir de bon œil, tesmoing Jupiter, lorsqu'il coucha avecq Alcmene, mère d'Hercules, il le feit cacher deux jours, car peu devant il avoit descouvert le larcin de Mars et de Venus. Chapitre XLIII, page 171, ligne 27 : «monte jusques à la mer de vostre monde » termine ce chapitre, qui est coupé en deux dans le manuscrit; la seconde partie est intitulée : « Comment l'eau de la Fontaine rendoit goust de vin selon l'imagination des beuveurs. Chap... » el commence ainsi : « Puis commenda estre hanaps, tasses et goubeletz présentez, d'or, d'argent, de cristallin, de porceline, et feusmes gracieusement invitez à boyre de la liqueur sourdante d'icelle fontaine, ce que feismes tresvolontiers. Car, pour plaine- ment vous advertir... » Même chapitre (XLIII), page 172, lignes 17-18: « le boyre 98 VARIANTES dessus coule pour descendre... » Le manuscrit porte : « Non éspoulmons par l'artère inegualle, comme a esté l'op- pinion du bon Platon, Plutarque, Macrobe et aultres, mais en l'estomatz par le sesophage. » Chapitre XLVIII, page i88, ligne 7, à partir de «... et compagnie d'homme », voici comment le livre se termine dans le manuscrit : « Ainsi, entre les Perses, Zoroastes print Arismaspe pour compaignon de toute sa misterieuse philosophie ; Hermès le Tresmegiste, entre les Egyptiens, eut Esculapius ; Orpheus en Thrace eut Muse ; illecques aussi Aglaophemus eut Pyta- gore ; entre les Athéniens Platon eut premièrement Dyon de Syracuse en Cicille, lequel defunct, print secondement Xenocrates; Appolonius eut Damis. Quant doncques voz philosophes, Dieu guyde, accompaignens à quelque claire Lanterne, se adonneront à songneusement rechercher et investiger, comme est le naturel des humains (et de ceste qualité sont Hesrodothe et Homère, appeliez alpheste, c'est à dire re- chercheurs et inventeurs), trouveront vray estre la responce faicte par le saige Talés à Amasis, roy des Egiptiens, quant, par luy interrogé en quelle chose plus estoit de prudence, respondit : « On temps. » Car par temps ont esté et par temps seront toutes choses latentes inventées, et c'est la cause pourquoy les antiens ont appelé Saturne, le Temps, père de Vérité, et Vérité fille du Temps. Infaliblement aussi trouveront tout le sçavoir et d'eulx et de leurs prédécesseurs à peine estre la minime partie de ce qui est, et ne le sçavent. De ces troys oires, que présentement je vous livre, vous en prendrés jugement, congnoissance, comme dict le proverbe : (I Aux oncles le lyon. » Par la raréfaction de nostre eaue dedans enclose, intervenant la chaleur des corps supperieurs et ferveur de la mer sallée, ainsi qu'est la naturelle transmutation des elemens, vous sera air dedans tressallubre engendré, lequel de vent clair, serain, delicieulx, vous servira, car vent n'est que air flottant et undoyant. Cestuy vent moyennant, yrez à droicle routte sans terre prendre si vouliez. VARIANTES 99 jusques au port de Olonne en Talmondois^ en laschant à travers voz velles, par ce petit soubspiral d'or que y voyés apposé, comme une fleute, aultant que penserez, pour tout ou lanternent naviger, à tousjours en plaisir et seureté, sans dangier ne tempeste. De ce ne doubtez, et ne pensez la terapeste yssir et procéder du vent : le vent vient de la tempeste excitée du bas de l'abisme. Ne pensez aussi la pluye venir par impotence des vertus retentives des cieulxet gravité des nues suspendues : elle vient par évocation des soubzter- rennes régions, comme, par évocation des corps supérieurs, elle de bas en haut estoit imperceptiblement tirée, et vous le tesmongne le Roy Prophète, chantant et disant que l'abisme invocque l'abisme. Des troyes oyres, les deux sont pleines de l'eaue susdite, la tierce est extraicte du puys des saiges Indiens, lequel on nomme le tonneau des Brachmanes. Trouverez davantaige voz naufz bien duement pourveues de tout ce qu'il vous pourroit estre utille et nécessaire pour le reste de vostre mesnaige. Ce pendant que icy avez séjourné, je y ay faict ordre tresbon donner. Allez, amys, en gayetté d'esprit, et portés ceste lettre à vostre roy Gargantua, le sa- luez de par nous, ensemble les princes et officiers de sa noble court. » Ces motz parachevez, elle nous bailla des lettres closes et scellées, et nous, après action de grâces immortelles, feist yssir par une porte adjacente à la chapelle, où la Bacbuc les semonnoit de proposer questions aultant deux foys qu'est hault le mont Olympe. Par ung païs plain de toutes délices, plaisant, tempéré plus que Tempe en Thessalye, salubre plus que celle partie d'Egipte laquelle a son aspect vers Libye, irrigé et verdoyant plus que Thermiscrie, fertille plus que celle partie du mont Thaure laquelle a son aspect veis Aquilon, plus que l'isle Hiperborrée en la mer judaïque, plus que Caligés on mont Caspit, flairant, serain et gratieulx autant qu'est le païs de Touraine, en fin trouvasmes noz na vires au port.

GLOSSAIRE-INDEX A, avec. A bas, ici-bas. Abbegesse, abbesse. Aben-Ezra, rabbin, commentateur de la Bible. Aberkeids , vilifiés , en alle- mand, Abestin (Lin), asbeste. Voyez Asbeston. Abhorrent, éloigné, qui fait horreur, impie. Abhorryz, abhorrés. Abila, montagne d'Afrique au détroit de Gibraltar. Abiron, nom d'un diable. Abordée (De prime), de prime abord. Aboth, prophètes, de l'hébreu ? Abrier, mettre à l'abri. Abriconner, tromper. Abscond, absconce, caché, in- accessible, profond. Absterger, nettoyer, Absîracteur, qui extrait, sépare, isole, distille. Abundant (D'), de plus. Acamas, infatigable, du grec. Acarations, confrontations. Accapaye, mets-toi à la cape ; ne porte que très-peu de voile (Jal). Acclamper, planter. Acconcepoir, atteindre. Accoubler, accoupler. Accoursiers , commentateurs d'Accurse. Accurse(F.), jurisconsulte flo- rentin du XIF siècle. Acertainé, renseigné d'une fa- çon certaine. AcHATES, ami d'Énée. AcHORiE, pays imaginaire, pays n'existant pas, du grec. Aconcepvoir, atteindre. Acravanté, écrasé. Acresté, qui redresse la crête, qui fait le fier. AcRisius, père deDanaé. 26 GLOSSAIRE-INDEX Acromion (Os), apophyse dj l'omoplate. Acroué, accroupi. Aculler, déraciner. Acut, agu, aiguisé, fin, aigu, du latin acutus. Adamastor, géant. Additainens mammillaires, bouts des mamelles, du latin additamenta. Adenes, glandes. Adiantos , non humide, en grec. Adiantum, la capillaire. Adjouda my, aidez-moi, en li- mousin. Adrian Villart , "Willaert, musicien belge du XVI^ siècle. Adscript, inscrit. Advers, ennemi, opposé. vEacus, Eaque, l'un des trois juges à l'entrée de l'enfer. vEditue, sacristain, du latin sediluus. iEMiLiAN, itmilianus, rhéteur grec. y£olipyle, porte d'Éole. Voir ce mot dans la Briefve Déclaration, à 1.1 suite du livre IV, page 296. /Egipanes, Egipans, sorte de satyre. itcEON, géant. /Egylops, graminée. On croit que l'aegylops a, par des modifications successives , donné naissance au froment. A^quiparer, mettre sur le même rang. Aeromantie , divination par AesleSj JEsles, ailes. jEthiopis, espèce de fucus. Affaictée, terme de fauconnerie, apprivoisée. Affecter, désirer avec inquié- tude. Affections, passions. Affené, garni de foin, rassasié. Affier, affirmer, greffer. Affiert, a rapport. Affiner, tromper finement. Affoler, affoller, rendre fou ; blesser, maltraiter. Afriquanes, les bêtes féroces prises en Afrique. Agalloche, substance végétale balsamique connue sous le nom de bois d'aloès. Agarene, en arabe, descendant d'Agar. Agathias, poëte et historien grec des VF et VIF siècles. Agatho, géant. Agathocles, tyran de Syracuse. Agelaste, qui ne rit point, du grec. Agenor, père d'Europe. Aggeres, digues. Agios, saint, en grec. Agiotate, très-saint, superlatif grec. Agiots, choses saintes. Agrené, garni de grain, rassasié. Agricola, musicien des Pays- Bas du XVe siècle. Agrie, ou plutôt Agnie, fontaine d'Arcadie. GLOSSAIRE-INDEX Agrimenseur, mesureur de champs, arpenteur, du latin ager et mensor. Agu. V. Acut. Agua, regarde ; est employé dans le même sens dans Pathelin. Aguars (Oiseaux), hagards, oi- seaux pris trop âgés pour être dressés. Agueilky Agueillette, aiguille, aiguillette. AguyoM, vent doux et favorable. Ahan, effroi. Aguilanneuf, au gui l'an neuf, le premier jour de l'année. Aguille de Virgile, clocher soi- disant bâti par Virgile à Rome. Aignevillot, aiguillot, gond fixé au gouvernail. Aigresi, verjus. A fgtmrfe (Faire), faire de l'eau. Aigueillettes , aiguillettes. V. Aguilles, Aguillettes. Aiguillette borgne, aiguillette ferrée d'un seul bout. Aiguosité, partie aqueuse. Ains, mais, mais bien; pendant. Aire, grand flacon ; coffre. V. Oire. AisGNEjAisgnes, arrondissement d'Angoulème, Charente. Aisgué (Vin), vin mêlé d'eau. Aisses, ais, planchettes de bois. Aisseuil septentrional, l'essieu sept., le pôle arctique. Alaire ou Allaire, musicien. Alanus, Alain de Lisle, auteur d'un traité des Paraboles. Alateré, faut-il lire a latere, titre donne à certains légats du pape? Albert le Grand, moin-e jacobin, philosophe scolastique du XIIF siècle. Alberti (Leo-Battista), architecte florentin du XVsiècle. Albian Camat, blanc sacristain, en hébreu. Albrans, hallebrans, canards sauvages. Alcibiadion, la vipérine commune. Alcman, poète grec du VIP siècle avant J.-C. AlcofribasNasier, anagramme de Rabelais. Alecretz, corsets de fer. Alectryomantie, divination par un coq. Aies, ailes. Aleuromantie, divination par la farine. Alexander Myndius, philoso- phe grec du IIF siècle. Alexandre, jurisconsulte italien. Alexicacos, qui éloigne !e mal, du grec. C'est un des sur- noms d'Hercule. Alezan ioustade, alezan brîjlé. Algamala, Algamana, Algv.a- mala, amalgame; nom du mercure chez les alchimistes. Algorisme, calcul. Algousan, argousin. Alibantes, morts, du grec. 204 GLOSSAIRE-INDEX Alibitz forains, mauvaises chi- canes. Alicacabut, fruit de l'alkékenge. Alidada, alidade, règle qui sert à déterminer la direction des objets. Aliptes, garçons de bains, du latin aliptge. AJkatim, Alkatin, mot arabe. D'après le texte, ce serait le coxis, et plus loin le péri- toine. Allebouter, grappiller. Alliaco (De), Pierre d'Ailly, théologien du XV^ siècle. Allianciers, faiseurs de jeux, d'alliances de mots. Alliboron (Maistre), sorcier, diable. Allouvy, qui a une faim de loup, affamé. AllumelUs, lames d'épée. Alluz, boire, en allemand. A/me, nourricière, du latin aima. AlmicantaraihjAlrnucantharat, cercle astronomique parallèle à l'horizon. Almyrodes, salés. Aloe, géant. AloVdes , Otus et Ephialte, géants , descendants d'Aloeus. Alopecuros , plante de la fa- mille des graminées. Alphitoniancie , divination par la farine d'orge. Altère, artère. Alun de plume, sulfate d'alu- mine en poudre. Alvares (Piètre), Pedro Alvares Cabrai, voyageur portugais du XVI^ siècle. Alyasum ; est-ce un ail, al- lium ? Amadeans, ordre religieux fon- dé par Amédée VIII de Savoie. Amaurotes, inconnus, obscurs. Ambezars, Ambezas, les deux as, aux dez. Ambouchouoir, embauchoir. Ambrun, charpente de toit. Amerine saule, variété de saule qui passait pour antiaphrodisiaque. Ammomus, philosophe éclec- tique du V^ siècle. Amoderer, réduir. Amodier, déterminer, fixer. Amodunt, a modo, sine modo, sans forme. Amorabond, amoureux. Amorabaquine, danse turque. Amphiaraus , fils d'Apollon, interprète des songes. Amphicyrces, amphicyrtes, du grec, arrondi aux trois quarts. « État où se trouve la lune le onzième jour du mois quand elle croît, et le dix-neuvième quand elle décroît. » (Le Duchat.) Amure, cordage qui fixe une voile par en bas. Amy (Pierre), cordelier de Fontenay-le-Comte, ami de Rabelais. Anacampserotes , herbe qui, d'après Pline, fait revenir GLOSSAIRE-INDEX :o5 l'amour passé. Anachite, nom d'un diamant qui était regardé comme un talisman. Anagnostes, lecteur, du grec. Le lecteur de la dédicace du IV«^ livre était Pierre du Chastel, évêque de Tulle. ANARCHE,sans pouvoir, du grec. A/ia/o/e(Tour),tour de l'Orient. Anatomies, dissections. Anaxagoras , philosophe de l'école ionienne, cinq siè- cles avant J.-C. André (Jo.), Giovanni Andréa, jurisconsulte italien du XIV'= siècle. Anerudutes ; ce nom fait partie des animaux venimeux énu- mérés par Eustène au chapitre Lxiv du IV^ livre, et empruntés, pour la plupart, à Aristote et à Pline ; il y a là des reptiles, des insectes, des animaux fantastiques, etc., dont il est impossible d'arriver à expliquer le nom par un équivalent moderne. Aneth, anis ou fenouil. Angarier, Engarier, tourmenter, contrarier. Angaries, Anguaries, Engaries, tourments, vexations, injustices, oppression. Angelotz, monnaie frappée sous Philippe de Valois. Anglicquetnentj à l'anglaise. AnguoLinages ; ce mot est ex- pliqué dans la BrUfvt Déclaration, à la suite du IV^ livre, page 298. Angustie, angoisse, anxiété. Animant, subst., animal. Anonchaly , rendu nonchalant. Ansées, vases à anses. Anseride (Plume), plume d'oie, anas anser. Antan, Van passé, auparavant. Antée, géant. Anthromantie, divination par les entrailles d'un homme. Antibust, le devant du buste. Anticthone, antipode, du grec. Antifortunal, contre le mauvais temps. Antigone, changée en cigogne par Junon. Antiphon, sophiste et orateur athénien du IV^ siècle avant J.^C. Antiphysie, antinature, contre nature, du grec. Antiquaille, ancienne danse. Antiquaille (Sonner 1'), parler de choses anciennes, ou jouer l'air de l'Antiquaille. Antiquaire, antique, ancien. Antonoinatic, adj., d'antono- mase, sorte de synecdoque qui consiste à prendre un nom commun pour un nom propre, ou un nom propre pour un nom commun. Apedeftes ou Apedeutes, ignorants, du grec ; c'est ici appliqué aux magistrats de la cour des comptes. Apert, à découvert, apertus. A/3er//ses d'armes, faits d'armes. Aplane, ciel des étoiles 'fixes,

o6 GLOSSAIRE-INDEX

du grec. Apollo, salle d'Apollon, chez Lucullus. Apone (Fontaine de), à Albano, près de Padoue. Aporrheticques, douleurs , qui doutent. Apostoles, apôtres. Aposîoles, lettres demandées au juge pour qu'il renvoie l'affaire qu'il a jugée à une juridiction supérieure. Apotheque, magasin, boutique, du grec. Apoiherapie, exercice hygiéni- que, du grec. Apotrophées , détournant les maléfices, du grec. Appeaulx, appels, en justice. Appellations , révision des comptes. Applausenunl , applaudisse- ment. Appareil (Haut), armure complète. Appianus , historien grec du 11^ siècle. Appigrets, profits illicites, grappillage. Appoincté , arrangé , accom- modé. Apposées (Viandes), mises sur table. Appoulle, Apulie. Apoyer, Appoyer, appuyer. Appous, acolytes. Appréhension, compréhension. Aprivoiser, acclimater. Aquileie, Aquila, ville de l'A- bruzze supérieure. Aranthas, géant. Arbalestes de passe, grosses arbalètes. Arbre, mât. Arc à jallet, arbalète. Arcadelt, musicien des XV*-' et XVie siècles. Arceau Guabeau, localité du Chinonais. Archadian, Arcadien. Archasdarpenins, voudrait dire étudiant, en hébreu? Archiiriclin, majordome. Ardillon (Antoine), abbé de Fontenay-le-Comte. Aremotis, au loin, éloigné. Arer, labourer ; parcourir. .1res me^js (Tout), en gascon, tout de suite. Argathyles , oiseaux fantasti- ques. Argentangine, angine payée à Démosthène par les ambassadeurs milésiens pour qu'il ne parle pas. Voir la Bne/'i'e Déclaration, à la suite du IV*' livre, page 298. Argentier, nom propre de VAnthologie, traduit par Rabelais. Arges, lumière blanche de la foudre, éclairs. Argiere, Alger. Argives, Argiens. Arguer, argumenter. Argut, subtil. Argy, Argis, Arrondissement de Châteauroux, Indre. Argyropile, Arguropoulo, helléniste du XV^ siècle. GLOSSAIRE-INDEX 20' Arietant, faisant le bélier. Arimanian (Daemon), Ahri- mane, principe du mal, en Perse. Arimaspians ou PiENS, peuples du Nord dont parlent Pline et Hérodote, et qui n'avaient, disent-ils, qu'un œil. Ariphron, poëte, né àSicyone. Aristarchus , philosophe de Samos, vivait 3oo ans avant J.-C. Aristarchus de Sole, grammairien grec du IF siècle avant J.-C. Aristodice , nom grec emprunté à l'Anthologie. Aristophanes , grammairien grec du III^ siècle avant J.-C. Arinet de Platon, casque qui rendait invisible. Armoisij Armoisy, étoffe de soie. Armoisine, de taffetas. Arin, airain. Aromatisant , sentant les épices. Arondelle, hirondelle. Aroy, charrue. Arraper, saisir. Arresser, dresser. Arroy, train, équipage. Ars, arcs. Artachée, Artacaeas, géant. Artemidorus Daldianus. Artémidore, écrivain grec du IF siècle. Artemon^ écrivain néàMllet. Artemon, mât d'artimon. Ariice (Tour), tour arctique, du Nord. Articuler, faire le procès. Artiens, étudiants es arts. Arulettes, sillons. Asarotum, mosaïque, du grec. Asbeston, asbeste , amiante; c'est un silicate de magnésie. Asçavanté, informé, instruit. Ascites, hydropisies. Asnerie, l'Asinaria, comédie de Plaute. AsoPE, personnification d'un fleuve de Béotie. Aspharage, gosier. Asprettes, un peu âpres. Assaphis, gens de basse condition, du grec. Assay, essai. Assere, d'acier. Asserer, aiguiser , armer de pointes de fer ; affermir ; prendre, saisir. Assertivement , catégorique- ment. AssiER (François de Genouillac, seigneur d'), tué à la bataille de Cérisoles. Assimentées, épaissies comme du ciment. Assimenty, bouché. AssuERE, Assuérus. AsTAROST, nom de diable. Astipulateurs, défenseurs. Astipulation, approbation. Astragalomantie, divination par les osselets, astragales. AsTROPHiLE, le pilote aimé des astres. Asturciers, fauconniers. Ataves, aïeux. GLOSSAIRE-INDEX Até , divinité grecque qui pousse à l'erreur. A.thanatos, immortel, en grec. Athen^us, Athénée, grammairien grec du IF siècle. Athineus, Athénée, mathématicien grec du llh' siècle avant J.-C. A tout, avec. Aires, foyers, dans le sens de maison. Atrophts, atrophiés. Altediation, ennui. Attempier, tenter. Attrempé (Temps), temps doux. Aube des mousches, l'instant le plus chaud de la journée. Aube du bast, le bord de de- vant du bât. Aubeliere, muselière de couleur blanche. Aubers, Haubergeons, cottes de mailles. Aubert, argent. Aubier (Franc), osier. AuCTOLiA, mère d'Ulysse. Audiance, audition, ouïe. Aulcunemeni, un peu, quelque peu. Auliques, de cour. Aultelissiers, tapissiers de hautelisse. Aumusse, peau de martre ou de petit-gris que les cha- noines et les chantres portent sur le bras quand ils vont à l'office (Littré). Bonnet fourré. " Aurande, fleurs d'oranger. Aureilles de Bourbonnoys, longues oreilles. AuRELiANS, Orléans. AuRiDiE, prophétesse nommé par Tacite. Auriflue, qui fait couler l'or. Auripeaux, mal d'oreille. Ausou, saindoux. Autant (D'); boire d'autant à I un chascun, c'est tenir tète à j tous ceux qui boivent, boire ! autant qu'eux. AuxERRE, ou Dauxerre, musicien. Avalisque Sathanas, retire-toi, Satan, en provençal. Avaller, tomber, abaisser, des- cendre, manger (ce qu'on boit et mange descend par l'œsophage dans l'estomac); abattre. Avalluer, mettre en valeur. Avangtr, avancer. Aveiglé, aveuglé. Averlans, gaillards, fanfarons, tapageurs. AvERROïs, Averroës, célèbre médecin arabe du XIF siè- cle.* Apes, aïeux. AvicENNE, ou Abou-ibn-Sina, philosophe et médecin arabe des Xc et XF siècles. Avives (Males)^ engorgement de glandes du cou chez les chevaux. Avoir. Cet infinitif, employé seul au commencement d'une phrase, signifie toujours : après avoir. Il y a dans Rabelais d'autres infinitifs em- GLOSSAIRE-INDEX ployés avec le même sens mais ils sont très-rares. Avoistre, enfant adultérin. Avoler, voler, aller vite. Axinoinantie, divination parla cognée, Azetnine, azziminina, sorte de damasquinure appliquée sur- tout aux armes et aux ar- mures. Azes guayes, zagaies, lances. Azimuth, cercle astronomique vertical à l'horizon. Babines, lèvres. Babou (Faire la), faire la ni- que, narguer. C'est propre- ment le bruit que les nourrices produisent en faisant passer rapidement leur doigt sur leurs lèvres pour amuser les petits enfants. Babouyneries, singeries. Bac, baquet. Bac (De queue et de). Faut -il de queue et de bec, ou de cap, à égale distance de la queue à la tête ? Bacabery l'aisné, auteur de la fabrique de Rabelais. Bacbuc, personnification de la bouteille en hébreu. Baccane (Lac), lac Baccano, au N.-O. de Rome. Bacchides, bacchantes. Bacces, baies, graines. V. Bague. Bacchelier, jeune garçon. Bachelettes , aimables jeunes filles. Bàdebec, niaise, ensaintongeais. Rabelais, V. Badelaire, épée à lame large, courte et recourbée. Badelorié, recourbé. Badeloury, géant. Badigoinces, babines, lèvres, mâchoires. Baguaige, bague, bagage, du bas latin baga, sac. Bague, baie, du latin bacca. V. Bacces. Bail, bai, rouge brun. Bailler le moine, c'est attacher aux pieds de quelqu'un qui dort une corde qu'on tire pour lui faire peur.V. Moine. Baisler, bâiller. Baissiere, la lie, ce qui est au bas du tonneau vidé. Bal solistime des canes, bruit que font les canes en mangeant. Balais, balay, rubis balais. Balane, gland. Balde de Ubaldis, jurisconsulte italien du XV^ siècle. Balle (Pain), pain où reste la balle ou enveloppe du grain. Balleruc, Balaruc, eaux ther- males, arr. de Montpellier. Hérault. Balloter, aller aux voix. Bandouille (Jousse), probable- ment Jean Cheradame, professeur de grec de l'Université, à la famille duquel appartenait le prieuré de Bandouille (Burgaud). Bandouillers, bandits, brigands. Banerol, porteur de bannière Banier, crieur de ban. 2 10 GLOSSAIRE-INDEX Baririj d'éléphant, du latin barrus. Barrier, se dit du cri des élé- phants. Baralipton, forme de syllogisme. Baratter, remuer comme avec une baratte à heure, houspiller. Barbatia , Andréa Barbazio , jurisconsulte italien du XV'^ siècle. Barbe (En), en face, en avant de, devant. Barbe de Jupiter, plante vulnéraire. Barboire, mascarade où l'on se déguisait avec de fausses barbes, du bas latin barbatoria . Barbotine, armoise. Barbute, capuce de moine, ca- goule, casque à fourrure. Barde, armure de cheval. Bardocuculkz, encapuchonnés. Barraige, droit de passage. Barrault, mesure languedocienne des liquides, de près de 5 2 litres. Barraux, petits barils. Barretade, salut de la barrette, du bonnet. Bartachim, Bertachin, Jean de Bertachino, jurisconsulte italien. Bartolus, Bartole, jurisconsulte italien de XlVe siècle. Baschatz, pachas. Basché, arrondissement deChinon, Indre-et-Loire. Baschb (Le seigneur). Un Per- | rot de Basché alla en Italie par ordre de Charles VIII. Bazilicz, canons un peu longs. Basic-, bailler. V. Baisler. Basme, baume, parfum. Bassarides, bacchantes. Baston, arme, terme généri- que. Batail, battant de cloche. Baudement, agréablement. 5aurf[(/fe, lavette de toile; baudruche. Bauffrer, manger avec avidité. Bauffrures, grandes mangeailles. Baulevres, mâchoires. Baulkvre, tour de la bouche. Baurach, borax, borate de soude. Bauracineuses, de la nature du borax. Bavière, visière du casque ; bavette. Baye, béante. Bazacle lés Toloze (Moulin du). Ce moulin existe encore à Toulouse. Bazelic, bazilic, pièce de canon. Barizel, barigel, chef de sbires. Beaugears, fréquentant les bauges. Becars, nom d'une espèce d'oie. Bêchée, becquée Beclïiuni, béchion, pas d'âne. Beda (Noël), principal du collège de Montaigu. Bedaines, boulets de canon en pierre. Bcdaud, ami. Bedon, petit ventre, nom d'à- GLOSSAIRE-INDEX mitie. Bedondaine, ventre, gros ventre. Bedouault, blaireau. Bedouaux, petits veaux. Bée (gueule), gueule béante. V. Baye. Beffier, bafouer. Been, racine du silène-been commun. Bejaune, jeune sot ; au propre, jeune oiseau qui a encore les commissures du bec jaunes. Belima, rien, en hébreu. Belin (Regnauld), nom de ber- ger de quelque conte populaire. Beliner, mystifier, tromper. Belistrandie, sottise, coquinerie. Belistrandiers, mendiants, bélîtres, gueux, vagabonds. Belutement, examen minutieux. Bénéfice, bienfait. Benistre, benoist, bénir, béni. Benoistier, bénitier. Berkj racine du ginseng, qui a l'aspect de l'ambre jaune et passait pour aphrodisia- que. Bernesj mantelets à capuchon. Berose, historien chaldéen du IVc siècle avant J.-C. Bers, berceau. Besaguë Tenedie, hache de Ténédos, hache à deux tranchants, besaiguë. V. Be- zague. Besc/i, vent du S.-O., Libeccio. Bessains, bassins Bessarion (Jean), helléniste du XVe siècle. Bessé, arr. de Saumur, Maineet-Loire. Besser boys, abaisser les lances. Bessons, jumeaux. Bette, boisson, action de boire. Betune, Bithynie. Beufîes, buffles. Beurre (Tour de), tour bâtie avec l'argent donné pour avoir la permission de manger du beurre en carême (Burgaud). Beurs, burs, moines vêtus de bure. Beusse, bourg et rivière, près de Loudun. Beuvette, action de boire, buverie. Beuvreaux, buveurs. Bezagues, besaiguës, outils de de charpentier taillant par les deux bouts. V. Besaguë. Bezans d'or, monnaie frappée à Byzance sous les empereurs chrétiens. BiART, Béarn. BiEAROYs, Vivarais. Bicane, nom d'un cépage. Bière (La forêt de). Les commentateurs ne sont pas d'ac- cord et ne savent s'il s'agit d'une forêt sur les bords de la Bièvre, ou de la forêt de Fontainebleau. Bigearre, bizarre. Bigot (Guillaume), professeur de philosophie à Tubinge, au XVP siècle. 2 I 2 GLOSSAIRE-INDEX Billart, bûche, bille de bois. Bilks vizécs, balles soufflées. Billonneurs, qui font de la monnaie de billon, faux- monnayeurs. Bipartient, part., se divisant en deux parties. Biscarié, maladif. Bischarsj jeunes daims, Biscle, bigle, qui louche en dedans. Bisouars, vêtus d'étoffes grises, porte-balles. Bistorié, qui a des coups de bistouri. Bitars, variété d'outardes. Biterne (Diable de), juron. Biton, bitous, pièce de bois à laquelle on amarre les cor- dages à bord d'un navire. Blanc, petite monnaie. Blanchée, ce qu'on avait pour un blanc. Blanchei, étoffe blanche, doublure de laine blanche. Blandureau (Pomme de), pom- me blanche et dure. Blason {Le) des couleurs, par Sicile, imprimé d'abord sous le titre de : Le Blason des armes. Blemmies, peuples sans têtes, qui ont les yeux et la bouche sur le sternum. Bobeliné, rapiécé. Bobelins, chaussures grossières, savates. BoissoNNÉ, Jean de Boyssone, jurisconsulte du XVI siècle. Bolides, plomb de la sonde BoLiYORAX, géant. Bolines, boulines, cordages. Bonache, bonace, calme en mer. Bonases de Pseonie, espèce de buffle. Bondes de Hercules^ les colonnes d'Hercule. Bondon, bonde. BoNivET, château près de Chàtellerault, commencé par l'amiral de ce nom. Bonne-Dée, bonne déesse, du latin bona dea. Bonnes-Nouvelles (Notre-Da- me de), près d'Orléans. Bonnette, voile supplémentaire. Bonnetz (Du temps des haults), à la vieille mode. Bononus, proclamé empereur par l'armée du Rhin et vaincu par Probus, se pendit. Bordes, bordieux, maisons des champs. Botanomancie, divination par les plantes. Botes d'olif, tonneaux d'huile. BotineurSj moines qui portaient des bottes. Botte, bote, tonneau. Botte Sainct-BertoU , la grande tonne qui est à Bologne. Bouc, bouche. Bouc (De broc en), de broche en bouche, immédiatement. Boucaiges, bocages, bois. Boucal, bocal, vase. Boucler, bouclier. Boucler à la bergamasque, mettre une ceinture de GLOSSAI RE-lNDEX chasteté. BoucleZj fermés avec un cadenas. Bouclus, tranchée. Boucon, bouchée. Ly boucon de Lombard, les bouchées empoisonnées. Bouconi, poison, de l'italien boccone. Boucque du hault ventre, le creux de l'estomac. Boucquer, baiser de force. Boudinalle (Fressure), de boudin. BouffaigCj bouffage, chose à manger. Bouger, partir. Bougette, bourse. Bougres, bougrins, hétérodoxes, hérétiques. Bougrino, petit bougre. Bougrisque, à la bougre. BouGUiER (Guy) , contemporain de Rabelais à Montpellier. Boulas, bouleau. Bouline, l'un des cordages d'un navire. Boulingues , boulines, petites voiles hautes. BouLOiGNE, Bologne. BouRBONNENCY,Bourbon-Lancy, arr. de Charonnes, Saôneet-Loire. Bourdes. Est-ce Le Bourdet, arr. de Niort, Deux-Sèvres? Boure, Bura, où était un oracle d'Hercule. Bourgeoys (Frère Jan), corde- lierdelafinduXIVe siècle. Bourgueil, arr. de Chinon, In- dre-et-Loire, avait une ab- baye de bénédictins. Bourlet, bourrelet, ancienne coiffure des docteurs. Bourne, borne. Bourrabaquin, flacon garni de cuir. Bourrabaquiniere (Nauf), navire qui avait pour enseigne un bouriabaquin. Bourraches, bouteilles de cuir. Bourrachous, ivrogne. Bourreau, bureau. Bourré (François;; faisait partie de la maison de Du Bellay. Bourt, bord. Boussin, morceau. Boutargues, poutargues, cervelas d'oeufs de poisson. Boutavent, boutevent, soufflet. Boutée, boutade. Boutées (A), par troupes. Bouteiller, musicien français du XVP siècle. Bouteillon, grand buveur, de l'italien bottiglione. Bouzine, cornemuse. Bo-je, bourreau, de l'italien boja. Boyers, bouvier. Boyre, courant d'eau. Boyte, provision de vin pour l'année. Boyteau , petite botte , petit tonneau. Bracque. Est-ce un jeu de paume du faubourg Saint- Marceau ou le carrefour de 214 GLOSSAIRE-INDEX Bracque, aujourd'hui place de l'Estrapade ? Bragmard , bracquemart, bâton, épée courte. Braginarder , mener joyeuse vie, Braguart, élégant, pimpant, coquet. Brague, cordage; braguette. Bragues avalades, culottes tombantes. Braguette, pochette entre les deux jambes du haut-dechausses ; quelquefois le contenu de la braguette. Braguettodyiej habitant de la braguette. Brain, un brin, un peu. Braisler, braire. Bramer, brasmer, crier. Brancquars, vergues. Brandes, broussailles. Brandif, brandissant. Brandifz (Tous), tout brandi, tout de go, tout d'une pièce. Branc ou brand d'acier, épée à large lame. Branchier, nom général des oiseaux de proie. Bransler, brandir. Brassai, bra;sart. Brassée, embrassade. Brassisers, bâtons. Braye, culotte ; toile goudronnée. Braver (Jamet), pilote célèbre du XVF siècle. Brayer, broyer. Brayes (Faulses), murs extérieurs de fortifications. Braze, braise allumée. Bréchet, le sternum, os de la poitrine où aboutissent les côtes par devant. Bregerac, Bergerac, chef-lieu d'arr., Dordogne. Bregmatis (Os), ou bregmatiques, partie antérieure du crâne, sinciput. Brehaigne, stérile. Brehemont, arr. de Chinon, Indre-et-Loire. Bren, merde. Brenasserie, se rappeler le sens du mot bren. Breneux, brenoux, merdeux. Brésil incarnat, bois du Brésil, fourni par les Cxsalpinia echinata et tinctoria, légumineuses. Bresser, bercer. Bressiner, tirer le cordage qui sert à hisîer une voile. Bretesque (A la), comme les Bretons. Breton '^Vin), vin du cépage Chinonais Le Breton. Breton Villandry, Claude le Breton, seigneur de Villan- dry, secrétaire des rois François F"" et Henri II. Breusse, vase à boire. Bréviaire, flacon en forme de livre de messe. Briare, Briarée, géant. Briber, boire et manger avec avidité. Bricot (Guillaume), pénitencier de Notre-Dame au XVIc siècle. GLOSSAIRE-INDEX Brief (De), bientôt. BriffauLv, frères quêteurs, goulus, gourmands, gens de grand appétit. Briguandines, armure. BrimbaleurSj sonneurs de cloches. Brimballer, se remuer, s'agiter, sonner les cloches. Brimballatoyre, propre à être brimballé, remué, agité. Brimbelettes, gâteaux recs. Brinde, vase à boire. Brindiere (Nauf), navire qui a pour enseigne une brinde. Bringuenarilles, géant. Brisnns. « Etat de la lune le quatrième jour du mois quand elle c?oît, et le vingt- sixième quand elle décroît.» (Le Duchat.) Brismarg d'algotbric. . . C'est du lanternoys, langage de fantaisie. Brizepaille , d'auprès Sainct- Genou (Venir de), se dit, en Languedoc et en Dauphiné, d'une femme débauchée. Brocadium juris, recueil de droite Brocardia juris, dont Brid'oye fait un juge. Broc, broche. Broc en bouc (De), de broche en bouche, immédiatement. Brocards, maximes de droit. Brosse ^^La), arr. de Saumur, Maine-et-Loire. Brouet, le Broglio, grande place à Milan. Brumel, musicien flamand du XVe siècle. Brushant de Mommiere, géant. Bruslefer, géant. Bruslefer (Etienne^, cordelier parisien du XV^ siècle. Brusq, âpre ; vin âpre, de l'ita lien brusco. Bruyer, géant. Bruyer, musicien. Bruyre, faire du bruit. BubeletteSj petites gouttes. BuDÉ (Guillaume), érudit contemporain de Rabelais. Buées, lessives ; la buée, le linge qui a passé à la lessive. Buffer, souffler. Buffeter, boire à même au ton- neau. (Littré.) Buglosse, buglose. Bulletin, patente de santé. BuLLou, de la maison de Du Bellay. BuourSj butors. Bur, de couleur grise; toge bure, toge d'étofîe grise. Bureau, grosse étoffe de laine. Burgotz, moines vêtus de bure. Buro/2, cabane. Bursal, qui est relatif à l'im- pôt. BuscH, La Tête-de-Buch, arr. de Bordeaux, Gironde. Busche (Bachelier en). On appellerait en Poitou et en Saintonge bûche les bâtons tracés par ceux qui commencent le rude apprentissage de l'écriture. Le mot bachelier en bûche aurait alors un sens ironique. GLOSSAIRE- INDEX Bussart, tonneau. BustarinSj ventrue. Bustuaire, du bûcher. Bustuaires (larves), larves rô- dant autour des tombes. BuTROT, Buthrole, ville d'Epire. BuzANÇAY, Busançais, arr. de Châteauroux, Indre. Byssines (Paroles), paroles douces flatteuses, du latin byssus, lin le plus fin. Bytures, oiseaux fantastiques. C, lettre par laquelle Brid'oye déîigne le Code romain. Cababezacé, mis en panier et en besace. Cabasser, amasser. Cabires (Dieux), divinités phéniciennes. Cabirotades, grillades de chevreau ; allusion aux dieux cabires. Cabirotz, chevreaux. Cabourne, sorte de chapeau. Cabre, chèvre. Cabus, subst., choux pommés; et adj. , pommés. Cace, Cacus, géant. Cachekt, demi-masque, loup. Faut-il lire cacheiaid? Cacoethe, difficile à guérir, du grec. CacqueroleSj CacqueroUiere, co-. limaçons, colimaçonnière, l'un des revenus de Panurge. Cacquerotier, homme à doigts crochus. Cacquesangue, Caquesangue, flux de sang. Cadeac, musicien français. Cadouyn, chef-lieu de canton de l'arrondissement de Bergerac, Dordogne, où se conserve un saint suaire. Cagar, chier. Cagaux, Cagotz, moines mendiants. Cahuaillej canaille. Cahuet, bout, pointe ; en particulier, bout du capuchon. Caiche, queue. Caignard, sale recoin, chenil. Calabrisme, genre de danse. CaillebotteSj lait caillé. Cailles coyphées, jeunes femmes en gaîté. Caillette, fou de Louis XII et de François I*'". Caisgne, chienne. Ca/aer (Tour), tour du bel air. Calamité, aimant, l'aiguille de la boussole, la boussole. Calaihe, corbeille, du grec. Calfreter, rembourrer. Calibes (Acier de), acier trempé dans le Chalibs, fleuve des Celtiberes. Calicules, calices. Caliges, chaussures. Callafater, calfater. Callaischre, Grec mort en mer dont ['Anthologie cite les épitaphes. Coller, caler, plier. Callianax, médecin grec antérieur à J.-C. CALLiMACHE.nom grec emprunté à VAnthologie. Calloier. Ce mol serait formé GLOSSAIRE-INDEX de deux mots grecs, et signifierait : beau moine, ou bon prêtre. Calpe, montagne d'Espagne au détroit de Gibraltar. Calumniateur (Le), le diable. Camarine, ou Camerine. V. Palus. Camelin, musicien. Camelin, allure du chameau. Catnelopardales, doit être une sorte de panthère. Camille, reine des Volsques. Camille, messager, serviteur, surnom de Mercure. Camisade, attaque inattendue. Campane, campanelle, clo- che, clochette, du latin campana. Canabasser, canabasserie, exa- miner minutieusement, exa- men minutieux. Canarre (Ilesde), îles Canaries. Cancre, crabe. Candé, arr. de Blois, Loir-et- Cher. Cancelleresques (Lettres), lettres émanant des chancelleries. Cane (Faire la), avoir peur, caner. Canne, mesure de longueur. Canon (Casse en), en bâtori ; on dit encore souffre en canon. Canonge la carte, Canonica charta, papier canonique, papier fort. Canore, adj., sonore; subst., chanteur. Canteperdris, nom de lieu ; doit être dans l'Hérault, près de Montpellier. Canthare, vase à boire. Cap de Sainct-Arnaud... Voici la traduction de M. Bur- gaud : « Tête de Saint-Arnaud, qui es-tu, toi qui me réveilles ? Que l'ivresse te retourne ! Oh ! saint Sévère, patron de la Gascogne, je dormais si bien quand ce taquin est venu me réveiller ! » Cap en houlle, l'avant du navire à la lame. Cap et les basses, le cap et les bas-fonds. Capable (Escuelle), de grande capacité. Capella (Martianus), grammairien latin du V^ siècle. Capilamens, filets, ligne fine. Capito (Atteius), jurisconsulte romain du F^ siècle avant J.-C. Capitoly, capitole. Capitonner (Se), se couvrir la tête. Capnomantie, divination par la fumée. Capo Melio, le cap Malio. Cappassonnez, caparaçonnés. Cappe, manteau, Cappelines, sorte de casque. Cappiettement, furtivement. CaprimulgeSj oiseaux qui tet- tent les chèvres. Caps, chefs, capitaines, du latin caput. Capse, coffret. GLOSSAIRE-INDEX Capter, prendre. Capulaire, corde. Capiissionnaire, qui a un ca- puce. Caputions, porteurs de capuces, capucins. CaqueroUe, écaille, coquille. V. Cacquerolles. Caracque, carracque, sorte de navire. Caradoths, énigmes. Carbonnades, grillades. Carcan, collier. Cardiacque (Passion), souffrance du cœur. Cardinalizer, rendre rouge. Carine, carène. Carmaigne, Caramanie. Carmes, vers. Caroles, danses en rond. Carolus, monnaie de Charles VIII. Caros, carous (Faire), boire à l'allemande. Carpalim, vif, alerte, du grec. Carpasie, ville de l'île de Chypre. Carpasien (Lin), asbeste, amiante. V. Asbeston. Carpentras, Elzéar Genêt, né à Carpentras, musicien du XVF siècle. Carp/o/j,carpillon, petite caipe. Carracons, caraques, espèce de navire. Carreau, trait, flèche. Carreau, carré. Carreleure de ventre, raccom- modage de ventre, raangeaille. Cartasonnes, licornes. Cartier (Jacques), navigateur malouin du XVF siècle. Caruel (Hans) , personnage qu'on retrouve dans l'Arioste et la Fontaine. Carymary, carymara , juron burlesque de la fabrique de Rabelais. Case, maison. Caseiforme, en forme de fro- mage. Caspies, caspiens. Casquets, casques. Cassade (L'isle de), l'île de la Tromperie. Casse escoute, haler une écoute avec force. Cassemuzeaulx, sorte de petits gâteaux durs. Casserons, casseroles, poêlons ; c'est aussi le nom d'une es- pèce de poulpe. Cassidoine, calcédoine. Cassines, maison de campagne. Castamena, ville d'Asie. Castanes, châtaignier. Castel (Le), cabaret parisien. Castilliers, ou Châtelliers, ab- baye du diocèse de Poitiers. Caston, chaton. Castor, étoile de la constellation des Gémeaux ; feu saint Elme. Castoreum, sécrétion qui se trouve dans une poche à l'anus du castor. Castes, chastes. (Castro (De), jurisconsulte ita- lien du XVe siècle. GLOSSAIRE- INDEX 2 19 Catadupes, cataractes, du grec. Cataglyphe, ciselure, du grec. Catarates, maudits, du grec. Catay (Le), la Chine. Categides, tempêtes, du grec. Catenat, cathenat, cadenas. Caterve, bande. Catharactes, qui brisent, du grec. Cathedrant, siégeant en chaire. Cathene, chaîne. Catoblepes, animaux fantasti- ques. Catoptromaniie, divination par un miroir. Caudict, tige. Caiild, rusé, cautus. CAULDAUREiL(Frai), frère Chaudeoreille, moine de la façon de Rabelais. Caules emb' olif, choux marinés à Thuile. Cauponizer, boire. Cauquemarre, quelque animal rare et curieux. Cavalliers, talus où l'on met de l'artillerie. Cavayn, caveau. Cave paincte (La), dépendance de la maison de Rabelais à Chinon. Caveche , tète, de l'espagnol cabeça. Caviatz, caviar, œufs de pois- son dans la saumure. Caynon, Chinon , nommée Caino par Grégoire de Tours . CEE, géant. Ceincts, cordeliers. Ceincture ardente (La), l'équateur, la zone torride. Celeume, chant rhythmé pour encourager les matelots ; chants d'allégresse, du grec. Celles, arr. de Melle, DeuxSèvres. Celoces, petits navires légers. CeniadeSj faons. Cen, ce en. Cenomanique, du pays des Cénoraans, les Manceaux. Censorin, censeur. Centonifïques, faiseurs de centons. Centumvirale (Court) , Cour composée de cent juges. Centurie, centaine. Cèpes, cephes, animaux fantastiques. Cephaleonomantie , divination par la tète d'un âne. Cepola (Barthélémy), jurisconsulte véronais. Cercelles, sarcelles. Cerclé, sarclé, arraché. Cercopitheces, cercopiteques, sin ges à queue. CeRCU, dict BOURGUEMAISTRE, personnage de la maison de Du Bellay. Cere, cire. Cerfouettes, petite binette, outil de jardinage. Cerge, serge. Cerites, habitants de Ceres, ville de Tuscie (Toscane), ou Étrurie. Cerne, cercle. Cernophore, genre de danse. Cerons, cirons. GLOSSAIRE-INDEX Cerq, île deSerk, dans l'archi- pel anglo-normand. Certon, musicien français du XVie siècle. Ctrulé, bleu, du latin cœru/e«s. Ctsinim, serviteurs, de l'hé- breu ? Ctssateur, cessant de faire quelque chose. Cestrin, succin, ambre jaune. Cesves, sève. Chachanin, serviteur, de l'hé- breu x? Chaffourer, barbouiller, salir, tacher. Chaire, siège à bras. Chaisne, chêne. Chaisnon, Chinon, chef-lieu d'an., Indre-et-Loire. Chaiton, armenian. L'Arménien Hayton, voyageur du XIIF siècle. Challans, mauvaises pratiques. Chalbroth, géant. ChMit, bois de lit. Challer, écaler. Chamarre, robe de cérémonie. Chambrier, Joachim Camerarius, érudit du XVF siècle. Chambourg, château de Chanibord, commencé en i5 36 par François F"". Champier (Symphorien), médecin lyonnais du XVF siècle. ChampiSj enfant trouvé. Chaneph, hypocrisie, en hé- breu. Chanteau, morceau ; quartier de lune. Chantelle, en Bourbonnais, arr. de Gannat^ Allier. Chantepleure, arrosoir. Chanu, à cheveux blancs. Chapifou, jeu de Colin-Maillard. Chaplis, coups; bruit des masses d'armes s'entre-cho- quant. Chapoter, racler. Chappart, qui s'échappe. Chappe du ciel. On dit encore : la calotte des cieux. Chappelle, alambic. Chappl-ys (Le capitaine) et son facteur Alcofribas. Sont-ce Rabelais et son ami Claude Chappuys, garde des livres de François I^""? Charazie, pays de Charax, en Asie, Chardonnetie. La chardonnette, dont on se sert dans quel- ques localités pour faire cailler le lait, est la fleur de l'artichaut. Chardriers, chardonnerets. Charesses, caresses. Chareté, masque. Charisteres , chants d'actions de grâces, du grec. Charités, les grâces. Charmois (Charles), Charles Carmoy, peintre du XVF siècle, qui a travaillé à Fontainebleau. Charnier, lieu où l'on conserve les viandes salées. Charrantons, charançons. Charte, alphabet. Charles, cartes. GLOSSAIRE-INDEX Chasteau^Le , cabaret parisien. Chat de mars^ martre. Cliatouille, lamproie. Charmâtes , trous profonds , gouffres. Chauffourer, égratigner. Chault (Me), m'importe. Chaumeny, moisi. Chausse, cône d'étoffe feutrée pour filtrer les liquides. Chauver des aureilles, remuer, dresser, baisser les oreilles. Chauvigny, Chavigny, ChaviNY, arr. de Vendôme, Loir- et-Cher. Cheli, gâteau, en hébreu. Chélidoine, hirondelle, du grec; c'est un nom de navire. Chelimins , rêveries, de l'hé- breu. Chemant (François Erault, sei- gneur de), président au par- lement de Turin. Chemnis, île d'Egypte célèbre par un temple d'Apollon. Chenevé, chènevis, qui passait pour antiaphrodisiaque. Chenin, nom d'un cépage. Chère lye , chère joyeuse, liesse. Cherme, charme. Chesaulx , habitations de paysans. Chesil , nom hébraïque d'Orion, constellation des tempêtes. Chesinins, forts, de l'hébreu? Cheutes, tombées. Chevauche, bien, profit. Chevaulx (Isle des), île d'Inchkeith, sur la côte d'Ecosse. Chevêche, chouette. Chevecier^ celui qui a soin du matériel de l'église. Cheveu de Venus, capillaire. Chevreter , faire la chèvre, s'impatienter. Chevrotin, outre de peau de chevreau. Chiabrena, minauderie. Chiabrener , faire l'aimable , minauder. Chichart, chiche. Chiliandres (Naufz), navires portant mille hommes. Chippes, navires, de l'anglais ship . Chiquanous, gens de chicane. Chirotnantie , divination par les lignes de la main. Chironacte, à main prenante, du grec. Chocquer, se battre. Charomantie , divination par les porcs. Choine, ou Choesne, pain blanc délicat. Choie, Cholere, colère ; bile, du grec. Chorme, chiourme, l'équipage de rameurs d'un navire. CHOR.EBUS , fils d'un roi de Thrace, amant de Cassandre, qui fut tué au siège de Troie. Chorographie , description de pays. Chose, Chouzé-sur-Loire, ar- rond. de Chinon, Indre-et- GLOSSAIRE-INDEX Loire. Chronique, maladie chronique. Chrysippus, philosophe stoïcien du IP siècle avant J.-C. Cibotz, ciboules. Cil, celui, celui-là. Cimasultes, contours sinueux. CiNAYS , Cinais , arrond. de Chinon, Indre-et-Loire. Cincinnatule, prisé. Cinamone, cinnamoine , cannelle. Circumbilivagination , tour- noiement. Circuinbilivaginer , tourner. Civadiere, voile attachée sous le mât de beaupré. Clabault, aboyant. Claquedens, gueux, qui souffre du froid. Claudin, Claude de Sermizy, musicien du XVI^ siècle. Claustrier (Moine) ^ moine cloîtré. Claveaux, espèce de hameçons. Clavelé, mouton qui a la cla- velée; Rabelais l'applique aux hérétiques. Claver, fermer. Claveure , serrure , fermoir , clef. Clavier, serrure. Cleanthe, stoïcien du III« siè- cle avant J.-C. Clémentines, décrétâtes de Clé- ment V. Cleon DE Daulie, cité par Plu- tarque pour n'avoir jamais rêvé. Clerberg (Henry}, contemporain de Rabelais. Cleromaniie, divination par le sort. Clicquer, claquer. Clicqueites, crécelles. Climatere, âge climaterique, âge d'un homme qui est un multiple de 7 ou de 9. Clouatier, cloutier. Clouer, réunir. Ciousbraneau (Le), le derrière; c'était le nom d'une partie fort sale de l'Université. Clyinenos, plante de la famille des euphorbiacées. Cobbir, bosseler. C0CCAIE (Merlin), poëme macaronique de Théophile Folengo. Coccognide, fruit du garou. Cocquassier, marchand d'œufs. Cocqueinart, marmite, chaudron. Cocquecigrue, animal fantasti- que. CoDERETZ, Cauterets. Codices, cahiers. Ccelivages, tirés du ciel. Canaires (Lois), lois limitant le luxe de la table. Coguk, cagoule, capuchon. CoHUAU, de la maison du car- dinal Du Bellay. Coinci, agréable, propret. V. Cointe. CoiNGNAUFOND (Abbaye de). Abbaye de la fabrique de Rabelais. L'édition origi- nale porte Fonthevrault. GLOSSAIRE-INDEX CoiNGNET (Pierre du), Pierre de Cugnières, avocat du XIV^ siècle, qui eut de grands démêlés avec le clergé. CoingMt, petit coin. Cointe, mignonne. V. Coinct. Coiraux, boeufs gras. Coissins, coussin, oreiller. Col, cole, colle, bourrasque, coup de vent, tempête, ouragan. CoLDREAULx (Les), Village du Chinonais. Collauder, vanter. Colligence, colliguance, chose qui réunit; lien, relation, rapport. CoLLiNET, serait Jacques Collin, d'Auxerre. Colocasie, colocase. Colocynthe, coloquinte. C0L0NGES-LÉS-R0YAUX,C0Ulanges-sur-l'Autize, arr. de Niort, Deux-Sèvres. Colymbades (Olives), olives confites dans l'huile, du grec. Combrecelle, action de se baisser pour recevoir quelqu'un sur son dos (Le Duchat) ; comble, selle, monture (Bur- gaud). Comicque (Le) , Térence dans VEunuque. Comité, compagnon, du latin cornes; surveillant des galériens. Comment, commentaire. Commissure lambdoïde, suture du crâne. Commissure sagittale, suture du crâne en forme de flèche. Compacture, assemblage. Compaing, compagnon. Companage , ce qui se mange avec le pain, cum pane. Compère , musicien du XV siècle. Competer, convenir à, s'appli- quer à, appartenir à, s'ac- corder avec. Compites, carrefours. Complainctz, plaintes. Compost, comput , livre pour calculer les époques du calendrier. Compouste, compote. Compte romanicque, calendrier romain. Compulsoire, qui pousse à. Conare, glande pinéale. Conche, conque. Concilipetes, qui vont au concile. Concion, contion, discours. Conclusion, fermeture. Concoction, digestion. Concoctrice (Vertu), force qui fait digérer. Concords, qui est d'accord, qui s'équilibre. Conculqué, foulé aux pieds. Concussion, concution , commotion, secousse. CoNDEMNATiON, pays où l'on condamne. Condempner, condamner. Condieux , dieux en même temps qu'un autre dieu, ses confrères. 224 GLOSSAIRE-INDEX Condignac, cotignac, gelée de coins. V. Cotoniat. Condigne, digne. Conduist, conduisit. Confahidation, conversation. Confalonnier , porte-enseigne. Confalorij confanon, gonfanon, enseigne, étendard. Confermer, confirmer, affermir. Conformer, confirmer. Connilz, connins, connis, la- pins. Connubiales, conjugales. Conopée, lit de repos à rideaux. CoNSENTiNois, habitants de Cosenza. Consequemmentj ensuite. Conserve (En), en compagnie ; on dit encore de deux navires qu'ils naviguent de conserve, quand ils suivent la même route. CoNsiLiON, Jacques Consilium, musicien du XVI^ siècle. Consolde, consoude. Consonnantes, consonnes. Consonner, concorder, s'accorder, sonner avec. CoNSTANTio Festi, OU Festa, musicien romain des XV« et XVie siècles. Contaminer, souiller. Co/i/emperer, tempérer,adoucir. Contempnement,contemnement, mépris. Contempner, contemner, mépriser. Contemptible, méprisable. Contendent, soutenant. Contendens, prétendants , exigeants. Contrehastier, landiers , chenets à crans pour y mettre les broches. Contremont, en l'air. Controverses, controversées. Contumelies, injures. Contunder, écraser. Convenir, se réunir, se rassembler. Conventz, couvents. Copie, abondance, du latin co- pia. Copieux , mauvais plaisants ; abondants, prodigues. Coqu, coucou. Coquarde (Bonnet à la), sorte de bonnet très-lourd, garni de rubans. Coquart, niais. Coquasses, cocquasses, petit pot de terre allant au feu pour faire chauffer l'eau ; chaudrons. Coqueluche, capuchon. Coquemars, pots. Coquillons, encapuchonnés. Coquins, mendiants. Corbeuf, corne de bœuf, juron. Cor bieu^ juron, CoRAXiENs, peuple de la Colchide. Corbigeaux, cormorans. Corbiner, dérober. Cordaces, danses lascives. Cordouan, cuir de Cordoue. Corme, cidre de cormes. Cormier (La plante du grand), le cru, le cépage. Cornabons (La journée des). GLOSSAIRE-INDEX faut-il lire cornabous ? la journée des cornets à bouquin, la journée où l'on fit un grand tapage, Cornaboux, cornets à bouquin. Cornélius (Alexander), Polyhistor, philosophe, géographe et historien du pr siècle. Cornette, cravate. CoRNiBus (De), Des Cornes, Pierre Cornu, prédicateur contemporain de Rabelais. Cornucopie, corne d'abondance, du latin cornucopia. Coronal (Os), os frontal. Coronale (Joincture), jointure de» deux parties de l'os frontal ou coronal. CoRONE, Cyrène, en Afrique. Coronie, corniche. Coronopous, coronope, plante. Corpe degalline, corps de poule, juron italien. Corpore, corps. Corratières, courtières. Correct, adv., correctement. Corrugation, contraction. Corruptele, corruption. CorsecqueSj javelots à grosse tête. Corsique, corse. Corybantier, dormir les yeux ouverts, comme les cory- bantes veillant sur Jupiter enfant. CoRYTUS, le mari d'Electre. Coscinomantie, divination par un crible. Rabelais. V. Coscossons et coscotons à la mauresque, couscoussou. Coscoté, tacheté. Coscotons, caillots de lait. Cosses, anneaux où passent les cordages d'un navire ; M. Jal dit qu'il faut lire costes (côtes) du navire. Cosson, nom vulgaire donné aux larves du bruchus pisi, ou 6. fabz, qui vivent dans les semences farineuses ali- mentaires, pois, fèves, lentilles, etc. Cotoniat, cotignac, gelée de coing. V. Condignac. CoTiRAL (Henry), serait HenryCorneille Agrippa, suivant Johanneau. Cotonner, garnir de coton, bourrer de vivres. Cotte hardie, grande robe tail- tée droite et fermée comme un fourreau (Quicherat). Cotteurs, commentateurs. Cotylédons, orifices extrêmes des veines et artères menstruelles. (Paré.) Cotyles, ancienne mesure d'un peu plus de six litres. Couane, couenne. Couble, coublement, couple, accouplement. Coubte, coubtée, coude, coudée. Coucher en chapon, se coucher de bonne heure, comme les poules. Coucourde, gourde. Coudinac, coudignac, cotignac. 22t GLOSSAIRE-INDEX V. Condignac et cotoniat. Coue, couetz, amures (Jal). Couillaris, grosses pièces de canon. Couillevrines, coulevrines. Coul, col, cou. CouLAiNES, lieu près de Chinon. CouLDRAY (Le), lieu planté de coudriers, le Coudray, arr. de Saumur, Maine-et-Loire. Couller, brandir. Coupe guorgée, coupe testée, gorge coupée, tête coupée. Coupelaud, coupelle, creuset à éprouver les métaux. Coupes, couppes, bassins, pla- teaux de balances. Couppiers, écuyers tranchants. Coural, corail. Courbassée, toute courbée. CouRCAiLLET, ami de Panurge. Courtes, courges ; courlis. Courmaran, cormoran. Courquaillet, appeau à cailles. Courracteurs, correcteurs des comptes. Courraies, courroies. Courrait, gros verrou. Courratiere, courtière, entre- metteuse. Coursie. V. Coursouoir. Coursouoir, coursie , coursière (Jal), passage entre la proue et la poupe du navire. Courtault, cheval ramassé, d'épaisse encolure. Courtil, jardin clos autour d'une maison. CouscoiL (Adam), cordelier de la façon de Rabelais. Coussons, goussets de manches de chemise. Couste et vaille, quels qu'en soient le prix et la valeur, coûte que coûte. Coustiers, côtiers ; qui mettent à côté. Coustieres, haubans. Coustrets, cottrets. Coustrets ( Porteurs de) , porteurs de hotte, portefaix. Coy, tranquille, non troublé, non agité. Coyphe, coiffe. Coylte, courte-pointe. Coz, pierre à repasser. Cradots^ brèmes. Crxpalocomes, cris d'ivresse, du grec. Craine, crâne. Cramoisi; est employé comme superlatif. Cramoisine, belle étoffe. Crapaudine,crapauldine, pierre précieuse d'un gris brunâtre, qui se trouvait, dit-on, dans la tète d'un crapaud, Cratyle, titre d'un dialogue de Platon. Cravans, oies sauvages. Gravant, arr. de Chinon, In- dre-et-Loire. Créance, témoignage. Credentiers^ dégustateurs^ es- sayeurs de mets. Cremasteres, muscle des testi- cules. Cremere (Le fleuve), aujourd'hui Valea, rivière d'Étrurie. Crenequin, outil à tendre les GLOSSAIRE-INDEX 27 arbalètes. Crespelu, crêpé, frisé. Crevailles, festins où l'on mange à en crever ; faire sa crevaille, mourir. Creziou, creuset; godet de lampe. Cristallin, cristal. Critiquer, diminuer. Critolaus, philosophe péripatéticien de Phasélisen Lydie. Crocquenotaire, protonotaire, V. Crote notaire. Crocutes, animaux fantastiques. Croql'ignolles, ville delà géographie de Rabelais. Crotaphique (Artère) , artère temporale. Crote notaire, protonotaire V. Crocquenotaire. Crotesque (En), comme la peinture des grottes. Croue, écrou. Croulay, cou Croulé (près de Chinon), où il y avait un couvent de cordeliers, » (Burgaud.) Croustelevés, ayant des maladies de peau dont les croûte^ s'enlèvent. Croustelle, arr. de Poitiers, Vienne. Crue, croc, crochet. Cruon, cruchon. Crustumenies (Poyres), poires de Crustumenum, en Toscane. • Cryere (Tour), tour froide. Cucrocutes, animaux fantasti- ques. Cueilleroyent (Se y), s'y réuniroient. Cueur (Bas), moindre qualité. Cuider, cuyder, croire, penser. Cuisse dorée (Le philosophe à la) , Pythagore. Cuisse heronniere , cuisse de héron, cuisse maigre. Cuiites, cuissons. Culices, cousins. CuLLETANT (Frère Artus), moine de la façon de Rabelais. Culpelê, singe. Cultans, rendant un culte. CuNAULT (Notre-Dame de), prieuré de l'Anjou, arr. de Sauraur, Maine-et-Loire. Cures, excréments, en fauconnerie. CuRTius, jurisconsulte fîa.mand. CusANUs, CusANE, le Cardinal Nicolas Crebs, de Cusa, mathématicien du XV^ siècle, qui avait prophétisé la fin du monde. Custodes, gardes, du latin custos. Cuticule, surface. Cuve le Vénus, chardon ""à fou- lon; Pline l'appelle Veneris labrum. Cyerce,went d'ouest-nord-ouest. Cymbales, sonnettes, clochettes. Cynamolges, oiseaux fantasti- ques. Cynara, l'artichaut. Cynes, arbres à fibres textiles. Cynocéphales, animaux à tète de chien, du grec. Czà, çà.

8 GLOSSAIRE- INDEX

Dactyle, datte. Dadvantaige, de plus. DaemonSj génies. Daguenets, petites dagues. Dail, faux. Daire, Darie, Darius. Damerj surpasser. Damis , compagnon d'Apollonius de Tyane. Damostrate , philosophe de l'antiquité. Dangiers palatins, surveillants au service des maris jaloux. Danouble, Danube. Dar, Dard, petit poisson blanc à nageoires rougeâtres. Dardelles, petites javelines. Darie, Daire, Darius. Daril, nom d'une forme de syllogisme. Barioles, gâteaux à la crème cuite. Dast, Dax, chef-lieu d'arr., Landes. Datan, nom d'un diable. Dateur, distributeur, dispensateur. Dauber, Daubber, frapper fort; encore usité chez les écoliers. Davantau, tablier. Daviet, davier, pince-levier à l'usage des dentistes. Davus, esclave dans VAndriennc de Térence. Dea, interjection. Déambuler, promener. Débarquer d'un lieu, s'enfuir. Debezilkr, briser, mettre en pièces. Debitis (Millort). Signifie-t-il : Milord qui a des dettes? Débouter, repousser. Debradé, qui avait le bras démis. DÈCE (Philippe), Decio, juris- consulte italien des XV^ et XVP siècles. Deceinpedale, de dix pieds. Décliner, éviter. Decours, courant, cours; dangers. Decreiales, constitutions pontificales. Decretaliarche , souverain des Décrétales, le pape. Decretalicides, Decretalictones, tueurs de Décrétales. Decretalifuges , qui fuient les Décrétales. Decretalipotens, docteur très-- fort sur les Décrétales. Decumane, dixième, dix fois, gros comme dix; c'était le nom d'une légion romaine, Deduyt (En voir le), voir ce qui en résulte. Déesse soubsterraine , Proserpine. Defaucillé, démis à l'os focile. V. ce mot. Deffourrer, enlever la fourrure. Défiance, défi. Defleuher, dégrafer. Degourt, dispos, joyeux. Degout, écoulement, ce qui dégoutte; le jus d'une viande. Degouziller, boire très-vite. Deguast, dégât. Deguaster, détruire. GLOSSAIRE-INDEX De hayt, adj., gai, joyeux, vif. De hayt, adv., gaiement et vivement, Deject, abattu. De la Fage , musicien du XVe siècle. De la Rue , musicien belge du commencement du XVI" siècle. Delphinium, pied d'alouette. Demande (J'en), j'en appelle. Démarcher, s'en aller. Demigre (Je), je me rends. Demiourgon, Demogorgon, le génie de la terre, en mauvaise part. DeModis signifîcaiidi, ouvrage de Jean de Garlande. Demonax , qui vécut près de cent ans. Demouller, déformer. Demy-ostade , étoffe à poils demi-longs. Demye alaine{A), à la moitié. Denare, denier, argent, de l'ital. danaro. Dendromalache , arbre , bois tendre, du grec. Denigement, Deniger, déniche- ment, dénicher. Départ, séparation. Département, Départie, départ. Départir, partir, fuir; séparer, partager, donner une part ; disposer. Depescher (S'en), s'en débarrasser à la hâte. Dépiter, maudire. Depopulé, dépeuplé. Déporter (Se), s'écarter. Déporter [S' en] , s'en aller, s'en abstenir; s'en rapporter à. Deposcher, tirer du sac , de la poche. Dépravez, défigurés, altérés. Deprisement, mépris. V. Despris. Dercé, fontaine de Dircé, en Arcadie. Der Guasconguer thut schich... C'est du vieux allemand ; M. Burgaud traduit : « Le Gascon se flatte de se battre avec n'importe qui, mais il est plus enclin à voler : ainsi donc, chères femmes, veillez aux bagages. » Desarroy, meslée, bataille en désordre. Descœuvrer, découvrir. Desconfite gigantale, déconfiture des géants. Desconfort, découragement. Descrouller, désarticuler. Desemparer, supprimer. Deservy, mérité. Desgonder, faire sortir des gonds, déboîter. Dés huy, dès aujourd'huy. Desincornifistibuié, démanché. Desinens, finissant. Désister, renoncer. Desyuc/zer (Au), au réveil, quand les poules cessent de jucher. Deslocher, désarticuler. Desnier, refuser. Despendre, dépenser. Despiter, défier. Desporter (Se), V. Déporter. Despris, Despriser, mépris, mé- 23o GLOSSAIRE-INDEX priser. Despurner, cracher. Desracher, desrocher, arracher. Desrayé, hors du chemin. Desroter, délier, Dessay, André de Montalembert, sieur de Dessé, qui commandait le corps français envoyé au secours des Écossais contre les Anglais, en I 549. Dessirer, déchirer. Destituer, priver. Destorses, détours. Desultoyres (Chevaux), che- vaux sur lesquels on sautait. Detravé, échappé, qui a rompu ses entraves. Detrichoaères, dévidoirs. Deu Colas, faillon, par saint Nicolas, compagnon, en lorrain. Deult, chagrine, blesse, dolet. Dévaler, devaller, descendre. Dei'allée, descente. Deviniere (La), propriété de Rabelais, entre Chinon et Lerné. Devis, gré, convenance. Devise, enseigne. Devise de Monsieur l'Admirai : Festina lente. Dévotion ( Horrificque) , un vœu effrayant. Dez (Hors tous , en dehors de tout hasard. Diableteau, petit diable. Diableteau de choeur, diable jeune comme un enfant de chœur. DiA Cyenes, près Syène, ville de la Haute-Egypte. Diainent en table, diamant taillé à surface plane. Diamerdis (Poudre de), poudre d'excréments desséchés. Diaphragme, muscle très-large et très-mince qui sépare la poitrine de l'abdomen. Diarhomes (Climat), climat de Rome? Diastolicque, mouvement de dilatation. Diatyposes, inventions, du grec. Diavol, diable. Dicastes, juges, du grec. Dicou, dites, en limousin. Dict, édicté. Dictaine, plante de la famille des labiées. Dicte, montagne de l'île de Candie. Diecule, jour. Diesble, diable. Diète, diette , manière de se nourrir, façon de vivre. Dieu seas (A), adieu, bonjour, en provençal. Diffame, perte de réputation. Diipetes, aspirant aux dieux, allant vers les dieux. Dilicule, point du jour. Diliger, aimer, chérir, du latin diligere. Dille, fosset. V. Donzil. Dimions, illusions. Dimittons, remettons, du latin dimittimus. Dîna, en Lycie , célèbre par un oracle d'Apollon. GLOSSAIRE-INDEX 3 Diole, diable. DiocLiDES, nom grec emprunté à ['Anthologie. Diphthere, peau de la chèvre Amallhée. DipsodeSj altérés, du grec. Direption, action de mettre en pièces, de déchirer. Dis, Pluton, dieu des richesses souterraines. Disceder, éloigner. Discepier, discuter. Discession, départ. Disciplines, études. Discrasiée, dyscrasié, de mauvaise constitution, de mauvaise complexion, du grec. Discrétion, discernement. Dissolu, dissipé, dissout, ré- solu. DiVE (La), petite rivière du Poi- tou , marécageuse et non navigable. Doctrine, ensemble d'études. Doctrinal, Doctrinale pt^erorum, par Alexandre de Villedieu. Dodeliner, balancer doucement la tête de droite à gauche et de gauche à droite. Dodeliner (Se), être pour soi aux petits soins. Dodine, sauce à l'oignon. Doint, donner. Dominotier, fabricant d'images et de cartes à jouer. Dommaine (Hault), le royaume des cieux. DoNAT, vElius Donatus, grammairien du IV^ siècle, auteur d'une grammaire latine, et par suite la grammaire elle- même. Dont, d'où. DoRBELLis, cordelier angevin du XVe siècle. Dorcades, espèce de chevreuil. Dorelot, enfant gâté, dorloté. DoRiBus (Maistrej , P. Doré, jacobin, ou Matthieu d'Orry, dominicain. Doriphages, mangeurs de présents, du grec. DoRis (Michel), Espagnol. Doublet, musicien. Doublet, terme de trictrac. Doubler, douter, redouter. Doué, arr. de Saumur, Maineet-Loire. Dours, douz, dos. Douzains, pièce de douze deniers. Douzil, fosset. V. Dille. Doyac (Jean), ingénieur qui construisit le pont Notre- Dame, à Paris, et passe pour avoir fait franchir les Alpes à l'artillerie de Charles VIII. Doye, mesure de capacité. Draconneaulx, vers de la cuisse. Dragées, épices données aux gens de loi. Drapeaulx (Vieux), vieux chif- fons. Dronos (Donner), donner des coups, en languedocien. Dropace, épilatoire. Drouet. Serait-ce Heroët? Du Bellay (Guillaume), l'un des frères du cardinal, grand capitaine et écrivain. GLOSSAI RE-INDEX Duir, duyr, convenir, plaire. Duisantj convenable. Dulie, culte de vénération qu'on rend aux saints. Dumet, dumtté, duvet, duveté. Du MoLLiN, ou Du Moulin , musicien français. Duple, double, du latin duplex. DuppCj huppe, oiseau. Du tout, tout à fait. Dyas, deux. D'Ynarius, Dinarius? Eales, animaux fantastiques. Eau ardente, eau-de-vie. Eau beniste de cave, vin. Eau d'ange, eau de myrte. Eau de naphe , eau de fleur d'orange. Eau gringorienne, eau bénite, dont Grégoire le Grand généralisa l'usage. Eccius ou EcKius, théologien allemand, adversaire de Luther. ECHEPHRON, ayant du bon sens, du grec. Echineis , echeneis rémora , poisson. V. Remore. Echines poignans, enveloppes piquantes. Edonides, bacchantes. Efferée, sauvage. Effiancé, fiancé. Effructé, dépouillé de fruit. Efrené, ne supportant pas le frein. Egenes, pauvres. Egesta, fille d'un prince troyen qui se livra au fleuve Crisinus changé en chien. Egipanes, egipans, moitié hommes, moitié boucs. Egiuchus, qui tient l'égide, du grec. Egnatins, ordre religieux. Ela, note la plus haute de la gamme. Elaiodes, huileux, du grec. Elanes, les Landes. Electre, ambre, du grec. Eleeniosynes, aumônes, du grec. Eleichie, en forme de poire, du grec. Elianus, Elien, naturaliste du me siècle. Elicies, éclairs, du grec. Elixo. Est-ce élixir? Eluer, laver, du latin eluere. Elutian, épuré, du latin e/uere. Ernbavieré, ayant une bavette. Emblée (A 1'), en cachette. Embourrer, engrosser. Embrunché, recouvert, fait de branches Eniburelucocquer, embarrasser, emmitoufler, entortiller. £m6ofr,s'imboire, s'approprier. Embut, entonnoir. EmininSj espèces, de l'hé- breu ? Emmelie, genre de danse. Empaletocqué, enveloppé. Empans, mesures de longueur. Empantophlé, enfermé dans une enveloppe. Empas, entraves. Empeger, empeiger, empêtrer, prendre au piège. Empescher, sommer, contraindre; embarrasser, mettre dans GLOSSAIRE-INDEX i33 l'embarras. Emploicter, employer. Emunderj nettoyer. En, au. Enasé, sans nez. Enay, géant. Enay, l'abbaye d'Ainay, à Lyon. Encarrer, engraver. Enclaver, enfiler ; clôturer. Enclins, penchés, inclinés. Encochcr, attacher. Encyliglotte, anciloglosse, vul- gairement le filet, du grec. Endenteléj endenté. Endouayré, gratifié. Endousseure, arête, crête d'un toit. Enduire, digérer, terme de fau- connerie. Eneoremes, nuages floconneux dans l'urine, du grec. Enfermier, infirmier. Engarier, engaries. V. Angarier, angaries. Engastrimythes, ceux qui parlent du ventre, du grec ; ventriloques, du latin. Engin, moyen, outil, appareil, stratagème, adresse. Engipponné, enjuponné, portant robe. Engolevent, géant. Engoulevezinemassez, froissés, foulés. Engoullé, mis dans la bouche. Engourdely, engourdi. Engroneland, Groenland, Groënlandais. Engrouin (Mal), mauvaise fortune. Enguainnant (Frère) , frère mettant en gaîne. Engys, proche, du grec • Enig, sans, en allemand. Enilins, serviteurs de la Quinte, de l'hébreu? Enite (Je me), je m'efforce. Ennasin, ennasé, camus ; ne serait-ce pas plutôt en-nasé, à long nez? Ennicroché, accroché. Enrimer, enrhumer. Ensagir, devenir sage. Entaknté, disposé, prêt à. Entelechie, perfection intérieure, du grec. Entendant, intendant. Entendouoire, compréhension, intelligence. Entommer, entamer. Entommericque (Mer), du nom de frère Jean des Entommeures. Entommeures, entailles; frère Jean est proprement Jean des Entailles. Entouillé, sali. Entreillizé, entremêlé. Entronificqué, qui est dans. Enyo, nom grec de Bellone, déesse de la guerre. Eone, éon, bois dont était fait le navire Argos. Epagon, poulie (Jal). Epanalepse, répétition de mots, du grec. Epaticque, qui tient au foie, du grec. Ephectique, a le même sens que 3o 234 GLOSSAIRE-INDEX le mot pyrrhonien qui suit : qui ne dit jamais ni oui ni non, qui doute toujours. Ephemerum, plante inconnue. Epicenaire, frivole. Epidemiale, épidémique, Epiglotide, épiglotte. Epilenie, chant de vendanges, du grec. Epinicies, chant de victoire, du grec. Episemasies, manifestations, du grec. Epistemon, savant, du grec. Epithersés, grammairien grec, maître de Plutarque. Epxnons, cris d'ivresse, du grec. Eraige, héritage; race. Eresné, éreinté. Ergo ghic, conclusion d'un raisonnement qui, en réalité, ne conclut pas. Ergotz, arguments d'ergoteurs. Erre (Grand), vivement, grand train. Erres, direction. Erres, en vénerie, les excré- ments laissés par un animal sur son chemin. Eruce, roquette. Eruyté, qui n'entre plus en rut, Erynge, eryngion, chardonRoland, ou roulant, panicaut. Eryon, géant. Eryx, géant. Es, aux, dans les, sur les. Esbanoit, épanouit. Escafignon, escarpin. Escalle, écaille. Escamper, fuir, décamper. Escanioula, pompe à bord d'une galère (Jal). Escarques, valets, de l'alle- mand. Eschalleur de noys , écaieur de noix. Eschallons, échelons. Eschaloté, écalé comme une noix. Escharboiter, éparpiller, four- gonner. Eschenaulx, chéneaux, conduits d'eau. Eschervis, chervi, girole. Esclaffer, éclater. Esclotz, sabots ; sandales de moine ; désigne parfois le moine lui-même. Escorcher le renard, vomir. Escorter, écorcher. Escorné, triste. Escornifler, affronter. Escors, escorts, adroits, dispos. Escot (Parlons par), parlons chacun à notre tour. Escriptoire, endroit où l'on écrit, bureau. Escrouller, secouer. Escuelles (Aller par), servir abondamment. Esculée, écuellée. Esculler, écraser. Escurieux, écureuils. Escuz au sabot, pièces de monnaie de la façon de Rabelais. Escuz au soleil, monnaie d'oi de Louis XI. GLOSSAIRE-INDEX 35 Escuz du palais, jetons. Esgous, sale. Esguasser, agacer ; dégoûter. Esgue orbe, jument borgne, du latin equa orha. Eslargir, faire des largesses. Esmeut, fiente de bête sauvage. Esmeutir, esmoutir, émouvoir ; par extension avoir besoin d'aller à la selle, cacare, évacuer. Esmorche, amorce ; ordure lais- sée après un nettoyage. Esmouchail, chasse-mouches. Esmoucheter, moucheter, orner de broderies. EsoPET, Ésope. Esparer (S'), s'éclaircir, de l'italien spararsi. Espartir, répartir, répandre. Esparvkrs de Montagu, poux. Le collège de Montaigu était renommé pour sa saleté. Espaultrer, luxer les épaules. Espaves, hors d'usage. Espelan, éperlan. Esperruquancluzelubelouzerlrelu paralysé. Espices, épices; cadeaux que l'on faisait aux juges pour se les rendre favorables, et qui, dans l'origine, étaient réellement des épices ; a souvent le sens de gâteaux, confitures, dragées, sucreries. Espies, espions. Espine de Saint-Fiacre (V). Était conservée dans la cathédrale de Meaux. Espiner, piquer. Espingarderie, machine de guerre. Espouilleresse, chercheuse de poux. Esquames, écailles, Esquarrer, tailler. Esquels, auxquels. Esquinanche, esquinanci^. Esrafflade, égratignure. Esrener, éreinter, fatiguer. Essors (Oiseaux), oiseaux qui s'échappent facilement. Essuer, essuyer. Essueil, essieu. EsTABLES, village des environs de Poitiers. Estait, nom d'un cordage. Estaincts, asphyxiés. Estamet, étamine. EsTRANGouRRE (Pays d') ; c'est pour Le Duchat l'East-En- gland, une des heptarchies de l'Angleterre^ sous les rois saxons. Estanterol, pilier de bois supportant la poupe d'une galère (Jal). Estaphe, étrier. Esteuf, balle. Estiomené, rongé. Estivallet^ chaussure d'été. Estoc, épée, bâton, pointe. Estoille poussiniere, monnaie de l'invention de Rabelais. Estommis, vaincus. Estonnemens, événements étonnants. Esiorce, effort. 36 GLOSSAIRE-INDEX Estouper, boucher. Eslradiotz, stradiotes, troupes mercenaires vêtues à la tur- que, EsTRELiNS, Esthoniens, habitants des villes anséatiques. Estrene (En bonne), sous de bons auspices. Estrif, danger, embarras, si- tuation embarrassante , in- quiétude. Estrindore, sorte de danse. Estrippé, crevé, déchiré. Estrh'iers, estrivkres, étriers, EsTROCZ (Bois d'), en Poitou. EsTROiCT DE Sibylle, le détroit de Séville, de Gibraltar. Estronspicinî, divination par les fèces. Esveigkz, éveillés. Esvantoirs, évantails. EthiopiSj herbe qui ouvre les portes. Etion, géant. EuBOiENs, habitants de l'Eubée. EucLiDES, mathématicien grec du IJI^ siècle avant J.-C. EuDEMON, bon génie, du grec. El'Gube, ville de l'Ombrie. Euhyades, bacchantes. Eumetrides (La pierre), pierre précieuse citée par Pline. Euphorbe, euphorbium, résine irritante tirée d'un arbris- seau cactoïde de la famille des euphorbiacées. Euphorion, poète grec du IIF siècle avant J.-C. Eupolis, nom grec emprunté à VAnlhologie. EuRYCLES, ventriloque athénien dont parle Aristophane. EuRiSTHEUs, Eurysthée, rival d'Hercule. EusTATHius, de Constantinople, archevêque du XII® siècle, commentateur d'Homère. EusTHENES, fort, robuste, du grec. EuTYCHE, fortuné, du grec. Evangile, bonne nouvelle, du grec. Evangiles de boys, tables à jouer. Evantes, bacchantes. Everseurs, destructeurs. Eversions, renversements. Euig, avec, allemand. Eviré, privé de forces. Excequer, exécuter. Exclusive, exclusivement. Excolé, écoulé. Exempiiles, postiches. Exenterer, arracher les entrailles, du grec. Exeques, obsèques. Exercite, armée, du latin exercitus. Exhauste, vidé. Eximé, amaigri. Exinaniz, épuisés. Existimation, réputation. Exiture, sortie. Expiration, respiration. Expediens, prompts. Expédiez, entraînés, disposés. Expoly, poli. Exponibles (Les) de M. Haultechaussade. Titre d'ouvrage et auteur inventés par Rabe- GLOSSAIRE-INDEX :37 lais. Extispicine, divination par les entrailles des victimes. Extoignoit, éteignait. Extoller, rehausser, vanter. Extrandzer, mettre hors. Extravagantes , constitutions postérieures aux premières collections de Décrétales, du latin Constitutiones qusevaga- bantur extra. Extravaguant, qui déborde, qui coule dehors du vase. Exule, qui sort, qui s'en va. Fabrile (Art), l'art du forge- ron. Facet, livre de morale familière. Faciende, chose à faire. Facultatule, faculté. Fadas, sot. FadrinSj jeunes matelots. Faguenat, puanteur. Faignoit (Se), faisait le fai- néant. Failly, disparu. Faindre (Se), se ménager. Fallaces, tromperies, finesses de la discussion. Falot, gai compagnon. Falourdin, géant. Fanfarer', parader. Faiïtesque. Est-ce une courti- sane? L'italien fantesca veut dire chambrière. Far de mal'encontre, phare de malheur. Faratz, tas, assemblage. Farce magistrale, assaisonne- ment de haut goût et abondant. Fardeau (Le) de Sainct-Christofle, le Christ. Farfadetz, esprits follets ; le plus souvent moines. Farfelu, gonflé, gras, replet. Faribroth, géant. Fasché de ialeures, fatigué de viandes salées. Fasques, petites boîtes, étuis. Fatuel, qui prédit l'avenir, du lat. fatum. Fauciles, les deux os de l'a- vant bras. Faulcon, faulconneaulx, petit canon, petits faulcons. Faulseres, faussaires, Faultier, qui fait des fautes. Fauveau, de couleur fauve. Faverolles, arr. de Blois, Loir- et-Cher. Favorer, faire silence, du lat. favère linguis. Faye, foie. Faye ( Le chemin de), chemin contourné par lequel on monte à Faye- la-Vineuse, arr. de Chinon, Indre-etLoire. Faseolz, haricots, du lat. phaseolus. Fenabregue. Le Duchat dit que c'est le nom qu'on donne en Languedoc à l'alisier. Ne serait-ce pas une altéra tion du mot fenugrec, sé- négrain ? Fenestré, attaché à cordons croisés. Fenoil, fenouil. i38 GLOSSAIRE-INDEX Fercuks, plateaux de balance. FeriaUj férié. Fcrics, fêtes; ferks esuriales^ fêtes où l'on doit jeûner, du lat. esuriaks. Fernelj anneau de corde qui maintient l'aviron à bord d'une galère (Jal). Feronia, déesse des forêts. Ferragus, géant. Ferrandat (Henri), jurisconsulte nivernais du XVI<^ siè- cle. Ferrate (Chemin de la), che- min entre Tours et Limoges. Ferrais (Pieds), pieds chaussés de galoches. FerreaUj fer, lame. Ferrement, tout instrument ou outil tranchant en fer. Ferremens de la inesse, orne- ments religieux. FerrkreSj grands flacons, bouteilles de cuir. Ferron. Est ce Arnold Ferron, conseiller au Parlement de Bordeaux? Fers, ferrets. Ferulacée, qui ressemble à une férule (ombellifères), d'où l'on extrait une résine fétide connue sous le nom d'Assafatida. Fessée, Fascée, divisée. La fasce est une pièce en for- me de barre horizontale pla- cée sur le milieu de l'écu. Fessepinte, héros de roman, grand buveur. Feston Dkne, Fête-Dieu. Feuillades, feuillées. Feurre, paille. Feustré, jonché. Fevin, musicien Orléanais du XVe siècle. ff, lettres par lesquelles Bri- d'oye désigne le Digeste. Fiant, fien, fumier. Fktil, de terre cuite, du latin flctilis. Fierabras, géant. Fkreté, hardiesse. Fkrs, nom d'un cépage. Fkulx, enfants, en picard. Figue (Faire la), se moquer, far le fiche, montrer le bout du pouce entre le médius et l'index. Figues dioures, figues d'or, provençal. Filopendoks, contre-poids. Fins, frontières. Fins maritimes, côtes. Flacce. Horace, Quintus Horatius Flaccus. Flacque, flasque. Flagitiose, vicieux, du lat. fla- gitiosus. Flammivomes, vomisseurs de flammes, épithète appliquée aux chevaux du Soleil. Flancquegées, flanquées, italia- nisme de fiancheggiate. Flasque, bouteille, de l'ita- lien fiasco. Fkurins, florins. Fleury (François), érudit du XVI« siècle. Fleute, tuyau qui part du chapiteau d'un alambic. GLOSSAIRE-INDEX :39 Fleutes d'Alkmant, instrument de la musique militaire alle- mande. Floc, Flocquars, houppe. Flocqutr, flotter au vent. Flocquetz, freluquets. Flouins, petits navires à voiles et à rames. Florale, genre de danse. FluXj terme de jeu. Focile, le cubitus, os de l'avantbras, pris pour l'avant-bras. Foillouze, bourse. Foin en corne (Avoir du), être désigné à la moquerie. On mettait du foin aux cornes des animaux méchants. FoLENGo (Théophile), bénédictin mantouan, auteur de {"Histoire macaronique de Merlin Coccaïe, que Rabelais connaissait bien et à laquelle il a fait plus d'un emprunt. Folfré, rendu fou. Folliant, faisant le fou, jouant, folâtrant. Follie Guobelin, la manufacture de tapisseries de Gilles Gobelin, aujourd'hui les Gobelins. Foncé, ayant des fonds. Fonde, fronde. Fondrillons, ramassis de chanvre de rebut sur quoi on pelotonne le fîl. Fons cabalin, l'Hippocrène, fontaine du cheval Pégase. FoNSBETON, pays de la fabrique de Rabelais. FoNTAiNE-LE-CoNTE, Fontenayle-Comte, chef lieu d'arr., Vendée. Forbe, fourbe, tromperie. Force (Toute), de toute façon. Forces, forts ciseaux à ressort, sans charnières. Forcettes, petites forces, petites cisailles. Forcez, forçats. Forclus, exclus. Forest (La) de l'Académie, les jardins d'Académus à Athènes^ où l'on discutait en li- berté. Forfant, mauvais sujet, forban. Forissoient, Forissu, faisaient sortir, sorti. Fort, l'endroit le plus épais d'un bois. Forteresse, force. Fortunal, tempête, de l'ita- lien fortunale. Fortune (De), par un heureux hasard. Fortunes, bonheurs, prospérités, succès. Fou, Foug, arr. de Toul, Meurthe. Fouace, galette tourangelle, poitevine ou saintongeaise. Fougent, fouillent. Fougons, cuisines de navire. Fouillouse, poche. Foullouaires, fouloirs. Foulque, poule d'eau. Fouquet, foucquet, jeu où l'on éteignait une lumière en soufflant par les narines. Fourche fière, fourche ferrée, 240 GLOSSAIRE- INDEX lance avec une fourche. Fourchez là, arrêtez -vous là. Fourmay (Je complainte, je portai plainte. Fourneasmes {Onques puis ne) nous. M. Burgaud explique cette locution, dont il cite un autre exemple, comme marquant la perfection d'une chose, qu'il n'est plus besoin de remettre au four. FouRQUES Les) d'Augsbourg, les Fugger, riches négociants dont la fortune était proverbiale. FoussCj fosse, FouTASNON, géant. Fouteau, hêtre. FouTiGNAN, Frontignan, arr. de Montpellier, Hérault. Fouzil, fuzil, briquet à pierre. FoyneSj fouines. Foyrad, foirard. Foys, fais, de faire. Fraires, frayres, fraises. Francarchierus de Bagnolet. Le Franc-Archier de Bagnolet est un filou renommé. On imprime à la suite du Villon une pièce : Monologue du Franc-Arcliier de Baignolet. Francolys, francolins, oiseaux. Francs Gontiers, habitants des forêts. Francs-Taulpins, Franctopins, Milices campagnardes, ar- chers irréguliers. Frapars, épithète de moine. Frapin, Lucas Le Moyne, curé de Saint-Georges d'Angers, a composé et publié des noëls poitevins. Frarie, confrérie. Frayer, subvenir. Fredons Frères , frères fredonnant, les moines qui mar- monnent des prières et des chants d'église. Frelore, Bigoth (Tout est)! tout est perdu, bon Dieu! de l'allemand. Fressurade, embrassade. Freusser, froisser, rompre. Frezes Febves , fèves décorti- quées. Friandeaulx, gourmands. Friperie, fripperie, friponnerie. Fripesaulce, marmiton. Friquenelles, jeunes andouilles. Friscades, boissons fraîches. Frisque, tout éveillé, tout gail- lard. Frize, étoffe grossière. Frizons, pots à boisson à bord des navires. Fronde, furoncle. Fronton. Est ce Frontin, l'au - teur des Straiagemata^ Fructices, arbrisseaux annuels. Fruition, jouissance. Fulciz, soutenus, du lat. fulciti. Funges, champignons, du lat. fungus. Furt, vol. Fust, bois. Fastaye, futaie. Fustes, navire à rames (Jal . Futeur, futur. Fy, foy. GLOSSAIRE-INDEX 241 Gabbara, géant arabe. Gabeler (Se), se moquer. Gabies, cages ; hunes d'un mât. Gabriel (Maistre), Gabriel Taphenon, médecin. Gagate^ jais oujayet. V. Gayet. Galaffre, géant. Galbanum, résine du Bubon galbanum. Galehaut, géant. Galen, Galenl's, Galien, célè- bre médecin grec du 11^ siècle. Galerne (Vent de), vent du N.-O. Galland (Pierre) , recteur de l'Université de Paris et professeur du Collège Royal au XVP siècle. GallefretéjCaUaté, goudronné. V. Guallefretiers. Galler, gauler, frapper à coups de gaule. Galleverdine, cape. V. Gualvardine. Galliers, galeux. V. Gualliers. Gallochler, sabotier. Galls, Gaulois, Français. Gais, Galli ou Corybantes. Gama ut, note la plus basse de la gamme. Cambres, Gambie. Gammares, homards, du latin cammarus. Game (Entra en la haulte), se mit à songer sérieusement. Ganabin, larron, en hébreu? Ganarriens, habitants des îles Canaries. Ganivet, canif. Rabelais. V. Ganyvetieres, marchandes de canifs, marchandes des rues. Garaniers (Chats) , chats sauvages, qui mangent les lapins de garenne. Garbin, vent du S.-O., de l'italien garbino. Gargamelle, gorge. Garon, garum, assaisonnement sur lequel Rabelais a fait une pièce de vers latins. Garré, bariolé. Gastrolatres , adorateurs du ventre, du grec. Gastromancie, divination par ventriloquie. Gaubregeux, qui se goberge. Gaudebillaux, tripes de bœufs gras. Gaudez, réjouissons-nous, gau- deamus, commencement d'antienne. Gaudisserie, réjouissance. Gaultier, Gautier, mauvais plaisant. Gaultier (Bon), bon vivant. Gausc/ziere (Raquette), raquette faite pour être tenue de la main gauche. Gavion, gosier, Gayet, jayet, jais. V. Gagate. Gayetier, sonneur de corne- muse. Gayoffe, géant. Gays, geais. Gaza (Théodorus), philologue byzantin du XV^ siècle. Gebarim, coqs , en hébreu ; peut-être les Français, Galli. Geber, alchimiste et mathéma3i 242 GLOSSAIRE-INDEX ticien arabe du 1X<^ siècle. Gehainer, tourmenter. Geheignoyt, geignait. Géhenne^ lieu de supplice^ du latin gehenna. Gelasim, pays où l'on rit , du grec. Gelines, poules. Gelones, Tartares. Gemmagog, géant. Gendre, Jean Le Gendre, musicien parisien du XVP siè- cle. Geneliabin , miel rosat , en arabe. Generaulx (Messieurs les), les magistrats de la Cour des Aides. Genêt, cheval d'Espagne. Genethliaque, horoscope tiré à la naissance d'un individu. Genevoys, les habitants de Gênes, de l'italien Genova. Gentj gens, braves. Geoffroy, à la grand'dent, de Lusignan, qui fit brûler l'abbaye de Maillezais. Géoinantie, divination par la terre. Gergeau, Jargeau, arr. d'Orléans, Loiret. Germain de Brie, ami de Rabelais. Gerson (J.)> chancelier de l'Université, théologien du XlV-XVe siècle. Gestes, actions, choses faites. Giborins, forts, robustes, de l'hébreu? Gilbathar, Gylbàthar, GibralGippon (Le moule du) ; le moule du jupon , c'est l'es- tomac, le ventre. Girard (Charles), de la maison de Du Bellay. Girardine, espèce de râle. Glands, boulets de canon. Glaterons, glouterons, boutons aspérulés de la bardane. Glaz, glace. Glenay, Glennay, arr. de Bressuire, Deux-Sèvres. Glimpes, flambeaux. Glirons, loirs. Gloux, Gloute, Glouite, glouton, gloutonne. Gluber, peler. GlyphoLioires , canonnières en sureau. Gnatho, gourmand de l'anti- quité. Gnaver, s'efforcer. Gocourte (Kohe), demi-longue, descendant à mi-jambe. Godale, boisson, probablement bonne bière, good aie. Godalle, débauche. Godemarre , marmite ? gros ventre. Goguelus, mauvais plaisants. Gogues , médicaments purgatifs. Goitrou, Guoytrouz, goitreux. GoLFARiN, neveu imaginaire de Mahomet. GoMBERT, musicien belge du XVI° siècle. Gonnelle, robe, de l'italien gonella. GLOSSAIRE-INDEX MÎ Gorgery, gorgerin. Gorgias, gorgiasement, brave, bien mis, pimpant, fierot, qui se rengorge ; avec ostentation, avec braverie. GossampineSj cotonniers. GotSj moines, cafards. Gottis, gothique. Goud fallût, pour goodfdlow, bon compagnon ; falot désigne aussi une lumière au bout d'un bâton. Gouet, serpette. Gougt, femme ou fille, Goaimphe, coin de bois. Gourmander , manger avec gourmandise. Gourmanderies , Gourmandeurs, commanderies, commandeurs. Gourretz , Gitoretz , gorets , porcs. Gourrkr, bien mis, arrogant, fier. Gourrier (Palefroy), beau cheval. Goussets, partie de l'armure en haut du bras. Gozal, pigeon, en hébreu. GrabeaUj examen minutieux. Grabeler, grabeleurs, étudier, examiner, discuter; gens qui épluchent tout, qui examinent minutieusement. Grain, pas, point; négation, du latin granum. Graisler, griller. Grampes, crampes. Grandmont, seigneurie près de Chinon. Graphides, images. Grapper, grappiller. Gratelles (Prince de), prince des démangeaisons , prince de Galles. Gratuité, reconnaissance. Grave, grève. Graver, Gravir, grimper. Gravot, commune de Bourgueil, arr. de Chinon, Indreet-Loire. Grefves , Grèves , jambards , cuissards ; le devant des jambes. V. Griefves. Gregeoys, Grégeois, Gregoys, grecs. Greigneur, plus grand, du latin grandior. Grene, Grené, graine, en graine. Grever, peiner, faire de la peine, charger. Greziller, griller, briàler. Grezillons, petits chapelets? Griays, chagrin. Gribouillis, nom de diable. Grief, adj . , 'douloureux; subst. , dommage. Griefves , grègues , grèves , haut-de-chausses. V. Grefves. Grilgoth, nom de diable. Grillotier, marchand de cerises. Grimaulx, écoliers des basses classes. Gringotter, chanter. Gringuenaudes , gringuenaudiers, ordures, restes ; indi- vidus malpropres. Griphons, greffiers. Grippeminaulx, gens de justice. 144 GLOSSAIRE-INDEX Grisler, Grlsles, griller; grils. Grishmtnt, grésillement, bruit de ce qui brûle en pétillant. Grivolées, grivelées, tachetées comme les grives, Grizelles, enfléchures des haubans (Jal). GrobiSj important. Groisse, grossesse. Grolle, corneille; en poitevin, le point noir qui est au milieu de la carte blanche du but, au tir à l'arbalète. Grollier (Noyer) , noyer à grosses noix que peuvent en- tamer les grolles. GruppadeSj groupe de nuages noirs. Gruppemens, griffements. Grupper , saisir , accrocher , griffer. Gri/yers, soldats mercenaires originaires de la vallée de Gruyère. GrypheSj griffons, oiseaux fantastiques. Grsphon, Gryphus, petit poëme d'Ausone. Gryson (Pierre de), grès? Guahan caban. Guabarriers, meneurs degabarres. GuabeUr. V. Gabeler. Guabet , flamme, pavillon du haut d'un mât fJal). GuADAiGNE, Thomas de Guadagne, financier du XVF siè- cle. Gualée, galère. Gualentir , rendre souples. dispos. GuaUrne , galerne, vent du N.-E. Gualimaffrée, pot-pourri. Gualimard, GualUmart, Gali- mard , étui à mettre les plumes, encrier. Guaîinottes, gelinotes. Guallefretiers , Gallefretiers , gredins, vauriens, racailles, matelots, calfats, goudronneurs de navires. Guciler, gratter, étriller; rire, plaisanter, faire bombance. Guallicr, tout gaillard; vaurien. Gualoise, Gualloise, jeune fille qui mène joyeuse vie, femme plus que galante. Gualot, galop. Gualous, galeux. Gualvardine, jaquette. V. Gallei-erdine. Guambayer, gambader. Guarani, garant, cordage d'un palan (Jal). Guarbin, vent doux du S.-O. Guareserre, action de se mettre sur ses gardes. Guargoulks, bruits et cloches faits en soufflant dans l'eau avec un chalumeau. Guarguareon, la luette. Guarigues, Giiarrigues, plaines incultes, broussailles, landes, bruyères. Guarot, Guarrot, trait d'arbalète, flèche. Guaroux, loups-garoux. Guarres, bigarrées. GuASCoiGNE , Matthieu Gas- GLOSSAIRE-INDEX cogne, musicien du com- mencement du XVP siècle. Guast, dégât, ravage. Guatie, hune de guet (Jal), Guavasche, sale. Guaviet, gosier. Guedofle, Guedoufîe , flacon couvert de cuir. Guementer (Se), s'informer avec anxiété. Guenaulx, Guenaux, gueux. GuENET (La dive Oye), oie qui figure dans la légende de Saint- Guennolé (Burgaud). Giierdonner, Gaerdonneur, ré- compenser; qui récompense. Gucspin , piquant, au figuré, comme une guêpe ; surnom des Orléanais. Gueules, couleur rouge en blason. Gueux de l'hostiaire, mendiants de porte en porte. Guildirij cheval hongre. Guillaume sans paour, héros de roman. GuiLLOT , Guillaume , tavernier célèbre à Amiens au XVP siècle. GuiLLOT le Songeur, person- nage populaire. Guilverdons, capuchons. Guimaux (Prés), prés fauchés deux fois par an. Guinder (Se), s'enlever. GuiNGUOLFus. Gengoulfest un saint breton. Guinguoys (De), de travers. Guisarmes, armes piquant des des deux bouts. Gumenes, cables des ancres, cordages (Jal). GuoBELiN- V. FolUe. Guodebillaux, tripes de bœufs gras. Guodetz, gobelets. Guogue, farce, au propre et au figuré; boyaux; musette. Guoguelu, personnage ridicule; railleur, farceur. Guo/ Wronneurs, goudronneurs. GuoLGOTZ Rays. Serait l'amiral turc Dragus Rays. Guorgeriz, gorgerins, partie de l'armure qui protégeait la gorge. Guorges (Sur leurs), bien gorbigés, en repus. Guorgias. V. Gorgias. Guorre (La Grande), la grande truie, femme débauchée. Guourneau, gournal, rouget. Guoyons^ goujons. Guoytrouz. V. Goitrou. GuYERCHAROis (Le seigneurdu), seigneur de la Guerche, arr. de Loches , Indre-etLoire. Guy de Flandres, plâtre de Flandre, du latin gypsuin. GuynetteSj espèce de poule. Gylles (Pierre), d'Alby, naturaliste du XVP siècle. Gymnaste, maître dans les exercices corporels, du grec. Gyrer^ tourner. Gyrognomonique, circulaire Gyromantie, divination par le tournoiement de cercles. 246 GLOSSAIRE-INDEX Habaliné, ahuri. Habille, alerte. Hacquebuter, hacquebutes, ar- quebuser; arquebuses. HacquebutierSj porteurs de hacquebutes, fortes arquebuses qu'on appuyait sur une fourchette pour les tirer. Hacquelebac, géant. Hagarene (Langue), langue arabe. Halian, haan, fatigue (onomatopée). Hailz, ail. HaimSj hameçon. Haire, jeune cerf de un à deux ans. Halcret, cotte de mailles en fer forgé, dur habit. Ha/e^interjection : courage! va! Hali Abbas, médecin persan du X^ siècle. Halleboter, grappiller. Hallebrené, harassé ; languissant ; qui a perdu des plu- mes; mal étrillé, mal pei- gné. Halot, cercle autour de la lune, annonçant la pluie. Hanicroches, crochets. HanicrochemenSj embarras, empêchements, obstacles. HanebanCj hannebane, jusquia- me noire. Hannuiers, habitants du Hainaut. Hanttr, enter, greffer. Hapelopins, preneurs de bons morceaux. Happelourdc, pierre fausse; tromperie. Happemousche, géant. Happesouppes, cuillers à prendre la soupe dans le bouillon. Haraniers, mangeurs de harengs fumés. Harborins, pensées. Hardeau, grand et mince. Harpailleur, gueux des campagnes (Nicot;. Harry bourriquetja\\on%, bourri que. Hasch, ehasch, grenhenhasch, onomatopée de la toux. Haschantj fendant l'air. Hastereaux, brochette de morceaux de foie et de lard al- ternés. Hastille, abats, entrailles de porc. Haubdon, houblon. Haulser le temps, boire (Littré). Haultechaussade (M.), auteur inventé par Rabelais. Haultelissiers , tapissiers de haute lisse. H.ivetz, crochets. Hayre, supplice, haire. Hayt (De bon). V. De hayt. Hayte (Qui plus leur), qui leur convient le mieux. Hé paovret iou te esquinerio... Voici la traduction de M. Bur- gaux : « Hé ! malheureux ! je t'éreinterais, maintenant que je suis bien reposé. Vat'en un peu dormir comme moi ; après cela nous nous battrons.» GLOSSAIRE-INDEX 247 Heaulme, barre du gouvernail. Hchdomades, semaines . HÉBRARD de Béthune, auteur du Grsecismus. Hebrus, fleuve de Thrace. Hecale, vieille femme de l'At- tique dévouée à Thésée. Hectique, étique. Hegronneaux, petits hérons. Hélène, météore, feu Sainl- Elme. Helepolides, machines de siège. Heliodorus , mathématicien grec du 11^ siècle. Helxine, pariétaire. Hemicraines, migraines, du grec. Hemiole, nombre qui contient un nombre plus la moitié de ce nombre. Henilles, contes. Henricus, monnaie d'or de Henri II. Heouses, yeuses, chênes verts. Heptaphone, à sept voix, portique d'Olympie où un écho répétait sept fois un mot. Her, Hers, monsieur, messieurs. Her der Tyfel, Teufel, M. le diable, en allemand. Heraclides, architecte né à Tarente, Heracleotain, d'Héraclée. Heraclitus, Heraclite l'obscur, philosophe grec; vivait cinq cents ans avant J.-C. Herbault, personnification de l'indigence. Herbe aux charpentiers, achillée millefeuilles. Herbée, couchée dans l'herbe. Herberger, demeurer. Herbiers, botanistes. Hercules gaulloys ; il séduisait par son éloquence. Hergneux, qui a une hernie. Herm, île de l'archipel anglo- normand. Hermès Trismegistus, Mercure trois fois très-grand. Un Grec néo-platonicien a écrit sous ce nom. Hermodactyles, tubercules d'un blanc jaunâtre au dehors, blanc au dedans, ressemblant aux bulbes du colchi- que. On les attribue au col- chicuni variegatum. Hermolaus Barbarus, savant vénitien du XV^ siècle. Herophilus, Hérophile, médecin grec; vivait en 820 avant J.-C. Herper, ramper. Herpe, harpe. Herselez, habitués à discuter. Hersoir, hier soir. Herte, guet. Hervé, de Porzmoguer, célè- bre marin breton. Hesdin, musicien. Hespailliers, hespaliers, ra- meurs. Hesperie (Tour), tour du Couchant. Hesperus, Vesper, l'étoile du soir. Heur, bonheur, bonne chance. Heurt, attaque. V. Hourd et 248 GLOSSAIRE-INDEX Hurte. Heurteur, musicien touran- geau du XVP siècle. HiBERNiE, Irlande. Hieracia, piloselle, oreille de souris. Hillot, mon fils, en gascon. Himantopodes, qui marchent comme des serpents, du grec. HiPPES, Hippone. HiPPOLYTUs, jurisconsulte ita- lien. HiPPONAX, poète satirique grec. HiPPOTHADÉE. Serait Guillaume Pavie, docteur en Sorbonne. HiPPOTHADÉE, compagnon He Pantagruel. Ce nom signifie apôtre à cheval, du grec.. Hippuris, prêle, queue de cheval. HiRCANE (Mer), partie de la mer Caspienne. HiRCus ou Œnopion, fils d'Apollon, qui eut un fils sans femme: c'est Orion. Hobin, allure du bidet. HoBRETHZ, Jacques Hobrecht, musicien hollandais du XV« siècle. HocsTRATEM ( Jacobus ) . V. HOOGSTRATEM. Hxmorrutts, hémorrhoïdes. Hoguines, parties de l'armure entre le corps et les jambes. Holos, hélas ! HoMMEFLEUR, Honflcur. Homocentricalenunt, autour du même centre. Hondrespondres, hommes pesant cent livres, hundred pounds. HooGSTRATEN (Jacobus)^ jacobin brabançon du XVl** siè- cle. Horche, bâbord, la gauche du navire, de l'italien orza. Hord, hordous, sale. HoRDOux (Maistre), gras, couvert de graisse , le chef des cuisiniers. Hoschepoi, pot-pourri. Hostarde, outarde. Hostiatement, à la porte des maisons. Houltaige, otage. Hourdj hoart, bataille, choc, attaque, coup. V. Hturt et Hurte. Housé, houzé, botté, crotté. Houseaux, houztaulx, hautes guêtres en cuir, sans pieds, qui protégeaient les jambes contre la crotte. Housée de pluye, une battue de pluie, une forte ondée. Houssepailleur, houssepaillier, marmiton. Houst, houx. Houster, ôter. enlever, dérober. Hugrement, rudement. HuGUTio, Hugutius, auteur d'une grammaire. Huillier, marchand d'huile. Humer, boire à grand'lampée ; hunierie. Hurneux, buveur. HuMEVESNE (Le seigneur de), GLOSSAIRE-INDEX 249 de aspire-vesse. HuoN DE Bordeaux, héros de roman. Hurte, heurt, coup. HuRTALY, géant contemporain du déluge. Hurtis, hurtys, le heurtement, le choc. Huscher en paulme, crier dans ses mains. HussÉ, Houssay, arr. de Ven- dôme, Loir-et-Cher? Hutaudeaux, chapons. Huy, aujourd'hui. HuymeSj Huismes, arr. de Chi- non, Indre-et-Loire. Hydrargyre, mercure, métal. Hydries, pots à eau. Hydromantiej divination par l'eau. HymantopodeSj qui a les pieds en forme de courroies. Hyoscyame, jusquiame. Eypencmkn, venteux, du grec. littéralement : sous-vent. Hypocritique, feinte. Hypogée, souterrain, du grec. Hypophetes, qui parlent des choses passées, du grec. HyposargueSj hydropiques. Hypostases, sédiments d'acide urique. lambicque, genre de danse. Ibices, boucs sauvages. Ihides, ibis. ICAROMENiPPE, le philosophe Ménippe, ainsi surnommé par Lucien pour avoir voulu se faire des ailes. ICARUS, père d'Erigone. C'est sa chienne Méra, et non son chien, qui devint la constellation qu'on appela la Canicule. IcELON, ministre du Sommeil. Ichthyomancie, divination par les poissons, Icosimyxe (lanterne), lanterne à vingt becs, du grec. Idée, image, du grec. IdoiiHj propre à, approprié à, du lat. idoneus. V. Ydoine. Ignave, lâche, du lat ignavus. Il, lui. Illucescer, briller. Image, cachet (Burgaud). Immutation, changement. Imola, jurisconsulte italien. Impendente, très-prochaine. Imperit, inhabile, ignorant, du lat. imperitus. Impétrer, obtenir. Impotence, Impotent, impuissance, impuissant. Impotentes, qui ôtent les forces. Impropere, honte. Incaguant, souillant. Incautement, imprudemment. Incentricquer, concentrer. Inclyte, illustre. Inconsumptible, incombustible. Incornifistibuler, faire entrer. Inculquer, enfoncer. Indagn^, grossier, impuissant. Indalgos, idalgos. Indemnez, francs de droits. Indice (Doigt), l'index. Indicque, indienne. Indie, Inde. 32 5o GLOSSAIRE-INDEX Inertes (Maistres) , maîtres es arts, in artibus. Infauste, néfaste. Infinable, infini. Infractions, déchirements. Infringibk, qu'on ne peut rompre. Ingénieux, ingénieurs. Inhiber, défendre. Inian, juron. Inigo 'Frai), Ignace de Loyola. Initians, commençants. Inquinamens, souillures. Insculpé, sculpté, gravé. Inse, verbe à l'impér., hisse. Insail, drisse qui sert à hisser les voiles (Jal). Instablée, établie, installée. Instant, exigeant, pressant. Instaurateurs, rétablisseurs, restaurateurs. Instauré, rétabli, renouvelé, restitué. Instituer, instruire. Instrophiez, entremêlés. Instruez, impér., instruisez. Instrument, matériel. Intendictz, relation de faits dont on doit faire la preuve. Intentement, avec attention. Intenter, tenter. Intention, tension d'esprit. Interbastez, piqués. Interestz, dommages. Interinées, achevées, parfaites. Interminée, appliquée. Internition, entre-tuerie. Intrade, rente, revenu, del'it. intrata. Intrans, délégués des facultés. Intrinquées, embrouillées. Inviser, visiter. lo, je, moi, italien. Iota (Un), le moins possible; l'iota est la plus petite des lettres grecques. lo ti ringratio, bel messere... « Je te remercie, beau sei- gneur; ainsi faisant, tu me as espargné le coiit d'un cly stère. « Irrision, moquerie, dérision. Irrorant, mouillant. Irus, mendiant, dans l'Odyssée. IsABELLA, ville des Canaries. 7sc/ue, sciatique, du grec. Ischiatiques. V. Isciatiques. Ischies, hanches, du grec. Isciatique, goutte, rhumatisme sciatique ; Isciatiques, nerfs sciatiques. Isiaces, Isiaques, prêtres vêtus de blanc, prêtres d'Isis. ISLE-BOUCARD, ISLE-BOUCHART, arr. de Chinon, Indre-etLoire. Isthme, orifice qui fait communiquer la cavité buccale avec le pharynx. Ithybole, homme bien fait, droit, du grec. Ithymbons, danses bachiques. Ithyphalle, image sacrée du phallus en érection. Itys, changée en oiseau par Jupiter. lynges, philtres, charmes, du grec. Jacquemart, marteau de potte, GLOSSAIRE-INDEX 25 d'horloge. Jacques Bonshoms, paysans. Jacquet Bercan, Jacques ou Giachetto Berchèm, musicien flamand du XVI^ siècle. Jadauiz, Jadaux, paniers^ écuelles. Jadeau de. VergnCj écuelle de bois. Jalousie, balustrade qui fer- mait la galère à la poupe. (Jal). Jambe-torte, épithète de Vulcain, qui était boiteux. Jambet (Le curé de), Rabelais lui-même. Jamblicque, philosophe du IV*^ siècle. Jambus, qui ont de grandes jambes, Jan, terme de trictrac. Janequin, Clément Jannequin, musicien du XVI^ siècle. JanspilVhommes, variante plai- sante de gentilshommes. Japhes, Jaffa. Jargonner, Jargonnoys, balbutier ; les premiers mots d'un enfant. Jartier, jarretière. Jason, Giasone del Maïno, jurisconsulte italien du XV^ siècle. Jau, coq. Jaulne et verd (livrée de), livrée des fous au moyen âge. Javart, maladie des chevaux. Javotin, ou Jacotin, musicien français. Jazeran, jaseron, chaîne d'or à fins anneaux. Jazerans, cottes à très-petites mailles. Jecabots, abstractions. Jects, Jectz, lanières de cuir qu'on attachait aux pattes des oiseaux de chasse, du lat. jacti. Jectigaiion, remuement nerveux, mouvement convulsif. Jejiine, à jeun. Joan (Seigny), le seigneur Jean, fou du XIV^ siècle. JoBELiN Bridé, nom forgé par Rabelais, avec le sens de niais, nigaud. Joncades, petites crèmes parfu- mées. JosQuiN DES Prez, musicien français du XV^ siècle. Joussaulme (Guillaume), le marchand de drap dans Pathelin. Jouste, Jouxte, près de, auprès de; suivant, conformé- ment à. Jovetian, Jovial, de Jupiter. Jovio (Paulo), Paul Jove, his- torien et géographe du XVF siècle. Joyeulx, bouffon de roi. Jubés, crinières. Jules second, le pape Jules TI, qui fut en guerre avec Louis XII. Jumelles, deux pièces de bois pareilles dans un pressoir. Jupiter-Philios, Jupiter protecteur de l'amitié. Jupiter Pierre, le pape, suc- GLOSSAIRE-INDEX cesseur de saint Pierre. Jus, à bas. KiMY, David Kimchi, rabbin, commentateur de la Bible, des XIF et XIIF siècles. Kyne, chien, du grec. Kyrielles, Kyrie, oraisons. La Basmette, abbaye près d'Angers. Labeo (Antistius), jurisconsulte romain. Labeurer, travailler. Lachrima - Christi , larme du Christ, nomd'un vin célèbre récolté au bas du Vésuve. Lactantius (Firmianus), auteur latin du III^ siècle. La FayeMoniau. La Foye Monjault, arr. de Niort, DeuxSèvres. Ladres, lépreux. Lagona edatera, en basque, ca- marade à boire. Laicter, teter. Laignel(Co1 de),cold'Agnello, au pied du mont Viso? Laise (Grande), grande mesure. Laissas aquaio , en limousin, laissez cela. Laisse, fiente de bête sauvage. Laize, largeur. Lamah hazabthani , derniers mots du Christ sur la croix. Lamballe, ville de l'arr. de Saint - Brieuc , Côtes- du- Nord, renommée pour son parchemin. Lamies, sorcières représentées avec une tête de femme et un corps de serpent. La Motte, arr. de Melle, DeuxSèvres. Lamines, armures formées de lames imbriquées. Lampreons, lamproies. ia/jcepesarfes^anspessades, sousofficiers. Lanciz, foudre, Lancy, esquinancie. Landerousse, nom de lieu forgé par Rabelais. Landier, grand chenet. Landores, Landorez, endormis. Landrivelj andrivel, gros cor- dage (Jal). Laneret, oiseau de proie. Lanes, landes. Lango, nom moderne de l'île de Cos, où naquit Hippocrate. Langrauff d'Esse, le Landgrave de Hesse. Langres, chef-lieu d'arrond., Haute-Marne. Languegoth, le Languedoc. Langues, nations. Lanier, espèce de faucon. Laniftcque, qui produit la laine. Lans tringue , en allemand, pays, bois ! Lansquenette, de lansquenet. Lanterné, amaigri. Lanternier, marchand de lanternes, cafard. Laniernois (Pays de), pays des lanternes, des lumières. Lanternoys, langage Imaginaire. La part, partout où. GLOSSAIRE-INDEX 53 Lapatlïium acutum, ou Lapa- thum, patience aquatique. Lappia, Laponie. Laps, chute. Larege, mélèze. Larisse, lance; suivant M. Moland, il faudrait lire Sarisse. Larmiers, corps en forte saillie pour empêcher les eaux de couler le long d'un mur. La Roche Clermauld, arr. de Chinon, Indre-et-Loire. Larrix, mélèze. Lasanon, Lazanon, bassin de chaise percée. Lasanophore , porteur de lasa- non, du grec. Lascaris, érudit grec contemporain et ami de Rabelais. Lassez, croisés. Lassas, là-dessus, là-haut. Late, largeur. Latial, latin. Latinicome , latin. Latrialement , avec culte de latrie. Latrie, culte d'adoration qu'on doit à Dieu. Laurence (Tante), tante du drapier dans Pathelin. Laurette (Notre-Dame de), près d'Angers. Laurezay ou Jaurezay, village du Poitou. Lavailies, eaux de vaisselle. Lavedan, cheval du pays de ce nom, en Bigorre. Layz, frères lais. Léans, céans, ici, là. Lecanoniantie, divination par la vue d'une image dans un vase d'eau. Lectieres, litières. Legugé, monastère aux environs de Poitiers. Leive (Anthoine de), général de Charles-Quint. Lelapes, tempêtes, du grec. Le Maire (Jean), poëte et his- torien, de Belges en Hainaut. Lemovicque, limousin. Lémures, esprits du mal ; âmes des morts. Lendole. V. Dar. Lenou (Notre- Dame -de -la-), entre Chinon et Richelieu. Lentisce, lentisque. Léon, lion. Leonicus, auteur vénitien du XVP siècle. Leonides, poëte grec de ['Anthologie. Lernb, arr. de Chinon, Indreet-Loire. Leschars, gourmands. Leschart, avare. Lesche, partie. Letrain, lutrin. Leuce, blanc. Leurier, laurier. Leurre, morceau de cuir qui servait à rappeler les faucons. Le Veneur-Carrouges (Jean), évêque de Lisieux, fait cardinal en I 533, gastronome. Lever guerre, faire la guerre. Lexif, suc blanc du figuier. Lez, proche de, le long de. Lheritier , musicien français

54 GLOSSAIRE-INDEX

du XVie siècle. Libanomantie , divination par l'encens. Libentissiment, de très-bon gré. Libères (Personnes), de condition libre, non serves. Librairie, bibliothèque. Libiirnicques, petits navires à marche rapide. Licence, autorisation. Licentier, donner licence, permettre. Lichecasse, lécheur de casse... La casse serait le vase qu'on met sous le rôti pour en recevoir le jus? Marmiton. Lifreloffres, ignorants ; grands buveurs. Lignade (Faire), faire^ prendre du bois. Ligneare (En forme), en forme de potence ; marche des cavaliers aux échecs (Burgaud). LiGRE, Ligré, arr. de Chinon, Indre-et-Loire. Liguombeau, Bernard l'hermite, crustacé. LiGUSTiQUE (La mer), le golfe de Gênes. Limacial, de limace. Limessourdes, gens en dessous. LiMOUs, Limoux, Aude. Linceux , pluriel de linceul, draps de lit. Linostolies, robes de lin, du grec. LiPARA, aujourd'hui Lipari, îles Éoliennes. Lipothymie défaillance, éva- nouissement, du grec. Lippée, bouchée, repas de bons morceaux. Liron, loir. Lithontripon, casse-pierre, du grec. Livesche , livêche, ache des montagnes. Livier, levier. Livrée à une noce, rubans aux couleurs de la mariée, que les invités se partagent et portent. Liz, lisse, poli. Lizart, lézard. Lize, compacte. Lo, lof, vent. Locale, poche. Locupkter, enrichir. Locustes, sauterelles. Lodier, courte-pointe. LoGROiNE, Logrono, en Espa- gne? LoNGYS, géant. Lopiner, mettre en menus morceaux ; examiner en détail ; goûter, faire une collation. Loppin, morceau ; on dit encore un lopin de terre. Loqueteux, en loques, déguenillé. Los, louange. Lourche, sorte de jeu. Louschetz, louchetz, serait une étoffe de laine. Lourdoys , lourdeau. A mon lourdoys, h ma façon , naï- vement. Lourpidor} , y'ieWle au pied bot, dont la rencontre est de mauvais augure. GLOSSAIRE-INDEX 255 LouzEFOUGEROusE, La LogeFougereuse, arr. de Fonte- nay-le-Comte, Vendée. Loyer consigné , récompense assurée. LoYSET, musicien du XV^ siècle. Lubin (Frère), un moine. Lubine^ espèce de bar, poisson. Luc, luth. Lucestre (Balles de), balles de Leicester? Lucifer, Tétoile porte-lumière, la planète de Vénus. Lucifuges, qui fuient la lumière. Lucullian (Marbre), marbre tiré de l'île de Milo, très- employé par Lucullus. Ludificatoyres, trompeurs. Luettes, jeu de cartes du Poitou. LuGA, ville d'Asie. LuLLE, LuLLius, Raymond LuUe, alchimiste du XIIl» siècle. Lunaria major, lunaire, herbe à la lune. Lunettes des Princes, Recueil de vers de Jean Meschinot, poëte du XV® siècle. Lupi, musicien. LusiGNAN, arrond. de Poitiers, Vienne. Lussonnoys,\e diocèse de Luçon. Luter, joindre. Lutz, petits navires. Lybistides, de Libye. Lycambe. Se pendit à cause de vers qu'Archiloque avait faits contre lui. Lycaon, animal fantastique dont parle Pline. Lychaon patepelu, que Jupiter changea en loup après avoir séduit sa fille. Lychnion, mèche de lampe, du grec. Lychnobiens, peuple vivant de lanternes ou de phares, comme le dit le texte. Lycisque orgoose, chienne en chaleur. Lycoptalmie, œil de loup, pierre dure. Lycus, tyran de Thèbes, qui voulut séduire Mégare. Lye (Chère), vie joyeuse. Lyra (Nicolas de), juif converti du XIV® siècle, dominicain, commentateur de la Bible. Lyripipié, en forme de bonnet doctoral. Lyripipion, chaperon des docteurs de Sorbonne. Lysidices, nom grec emprunté à VAnthologie. Ma dia, juron : Non, par Jupiter? Mabrun, géant. Macé Pelosse (Frère), moine de la fabrique de Rabelais. Macle, macre, châtaigne d'eau. Macrxons, ou Macreons, gens qui vivent longuement, du grec. Macrobe, à longue vie, du grec. Madourré, fainéant; maladroit. Magdaleon d'entraict, masse emplastique maniée entre les mains. Magdeleine (La), cabaret pari- 56 GLOSSAIRE-INDEX sien. Mage, ad)., plus grande, major. Magnigoule, grande gueule. Magotz, géants. Maguelet (Huille de), huile tirée des semences du cerasus mahaleb. Mahom, Mahon, Mahomet. Maignans, vers à soie. Maigre, nom de la sèche sur les côtes de Saintonge. Maillard (Olivier), frère mineur, prédicat. deLouisXI, célèbre par la singularité de ses sermons. Maillart, musicien. Maille, musicien. Maille, monnaie valant un demi-denier. Maillezays, Mailiezais, arr. de Fontenay-le-Comte, Vendée. Mailly le Borgne, commissaire de l'artillerie. Maiorici, de la maison de Du Bellay. Maison du Ciel, constellations sous lesquelles un person- nage est né. Maistral, mistral, vent du N. O. Maistralle, grande voile (Jai), Majeurs, Majores, ancêtres ; plus âgés. Major (Jean), contemporain de Rabelais, principal du collège de Montaigu. Malader-je, maladrerie. Malandré, lépreux. Malchus, Malcus, l'épée avec laquelle saint Pierre coupa l'oreille à Malchus. Maie guarde, mégarde. Maie heure (En la), par malheur. Maies, malles, coffres, bagages. Maléfique, porte-malheur. Malengroin, mauvais vouloir. Maies mules, engelures au talon, engelures d'un mauvais caractère. Malesuade,- mauvaise conseillère. Maleites, maillettes, œillets où passent les cordes des voiles. Malivole, de mauvaises intentions, qui veut du mal, malveillant. Malogranatum, pomme de grenade, fruit du grenadier. Mal Sainct Eutrope, maladie épidémique, sorte de peste. Malvedis, niaravédis, monnaie espagnole. Mal vouluz, ceux à qui on veut du mal. Mammallement, adverbe forgé avec le mot mammelle. Mammone, le démon des ri- chesses. Manche, pourboire, gratification, de l'ital. manda. Manche de la paroece, le clo- cher de l'église. Manchicourt, musicien du XVF siècle. Manchons, manchettes. Mancipée, prise en possession. Mancippe, esclave. Mandés (Ile de), ile dont les GLOSSAIRE-INDEX 5' femmes adoraient Pan et le bouc. Mandousianes, épées larges. Mandragore; passait non-seule- ment pour antiaphrodisia- que, mais encore jouait un grand rôle dans les sortilèges. Manduce, en lat. Manducus, espèce de Croquemitaine, de tnanducare, manger. Manequins, ornement en forme de panier plein de fleurs. Manillier, marguillier. Maquerelle (Isle), île dans la Seine, en bas de Paris, qui s'est depuis appelée l'île des Cygnes, et qui a fini par être réunie à la rive gauche. Marais (Charles), médecin de Lyon, contemporain de Rabelais. Marault, musicien. Marc Paule, Vénitien, Marco Polo, voyageur du XIII^ siècle. Marcellus (Donatus), médecin du XVF siècle. Marcellus Empiricus, médecin du IVe siècle. Marché vieulx, village du Chinonnais. Marchettes, touches d'un clavier. Marchez, Marques, dizaines d'un chapelet. Marforio, restes en marbre d'une statue de fleuve à Rome, sur laquelle on affi- chait des épigrammes. Marguerite, perle, du lat. Rabelais. V. margarita. Marlottes, mantelets d'été. Marmiteux, mendiants piteux. Marmotret, Mammotrectus, ti- tre d'un Abrégé de morale à l'usage des écoliers. Marotus du Lac, auteur de la fabrique de Rabelais. Marpault, palefrenier. Marpesian (Le roc), le mont Marpesus, dans l'île de Paros. Marques, V. Marchez. Marrabais, marrabeise, renégat, mauresque. Marrane, mécréant. Marranisés, infidèles, impies. Marres, Marroches, Marrochons, binettes, pioches, outils de jardinage. Marsupies, bourses. Martin de Cambray, le ja- quemart de l'horloge de Cambrai. Martiner, boire comme on boit à la Saint-Martin. Martingualle (Chausses àla\ chausses dont le derrière s'abattait; on en fait encore aux petits garçons. Mas, pièce de terre. Mascarer, barbouiller. Maschefain, géant. Maschefains, insatiables. Mascherable, mangeur de raves. Massiteres pétrisseurs, mâcheurs. Massorethz, interprètes et glos- sateurs de l'Ancien Testa - 33 i58 GLOSSAIRE-INDEX ment. Massuau (Claude), traducteur ; faisait partie de la maison de Guillaume du Bellay. MASUEL;serait Claude Massuau . Mat, fou, de l'ital. matto. Matabrune, personnage de la chanson de geste Le Chevalier au Cygne. Matafain, pâte indigeste. MatagotSj vieux drôles; fanatiques. Matagrabolisé,hou\eversé , pré- occupé. Matagraholiser, apprendre à grand'peine. Matagrabolisme, hypocrisie. Mateologiens, qui font des dis- cours mutiles, du grec. Mateotechnie, étude d'une science inutile, du grec. Matraz, trait d'arbalète; matelas. Matute, du matin. Mau de pipe vous byre, gascon: le mal de tonneau vous retourne. Mau de terre, mal de terre, épilepsie. Maugis, enchanteur dans les Quatre Fils Aymon. Maugré, malgré. Maujoin, par opposition à benjoin. Maujoinct, mal joint. Maulevrier le Boyteux , le mari de Diane de Poitiers, Louis de Brézé, comte de Maulevrier. Maulgouvert, se gouvernant Maulubec (gascon), ulcère, mal de jambe. Maulvys, mauviettes. Maumusson, arr. d'Ancenis, Loire-Inférieure. Maunettes, mal nettes, sale;. Maydenbourg, Magdebourg. Mebins, intelligents, del'hébr.? Me^ha, La Mecque. Medamothi, nom d'un pays imaginaire : aucun lieu, nulle part. Meden, pays imaginaire. Medere, Madère. Mediastinc, continuation de la plèvre. Medulare (Os), os à moelle, médullaire. MeduUes, moelle. Megiste, très-grand, du grec. Mejane, Conire-Mejane, voile d'artimon et de contre-arti- mon (Jal). Mêla (Pomponius), géographe latin du l^' siècle. Melancholier, attrister, fâcher. Melinde, en Afrique. Melli, Meliiia, en Afrique. Mcllifîue, douce comme du miel. Melze, mélèze. Mémorial, chose qu'on n'oublie pas. Memoriallement, adverbe de mémorial. Menades, bacchantes en fureur. Men cm}!, mon ami, en lorrain. Menthicores, animaux fantasti- ques. GLOSSAIRE-INDEX 59 Menu (Du), menues volailles de basse-cour. Menuail (Duc de), duc de petites gens. Mephitis, déesse du mauvais air. Meratre, marâtre. Mercuriale (Eau), eau lustrale ou eau bénite. Merdé (Par la), juron, par la Mère de Dieu. Merdigues, juron, Mère de Dieu. Mere-goutte, premier vin tiré du pressoir. Meretricules, courtisanes. Merluz, Merlus, merluche, morue sèche. Mervant, Mervent, arr. de Fontenay-le-Comte, Vendée. Merville (Le Seigneur de), seigneur de la fabrique de Rabelais. Mesa, moyenne. Mesaraïcques (Veines), veines du mésentère. Mesembrine ( Porte , Tour ) , Porte, Tour du midi. Mesescrire, écrire du mal. Meshaing, malechance, insuccès , souffrance , malheur, chagrin, infirmité. Meshaigner, affliger, tourmenter. Mesles, Nèfles. Mesnagerie (La), de Caton, l'art du ménage , le traité De Re rustica. Mesnagerie, soins de la basse- cour, de la ferme; économie domestique. Mesoùan, cette année. Mespris, méprise. Messe seiche, messe dite sans la consécration. Mes^/Va/Z/es, fêtes de la moisson. Mestiviers, moissonneurs. Met, la huche où l'on pétrit le pain ; cuve où tombe le vin qui découle du pressoir. Metalepsis, métalepse ; d'après Dumarsais, figure par la- quelle on prend l'antécédent pour le conséquent, ou le conséquent pour l'antécédent. Metaphrenes, aponévrose du diaphragme. Mete, borne, limite, du latin ineia. Melhanesiens, habitants de Méthène, près de Trézène. Metifs, métis. Metopomantie, divination par les lignes du front. Metoscopie, aspect du front. Mètre, vers. Metrodorus, philosophe grec. Meung, arr. d'Orléans, Loiret ; ce sont les habitants qu'on appelait Asnes de Meung. Meusnier, espèce d'ablette. Meuvoir armes, mouvoir, faire la guerre. Mezarims, médecins des entrailles. Mezeaulx, Mezeaux, arr, de Poitiers, Vienne. Michelots, Micquelots, pèlerins; on donnait en particulier ce 260 GLOSSAIRE-INDEX nom à ceux qui se rendaient au mont Saint-Micliel ; partisans. Micraines, Migraines, grenade d'artillerie. Microcosme, petit monde, du grec. MiDY, musicien. Mignotize, gentillesse. Migraine, mi-graine, sorte de teinture, V. Micraine. Miliaires (Bornes), mesure ro- maine indiquant un espace de 1 ,000 pas. Millesouldiers, soldats. Millet, musicien. M/'/our^mylord, monseigneur. Mimallones, bacchantes. Mimallonides, prêtresses de Bacchus. Minere, minière, mine. Minorative, minoratif, purgatif léger. Minot, mesure de près de 40 litres . Minutait, petite. Mirach, mot arabe, partie du ventre. Miraclifîque, faiseur de miracles. Miralliers, miroitiers. MlREBALAlS, MlRABALAYS, Mirebeau , arr. de Poitiers, Vienne. MiRELANGAULT, géant. MiREVAULX, Mireval, arr. de Montpellier, Hérault. Missayr, messire. Missicque, de la messe. Mistes, Mystes, mystères. Mitouard, matou. Mitouflez, Emmitouflez, enveloppés. Mixarchagevas, nom donné par lesArgiens à l'étoile Castor. Mna dies , corruption parlée de bona dies, bon jour. Mocitelle, hoche-queue, passereau. Mocque, Mocquette, moquerie. Modal, suivant la mode. Mode que (De), de sorte que, de façon que. Moine (Avoir le), être attrapé. Le moine était un instru- ment destiné à réchauffer le lit en temps froid, et la substitution de la neige ou de la glace au feu, dans le moine, était une plaisanterie très-pratiquée. Moine Bailler le), porter malheur. Moins de mon plus (Le), le plus que je pourrai. Mo/sso/?n/ers(Chevreaulx), che- vreaux de redevance. Molares, molaires. Moler, larguer, 4àcher (Jal). Moles, meules. Mo/es^e^ fâcheux, du latin molesius. Montions, travaux de siège. MoUice, mollesse, douceur. Molossicque , genre de danse. MOMMORILLON.MONSMORILLON, Montmorillon,ch.-lieu d'arr. de la Vienne. Monettes, qui avertissent. Mongas, genre de danse. GLOSSAIRE-INDEX Monochordion , instrument de musique à une seule corde, du grec. Monochordiser des doigts, imiter le mouvement des doigts sur un instrument à une seule corde. Monopes, animaux à un pied, du grec. Monopole, contrarié. Mons Jovis, proéminence sur les doigts. MONSMORILLON. V. MOMMORILLON. McTNSLEHERY, Montlhéry, arr. de Corbeil, Seine-et-Oise. Monstkr^ monastère, église. Monstre, cortège, procession. Monstre (Chien de), chien qui montre, chien d'arrêt. MoNTRiBLE (Pont du), pont du Mont-Terrible, pont imaginaire. Mont (A), en haut. Montaison, se dit du vin qui commence à fermenter, à monter dans la cuve. MoNTARGENTAN, Porto di Tela- mone, en Toscane. MoNTEViEiLLE, héros de roman. Montigenes, nés dans les montagnes. Montjoye, entassement, monceau, amas. MoNTSOREAU, arr. de Saumur, Maine-et-Loire. Morales, musicien espagnol du XVie siècle. Morcrocassebezassevezassegrig - ueliguoscopapopondrilléjContusionné, blessé. Morderegrippi.piotabirofreluch- amburelurecoquehirintimpa- nemens, coups. Moret, suc du maurei ou maurette, baie noire de l'airelle ou myrtille. Mor/îai7/€r, manger goulijment. Morguan, Morgan, géant. Morgue (La fée; , Morgane, sœur d'Obéron et d'Artus. Morgue, regard sévère. Morgue (Bonne), bon visage. Moriginer, soumettre. Morisque, danse mauresque ; Mauresque; nom d'une voile. Morné, émoussé (Littré). Morosophe, ïou sage, du grec. Morpain, musicien du XVI^ siè- cle. Morpiaille, pediculus pubis. Morguaguoqfuasse'jfoulé.froissé, blessé. Morrambouzevezengouzequoq - uemorguatasacbacguevezinemaffressé, l'œil, poché l'œil. Mort beuf (Par la), juron. Mort beuf de boys (Par la), juron. Mortier, sorte de bonnet de magistrat. Mortifiez, en forme de mortier. Mosmerie, mascarade. Mouchet, émouchoir. Mouee, une volée, une quantité, Moufpes, mitaines; bouffissures. Moule, Moulle d'un bonnet, la tête. Moulle, caractère moulé, caractère d'imprimerie. On

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dit encore : Il sait lire la lettre moulée. Moulinet, petit moulin. Moulu, musicien. MoulueSj morues. Mourions, morions, casques. Mourre, visage. Mourre, jeu italien où il faut dire vite le nombre de doigts restés fermés aux deux mains de son adversaire. Mourrins, musaraignes, petits rats mangeurs de blé, du latin nius, mûris. MouscHE (Maistre), nom d'un charlatan; type de l'homme adroit. Mouschenez, mouchoir. Mousche bovine, taon, Mouschet, chasse-mouches. Moussines, branches de vigne avec les raisins. Moust de vin, vin doux. Moustardier, jeu de mot sur moult tardier,qui tarde beau- coup. Moustardois, le pays de la moutarde. Moutons à la grand laine, monnaie d'or de saint Louis 'à Charles VII. Mouvans {Nous), nousexcitant. Mouvons (Qtie) toute pierre, que nous remuyions toute pierre, que nous essayions de tout. Moyeux d'eufz. Prononcez : meyeux ; c'est-à-dire : mi lieux, les jaunes. Moyneaux, guérites mobiles. Mucer, Musser, cacher. Mugueter, faire la cour, courtiser. Muguttz, galants. Mules, engelures. V. Maies mules. Muliebre, de femme. Muliebrité, état de femme. Mulle (La), cabaret parisien. Munde, pur, du latin mundus. MuNiCAN, Munich? MuRMAULT, peut-être J.Murmellius, professeur du XVI^ siècle. Musaffiz, Musaphiz, docteurs de la loi musulmane. Musimones, béliers? Musser. V. Mucer. Mut, muet, Mutue, mutuelle. Myault, onomatopée burles- que, pour exprimer des pleurs. Mylasea, destinée à la meule, farineuse. Myoust, mi-août. Myrallier, miroitier. Myres, médecins. Myrebeau, Mirebeau, arr. de Poitiers, Vienne. Myrelingays en Myrelingues, pays de la fabrique de Rabelais. Myriandres (Naufz), navires portant dix mille hommes, du grec. Myrobalans, Myrobolans emblicz, fruit du Myrobolanus citrina, de la grosseur d'une petite olive, et dont la cou- GLOSSAIRE-INDEX 263 leur varie du noir au jaune. Mysota, myosotis, ne m'oubliez pas. M)is'agogf<es^prêtres, prêtresses. Mystes, prêtres initiés aux mystères. Nacelles, vases de métal. Naïfve, véritable, naturelle. Naphe, fleur d'oranger. Naquets, mendiants. Narsay, village du Chinonnais. Nasitord, cresson alénois. Nasturtium, cresson de fontaine. Natatoires, bains où l'on peut nager. Nau, nau, nau, refrain d'un noël poitevin. Nature quite, anagramme de Jean Turquet, ami de Rabelais. Nauchiers, navigateurs, Naufj navire. Naufz oneraires, navires de transport. Nausiclete, célèbre par ses navires^ du grec. Naute, pilote. Navrer, blesser. Nays, Nesde? arr.de Poitiers, Vienne. Nazardes, coups sur le nez. Nazarder, taper sur le nez. Nazdecabre, nez de chèvre. Neares, animaux fantastiques. Nearins, nom hébreu (?) d'un serviteur de la Quinte. Nebulon, mauvais garnement, du latin nebulo. Necromantie, divination par l'évocation d'un mort. Nedibins, serviteurs, de l'hé- breu ? Neemanins, puissants, de l'hé- breu? Nercins, adolescents, de l'hé- breu ? Nemains, serviteurs, de l'hé- breu? Nembroth, Nemrod, géant. Nephelibates, peuple qui marche au milieu des nuages, du grec. Nephrocatarticon, qui dégage les reins, du grec. Neric, Néris, arr. de Montluçon, Allier. Nettiz, nettoyés, rendus nets. Nettre-Dene, Notre-Dame. NiANTO (Francesco di) le Thuscan, auteur de la fabrique de Rabelais. Nicander (Jovien) de Colophon, médecin et poète grec du IP siècle avant J.-C, auteur d'un traité sur les serpents. Nicatisme, genre de danse. Nice, propret. Nicquenocque, chiquenaude. Nieblé, gâté. Nobles à la rose, monnaie d'Edouard III d'Angleterre. Noisettes, petites noises, petites querelles. Noix de pin, pommes de pin. Noizille, noisette. Nonacris, fontaine en Béotie. 264 GLOSSAIRE-INDEX NoNNAiN (Le pont de la), ancien pont de Chinon. Nosocome^ hôpital, du grec. Notable, chose à noter. Notice, connaissance. Nou, Noud, nœud. NouAiLLÉ, arr. de Poitiers, Vienne. Noverce, seconde femme de père, du latin noverca. Noyer (Balthasar), contemporain de Rabelais à Montpellier. Noyrettes, jeunes noyers. Nully, aucun. NuMENius, philosophe grec du II*^ siècle. Nyctimene, changée en hibou par Minerve. Nymphsea heraclia, nénufar, qui passait pour antiaphrodisiaque. Obelices, obélisques, obélisques; aiguilles, aiguillettes. Obeliscolychnies , obélisques surmontés d'un phare; sol- dats portant un falot au bout d'une lance, du grec. Obelies, oublies, plaisirs. Obelon. V. Haubelon. Objectes, mises devant. Oblecter (S'), se réjouir. Obrizé, affiné. Obsister, s'opposer, faire obstacle. Obstestans, prenant à témoin. Obtempérer, se soumettre. 06/ur6cr, troubler ; interpréter les choses du mauvais côté. Ocieux, oisifs, oiseux, paresseux, du latin otiosus. OcKAM, théologien anglais du XVe siècle. Oconcevoir, atteindre. Odes (Ile d'), île des Chemins, du grec. Odet, cardinal de Chastillon ; était le frère aîné de l'amiral Coligny. Œdipodicque, qui a les pieds enflés, du grec. Œil de Jupiter, plante. Est-ce la matricaire, dite aussi œil de soleil ? ŒnOPION. V. HiRCUS. Œstre junonicque, taon, oes- trum, que Junon envoya s'acharner après lo, changée en vache par Jupiter. Œtyle, ville de Laconie. Œuvres, travaux. Offendre, attaquer, défendre. Office, devoir, du latin officium. Officiai, pot à uriner. Offot, géant. Og, géant, roi de Basan. Ogier le Dannoys, l'un des douze pairs. Ogygies, bacchantes. Ohabé (Le roii; suivant M. Sar- dou, ce serait un mot hé- breu signifiant : l'ami, le chéri. Oince, once, anima! du genre chat ; lynx. Oinces, articulations des doigts qui font saillie quand le poing est fermé. Oinsestre (La marquise de), de GLOSSAIRE-INDEX 265 Winchester. OirCj vase. V. Aire. Oiseau de masson, instrument à l'aide duquel les maçons transportent le mortier sur leurs épaules. Oizillets, petits oiseaux. Olcam, Ockam, théologien anglais du XIV^ siècle. Olif, huile. Olif enlycaleil (languedocien), huile dans la lampe. Olimpicoles, habitants du ciel. Olive {V), maison à Chinon. Ollzegan, Jean Ockeghem, ou Olkegan, musicien du XV^ siècle, Olone, Olonne, arr. des Sables, Vendée. Oltroy, action d'octroyer. Olus atrum. Daps Pline, serait une espèce d'ache? Dans Plaute, ce serait, d'après les traducteurs, des épinards. Omniforme, qui prend toutes les formes. Omnigene, qui engendre tout. Omnijuge, qui juge tout. On, au, dans. Onagrier, allure de l'âne sau- vage, onagre. Oncle (Un vieux), un vieux papa, un vieux bonhomme. Onestes, nom grec emprunté à VAnthologie. Onirocrite, interprète des songes, Oniropole, qui interprète ses songes. Onocrotale, palmipède, pélican; âne; oiseau fantasti- que qui imite le braiment de l'âne. Onomatomantie, divination par les lettres du nom de celui qui interroge. On quel, en ce ; pendant le- quel. Onymantie, divination par l'ongle enduit de cire. Onys, Aunis. Onzay, Onzain (?), arr. de Blois, Loir-et-Cher. O O (Les benoists saincts), antiennes de Noël, qui commencent toutes par un O : O Sapientia, etc. Opérer, travailler. Ophyres, serpents fantastiques. Ophite, Ophyte, serpentine, pierre dure, du grec, Opignerée, ornée. Opistographes, écritures, papiers écrits. Oppianus, Oppien, pcëte grec du ne siècle. Oppiler, boucher, fermer, clore. Opprimer, écraser, accabler, combler. Oppugner, assiéger, combattre. Opter, souhaiter. Oranges, oiseaux, Orbellis (Nicolas de), cordelier du XV^ siècle. Orchades, navires. Orche, a gauche, bâbord, Orchis, orchis mascula, dont le petit tubercule passait 34 t66 GLOSSAIRE-INDEX pour antiaphrodisiaque, tandis que le gros devait produire l'effet contraire. Ord, sale. Ordre (11 n'y a), cela va mal. Ordres, rangs. Orée, entrée, bord, commencement. Oreille, anse de vase. Ores, actuellement, maintenant, dès lors. Organes, instruments de musique. Orgeau, barre du gouvernail (Jal). Orgues, orge. Orgues (Dire d'), parler comun oracle. Oribasius, Oribase, de Per- game, médecin et ami de Julien. Oribus (Poudre d'), poudre de résine. Oriflamhe,Orifîant, oriflamme. Oriflans, éléphants. Origes, gazelles unicornes. Orlando furioso, poëme de l'Arioste. Orobrinche, ers, légumineuse. Oromédon, géant. Orque, hourque, navire de transport. Orthies, chants de mort, du grec. Ortuinus Gratius, lîardouin de Graetz, docteur de Cologne du XVI'" siècle. Orus Apollon, ou Horapollon, grammairien grec du IV'- siè- cle. Osawiiere (Croix), croix au pied de laquelle on chante Hosanna le dimanche des Rameaux. Oscines, oiseaux qui prédisent l'avenir par leur chant. Oscitation, action de bâiller. OssE, le mont Ossa en Thessalie. Ost, Oust, armée, camp. Ostade, étoffe à longs poils. Ostarde, Otarde, outarde. Otacustes, espions, du grec, Othe, géant. Ou, dans le. Ouailles, moutons. Oultrés, gonflés, gros comme des outres. OuZ/roy, octroi, chose octroyée. Oultroyer, octroyer, donner. Ous, os. Oust. V. Ost. Ouster, ôter. Outre, au delà; Rabelais en fait un pays. Ouvert, nu, découvert. Ouvrouoir, ouvroir, lieu de travail, boutique. Ouzeaulx. V. Houseaux. Oxydraces, Oxydraques, peuples de l'Inde. Oyre, outre. Ozillons, petits oiseaux. Pacolel, cheval de bois enchanté , dans Vakntin et Orson. Faction, traité. Paele, Palle, manteau, du lat. palUuni. GLOSSAIRE-INDEX Paelles, poêles. Paeslon^ poêlon. Paeone, pivoine. Paffuz, armes tranchantes. Pagine, page. Pagnier, musicien. Pailles^ poêles. Pal, pieu. Palatj Palatin, ^ahis, qui tient au palais. Palices (Les deux), jumeaux enfantés par Jupiter et la nymphe Thalie. Palingenesie, régénération. Paliniocie, renaissance, nouvelle naissance. Palle. V. Paele. Palle, chaton de bague. Palle, Pale, pelle. Palletoqué, bien vêtu. Palluau, arr. des Sables, Vendée. Palmes, palmiers. Palodes ou Pelodes, port d'Épire. Palude. Palus, Paluz, marais. Palus Camarine ou Cainerine, marais fangeux en Sicile. Palys, barrière. Pamphile, Pamphylie. Pampillette, Papillette, petite houppe de soie, paillettes. Pamyle, femme thébaine à qui une voix avait prophétisé la naissance d'Osiris. Panacea. Est-ce VArnica montana, qu'on nommait Panacea Lapsorum ? Panaciée, panacée, remède universel. Pane, panne, roulis d'un navire (Jal). Panerotz, paniers. Panes, pans, satyres. Panicault, chardon Roland. Panice, panique. Panigon, du latin paniculus, petit pain, ou du grec -rràv zixo'yj, toute image. Panomphée, qui rend à tous des oracles. Panorme, Panormitan, Niccolo Tedeschi, dit Panorrnitano, canoniste italien du XIV^ siècle. Panouere, pannetière. Pantagruelisme, gaieté philoso- phique. Pantagruelistes, bons vivants intelligents. Pantarches, Pantarques, registres, actes, papiers. Pantharbe , pierre précieuse indienne. Pantheologie, toute théologie. Pantophle, mule, pantoufle. Pantodiables, tout-diables, diables de toutes les façons. Pantagruelion, le chanvre. Panurge, qui fait tout, du grec. Panzoust, Panzoult, arr. de Chinon, Indre-et-Loire. Pao cap de bious... Voici la traduction que donne de ce discours M. Burgaud : « Tête bœuf, mes petits, que l'ivresse vous roule à terre ! Maintenant que j'ai perdu mes vingt-quatre vachettes, je n'en donnerai que

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mieux des coups de griffes, de poings et taloches. Y at-i! quelqu'un de vous autres qui veuille se battre avec moi de franc jeu? » Paoul, Paul. Paour, peur. Paouvre, pauvre. Papefîgues, ceux qui font la figue au pape, qui se moquent de lui. Papefil, nom d'une voile (Jal). Papegay, Papeguay, perroquet. Papelard, hypocrite. Papeligosse, pays où l'on se moque du pape, Paperat, papier. Papier baptistère, registre des actes de baptême, seul état civil alors. Papillette. V. Pampillette. Papiinanes, ceux qui ont la manie du pape, qui en sont les partisans absolus. Papimanie, papisme exagéré. Papinian, Papinien, jurisconsulte romain du IF siècle. Pappes, duvets. Parabolains, infirmiers. Paradis (Graines de), semences de VAinomum grana paradisi. Paradoxe, adj., paradoxale. Paragon, Parangon, modèle, comparaison. Parangonner, comparer. Paranomasie , Paronomasic , ressemblance entre des mots de différentes langues. On appelle paronomase le rapprochement dans la même phrase de mots dont le son est à peu près semblable, mais dont le sens est différent. Paranymphe, conducteur, in- troducteur. Parasanges, Parasangues, mesure itinéraire des anciens Persans, évaluée à 3,75o pas. Parasine, poix-résine. Paras^afes, conduits séminifères. Par autant, par ce que. Parces, les Parques. Parceux, perçus. Para, léopard. Pardoinner, pardonner. Pardonnaires , Pardonneurs, vendeurs d'indulgences. Pardonnigere, porteur d'indul- gences. Pardons, indulgences; lieu de pèlerinage où l'on va pour gagner des indulgences, des pardons. Parement, garniture. Parez, accouplés. Parfaict, Parfait, fait accompli, achevé, fini. Parfond, profond. Parforcer, forcer. Parforcer (Se), s'efforcer. Parguoys, Perguois, du Perche. Parien, de Paros. PARiLLÉ,Parilly, arr.de Chinon, Indre-et-Loire. Pariser, appareiller, rendre pareil. Parlouoire aux bourgeoys , grande salle d'hôtel de ville. Parodelles, fromages ronds. GLOSSAIRE-INDEX 269 ParpaillonSj Parpaillos, papillons, mécréants. Parragonner, comparer. Pars Les), le rudiment. Parsus, par surplus, au surplus. Part, partie, lieu, où. Part (La), le parti. Partement, départ. Parthenay, ch.-lieu d'arr. des Deux-Sèvres. Parthenay-le-Vieulx, rasé en i486 par les troupes de Charles VIII. Parthisanes, pertuisanes. Partir, diviser, partager, faire les parts. Partuys, pertuis, trou. Pasadouz (provençal), flèche. Pasle, pelle. Pasquenade, panais. Pasques de soles, Pâques du soleil, du dimanche; juron, Pasquillu5,doctor marmoreus, Pasquin, restes d'une statue de marbre, au coin d'une rue de Rome, sur laquelle on affichait des épigrammes. V. Marforio. Passato el pericolo, gabato el santo , passé le danger, moqué est le saint. Passavantus, Jacques Passa- vant, moine florentin. Passelourdin, rocher près de Poitiers. Passe sans flux, terme de jeu de cartes, pas de résultat; je m'en prive. Passereau, musicien. Passevolan, pièce de canon d'origine italienne. Passion de Saulmur, mystère de la Passion, joué à Sau- mur en i 534. Past, pâture, repas. Pastophores, prêtres égyptiens. Patacz, patars, monnaie de cuivre. Patays. Est-ce Pantays, court d'haleine ? Pâté, pattu. Patelin, jargon; allusion au langage de Pathelin. Patelinage, farce dans le genre de la Farce de Pathelin. Patelineux, imitateur de Pathelin. Patelinoys, langage de Pathelin. Patenostres, chapelets. Patenostre du cinge, grimace. Patent, visible; sans nuages. Patespelues, hypocrites qui font patte de velours. Patience, plante employée pour les ladres, contre la lèpre. Patrocinations, longs discours. Patrociner, parler longuement. Patroiller , piétiner dans la boue. Pau, pieu. Pautillé, Pautilé, Potillé, village du Chinonnais. Pavaniers, qui dansent la pavane. Pavée d'Andouilles (Rue). La rue Saint-André-des-Arts a porté ce nom. Pavoys, grands boucliers. Paxes, îles de Paxos. Pean, surnom d'Apollon. lyo GLOSSAIRE-INDEX Peaultraille, canaille. Peautre, barre du gouvernail. Pecile, varié, du grec. Pecune, argent. Pédales (Doubles), saut des quatre pieds. Pedané, qui va à pied; qui reste debout. PîDAUCQUE (La royne), per- sonnage aux pieds d'oie, légendaire à Toulouse. Peder, péter. Pegiiad, pot de vin. Pelaudans (Se), s'arrachant les poils, se battant. Pelauder, battre; user la peau à force de la battre. Pé lé quau Dé! par le corps Dieu ! juron poitevin. Pèlerin (Faire un), faire vœu d'envoyer quelqu'un en pèlerinage. Pelei, petit poil, Pellaaderies, membranes. Pellican, pélican, pince à bec à l'usage des dentistes. Penader, sauter, danser, piaffer. Penaillon, déguenillé. Penard, grand poignard. Pendilloche, pendelocque. Pendre, dépendre. Pêne de nez, l'arête du nez. Peneau, penon, flamme du haut du mât. Pener, peiner. Penet, musicien. Peneux, tout honteux. Penie (Dame), pauvreté, du grec. Penier, panier. Pennades, coups de pieds de derrière. Pennage, Pennaige, plumage. Pennes, plumes. Pensaroys, le pays des pensées. Pensement, inquiétude, pensée. Pensile, suspendu. Pentaphyllon, potentille rampante. Pephages, animaux fantastiques Perannité, éternité. Peratre, parâtre. Perazons, chevaliers, de l'hé- breu? Perdonnances, façons de gagner des pardons, des indulgences, Perdrier (Jan), contemporain de Rabelais à Montpellier. Perdurante, durant. Perefamiles, père de famille. Peregn/zs,voyageurs, étrangers. Pereilleux, périlleux. Pères, moines. Perforaminé, piqué. Perguois. V. Parguoys. Perichairie, grande joie, Periclymenos. Ce serait le chèvrefeuille. Perigot, le Périgord, Perigrinité, action de voyager, Periller, périr. Périt, habile, du lat. peritus. Perlas Isles de ' , iles aux perles. Perples, compliqués. Pers, bleu foncé, bleu noirâtre. Persephone, Proserpine, Perser, franchir. Perses, Persée. Persicque, de Perse ; espèce de danse. GLOSSAIRE-INDEX PersicqueSj Persiguiere, persicaire poivrée, piment d'eau. Perspectif, qui peut percevoir. Pertuisé, troué. Pesinunt , Pessimonte , en Phrygie. Peslier, poêlier. Petault (Le roy), héros de quelque conte populaire. Petauristique, de danseurs de corde, du grec. Petrocil, persil. Petron, Pétrone? Petron, philosophe sicilien. Petrus Alexandrinus, commentateur d'Hippocrate. Petrux (Os), le rocher, partie de l'os temporal. Peuple, peuplier, populus. Pevier, pierrier. Phabetor, ministre du Sommeil. Phalarices , javelots porte- flamme. Phaleré, harnaché, caparaçonné. Phantasie, fantaisie. Phantasmes, Phantasmes, fan- tômes. Phantasus, ministre du Sommeil. Pharingues, pharynx. Phaseols, haricots, du latin phaseolus. Phébol, île du golfe arabique. Phée, résolu par le destin. Phée (adj.), enchantée. Phengite, transparente. Philautie, amour de soi, amourpropre, du grec. Philippus, monnaie d'or. Philippus (Tournoy),un sol ou douze deniers. rHiLOCORus, historien et poëte athénien. Philogroholizez, perplexes. PHiLOLAiis, philosophe de Crotone ; vivait 400 ans avant J.-C. Philophanes, qui aime à se faire voir, du grec. Philotheamon, qui aime à voir, du grec. Philostrate, auteur de la vie d'Apollonius de Tyane. PiiiLOTOME, qui aime à couper, nom d'un maître d'hôtel, du grec. Philoxenus, gourmand de l'antiquité. Phlebotomie, saignée, du grec. Phlosque, bouteille, de l'ital. fiasco. PhreneSj aponévroses du dia- phragme. Phrixus et Helle, enfants du roi de Thèbes Athamas, furent transportés en Colchide par un bélier dont la toison devint la toison d'or. Phrontiste, vigilant, du grec. Phrontistere, lieu d'études, de veilles, du grec. Phrygie, genre de danse. Phryson, cheval de frise. P/î//ijnas/s,maladie pédiculaire , du grec. Physetere, baleine, cachalot. Physon, l'un des quatre fleuves qui sortaient du paradis. Piboles, flageolets. 2 7 2 GLOSSAIRE-INDEX Pication, emploi de la poix. Picote, petite vérole. PiCQUET (Trilman). Il y a eu a Montpellier une famille de médecins de ce nom. PiCROCHOLE, bile amère^ du grec. Picus MiRANDULA, Pic de la Mirandoie, omniscient du XVe siècle. Fiez mars, pivers, picus martius, oiseau. Pie second, ^Eneas Sylvius, pape, qui publia des livres de géographie. Pieça, depuis longtemps. Pièce, morceau. Pièce (En), en aucune façon. PiEDEBOYS, médecin d'Angers. Pierre levée, pierre druidique près de Poitiers. Piéton (Foi de), foi d'homme qui va à pied, parodie de : Foi de chevalier. PiETRO (Don) de Castille ; est- ce Pierre le Cruel, est-ce l'infant de Castille, frère d'Alphonse V? Pifre, gourmand ; fifre. Pigne,pigner,^e.\gnQ, peigner. Pile Sainct-Marc, monument carré de près de 3o mètres, d'origine inconnue, à 3 kilomètres de Saint-Mars, près de Langeais. Pilettes, ornements de bonnets. Pille (Amusez à la), jouant à la balle. Pille, nade, jocque, fore, ter- mes du jeu des dés. Pille à mil, mortier à millet. Pillemaille, maillet au jeu du mail. Pillotizer, bâtir sur pilotis. Pilât, pilote. Pinard, petite monnaie. Pinart, gaillard. Pinastre, pin sauvage. Pineau, nom d'un cépage. Pingres, petites billes d'ivoire. Pinne, arête. Piolé, bariolé. Pioller, piailler, criailler. Pion. V. Pyon. Piot, Pyot, pot ; la boisson par excellence. Pippe, mesure de liquide dont le contenu varie suivant les pays. Piraticque, piraterie. Piscantine, eau rougie. Pisioletz, poignards de Pistoie; gens nés à Pistoie. Pistons, pilons. Pistrines, meunerie?. Pital, bassin de chaise percée, de l'ital. pitale. Pithe, petite monnaie, le quart d'un denier. Pithies, buvettes, du grec. Pitoyable, pieux. Pivars. V. Picz Mars. Placiades (Fulgentius), grammairien arabe du IV siècle. Plaincts, plaintes. Planté, abondance. Planudes (Max), écrivain grec du XIVc siècle. Plasmateur, créateur de for- mes, du grec. GLOSSAIRE-INDEX 3 Plasmature, forme. Plataine, plateau, ou plutôt platane d'or que Pythius aurait donné à Darius. Playdoyens, plaideurs. Plegeray, provoquerai à boire. Pleiger guaillard, lutter à qui boira le plus. Plombin, Piombino, en Toscane. Plonge (Au), en plongeant, Plotin, philosophe grec du me siècle. Plumailj aileron de volaille qui a conservé ses plumes, et sert à enlever la poussière; la volaille elle-même. Plumart, plumet. Poche, cuiller à servir le potage. Poche, Pochée, sac. Pochecullieres, oiseaux d'eau. Podagres, goutteux. Podestat, gouverneur. Page, à droite, tribord. Poictral, poitrail. Poiltronité, poltronité^ poltronnerie. Poiltrons, poltrons; paresseux. Poinct, Poincture, Poindre, pi- que, piqiàre, piquer. Poine, peine. Poisant, pesant Poisles, poêles. Poitry, pétri. Pote, plie ; poisson plat. PoLiTiAN, Ange de Ambroginis, dit Poliziano, érudit et poëte italien du XV^ siècle. PoLLUX (Julius), écrivain grec Rabelais. V. du 11^ siècle. PoLYDAMAS, devin célèbre dans l'antiquité. Polymyxe (Lanterne), lanterne à plusieurs becs, du grec. PoLYPHiLE. Hypnerotomachia Polyphili : Venise, Aide Manuce, 1499, in-folio. L'auteur est Fr. Colonna. Polypragmon, curieux, indiscret, du grec. PoLYSTYLO, Abdere, dans l'anti- quité. Pomme de Pin (La), cabaret parisien. PoMPEÏE Plautine, épouse de l'empereur Julien. Pomper, faire le fier. Pompettes, verrues, boutons rouges et luisants; pompons. Ponant, Ponent, couchant. Poncires, variété du citronnier de Médie. Pond, pondu. PoNEROPOLE, ville des méchants, du grec. Ponnent, Ponnus, pondent, pondus. PoNOCRATEs, homme laborieux, du grec. Pont-Alais (Jean de), auteur et acteur de farces, moralités et sotties. Pont- aux -Meusniers, ancien pont de Paris. Pont-de-Clam ^ village du Chinonnais. Pontal, planche sur laquelle on va du navire à terre (Jal). 35 274 GLOSSAIRE-INDEX PoNTiNER, le sonneur de corne des Suisses à Marignan. PoNZAUGES, Pouzauges, arr. de Fontenay-le-Comte, Vendée. Popismes (Petits), mouvements élégants de voltige. PoR£, Porus, géant. PoRPHYRio, géant. PoRPHYRius, Porphyre, écrivain grec du III^ siècle. Porter (Se), se comporter. Portai, portail. Portecole, le souffleur pendant la représentation d'un mystère. Portement, santé, manière de se porter. PortenteSj choses prodigieuses, du lat. portenta. PoRT-HuAUX, village sur l'In- dre, au nord-est de Chi non. Porto SANCTO,peîite île Madère. Portoueriere (Nauf), navire qui a pour enseigne une Portouere, hotte de vendangeur. Portouoire, portuoir, hotte de vendangeur. Portri, pourtour. Portugualoys, portugais. PoRUS, dieu de l'abondance. Poser (Se), se reposer. PossiDONius, philosophe syrien. Possouer, enfonçoir, qui sert à enfoncer. Poste, poteau. Pot à plume, pot o\X l'on garde les plumes des volailles jusqu'à ce qu'il y en ait assez pour faire un lit. Pot pourry, plat composé de viandes et de légumes divers mêlés ensemble. Poiatif, buveur. Potet, petit vase, petit pot. PoîingLies, buveries. Pouacres, hérons ; podagres. PoLidrebif, poudre de bœuf. Poulain, deux fortes charpentes, réunies par de courtes traverses, sur lesquellesglisse la pièce de vin qu'on des- cend en cave. Poukmart, gros fîl, ficelle. Poullains grenez en laratouere. M. Burgand voit là des ratières à poulie. Poulie (Courir la), marauder. Poulies de Inde, dindes, dindons. Poulpre, poulpe, mollusque. Poultre, jeune jument. Poupié, pourpier. Pourreaux^ poireaux. Pourrée, poirée, bette. Pourtant, ainsi donc, c'est pourquoi, à cause de cela. Pourtraire, peindre, dessiner, représenter, faire le portrait. Poussavant, jeu. Poussé (Vin), vin fermenté. Poussinierc (L'étoile), les Pléiades. Poutargues. V. Boutargues. Pouvoir (ellipse), pouvoir tenir. Poy, peu. Poyer, payer. Poyzars, tiges des pois. Pracontal (Her), proconsul GLOSSAIRE-INDEX 2^5 de la fabrique de Rabelais. Prsesagir, présager. Prseveid, prévit. Przvieigne, prévienne. Prassine, verte, du lat, prasina. Praye, proie. Pncation, prière. Preceptions , enseignements , préceptes. PreclarCj célèbre, du lat. praeclarus. PrecLiles, prières. Predicantes (Les), les Harangueuses d'Aristophane. Prefation, préface, chose mise en avant. Prefix, fixé d'avance. Pregustes, goûtant d'avance, dégustateurs. Prelations, prélatures. Premier, adverbe, premièrement. Preneur de taulpes, attrapeur d'imbéciles. Les taupes passent pour aveugles. Prescriptz, préceptes. Presle, prèle, queue de cheval. Pressouer, pressoir. Presteres, orages, du grec. Prestjan, souverain oriental légendaire au moyen âge. Prestolant, attendant. Prestolans, juges de village. Preu, profit. Preude, honnête, prude dans le bon sens. Prieras (Sylvestre), jacobin du XVP siècle. Prime face, première vue. Prime vere, le printemps, pri ma vera. Primeve, ancien, du premier âge. Primipile, centurion de la première compagnie de la cohorte. Prindrent, Prins, Prinse, prirent, pris^ prise. Prioris, musicien du commencement du XVP siècle. Priour, prieur. Friving, beau-fils, du latin privignus. Probation (L'an de), l'année d'épreuves. Proboscide, trompe, du grec. Procéder oultre, passer outre. Prochain, proche parent. Prochaines, près de, proches. Prochas, Prochatz, pourchas, poursuite. Proclus, poëte et philosophe byzantin du V^ siècle. Procultous, procureurs. Procurer, rechercher. Prodenou, palan. Prcetides, filles de Prœtus, af- folées par Junon. Proficiat, bienvenue, terme ecclésiastique. Profiterolle, espèce de gâteau. Progné, changée en hirondelle. Progrez, marches, progressus. Prolepsie, objection prévue, du grec. Promoconde, dispensateur éco- nome. Promotion, instigation. Promovens, prenant l'initiative. .76 GLOSSAIRE-INDEX Propenser, méditer. Prophylactique, préservative. Propouser, tenir un propos. Prore, proue. Proscrire, adjuger en vente publique. Prosopopée, déguisement, du grec. Protervie, sacrifice pour rendre un voyage heureux. Protodiables, diables de pre- mier rang. Prototype, modèle. Protraictj dessin, portrait. Protraire. V. Pourtraire. Prou, beaucoup. Prouffiter, profiter. Proust (François), de la maison de Du Bellay. Provent, pourvu. Proximes, proches, du latin proximus. Psoloentes, foudres, du grec. Psycogonie, procréation de l'âme, du grec. Psylion, plantain des sables. Ptissane, tisane. Pudendes, parties sexuelles. Punays, puant. Pungitive, poignante. Puputz, huppes. Purée septembrale, le vin. On vendange généralement en septembre. Putherbes (Les Enraigez). Les enragés partisans de Puits- Herbault, moine qui a dif- famé Rabelais. PuY (Le). Est-ce le Puy-Notre- Dame , arr. de Saumur, Maine-et-Loire ? Pymion, pays des Pygmées. Pyon, simple soldat; la pièce des échecs qui a le moins de valeur ; buveur. Pyreicus, peintre dont parle Pline. Pyromantie, divination par le feu. Pyrope, escarboucle. Pyrricque, genre de danse. Quaderne, quaterne, les deux quatre aux dés. Quadrannier, de quatre ans. Quadrivies, carrefours, du latin quadrii'icC. Qitanard, canard. Qiiand est de moi, quant à moi. Quand Israël hors d'Egypte sortit, ce vers est de Marot. QuANDÉ, Candé, arr. de Blois, Loir-et-Cher. Qiiants, Quaniz, combien. Qiiaquerolles. V. Caquerolles. Qj.iare ? quia, pourquoi ? parce que. QuARESME PRENANT, C'est ici la personnification du carême, et non le mardi gras seule- ment. Quarreaux, traits d'arbalète. Qj.tarres, carats. Quarreleure, semelle. Quarroy, carrefour. Quart, quatrième. Quartiers brisans, quartiers de lune. Quatridien, de quatre jours. GLOSSAIRE-INDEX 277 Quecas, noix. QueconqueSj quelconque. Qathcue, queue ; cul-de-Iampe. Quelle part, où. Quemin (picard), chemin. QuENELAULT, médecin normand. QuenoilleSj quenouilles. Quentin (Jan), contemporain de Rabelais à Montpellier, que Le Duchat croit être le même que Giovanni Quintiani, médecin italien. Querelans, cherchant querelle; questionnant. Querelle, demande. QueritanSj demandants. Quiers, cherche. Queux, cuisiniers. Queux (Maistre), intendant des cuisines. Quid est, quest-ce que ? titre d'un livre de classe du XVI« siècle, par demandes et par réponses. Quidditatif, qui est en soi- même. Quiète, en repos, du lat. quietus. Qui ha, si parle, que celui qui a quelque chose à dire parle. Quinault (Faire), faire camus, forcer à s'avouer battu. Quine, les deux cinq aux dés. QuiNQUENAYS, vignoblc près de Chinon, d'après Le Duchat. Quinquenelle, rien, en poitevin. Quinquenelles, délai de cinq ans accordé à un débiteur pour payer ses dettes. Quint, Quinte, cinquième. Quinte, alchimie. Quintaine, exercice militaire qui consiste à frapper de la lance un mannequin ou un poteau. Quinterne, guitare. Quintessence, cinquième es- sence, propriété par excel- lence des choses. Quintessentiaux, tireurs de quintessence, alchimistes. QyiNTus Calaber, Quintus de Smyrne, poète grec du V^ ou du Vl^ siècle. Quitte (M. le), monsieur sans dettes. Quotté, noté. Quoy. V. Coy. Raballe, ratissoire. Rabanistes, porteurs de rabats ; rabbinistes. Rabbes, raves. Rabiz, rabbins. Rabouliere, Raboulliere, terrier du lapin, recoins de ce terrier. Rabrebans, grand seigneur, de l'hébreu? Rachapter, racheter. Raclet, professeur de droit à Dôle. Racleresse de verdet, éplucheuse de légumes (Burgaud). Le vert-de-gris s'appelle verdet; serait-ce : nettoyeuse de chaudrons, racleuse de vertde-gris? 2^8 GLOSSAIRE-INDEX Racquedenare, Racledenier. Radz, rangs. Ragletorelz, frotteurs, racleurs de la peau, dans les bains. Ragot, capitaine des gueux. Raillons, fers du bout des javelots, des flèches. RairCj raser. Raislier, associer. Ramasse, discipline. Rambades, pavillons construits à la proue d'une galère (Jal). Ramberges, navires dont la marche est rapide (Jal). Rameau, Pierre La Ramée, dit Ramus, philosophe, grammairien, philologue du XVF siècle. Ramenttvoir, rappeler, se souvenir. Raminagrobis. Ce serait Guil- laume du Boys, dit Crétin, poëte du XVl^ siècle. Le rondeau Prenez-la se trouve, avec des variantes, dans les poésies de Crétin. Ramons, petits balais de cuisine. Rançon, crochet, pique, halle- barde, grappin, dard acéré. Ramparer (Se), se réparer, se remettre en ^tat. Ranco (De), de main en main, avec ordre. Ranes, rainettes, grenouilles. Rane gyrine, gyrin, têtard, grenouille sous sa première forme. Rapallus, nom de diable. Rapars, moines rapaces. Raphe, jeu à coups de poing. Rasettes, os du poignet. Rasouer, rasoir. Rassoie, rendu sot; aussi sot que possible. Rat (Gros), grosse bévue, grosse erreur. Rataconneur, raccommodeur, rapetasseur. Râtelle, rate. Ratepenade, chauve-souris. Ratifier, affirmer. Ratiocination, Ratiociner, rai- sonnement, raisonner. Rational, raisonnant. Ratouere, ratière. Ratz, détroits ; sables. Ravasseur, rêvasseur, Ravelins, tranchées. Real, espèce d'esturgeon. Realement, réellement. Rebatz, esprits follets. Rebec, violon à trois cordes. Rebecquer, rebiffer. Rebidaines, Rebindaines (A jambes), les jambes relevées," les quatre fers en l'air. Rebouscher, s'émousser, se re- courber. Rebousse, revêche. Rebras, retroussis, repli. Rebraz (Double), double repli ; cette expression veut dire le plus possible. Rebrassit, retroussa. Rébus, façons de parler parti- culières. Recepvent, reçoivent. Recesses, retraites. Record 'Être) ou recors, se sou- GLOSSAIRE-INDEX 79 venir. Receler par cœur, réciter. Recollez (Les joueurs), ayant repassé leurs rôles. Recompense, reconnaissance. Record, avertissement. Recordation, souvenir. Recourser, rebrousser, retrousser. Recouvert, recouvré. Recouvrer, obtenir, avoir. Recouvreur, couvreur. Recreuz, vaincus. Recueil, Receuil, accueil. Recuillir, recueillir, accueillir. Reculorum (A), à l'écart, Recutitz, circoncis. Redame (Je), j'aime. Rédiger, réduire. Reduyt à mémoire, rappela. Réfection, repas. Refuis, repoussés. Refuyent (Se), se sauvent, s'éloignent. Regilian, Quintus Nonus Regilianus, Dace d'origine, général sous Vespasien, élu empereur par ses soldats. Régis (Pierre), prédicateur du XVie siècle. Regnard, renard. Regnault de Montauban, personnage des Quatre Fils Aymon. Regoubillonner,Reguoubilloner , faire le réveillon. Regualles, tuyaux d'orgue. Reigletz, filets dorés. Relenteur, odeur de relant, de moisi, de renfermé. Relés, relais. Religion, maison de religieux, couvent. Remembrer, rappeler. Remémorer, se rappeler. Remolquer, remorquer. Remore, Echeneis rémora, petit poisson qui s'attache aux navires à l'aide d'un appareil à succion, mais qui n'en retarde en rien la marche. Remoytie, moite. Remparer (Se), se fortifier, se mettre derrière des remparts. Renaguer, renier, du latin re- negare. Rendouer, le Rendoir, là où les actions sont punies ou ré- compensées. Reniguebieu, renie-Dieu. Renier, jurer. Repaire, fiente de bête sauvage. Repaisaille, Repaissaille, repas. Réparation de dessoubz le nez, ce qu'on mange. Repceoyt, Repceu, reçoit, reçu. Repetacé, rapiécé. Repeter, demander de nouveau, réclamer. Repous, Repouser, repos, palier; reposer. Requamé, brodé, niellé, da- masquiné. Requiesce, repose, Resjeuner, Ressieuner, Ressiner, faire collation, goûter. Resolution, solution. Resplendentes, resplendissantes. Response, raiponce. Ressaleument, re-salut, re-salu- !8( GLOSSAIRE-INDEX ment, nouveau salut. Resserrerj reprendre. Restes, loisirs. Restile, qui rapporte tous les ans^ du latin restilis. Restrinctif, astringent. Resudante, suante. Resveiglay (Me), me réveillai. Retaillaiz, eunuques. Retaillatz marranes, renégats circoncis. V. Marranes. Retaillons, morceaux de drap. Retepenade, chauve-souris, en languedocien. Retirant, ressemblant. Retirante, attenante. Retombe, Retumbe,\3ise à boire. Retornant, revenant, Retouble, champ fauché, chaume. Retraict, cabinet d'aisances. Retraict du guoubelet, l'office, l'endroit où l'on serrait le service de table. Retraict lignagier, droit qu'avait un membre de la lignée de reprendre un héritage à celui qui l'avait acheté. Ici retrait signifie latrines. Reuchlin, théologien du XV!" siècle. Révélation (La), l'Apocalypse. Revenu de queue, dont la queue a repoussé, ou qui a perdu la queue ? Révérence, respect. Revocquer, Révoquer, ramener, rappeler, enlever, faire revenir. Revocquer en recordation, rappeler à la mémoire. Rez, ras, rasés. Rhabarbe, rhubarbe. Rhagadies, rhagades, fissures. Rhizotome, coupeur de raci- nes, du grec. Rhodigina (Jacoba), femme ventriloque. Rhombe girante, toupie, ou plutôt sabot tournant sous les coups de fouet que lui applique le joueur. Ribaudaille, péjoratif de ri- baud. Ribaulx, vauriens, Ribleur, coureur de nuit, Ribon, ribaine, bon gré, mal gré. Ricasser, sourire, rire sous cape. RiCHARDFORT, Jean Richafort, musicien belge du XV^ siè- cle. Richinant, rechignant. Ricqueracques, ulcère du fon- dement. Ridde, monnaie d'or. RiFLANDOuiLLE, géant imaginaire. Rigoller, RigouUer, rire joyeu- sement^ se réjouir. Rillé, Rislé, rillettes, conserves de fragments de porc; celles de Tours sont particulière- ment célèbres. Rimasseurs, rimailleurs. Rimer, se dit, en saintongeais, d'un aliment qui s'attache au fond du vase où on le fait cuire ; d'où : « As-tu GLOSSAIRE-INDEX :8: pnns au pot, veu que tu rimesdesja? » RiOLE (La). La Réole, cheflieu d'arr., Gironde . Riolé, rayé, bariolé. Riottes, disputes de peu d'importance. Riparographe, qui écrit sur des riens. RiPHÉES (Montsj, monts hyperboréens. Ripperie^ escroquerie. Rislé. V. Rillé. Rissesj hérissons. RivAU (Le), village du Chinonnais ; est-ce le même que Rivière ? Riveran, passeur en bateau. Rivereaux, gaffes, crochets de bateliers. Rivière, La Rivière^ arr. de Chinon, Indre-et-Loire, où il y avait un pèlerinage re- nommé. Robbe (Bonne), commère ave- nante de toutes les façons. Robbe (En), à la dérobée. Robber, dérober, voler. Robbes, tout le bagage d'un voyageur, de l'italien ro66a. Robert le Diable, ancien ro- man populaire. Robinet (François), contemporain de Rabelais à Montpellier. RoBOASTE, géant. Roc, Rocques, la tour, aux échecs. Roche-Clermauld (La), arr. de Chinon, Indre-et-Loire. RocHE-PosAY (Jean-Châtaigner, seigneur de la), maître d'hôtel de François l^'^ et de Henri II. RocHE-PosAY (La), arr. de Châtellerault, Vienne. Roches-Sainct-Paoul, arr. de Vendôme, Loir-et-Cher. Rocquette Tarpeïe, petite ro- che Tarpéienne. Rocquettes de cheminées, fortin; les cheminées sont les forteresses des andouilles qu'on y fume. RoDiLARDus, Ronge-lard. RoDOGiNE (Jacobe), ou Rodigine, femme ventriloque italienne. Rogue, bélier dont les cornes commencent à pousser. Roigneux, qui a la rogne, la gale invétérée. Romain (Ludovic), Louis de Verthema,/)afnz/o romane, voyageur du XV^ siècle. Romanicque (A la), à la ro- maine. Romicoles, habitants de Rome. Romipetes, Romivages, pèlerins allant à Rome. Rondelle, bouclier rond. RoNDiBiLis (Maistre) ; serait Guillaume Rondelet, médecin que Rabelais connut à Montpellier. Ronfle, le point, dans un ancien jeu de cartes. Rongneurs, rogneurs. RosATA (Albéricde), jurisconsulte bergamasque. 36 282 GLOSSAIRE-INDEX Rostocosto (italien), rôti cuit. Rotans, tournans, du latin rotare. Rotte, liens, osier, Rouaisons, rogations. Rouart, bourreau qui roue. RouBON, musicien. Rouelle, petite roue, rondelle. Rouer, faire la roue. RouiLLAC, bourg de grande renommée gastronomique, arr. d'Angoulême, Charente. Roupieuse, qui a la roupie au nez. Roupt, Roupie, rompu ; rupture, cassure ; déroute. Rousseau, François Roussel, ou Rossello, musicien ita- lien du XVP siècle. Roussin, cheval entier, courtaud. Roust, Rousties, rôt, rôties. Route, déroute. RouzÉE, Cyprien de Rore, ou van Roor, musicien flamand du XVie siècle. Royaulx, monnaie d'or de Philippe le Bel. RoYDDiMET (Dom), Roide-ymet, nom forgé par Rabelais. Rozuins, princes, de l'hé- breu ? Ruach, vent, esprit, en hébreu. Ruant, faisant descendre. Rubette, graissât, grenouille verte dont le sang, dans l'antiquité, était regardé comme vénéneux ; Pline en parle. Ruer, se précipiter. Ruez, renversés. Rugient, rugissent. Rugient, part, prés., rugissant. Rustrement, vigoureusement, solidement. Rustrie, Rusterie, grossièreté ; tête de mouton. Ruysseau qui passe à Saint- Victor, la Bièvre. Ruyt, rut. S. P. Qi R., Senatus populus- que romanus, le Sénat et le peuple romain. Sabbot, sabot, espèce de toupie que les enfants font tour- ner à coups d'un fouet de peau d'anguille. Sabée, en Arabie. Sabez quey, hillots (gascon), savez-vous, mes enfants. Sabine, sabinier. Sable, noir, en blason. Sabourre, lest de navire, du lat. saburra. Sabourre, Saburé, plein, empli, chargé, lesté, saturé, rassasié. Saccade 'Bailler la), donner une forte secousse. Sacmenter, mettre en pièces, mettre à sac. Sacqueboutte, instrument à vent. Sacquer, frapper. Sacquer l'espée, tirer l'épée du GLOSSAIRE-INDEX t83 fourreau. Sacre, oiseau dressé pour la chasse. Sacre, sacrée. Sacre (La fête du), la fête du Saint-Sacrement, la Fête- Dieu. Sacrée, consacrée. Sacrificule, prêtre. Sades, gracieuses, douces. Saffrettes, piquantes, agaçantes, appétissantes. Sagamions, administrateurs, de l'hébreu? Sagane, sorcière. Sage, Saie, Saye, Sayon, vête- ment court. Sagettesj flèches, du lat. sagittse. Sagres, port portugais. Saie, Saye. V. Sage. Saingelais, Mellin de Saint- Geiais, poëte français du XVie siècle. Sainct Adauras, saint en l'air. Sainct-Aubin du Cormier (La journée de). C'est à Saint Aubin du Cormier, arr. de Fougères, Ille- et- Vilaine , quese livra une bataille entre Charles VIII et le duc de Bretagne, le 28 juillet 1484. Sainct-Ayl, Saint-Ay (prononcez Saint-Y), arrond. d'Orléans, Loiret. Sainct Alipentin^ saint de la fabrique de Rabelais. Sainct Babolin, ou saint Babolein, premier abbé de Saint- Maur-les-Fossés, au VIF siècle. Sainct Balletrou, saint de la fabrique de Rabelais. Sainct Clouaud, saint Cloud. Sainct-Espain, Saint-Espain, arr. de Chinon, Indre-etLoire. Sainct-Florent, abbaye de bénédictins, arr. de Saumur, Maine-et-Loire. Sainct François le Jeune, saint François de Paule. Sainct-François (Mal), parce que les disciples de saint François faisaient vœu de pauvreté. Sainct Goderan, saint poitevin. Sainct-jacques ; est-ce Saint- Jacques-des-Guérets, arr. de Vendôme, Loir-et-Cher? Sainct-Jago, de Bressuire, Saint-Jacques. Sainct -Jan de la Palisse, Saint Jean, dans l'Apocalypse. Sainct-Jean Decollaz, saint Jean Baptiste, qui fut décollé. Sainct Joan, saint Jean. Sainct-Louant, Sainlouand , prieuré du diocèse de Tours, arr. de Chinon , Indre-etLoire. Sainct Ligaire; est-ce S. Ligoire, S. Ligorius, qui se fête le i 3 septembre? Sainct-Mahieu , cap sablon- neux non loin de Brest. Sainct-Maixent, arr.deNiort, 284 GLOSSAIRE-INDEX Deux-Sèvres, Sainct Nicolas (Les exemples de), sa légende. Sainct Sang breguoy, Sainsambreguoy, saint sang de Dieu, juron. Sainct-Olary, abbaye de la fabrique de Rabelais, Sainct Picault, saint martyrisé à Nicée. Sainct RiGOMÉ, saint Rigomer, Poitevin. Sainct Sébastian, Saint-Sébastien, arr. de Nantes, LoireInférieure. Sainct-Sever, Saint-Sever, chef-lieu d'arr. des Landes. Sainct Treignan, Écossais. Saincte Geltrude, sainte Gertrude. Salade, espèce de casque. Salel (Hugues), abbé de Saint-Chéron, ami de Clé- ment Marot, auteur du dizain qui précède le livre II. Saleures, salaisons. Salkbrenaux, Sallebreneux, sales ; littéralement, sales merdeux (bren). Sallet. V. Salel (Hugues). Salses, salées. SaluernCj grand vase à boire. Salutz d'or, monnaie de Charles VI. Salvation, salut; état de sal- vation : état de grâce. Sahations, répliques juridi- ques. Salvernes, coupes. Samagarie, contrée d'Asie. Sambreguoyj Sambroguoy , ju- ron. V. Sainct sang breguoy. Samosatoys (Le philosophe), Lucien, de Samosate, écri- vain du IP siècle. Sam-malo, Saint-Malo. Sanctimoniales, nonnes, reli- gieuses. Sandrin, ou Sandryn, musicien. Sang de Mars, plante; est-ce la sanguinaire? Sanglerons, petits sangliers, marcassins. SangloLitir, avoir le hoquet. Sangreal, Sang greal, le sang du Christ; le Saint Gréai, ou Graal, est le plat qui re- çut le sang du Christ. Sangdedez, petites épées. Sanguifier, transformer en sang. Sanie, pus mal élaboré. Sanie des oreilles, cérumen. Sanità et guadain, Messer, santé et gain, Messire. Sanmaieu, saint Matthieu, en breton. Sansay, Sansais, arr. de Niort, Deux-Sèvres. Sa/i/o/jj'cçue, absinthe maritime. Santorons, santons, sorte de moines mahométans. Sanxi, donné sanction, accepté. Saphran, bonnet jaune des banqueroutiers. Saphran, safran, pistil du crocus saiivus. GLOSSAIRE-INDEX M Saporta (Antoine), docteur en médecine de Montpellier, mort en i SyS, Sarabroth, géant. Sarbataine, sarbacane. Sardaine, la Sardaigne ; une sardine. Sarge, serge. Sarins, gardiens, de l'hébreu? Sarpe, serpent. V. Serpe. Sarrabovites, religieux égyptiens de vie déréglée, Satalie, dans la Pamphylie, en Asie. Satin (Pays de), pays ovl la vie est douce et agréable ; pays des tapisseries. Saulgrenée, fricassée, ratatouille, macédoine de légu - mes. Saulieu, arr. de Semur, Côted'Or. Saullaye, Sauloye, Saulsaye, terrain planté de saules. Saulmates. V. Saumades. Saulmones, saumons. Saulmur, Saumur, chef-lieu d'arr., Maine et-Loire. Saulnier, marchand de sel. Saulvement, Saulveté, sécurité, salut. Saumades, Saumates, viandes salées. Saussignac; peut-être Saussenac, arr. d'Albi, Tarn? Il y a un Saussignac-Razac, arr. de Bergerac, Dordogne. Savasta, en Asie. Savorados, os qu'on met dans la marmite pour donner de la saveur au bouillon. Saye, soie. Saye, Sayon. V. Sage. Scale, Scalle, escale. ScALiGER (Jules-César), philo- sophe et médecin du XVI^ siècle. Rabelais mourut en I 5 5 3 , et le livre de Scaliger auquel il est fait allusion dans le V"^ livre est de i557. Scammonie, Scammonnée colo- phoniacque, de Colophon, en Asie Mineure; résine fournie par la scammonée. Scandai, corde de la sonde (Jal). Scaputions, capuchons. Scatophages, mangeurs de déjections. Scelle, Selle persée, chaise percée. Scendaux, enveloppes de reli- ques? Sendal, ou cendal, étoffe de soie légère. Sceur, Sceureté, siàr, assuré ; sûreté, assurance, certitude. Schedules, cédules. Scybale, excrément endurci, du grec. Scintille, subst., étincelle, fai- ble apparence. Sciomantie, divination par l'ombre d'un mort. Sclirrhotiques, qui ont des squirrhes. Scordion, Scordon, germandrée aquatique. Scorpions, espèce de fléaux de guerre . (86 GLOSSAIRE-INDEX Scotines, ténébreuses, du grec, ou parallusion à J. Scot. ScoTUS, Duns Scot, le Docteur Subtil. Scripteurs, écrivains. ScuRRON, Jean Schyron, médecin de Montpellier. ScythropeSj lugubres, du grec. Sebaste, respectable, vénérable, du grec. Sechabots, escarbots, scarabées. Secundaca^sécuridaque, plante. Seder, apaiser, du lat. sedare. Segré, chef-lieu d'arr. de Maine-et Loire. Seguin, musicien. Seigner (Se), se signer, faire le signe de la croix. Seille, seigle. Seillaux, SeilleauXj Seilks^ seaux. Seine, réseau. Séjour, loisir, repos, inoccupation. Séjourner, reposer, tarder. Sela, affirmation, en hébreu. Selande, Zélande. Seleucides (Oizeaux), oiseaux envoyés par Jupiter pour détruire les sauterelles. Seleucus, mathématicien ro- main du I*^"" siècle. Semaise, broc en bois. Sembler, ressembler. Semervé, Semarvé; est-ce Semerville, arr. de Blois, Loir-et-Cher? Semonce, demande. Semondre, ordonner, inviter. Senaire, de six pieds. Senege, Sénégal. Senestre, gauche. Senogues, médicaments purgatifs. Senoys, de Sienne. Sentement, sentiment. Sententier, rendre des sentences, des arrêts. Sequenie, Sequenye, souquenille. Sequente, suivante. Sequane, la Seine, du lat. 5e- quana. Seraph, monnaie d'or orientale. Serapion d'.'^scalon , auteur d'un livre sur les songes. Sercleurs, sarcleurs. Seres, probablement les Chinois. Sergent, huissier. Serpe Dieu, serpent de Dieu, juron. Serper, lever. Serpentine, pièce de canon. Serpillière, tablier. Serpoullet, serpolet. Serrail, palais, château, habitation, chez soi. Serrargent, jeu de mots, pour sergent . Sert, le premier service à table. Sertorianes (Guerres), guerres de Sertorius. Serra/eur, sauveur, Jésus-Christ. Server, observer. Sesolfiez, troublés. Seuil, entrée du port. Seuillé, abbaye de bénédictins près de Chinon ; Seuilly- GLOSSAIRE-INDEX 7 l'Abbaye, arr. de Chinon , Indre-et-Loire. Sexterée, setier. Sexte-Essence, essence superlative, la quintessence étant le dernier résultat de l'analyse des alchimistes. Seyer, scier, couper le blé à la faucille. Sij si bien que, pourtant. Sicinnie, Sicinnistes, genre de danse, danseurs. Siderite (Pierre), aimant. Sidoine, Sidon, en Phénicie. SiGEiLMES, en Libye. Sigillaiif, à sceau. Signamment^ notamment. Signé, signalé, tracé. Simulachre, statue. Simulte, haine. Sinapiser, moutarder, assaisonner, saupoudrer. SiNAYS, Sinaï. Sinon, Grec rusé au siège de Troie. Sinopien, de Sinope, en Anatolie. SinopUj vert, en blason. Sions, tourbillons. Siphach, la plèvre, en arabe. Siriace (Mer), mer de Syrie. S/roc/i, siroco, vent du sud-est. Sisame, sésame. Siticines, chantres des obsèques. Smach ; Rabelais l'oppose à brusq, qui signifie âpre. Smilax, esquine, plante. Smyrnium, maceron, plante. Sobresse, sobriété. Socialement, à la façon d'un ami. SoHiER, musicien du XVje siècle. Soingneusej inquiétante. Solas. V. Soûlas. Soleretz, Sollerets, armures des pieds. Solier, plancher. SoLiN, Caius Julius Solinus, compilateur latin. Solu, résolu. Solue (Oraison), manière libre de parler, prose , du latin oratio soluta. Solvables, payables. SomateSj corps, membres, du grec. Sommade, charge d'une bête de somme. Sommer, additionner, faire la somme. Sommier d'orgue, coffre où s'emmagasine l'air envoyé par les soufflets. Somnial, tiré des songes. Sones, sonnez, les deux six aux dés. SoNGECREUX, auteur supposé de livres facétieux. Sonnant, chantant. Sonnet, petit son. Sophie, la mosquée de Sainte- Sophie. SoPHRONÉ, sage, prudent, du grec. SopoLis, nom grec emprunté à l'Anthologie. SoRANus, Éphésien , médecin grec ; exerçait à Alexandrie au IP siècle. GLOSSAIRE-INDEX Sorbonicoles, qui fréquentent^ qui honorent la Sorbonne. Soretz, saurs. Sororité, lien de sœur. Sort principal^ le capital. SoRTiBRANT, de Conimbres , géant. Sotrins, gouverneurs, de l'hé- breu ? Soubarbade, muselière. Soubastement, soubassement. Soubdan, soudan. Soubelin, souverain, martre zi- beline. Soubrequart, quatrième complémentaire. Soubsecretain, sous-sacristain. Soubstraicte (Vin de), dernier vin tiré du pressoir. Soucilles, sourcils. Soudant, soutenant. SouEVE, Souabe. Soufflegan, suffragant. SouiCE, SouissE, Suisse. Souillartde cuysine, marmiton. Soûlas, soulagement, consolation, joie, plaisir, du lat. solatium. Soulcil, souci. Souldre, résoudre. Souloir, avoir coutume, du lat. sokre. Soupes de primes, tranches de pain garnies de fromage ou de gras de bœuf. Soupiz, frippés. Sourdre, naître, jaillir. Soutte , soute, emplacement destiné à serrer, à bord des navires, les provisions, soit de guerre^ soit de bouche. Soui'ieigne, souvienne. Spadonicque, rendu stérile, du lat. spado. Spagitides (Artères), artères du cou. Spagnola, Espagne. Spatule, épaule. Spectable, visible; regardable, méritant d'être regardé, beau à voir. Speculaire, réfléchissant la lu- mière. Speculance, action de réfléchir la lumière. Sperme d'emeraulde ; doit-on lire presme ou prime d'éme- raude? Sphaceler , meurtrir, gangrener. Spliengitide; M. Burgaud pro- pose de Vire phengiiide, trans- parente. Sphragitide (Terre), terre sigil- lée, marquée d'un sceau ; substance alumineuse rosée, employée autrefois comme astringent. Sphynges , animaux fantastiques. Spica celtica, grande lavande. Spirer, respirer. Spirale, petit canon. Spodizateurs, pulvérisateurs. Spondyles, vertèbres. Sporades, îles de la Manche. Spyrathe, crotte de chèvre. Squinanche, esquinancie. Squinanthi, résine du Calamus draco. GLOSSAIRE-INDEX 289 SS (Allonger les), en faire des ff , falsifier les comptes, faire Tdes francs (ff) avec les sols (ss) . Stade, mesure grecque de i 2 5 pas. Stamboucqs, bouquetins. Stères, animaux fantastiques. Sternomantes, ceux qui parlent de la poitrine, du sternum, du grec. Sternomantie, divination parle sternum. Stichomantie sibylline, divination par des vers de la Sibylle. Stipe, monnaie, Stocfisé, réduit à l'état de morue sèche, stockfish. Stœchas, lavande. Strain, strass, faux diamant. Strossy (Philippe;, Strozzi, négociant, père de Pierre, maréchal de France au service de Henri II. Stryges, oiseaux fantastiques. Style, petite baguette pointue, stylet . Stymphalides, oiseaux du lac de Stymphale, tués par Hercule. Stypticité, astringence. Subit, adv., subitement. Subler, Sublet, siffler, sifflet. Submirmillant, murmurant. Subside, aide, secours. Substantifique, substantiel. Succéder, arriverheureusement. Succès (Par), successivement. Successitres, successeurs au fé- minin. Rabelais. V. Suèdes ; il faudrait lire Sueves. Suffrages, prières. Suffrages (Menus), petites prières. Sugser, sucer, vider. Suidas, lexicographe grec du X« siècle. Suille {Queste^, quête du porc, faite à Noël par le curé. Sulz, Suzeau, sureau. Supellis, surplis. Supercoquelicantieux , surpassant tous ceux qui ont porté le bonnet de fou. Supereroger, répandre. Supererogation (De), d'excédant. Supergurgiter, regorger. Supernel, suprême. Suppied, sous-pieds , pédales d'orgues. Supports, Suppous, suppôts, soutiens, défenseurs. SuRAiNE Orangiers de), dans le V^ livre. Le ms. porte Sa«- Reme ; serait-ce San-Remo ? Surgeoit , survenait, surgissait. SuRiE, Syrie. Surot, maladie au canon d'un cheval. Susanné, suranné. SuTOR, Pierre Cousturier, docteur de Sorbonne. Suzeau. V. Sulz. Suzat (Vinaigre), vinaigre de sureau. SwEDEN-RiCH, la Suède. Sycoinantie, divination par le figuier. Sycophage, mangeur de figues, 37 290 GLOSSAIRE-INDEX du grec. Sylvestre de Prierio , jacobin du XVP siècle. Symmeterye, symétrie. Symmistes, complices, inities aux mêmes mystères. Symptomates, symptômes. Synapizer. V. Sinapiser. Synecdochique, synecdoche, es- pèce de métonymie en vertu de laquelle on donne une signification particulière à un mot qui, dans le sens propre, a une signification plus générale. Synesius, écrivain grec du IVe siècle. Syslolicque, mouvement de contraction. Tabachins, serviteurs, cuisi- niers, de l'hébreu? Tabellaires, lettres, messages. ra6mn(Laict;,lait préparé pour les émaciés, du lat. tabès. Tabide, atteint de consomption, du lat. tabès. Table (Seconde), second ser- vice. Tabliers, échiquiers. Taboureurs, joueurs de tambours; amants heureux. Taprobaniens, habitants de la Taprobane, l'île de Ceyian. Tabus, soucis, tourments. Tabus (Fagoteurs), chercheurs de querelles, faiseurs de ta- page. Tabuster, tourmenter. Tac, nom d'une maladie contagieuse du XV^ siècle. Taces, tasses. Tacquin; il n'y a pas là de profession, il n'y a qu'une as- sonance à Tarquin. Tacuin, taquin, avare, truand. Tadournes, canards sauvages. Tafetas (Vin de], vin doux à boire ; on dit encore d'une boisson agréable : C'est un velours. Taillebacon, taille-jambon, de l'anglais bacon. TAiLLEBOuRG^arr. deSaint-Jean- d'Angéiy, Charente- Inférieure. Taille-viej coupe la voie, de l'it. taglia via. Taillon, morceau, tranche. Taillon, petite taille, petit impôt. Tain, arr. de Valence, Drôme. Talares (Robes) , robes qui descendent très-bas. Talemouse, espèce de pâtisserie ; celles de Saint Denis sont encore célèbres. Taies, osselets, dés. Taluer, donner du talus, delà pente ; solidifier. Talvassiers , hâbleurs, gens grossiers. Tamarin, c'est la pulpe du tamarindus indica. Tanné, couleur de tan, couleur foncée. Tanquart, grand pot à bière. Tant jazer, c'est trop parler. Tapinois (Isie de), île des misérables. GLOSSAIRE-INDEX :9I Tappecoue (Frère Etienne), cordelier de la fabrique de Rabelais. Taprobana, l'île de Ceylan. Tarabinj Tarabas, formule de conjuration devenue une plaisanterie. Tarande, animal fantastique dont parlent ^lien et Pline. Tare, tache. Targon, estragon. Tartaretus (Petrus) , Pierre Tartaret, docteur en Sorbonne du XVie siècle. Tartes, Tartres, Tartares. Tartre, tertre. Tartre borbonnoise, tarte bourbonnaise, assemblage de saleté, bouse de vache. Tassettes, cuissards. Tatin fUn', un peu. Tauchie (Ouvrage de),damasquinure (Littré). Tauchié, damasquiné. Taulpetiers, ennemis de la lu- mière. Taureau !Le gros) de Berne, Pontiner, le sonneur de corne des Suisses, qui fut tué à Marignan. Tedieux, ennuyeux, du lat. tssdium. Teils, tilleuls. Teleniabin, marine, en arabe. Telephiuin, plante, telephe. Tellumon, le génie des forces de la terre. Temperie, Temperye, saison tempérée; modération. Tempeste (Pierre), principal très-sévère du collège de Monlaigu, au XVl*^ siècle. Templej tempe. Templettes, bijoux pour orner la tête. Tempter , Temptation, tenter, tentation. Tenare, la porte de l'enfer. Tenaud, frère Jean Thenaud, suivant M. Burgaud. Tenebrions, esprits des ténèbres. Teneur, continuité. Tenissiez, tinssiez. Tenites, divinités du sort. Tephramantie, divination par la cendre. Tereus, qui fut changé en épervier. Teriere, tarière. Termes, Paul de Thermes, qui commandait le corps français envoyé au secours des Écossais contre les Anglais, en 1 549. Terminer, déterminer. Terne, les deux trois, aux dés. Terreistreité, faculté d'être terrestre. Terriene, terre à terre. Terriens, de la terre. Terrigoles, oiseaux. Terse, frotté, poli, du lat. tersus. Tesmoin (Pierre), Pierre Martyr, Milanais, auteur d'ouvrages sur l'Amérique. Tesniere, tanière. Tesseré, marqueté, du lat. tes~ seratus. GLOSSAIRE-INDEX Tessonj l'arbre d'un pressoir. Testament, la tête et l'esprit, du lat. testa et mens. Teston, monnaie. Testonner, faire la toilette de la tête, soigner la tête, coiffer, peigner. Testonneurs, coiffeurs. TestZj écorce dure. Tétrade, nombre de quatre, du giec. Tetradiqae, à quatre parties. Tetragone, à quatre côtés. Teiricque, Tetrique, de mauvaise humeur, brusque, maussade. Teucrion, germandrée. Tezez, tondus. Thacor, fie au fondement, en hébreu. Thalamege, navire de luxe garni de lits. Thalames, ville de Laconie. Thalasse, mer, du grec; Rabelais en fait le nom d'un port. Thalmondoys.Talmontois, partie de la Vendée. Thamous, nom du dieu Pan chez les Égyptiens. Thaumaste, admirateur, du grec. Thebizonde, Trébizonde. Theleme , libre arbitre, qui agit à son gré, du grec. Theodolet, interlocuteur d'un dialogue contre le paga nisme. Theomaches, combattant les dieux, du grec. Theon; il y a deux mathématiciens grecs de ce nom, l'un du Il<^, l'autre du IVe siècle. Theophraste, naturaliste grec du IIl^ siècle avant J.-C. Theos, Dieu, en grec. Therapeutice, thérapeutique. Theriacle, thériaque, médica- ment polypharmaceutique que vendaient jadis les charlatans. Theriacleiirs, vendeurs de thériaque, charlatans des rues. Thermanstrie, genre de danse. Thesaur, Thesor, trésor, Thibaut l'Aignelet, le berger, dans la farce de Pathelin. Thielles, bourrasques, du grec. Thlasié, Thlibié, rendu stérile. Thoës, animal fantastique dont parle Pline. Tholouse, Toulouse. Thomas, estomac. Thomas l'Anglois, Thomas Becket, archevêque de Cantorbery. Thohu et BoHU (Iles de), îles désertes et incultes, en hébr.? Thracie, genre de danse. Threisses, de Thrace. Thuscan, toscan, bon italien. Thyades, prêtresses de Bacchus, bacchantes. Thymbré, timbré, surmonté, terme de blason. Thynnuncules, oiseaux fantastiques. Tierce, troisième. Tiercelet d'autour, mâle de GLOSSAIRE-INDEX 93 faucon, l'oiseau volant par excellence. Rabelais en fait souvent le signe du superlatif ou de l'augmentatif : Tiercelet de diable, de Job, de menteiies, plus que diable, plus patient que Job, menteur par excellence. Tiercin, troisième partie. TiMARE, nom grec emprunté à l'Anthologie. Timbous, tambourins. Timbre, auge de pierre, en poitevin. Les limonadiers appellent encore timbre le coffre en bois doublé de plomb où ils mettent leurs boissons à rafraîchir. TiMOCLES, nom grec emprunté à VAnthologie. TiMOTHE, musicien grec. Timper, faire sonner. Tinel, office, salle à manger. Tintalorisé, refrogné. Tintamarres, grands bruits. TiNTEViLLE ; ce serait François d'interville, évêque d'Auxerre au XVI^ siècle. Tintouins, tintements, ennuis. Tirados, cordage. TiRAQUEAu (André), jurisconsulte, ami de Rabelais. Tirefond, outil de tonnelier, r/re/ar/go^ (Boire à) ,boire beau- coup, tant qu'on veut ; boire comme ceux qui tirent la Rigaud, nom d'une grosse cloche de Rouen ? Tirelupin, mauvais garnement. TiRESiAS, devin, prophète, dans Homère. Tirez ailleurs, éloignez-vous. Tissâtiers, tisseurs de rubans. Titanes, géants, fils de Titan. TiTE, géant. Tmesis, tmèse, figure qui consiste à couper un mot en deux. ToLETE, Tolède. ToLLET, contemporain de Rabelais à Montpellier. Tollir, enlever. Tollu de vie, enlevé de vie, mort. ToLMERE Le capitaine), hardi, du grec. Tonnelle, panneau à perdrix. Tonnine, thon. Tonnoire, tonnerre. Topiaire Ouvrage), ouvrage imitant les plantes, les arbres. Topicqueur, raisonneur, sophiste. Topiques, arguments. Toranglés, à facettes. Torche lorne. Torche lorgne, à tort et à travers, au hasard. Torcoulx, hypocrites, de l'it. Coin torti. V. Tortycolly. Tormens bellicques, machines de guerre. Tortre, tordre. Tortycolly, hypocrite, de l'it. collo torto. V. Torcoulx. Tostade Alezan , alezan brûlé. Totage, Toiaige, le tout, le total. Tou, Toul, Meurthe, '94 GLOSSAIRE-INDEX TouARS, Thouars, arrond. de Bressuire, Deux-Sèvres. Touche, bouquet de bois ; haute futaie. Touquas grou (limousin), ne frappez pas, ne touchez pas. Toupon, bouchon de verre. Tour, cabestan. Tourbe, foule, du lat. turba. Touretz de nez, demi-masque de dame. Tournay, tournoi. Tourte, pain grossier. TouscHERONDE ; il y a un Jean de Touscheronde greffier du Parlement au XVF siècle. Tousdis, tous les jours, toujours. Toussissoient, toussaient. Toust, tôt. Tout (A), avec. Tout (Du), tout à fait. Touzelle, blé à épis sans barbes. Trabut, mesure de terrain, une perche. Trac, train, équipages de guerre. Tractement, traitement. Traicte (Mal), mal faite. Traictz, cordages. Traîne, traîneau, chariot; en saintongeais, une poutre. Traîneau (Le), village du Chinonnais. Traire, tracer, tirer, tirer de l'arc. Tramail, filet de pêche. Trancheplume, canif. Trancliit, trancha. Trançon. V. Transon. Transcender, surpasser. TranscouUer, couler à travers. Transfreter, traverser. Transgloutiz, engloutis. Tra/js/a^er, transférer, traduire. Transmontane, Trasmontane, la tramontane, vent du N. Transmué, transformé. Transon, Trançon, tranche, morceau, fragment, tronçon. Transonner, couper en transons, en morceaux. Transpontin, strapontin, ta- bouret. Transpontins , ceux d'au delà les mers. Transsumpt, part, passé, imité, transcrit; subst., trans- cription, copie. Trappe, trapu. Traquenard, allure qui tient de l'amble et du trot. Trasmontane. V. Transmon^ tane. Traverseur des voies périlleuses. Jean Bouchet a pris ce titre dans ses ouvrages, publiés au commencement du XVI° siècle. Trefeuil, herbe à trois feuilles, trèfle. Tregeniers, charretiers, muletiers. Trejectaires, saltimbanques des rues. Trepelu, poilu, moisi, pleutre, mal soigné ; très-peu lu, appliqué à un livre. GLOSSAIRE-INDEX ,95 Trepignemampenillorifrizonoufressuré, bousculé, froissé. Trepoit, piétinait. Tresmegiste, Trimegiste, trois fois très grand, du grec. Trespassé, outre-passé. Trestous, superlatif de tous, très-tous. Tréteau, trépied. TreuffïeSj Treufles, les trèfles, dans les cartes à jouer. TriaSj trois. Triballe, Triballement, remuement, ballottement. Triballer, remuer, balloter. Tribard, Tribart, bâton. Tribars, tripes, gras-double. Triboulet, fou de Louis XII et de François W. Tribunian, de Tribonien, célèbre jurisconsulte. Triscaciste, trois fois très-mauvaise, du grec. Trieterides, bacchantes. Trigone, à trois côtés, triangle. Trigone (Pile), jeu de balle à trois. Tringuer, boire, trinquer. Trinquamelle, tranche-amande. Trinquamolk, fanfaron. Trinqueb aller, remuer conti- nuellement. Trinquenailles, vauriens. Trinquet, mât de misaine, voile de misaine. Trinquet de gable, grand hunier. Trinquet de prore, petit hunier. Trlorlz fredonnizez , trihori, danse chantée des Bretons. Trlou, tréou, voile de fortune. Tripier, trépied. Tripoléon. V. Teucrlon. Trippa (Her). Les commentateurs veulent que ce soit Henri-Corneille Agrippa de Nettesheim, médecin-philosophe du XVP siècle. Trisulce (Excommunication), trois foi» fulminée. Trlsulque, divisée en trois pointes. Trivulce (Jean-Jacques), Milanais, maréchal de France sous Louis XII et François Trochlles, roitelets. Trochistz, trochisques, petits cônes médicamenteux. Troge-Pompone, Trogue-Pompée, historien latin du F^ siècle. Troglodyte, habitant des ca- vernes. Troigne, trogne. Trombe, espèce de toupie. Tropditieux, trop d'iceux , de ceux-là, gens dont il y a de trop. Trophonius (La fosse de) : Trophonius, fils d'Erginus ou d'Apollon, rendait des oiacles dans un antre. Tropologlque, faiseur de tro- pes. Troppeaux, troupeaux. Trotigner, trottiner. Trou, trognon. 296 GLOSSAIRE-INDEX Trou de Sainct-Patrice, caverne située dans une petite île du lac Dearn, en Irlande, connue aussi sous le nom de Purgatoire de Saint-Patrice. Trou de hize, anus. Trou, Tron de lentisce, cure- dent en bois de lentisque. Trouillogan ; serait Ramus ou Pierre Galland. Trousque (gascon), trousse. Troys cens troys, jeu de cartes, Trunc, coups. Trupher, railler, se moquer, plaisanter, Trut avant, mot employé en Saintonge pour faire aller les ânes plus vite. Truye, tour de bois, machine de guerre. Tubilustre, fête de la consécration des trompettes du temple, chez les Romains. Tuhule, petit tube, du latin tubulus. Tucquet, tertre, TuDiTANiE, province d'Espagne, aujourd'hui l'Andalousie, Tufe, pierre tendre. Tuition, siireté, du latin tueri. TuNic, Tunis. TuNSTAL, Cuthbert Tonstal, mathématicien anglais, • Tupins, pots de terre. Turbine, orage. TuRPENAY, abbaye près de Chinon. TuRPiN (Les Fables de), chroni que de Charlemagne attri- buée faussement à cet évêque. Turquoys, de Turquie. Tuscan, Tusque, Toscan. Thyanien (Le philosophe), Apollonius de Tyane. Tymbons, tambours de basque. Tympanes, tympans ; sorte de tambour. Tympanistes, Tympanites, hydropiques, qui ont la peau tendue comme un tambour. Typhoc, géant. Typhones, typhons, trombes, Tyranson, gibier d'eau, Tyrouer, flacon en forme de livre, le bréviaire de frère Jean, Tyrofageux, mangeur de fro- mage. Tyromantie, divination par le fromage, Tyrsigere, porte-thyrse, du grec. UcALEGON^ non aidant, du grec, Udem, pays imaginaire, Vligineux, marécageux. Ulisbonne, Lisbonne. Ulement, hurlement, du latin ululatus. Ulle, quelque, Uller, hurler. Ulmeau, ormeau, du latin ul- mus. Ulpian, Ulpien, Domitius Ulpianus , jurisconsulte ro- main de la fin du II" siècle. Umbilicares, ombilicales. GLOSSAIRE-INDEX 297 Undiculations, ondulations. Unguicule, ongle. Unicorne, licorne. Unicque (L'], le pape. Union, perle, du latin unio. Unzain, monnaie de onze deniers. Uranopete, qui aspire , qui va au ciel, du grec. Urbe, ville, du latin urbs. Ureniller, est-ce un diminutif d'uriner? Ures, taureaux noirs, du latin urus. Uretacque , Utacque, fausse amure (Jal). Ursin, d'ours. Usance, usage, coutume, habitude. Un, pays imaginaire. Vache (Pays de) , plat pays , pays de plaines. Vacqiie, vacant. Vagines, enveloppes. Valachè, Valachie. Valbringue (Robert). C'est, suivant Le Duchat, Jean François de La Roque^ sieur de Roberval, grand navigateur picard du XVI*^ siècle. Valée (Briend) , seigneur du Douhet , dans les environs de Saintes , jurisconsulte ami de Rabelais et protecteur de Scaliger. Valentiennes , roulis (Jal); dans le texte il signifie évi- demment courir des bordées. Vandare (Othoman), médecin. VanereauXj vanneaux. Vaporament, vapeur. Varenes, ou Varennes, arr. de Loches, Indre-et-Loire ; ou arr. de Saumur, Maineet-Loire. Vascons, Gascons. Vasquint, basquine, jupe. Vastadours, terrassiers. Vaticiner, prophétiser. Vaticinateur, Vaticinatrice, oracle, prophète, devin. Vaticinateurs memphiticques, devins de Memphis. Vaubreton, Le Veau-Breton, arr. de Chinon, Indre-etLoire. Vaugaudry; est-ce Vaugondy, arr.deTours, Indre-et-Loire? Vaultres, Veaultrez, vautrais, chiens courants, chiens de chasse. Vaurillon, théologien con- temporain de Rabelais. Vauvert (Diable), maison de Vauvert où le diable revenait, rue d'Enfer. Veautrez. V. Vaultres. Vede (Gué ou bois de), près de Chinon. Vedeaulx, bedeaux. Vefves, veuves. Végéter, vivifier. Veguade (Quelque), quelque coup. Veid, Veit, v\\.;jeveiz, je vis; vous veistez, vous vîtes. Veigler, veiller. Vejoves, anti-Jupiter, dieux malfaisants. 38 GLOSSAIRE-INDEX Vêle, Velle, voile. Velenailles, repos à l'occasion d'une vache qui a vêlé; parodie de relevailles. Vellication, pincement. Velotiers, veloutiers. Velous, velours. Venation, chasse. Vendangeret (Panier), panier de vendangeur. Vendiquer, revendiquer. Venefiques, empoisonneuses, du latin veneficse. Venelle, ruelle du lit. Vent grec, vent du nord-est. Ventir, vanner. Ventres à poulaine, gros ventres pointus. Ventre heuf. Ventre beuf de boys, jurons. Ventre guoy, juron. Ventre Sainct-Quenet, juron. Ventrée, grossesse des bêtes. Ventrose, enflure du ventre. Venuste, plein de charmes. Verbasce, bouillon blanc, molène. Verbenicque, de la nature de la verveine. Verbocination, langage. Verd, tapis de table de jeu. Verd du diable, les dés ; on ne prend pas le diable sans vert, sans dés. Verd et bleu, juron. Verdcoquin, ver-coquin, nom vulgaire des larves du rliynchites bacchus, de Veumolpe pitis, de la pyrale, qui toutes vivent sur la vigne; du cœnure, helminthe qui se développe dans la tête du mouton et lui donne le vertige. Au figuré, vertige, ou simplement fantaisie. Verde, verte. Verdelot^ musicien belge du XVie siècle. Verdugale, Verdugualle, jupon bouffant. Verduns, épées courtes fabri- quées à Verdun. Vere (Prime), commencement du printemps. Verge d'or, anneau d'or, bague. Vergne, aulne, aune. Tranchoir de vergne, planchette d'aulne. Vergouigne, vergogne, honte. Veriforme, vrai. Verisimile, vraisemblable. Verines, Vernis, vers intesti- naux, vermine. Vermont, musicien du XVP siècle. Vernacule, vulgaire^ du pays. Verrassée, verrée, plein un verre. Verron, arr. de Chinon, Indreet-Loire. Versalles (Lettres), majuscules qui commencent les vers. Verse, petite pièce d'artillerie. Verser à l'école, allei à l'école. Versure (Faire), faire un nouveau créancier pour en payer un ancien. Vertoilz, boutons qui terminent les fuseaux. GLOSSAIRE-INDEX 299 Vertueux, courageux. Vertus beuf de boys, d'aultre que d'un petit poisson, d'un petit poisson, de froc. Dieu, guoy, jurons. Vervaine, verveine, verbena officinalis, Veneris vena ; on lui attribuait une vertu fé- condante. Vervecine de mouton, du latin vervex. Vervelles, anneaux qu'on met aux pattes des oiseaux de chasse, avec le nom et les armes de leur propriétaire. Vesner, vesser. Vesquist, vécut. Vessaille, vile multitude. Vesten nord-est, vent soufflant de l'ouest au nord-est. Vestibousier, porteur d'une veste sale. Vestz (picard), va-t'en. Veu de Charrous (Le), statue de bois honorée dans le monastère de Charroux, arr. de Civray, Vienne. Veute figure, en figure vue, en présence. Veux, vœux. Vezarde, venette. Veze, cornemuse, outre. Viande, en général toute substance alimentaire. Viander, cacare, fienter. Vicinité, voisinage. Victeur, vamqueur. Victorial, victorieux. VicTRUvE, Vitruve, Marcus "Vitruvius Pollio, architecte romain de la fin du F' siè- cle avant J.-C. Vie, chemin, du latin via. Vielleux, joueur de vielle. Vienne, chef-lieu d'arr., Isère. Vierge qui se rebrasse, la vierge qui se retrousse, Sainte-Marie l'Égyptienne? Vietzdazes (provençal , visages d'ânes. Vignolat (Syrop), vin. ViGORis, musicien. Villanie, villenie, violence, vilaine action. ViLLANOVANus (Frauçois), auteur contemporain de Rabelais. ViLLAUMERE (La) ; est-ce La Ville-aux-Dames, arr. de Tours, Indre-et-Loire ? Villaticque, villageois, rustique. ViLLEBRENiN, Villebemin, arr. de Châteauroux, Indre. Villeneuve la Guyart Jacques d'Aunay, seigneur de), neveu de Du Bellay. ViLLiERS, Pierre Vuillers, musicien du XVIi-' siècle. Vimeres, tempêtes, calamités, ouragans. Vin (Donner le), donner un pourboire. Vin Clementin, vin d'une vigne que Clément V possédait près de Bordeaux. Vin du ya^e^pourboire du valet. Vinaige, vinage, distribution de vin. Vindrent, vinrent. Violiers, pots à fleurs. 3( GLOSSAIRE-INDEX Viroletj flèche, fer de flèche. Virollet, moulin d'enfant. Visif, qui peut voir. Vistempenard, Visiemptnarde, tête de loup, plumeau à long manche. Vistempenardé, aménagé, propre, nettoyé. ViTDEGRAiN, géant. ViteXj gattilier, vitex agnuscastus, plante qui passait pour antiaphrodisiaque. Vitrice, second mari de la mère, du latin vitricus. Vitupère, honte. Vituperéj blâmé. VivoNNE, arr. de Poitiers, Vienne. Vocales, voyelles. Vociter, nommer. Voerre, Voirre, verre. Voira, Voirons, verra, verrons. Voix (Les), les mots. Volains, armes. VoLATERAN, Raffaele Mafîei, de Volterre, géographe. Vole, paume de la main. Volerie (La , endroit où se tenaient les anges dans la représentation d'un mystère. Voiler, franchir ; chasser au faucon. Vollerie, chasse avec des fau- cons. Volontaires, navires marchant à volonté. Volter, tourner. Vomiter, vomir. Vorages gouffres, du latin vorago. Votes, vœux. Vouant, Vovant, Vouvant, arr. de Fontenay-le-Comte, Vendée. Vouge, manche d'arme, d'outil ; bâton, épieu. Voulent, veulent, voulant. Voulsist, Voulzist, vouliit. Voy le cy, le voici. Voy vous là, vous voilà. Voyagier, voyageur. Voyez-cy, voici. Voy s (Je], je vais. Voyirer (Se), se vautrer. Vraybis, vraiment, certaine- ment. Vraybis, vrai Dieu, juron. Vray bot, juron. Vrilonner, enrouler. Vueil (Le), le vouloir, la volonté. VuiTEMBERG, Wurtenberg. Vulgue, le vulgaire. Xenocrites, nom grec emprunté à l'Anthologie. Xenomanes, qui aime les étrangers, les pays étrangers, du grec. XoNOPHiLE, musicien grec, qui vécut, dit Pline, io5 ans. Y grégeois, Y grec. Ydoine, propre à, du latin idoneus. Yre, colère, du latin ira. Yssues, sorties en armes. Yvraye, ivraie. GLOSSAIRE-INDEX 3oi Zachée, publicain converti, dont parle saint Luc, chapitre XIX. Zalas ! hélas Zaphran. V. Saphran. Zencle, cheval dont les taches ont la forme de faux. Zinzembre, gingembre. Zinziberine (Pouldre), poudre de gingembre. Zivette, civette. Zoophore, frise avec animaux sculptés; porte-animal, du gec.

TABLE DU LIVRE CINQUIÈME Pages. Prologue ' i Chapitre I. Comment Pantagruel arriva en l'Isle Sonnante, et du bruit qu'entendismes 1 1 Chapitre II. Comment l'Isle Sonnante avoit esté habitée par les Siticines, lesquels estoyent devenuz oiseaux 14 Chapitre III. Comment en l'Isle Sonnante n'est qu'un Papegaut 17 Chapitre IV. Comment les oiseaux de l'Isle Sonnante estoient tous passagers 19 Chapitre V. Comment les oiseaux gourmandeurs sont muets en l'Isle Sonnante 22 Chapitre VI. Comment les oiseaux de l'Isle Sonnante sont alimentez 2 5 Chapitre VII. Comment Panurge racompte à Maistre yEditue l'Apologue du Roussin et de l'Asne, ... 28 3o4 TABLE Pages Chapitre VIII. Comment nous fust monstre Papegaut à grande difficulté $4 Chapitre IX. Comment nous descendismes en l'Isle des Ferremens 38 Chapitre X. Comment Pantagruel arriva en l'Isle de Cassade 40 Chapitre XI. Comment nous passasmes le Guichet, habité par Grippe-minaud, Archiduc des Chatsfourrez 48 Chapitre XII. Comment par Grippe-minaud nous fut proposé un énigme 48 Chapitre XIII, Comment Panurge expose l'énigme de Grippe-minaud 5 i Chapitre XIV. Comment les Chats-fourrez vivent de corruption 5 3 Chapitre XV. Comment frère Jean des Entomeures délibère mettre à sac les Chats-fourrez 56 Chapitre XVI, Comment Pantagruel arriva en l'isle des Apedeftes à longs doigts et mains crochues, et des terribles aventures et monstres qu'il y veit. . . 61 Chapitre XVII. Comment nous passasmes Outre, et comment Panurge y faillit d'estretué 69 Chapitre XVIII, Comment nostre nauf fut encarrée, et feusmes aidez d'aucuns voyagiers qui tenoient de la Quinte 72 Chapitre XIX. Comment nous arrivasmes au Royaume de la Quinte-Essence, nommé Entelechie 76 Chapitre XX. Comment la Quinte-Essence guarissoit TABLE 3o5 Pages, les maladies par chansons . 76 Chapitre XXI. Comment la Royne passoit temps après disner 83 Chapitre XXII. Comment les officiers de la Quinte diversement s'exercent, et comment la Dame nous retint en estât d'abstracteurs 87 Chapitre XXIII. Comment fut la Royne à soupper servie, et comment elle mangeoit 91 Chapitre XXIV. Comment fut en présence de la Quinte faict un bal joyeux en forme de tournay. . 94 Chapitre XXV. Comment les trente deux personnages du bal combatent 98 Chapitre XXVI. Comment nous descendismes de l'Isle d'Odes, en laquelle les chemins cheminent .... 106 Chapitre XXVII, Comment passasmes l'Isle des Esclots, et de l'Ordre des frères Fredons 1 10 Chapitre XXVIII. Comment Panurge interroguant un frère Fredon , n'eust response de luy qu'en monosillabes 117 Chapitre XXIX. Comment l'institution de Quaresme desplait à Epistemon 124 Chapitre XXX. Comment nous visitasmes le pays de Satin , 127 Chapitre XXXI. Comment au pays de Satin nous veismes Ouy-dire, tenant eschole de tesmoignerie. i33 Chapitre XXXII. Comment nous fut descouvert le païs de Lanternois 137 Chapitre XXXIII. Comment nous descendismes au Rabelais. V. 3q 3o6 TABLE l'ascs. port des Lychnobiens et enirasmes en Lanternoi;. . i 38 Chapitre XXXIV. Comment nous arrivasmes à l'oracle de la Bouteille 141 Chapitre XXXV. Comment nous descendhmes soubs terre pour entrer au temple de la Bouteille, et comment Chinon est la première ville du monde. ... 144 Chapitre XXXVI. Comment nous descendismes les degrez tetradiques, et de la peur qu'eut Panurge. . 146 Chapitre XXXVII. Comment les portes du temple par soy mesme admirablement s'entr'ouvrirent . . 149 Chapitre XXXVIII. Comment le pavé du temple estoit faict par emblemature admirable i53 Chapitre XXXIX. Comment en l'ouvrage mosayque du temple estoit représentée la bataille que Bacchus gagna contre les Indians i55 Chapitre XL. Comment en l'emblemature estoit figuré le hourt et l'assaut que donnoit le bon Bacchus contre les Indians iSq Chapitre XLI. Comment le temple estoit esdairé par une lampe admirable 162 Chapitre XLII. Comment par la pontife Bacbuc nous fust monstre dedans le temple une fontaine fantas- tique i65 Chapitre XLIII. Comment l'eau de la fontaine rendoit goust de vin, selon l'imagination des beuvans. . . i65 Chapitre XLIV. Comment Bacbuc accoustra Panurge pour avoir le mot de la Bouteille 174 Chapitre XLV. Comment la pontife Bacbuc présenta Panurge devant ladicte Bouteille 176 TABLE 807 Pages. Chapitre XLVI. Comment Bacbuc interprète le mot de la Bouteille 179 Chapitre XLVII. Comment Panurge et les autres rithment par fureur poétique 182 Chapitre XLVIII. Comment, avoir prins congé de Bacbuc, délaissent l'oracle de la Bouteille 186 Variantes 189 Glossaire-Index 201 A PARIS DES PRESSES DE D. JOUAUST Imprimeur breveté RUE SAI NT-HONORÉ, 338 l

PETITE BIBLIOTHEQUE ARTISTIQUE OUVRAGES A C. R A V U R E S Tirage in-i6 à petit nombre sur papier de Hollande, plus 2 5 exemplaires sur papier de Chine et 2 5 sur papier Whatman. Tirage en GRAND PAPIER (in-S») : 170 exemplaires sur papier de Hollande, i5 sur papier de Chine, i5 sur papier Whatman. HEPTAMÉRON de la Reine de Navarre, avec les grav. de Flameng. % fascicules. Épuisé. DÉCAMÉRON de Jean Boccace, avec les grav. de Flameng. 10 fascicules in-i6. Les derniers exemplaires, à 80 fr. CENT NOUVELLES NOUVELLES, dessins de J. Garnier, grav. àl'eau-forte par Lalauze, ou reproduits par l'héliogravure. 10 fascicules in- 16 . 5o fr. Format in-8« 80 fr. Exemplaires Chine et Whatman dans les deux formats. MANON LESCAUT, avec lesgravuresd'HÉDOuiN. 2 vol 2 5 fr. GULLIVER (Les Quatre Vo)'ages de), avec les gravures de Lalauze. 4 vol. in-16 3o fr. Format in-8° 5o fr. Exemplaires Chine de rin-i6, et Whatman des deux formats. VOYAGE SENTIMENTAL, de Sterne, avec gra- vures d'HÉDOUiN 2 5 fr. Nota. — S'adresser à la Librairie des Bibliophiles, rue Saint- Honoré, 3 38, pour connaître les conditions auxquelles on pourrait se procurer les ouvrages épuisés.





":m:jjj*w^«mTT ' ' ^.^i^i ^^ PQ 1682 G$ 1276 t. 5 Rabelais, François Les cina livres PLEASE DO NOT REMOVE CARDS OR SLIPS FROM THIS POCKET UNIVERSITY OF TORONTO LIBRARY ^1?, ^^^. >1*J*\ ^ i^2?t*0-.. ^ï* ' tU lv>.^.-<^^#^^. iii.

See also





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